29 avril 2012

C'est un voyage


Avant de poser ses valises à Llançà, Paco Pérez a passé du temps chez Michel Guérard à Eugénie-les-Bains, puis chez le voisin Ferran Adrià à Roses. Et après presque trois heures de déjeuner, on se dit que le chef a dû effectuer aussi quelques voyages au pays du Soleil-Levant.
On imagine que Paco Pérez a mûri ces expériences, les a digérées, méditées et réfléchies, avant de proposer sa propre cuisine, forcément marquée par ces chefs emblématiques de la nouvelle cuisine, ou cuisine moderne — appelez ça comme vous voulez, là n’est pas la question.
La question n’est pas liée à un concept ou à une vision ou à une fusion. La question c’est celle du voyage que propose Paco Pérez, même si, c’est évident, l’esprit du Bulli plane indéniablement sur le repas comme sur ce « Pesto » que n’aurait pas renié Miró, mais qui, une fois passée la surprise esthétique, étonne par sa puissance, ses saveurs entêtantes et une longueur en bouche qui semble ne jamais vouloir vous lâcher tant elle n’en finit pas de vous envahir.
La cuisine de Paco Pérez est irrémédiablement moderne, sans concession à d’autres conceptions plus sages, finalement plus actuelles, auxquelles les sublimissimes frères Roca, par exemple, semblent désormais parfois se contraindre.
Il serait pour autant injuste et réducteur de désigner la cuisine de Paco Pérez comme moléculaire ou nouvelle, ou même fusion. Paco Pérez est bien au-delà de tout ça. ¡Paco Pérez es grandeza! Paco Pérez est enthousiasmant.
Il suffit de constater la qualité des produits utilisés ici, le respect avec lequel ils sont proposés, pour vite se rendre compte que ce voyage sera simplement et totalement jouissif. Un voyage dans l’univers de la très haute gastronomie, encore accessible. Jouissance pure. Comme pour cette « Gamba marina » à la cuisson millimétrée, presque crue, juste tiède pour s’offrir comme il faut. Ou encore ces préparations où les légumes seuls sont mis en avant, incroyablement magnifiés et sublimés dans le « Primer verde ». Un bonheur gustatif total en chaud et froid, tout comme pour le « Foie, artichaut et truffe ». Époustouflant.

Paco Pérez est aujourd’hui gratifié de deux étoiles par le Guide rouge. Le jour où il en aura trois, le même menu, composé des mêmes plats, prendra sans aucun doute 50 ou 60 euros dans la figure. C’est maintenant qu’il faut en profiter. Sans perdre de vue qu’il est possible de boire au Miramar d’excellents vins locaux proposés à partir de 25 euros. Demandez à Toni, le sommelier, de vous guider. Le service, impeccable, comme dans un souffle, fera le reste.
Vous ne rêvez pas. Nous sommes au Miramar, à Llançà, en Catalogne, en Espagne. Un paradis gastronomique. N’en doutez pas.

>>> Une galerie de ce voyage gustatif est disponible en rubrique « Photographies » du site www.camposyruedos.com.

28 avril 2012

À vendre : connerie, bien entretenue, TBE


Chez les Héritiers de Christophe Yonnet © Laurent Larrieu / Camposyruedos.com

C’est le risque.
Écrire suppose une prise de risque : le risque le plus grand finalement étant d’écrire des conneries. C’est arrivé à tout le monde, ça arrivera à tous. Mais certains sont coutumiers du fait et la toile, parce qu’elle a ouvert de multiples moyens d’expression à tout un chacun, n’est pas avare de petites perles qu’il serait contraignant, laborieux de relever. Bref, certains, je l’écrivais, se retrouvent régulièrement en pole position de la connerie et force est de constater  que parmi nos « critiques » taurins, ou qui voudraient en être, il en est qui ont deux voire trois tours d’avance. C’est particulièrement vrai sur les sites d’annonces taurines, les ParuVendu du toreo (je n’écris pas du toro volontairement), Leboncoin du derechazo.
Aujourd’hui je relève… avouant par là même, et j’en suis un peu honteux imaginez bien, que la fréquentation de ces sites d’annonces taurines ne m’est pas totalement inconnue : « Le bétail est du fer de Christophe Yonnet, un élevage mené par la tante de Juan Bautista, Françoise Yonnet, dite "Quinquin". Rarement programmé dans le Sud-Ouest, il a la réputation d’une présentation impeccable mais de ne pas être commode. Pourtant, lors de la dernière corrida concours estivale de Vic-Fézensac (sic), un de ses frères s’était bien comporté. »
En quatre lignes, tout y est ou presque. Oubli de la mention « Héritiers » car Christophe Yonnet n’est plus — paix à son âme. Référence à Juan Bautista dont on se fout totalement dans ce contexte — mais l’auteur de ces lignes a réalisé un film sur le torero français, ceci pouvant expliquer cela. Last but not least, la cerise sur l’étouffe-crétin : les novillos sont présentés pas commodes mais pourtant, et ce pourtant est ici d'importance, un de ses frères (un frère de qui ? De l’élevage ?) se serait « bien comporté » !
Donc, si l’on résume la pensée (?) de cet annonceur : pour que l’on puisse considérer qu’un toro se soit bien comporté, il conviendrait qu’il fût commode. Les taureaux de combat doivent donc être commodes, faciles, maniables pour être considérés comme valables.
J’ai bien peur que la vision de la tauromachie de cet annonceur soit bien « fézendée » !

26 avril 2012

En peu de mots #08


Il y a 75 ans

« C'est le 26 avril [1937] que, de 16 h 30 à 18 heures, la petite ville basque de Guernica fut la cible d'attaques aériennes menées par trois vagues d'appareils, dont des avions italiens et les bombardiers Heinkel 111 et Junker 52 de la Légion Condor. Puis les chasseurs Heinkel 51 prirent le relais, détruisant 71 % de la cité dont les maisons, souvent construites en bois, flambèrent. »

In Bartolomé Bennassar, La guerre d'Espagne et ses lendemains, Perrin, Coll. Tempus (n° 133), 2007, p. 207.


>>> Pablo Picasso (1881-1973) / Guernica, 1937 / Huile sur toile, 349,3 cm x 776,6 cm / Museo Reina Sofía, Madrid

Liens Expo dossier « Guernica Picasso » jusqu'au 1er juillet 2012 | Portfolio commenté (en castillan) du bombardement de Guernica | Fondation musée de la Paix de Guernica (en français) | « Guernica 3D »

Image Conception graphique atelier julian legendre

Casser le mythe


Assouvir un fantasme, c'est le tuer. Alors, quand je pense aux peleas « galactiques » des diestros d'autrefois face aux monstres d'antan, j'aime bien croire qu'à chaque passe le ciel se fendait et la foudre s'abattait, la flotte ruisselait sur le corps des femmes nues et la foule ivre exultait, pendant que Belmonte et Joselito misaient leurs veines sous le souffle épais d'une terreur venue des plaines brûlantes d'Andalousie ou d'un Goliath minotaure des sierras infernales de Castille. J'aime y croire…

Pour autant, rêveur mais lucide, je ne mets pas Ribéry et Georges Charpak sur un pied d'égalité, surtout au moment de coller une lucarne à Casillas, mais il faut bien admettre que les fantasmes n'agissent que dans leur inassouvissement et n'existent que tant qu'ils ne s'incarnent pas, et que c'est jutement pour ça qu'ils sont bons. Sans doute parce que l'humain a besoin de rêves, a besoin de croyances, d'illusions, d'inexactitudes et de se conforter dans le doute pour mieux supporter sa faiblesse d'homme et se donner enfin la force d'aller chercher ses graals, où qu'ils soient , quels qu'ils soient… C'est dans le rêve seul et unique qu'il faut chercher la source des plus grandes victoires, car du rêve naît l'espoir. Le besoin de croire, plus que le besoin de voir, auront toujours raison des plus hauts obstacles, car le rêve a le privilège de décupler la beauté des choses alors que la vérité les dévoile telles qu'elles sont. Pas toujours comme on voudrait, d'ailleurs, et c'est bien ça le drame : la révélation que l'on ne souhaitait pas. En ce sens, j'ai toujours eu beaucoup de compassion envers les chercheurs et binoclars scientifiques dont la raison de vivre se résume dans l'art de stopper net les illusions du reste du monde. Envie de faire chier, sans doute, besoin d'exactitudes, probablement, manque de confiance en soi, certainement… Bref, le « voir pour savoir », le « saint Thomasisme » ou l'absolue nécessité de briser les élans fougueux de ceux qui prennent le risque de miser sur le « peut-être »…

Que voulez-vous, ce monde a besoin de voir, de toucher, de sentir et parfois même d'y foutre le nez dedans, pour être sûr, être certain, savoir, se rassurer, et surtout surtout ne pas se tromper. Noble intention, c'est vrai, mais qui laisse bien peu de chance à l'imprévu, à l'inexplicable voire même au surnaturel, et qui dénature un peu ce côté hasardeux des choses de la vie, qui va si bien à la mythologie taurine et aux croyances qui la hantent, au travers des photos noir et blanc écornées et jaunies racontant des histoires fabuleuses d'hommes et de toros que les moins de soixante-quinze ans ne peuvent pas connaître, et c'est très bien comme ça.

Le légendaire Paco Ruiz Miguel triomphant à Arles en 2012 dans un éclatant traje sur mesure trop propre, c'est Jean-Pierre Rives soulevant le Brennus en juin prochain dans un maillot rose pute fleuri du Stade français : ça fait rire les enfants, à défaut de les faire rêver…

25 avril 2012

Petits mais costauds


Novillos de Fernando Pereira Palha pour Orthez 2012 © Laurent Larrieu/Camposyruedos.com

Tout ne va pas si mal, finalement.
À recevoir les annonces de carteles de la temporada 2012 dans le Sud-Ouest, force est de constater que certaines petites arènes — l’utilisation du mot « petites » n’a rien de péjoratif ici — offre une programmation fort intéressante pour les aficionados qui pourront assister à des courses marquées par la diversité des encastes et la variété ganadera. La force des ces arènes qui maintiennent la tauromachie dans les placitas contre vents et marées réside dans leur faiblesse : l’argent. En effet, que ce soit pour les corridas ou pour les novilladas, elles ne peuvent s’offrir le gratin de l’escalafón. Trop cher la plupart du temps quand il ne s’agit pas d’un refus catégorique d’affronter certains toros ou novillos. À ce sujet, il suffit de lire les péripéties rencontrées par l’ADA Parentis avec certains novilleros (Víctor Barrio et autres) pour prendre la mesure de la chose. Dans un même ordre d’idée, des maestros comme Diego Urdiales ont clairement — mais en comité restreint — refusé de combattre les Dolores Aguirre d’Orthez en 2011.
Leur force réside aussi dans un volontarisme taurin car auraient-elles l’argent pour contracter figuras et futurs « génies » de la tauromachie, rien ne dit qu’elles le feraient à chaque fois.
Ainsi, la double conjonction d’une politique taurine en marge concernant les élevages présentés et l’étroitesse des marges de manœuvre financières pour composer le plateau a pour conséquence la nécessité d’élaborer des carteles qui sortent souvent de l’ordinaire. D’aucuns chaque année pointent du doigt la fragilité de certains de ces carteles du point de vue des maestros. J’ai lu une fois que l'affiche des Dolores Aguirre d’Orthez 2010 était faible par rapport à celle des Aguirre de Pampelune de la même année. Critiquer une affiche est une démarche normale et même louable (quand la critique est argumentée), mais mettre en comparaison Pampelune et la cité de Fébus relève de la pure connerie voire d’une débilité mentale avérée pour certains. Pour filer la comparaison, c’est aussi abscons que de demander une présentation madrilène (et l’on pourrait en redire longuement sur les critères de trapío ou de « non trapío » de Madrid) pour une course lidiée à La Brède.
Au-delà de ces aberrations, ces petites arènes subissent aussi la dure loi du quitte ou double. Une féria peut être « sauvée » par une corrida  — et Mont-de-Marsan pourrait en témoigner, elle qui à la fin des années 1990 et au début des années 2000 aurait dû ériger une statue à Victorino Martín dont les bons toros firent oublier la nullité du reste du cycle —, mais dans ces petites arènes tout se joue sur une voire deux courses et il en va de même pour le ganadero dont l’élevage est observé sur cette unique course comme s’il était possible d’émettre un avis sur le niveau moyen d’une ganadería, petite le plus souvent, d’encaste minoritaire aussi, au seul reflet d’une course ! La critique (pas tous les critiques évidemment mais une bonne majorité quand même) ne s’en prive pas pourtant mais ça fait bien longtemps que je n’achète plus certains journaux et que mes favoris Internet ont été nettoyés.
Bref, la saison 2012 s’annonce intéressante dans le Sud-Ouest car la variété est à l’ordre du jour et dans cette variété peut se lire en filigrane l’édification d’une certaine idée de la tauromachie : Héritiers de Christophe Yonnet et Pagès-Mailhan à Aire-sur-l’Adour, Baltasar Ibán à La Brède, Fernando Palha et Veiga Teixeira à Orthez, Coquilla de Sánchez-Arjona à Riscle, Moreno de Silva et Alcurrucén à Hagetmau, Raso de Portillo et Valdellán à Parentis… Ça paraît peu mais c’est déjà beaucoup, finalement.

24 avril 2012

Parentis 2012, présentation des carteles


Communiqué

Le samedi 28 avril 2012 à 18 heures se déroulera la présentation des carteles de la féria 2012 de Parentis-en-Born (s
alle René-Labat à l’étage du centre administratif, place du 14-Juillet).

À cette occasion, l’Association des aficionados (ADA) et la commission taurine dévoileront les noms des novilleros qui viendront à Parentis les 4 et 5 août prochains.
Dans le prolongement de cette manifestation, se tiendra la traditionnelle conférence annuelle de l’ADA qui recevra cette année les ganaderos de l’édition 2012 : Carlos Aragón Cancela (Flor de Jara), Iñigo Gamazo (Raso de Portillo) et Fernando Álvarez (Valdellán).
Lors de cette rencontre, les aficionados pourront interroger les éleveurs sur leurs expériences respectives et leurs attentes. À l’issue de la conférence, un apéritif  sera servi au siège de l’ADA.
Entrée libre et gratuite.

Émilie


Craquante et sexy… Vive nos lectrices !


23 avril 2012

« Ivoire brisé » sur fond orange


L'oubli. Il ne nous en voudra pas le Ciego. Oublier, s'oublier, ça va bien au flamenco, non ? À la poésie aussi, ça fait pas un pli… de page. Nous avions oublié. Pourtant, il trône sur ma bibliothèque au centre, au milieu, orange parmi le blanc, orange sur les tranches de livres. Je le vois tous les jours, je le lis souvent, je m'y oublie facilement.

Il faut ouvrir ce livre parce que « de l'autre côté de la porte / le temps comptait la vie / et la mort dans la vulve de l'horloge Coppel ».

Ludovic Pautier a écrit ces poèmes ; j'aime.


>>>
Ludovic Pautier, Ivoire brisé. Poésie & flamenco, Éditions Atelier Baie, 2012, 10,14 €.

Lien Le blog du Ciego : Los pinchos del Ciego.

22 avril 2012

'Fraturo' et ses frères


Les présentations terminées, António da Veiga Teixeira s'est installé dans le 4x4 en compagnie de sa femme et de sa fille, et nous avons pris place dans le godet fixé à l'arrière du tracteur — un outil fort utile pour transporter une balle de foin… Debout dedans, nous l'inspections d'un air inquiet tout en évoquant l'incident de la veille : un jabonero de Canas Vigouroux chargea le cul du pick-up et nous en fûmes quittes pour une grosse frayeur.
Le mayoral a mis le contact et le tracteur s'est ébranlé en direction du premier cercado ; nous brinquebalions suspendus à seulement cinquante centimètres au-dessus du sol, sans aucune protection. Assis sur le garde-boue, João, le jeune fils du ganadero, a profité de l'arrêt obligé devant le portail de l'enclos pour nous demander si tout allait bien. C'est précisément le moment qu'a choisi l'un d'entre nous pour partir se réfugier dans le 4x4 qui suivait…
Il avait vu mais n'a rien dit. Il les avait vus et lorsque nous les avons vus à notre tour il était trop tard. Nous étions cernés par sept toracos negros de Veiga Teixeira — sept buffets portugais. Et à force de virer, 'Fraturo' avait fini par laisser filer celui avec lequel il se chicanait. Comme statufié à cinq mètres du tracteur, les oreilles dirigées vers l'arrière, 'Fraturo' était fin prêt à se l'emplâtrer… « Fais pas le con, nos femmes et nos enfants nous attendent à la maison. »

>>> 'Fraturo' et ses frères, sans oublier les novillos de Fernando Palha : « Les cartels d'Orthez 2012 ».

Photographie Alentejo, mars 2012 © Laurent Larrieu

17 avril 2012

En peu de mots #07


Graciliano

« Quand tu [le] regardes, il faut que tu voies un señor toro, pas un gamin. Un athlète, avec le “cul serré”, les défenses bien armées, tout en muscles, la queue qui touche presque terre. Hasta el rabo, todo ha de ser toro. »

José Manuel Durán, vétérinaire


Photographie
'Jaquetón' de D. Juan Luis Fraile y Martín — Madrid, 2010 © Juan 'Manon' Pelegrín

14 avril 2012

Photographie sans paroles (XC)


Llanto


« Ya hace varios años anuncié que no hacía falta tener a los anti-taurinos para acabar con la fiesta taurina. Los mismos aficionados, la misma fiesta, los empresarios mediocres, los ganaderos ególatras y los toreros cómodos son los que terminarán con esto. Ayer en Sevilla, se dio razón para ver el porqué la cosa va por muy mal camino. »

Carlos Cazalis via Facebook…

Traduction flamenca : « Il y a quelques années de cela, j'annonçai qu'il ne fallait pas compter sur les antitaurins pour en finir avec la Fiesta. Les mêmes aficionados, la même Fiesta, les imprésarios médiocres, les éleveurs égotistes et les toreros faciles : ce sont eux qui en finiront avec la Fiesta. Hier, à Séville, on a vu pourquoi la chose filait un mauvais coton. »

12 avril 2012

Prochainement, tienta à Orthez


À la fin du mois, les arènes du Pesqué d'Orthez seront le théâtre d'une première journée taurine à l'entrée gratuite heureusement terminée par une tienta de vaches d'Aurelio Hernando (origine Veragua).

Comment le sais-je ? Certainement pas après avoir visité le blog de la commission taurine de la ville d'Orthez — coorganisatrice avec les peñas La Lidia, Sol et Los Dos — puisqu'il n'en dit rien de rien…

Comment cela se fait-il ? Allez savoir !


>>>
Orthez Arènes du Pesqué /// Dimanche 29 avril 2012 14h30 /// Tienta de vaches d'Aurelio Hernando (Soto del Real, Madrid) pour Paúl Abadía 'Serranito', Juan Ortiz, Sergio Sánchez et Fabio Castañeda.


Photographie
Soto del Real, 2008 © Campos y Ruedos

11 avril 2012

Non aux boucles d'identification




>>> Pour celles et ceux qui n'auraient pas encore le réflexe, voir le libellé « Crotales ».

10 avril 2012

Dix ans, déjà…


Et il nous manque… terriblement. Et avec ça, la tout aussi terrible sensation que la Fiesta se délite chaque jour un peu plus.
Aujourd’hui, vous pouvez lire un article d’Antonio Lorca dans El País : « Un café solo frío y un cigarro negro ».
Et à la suite de ce papier, parmi les commentaires, celui-ci : « He ido a una corrida en toda mi vida, invitado además. Eso sí, en la Maestranza. Sin embargo, recuerdo haber leído absolutamente todo lo que escribió el Sr. Vidal. Tenía una calidad literaria impresionante. Recuerdo una crónica de una corrida de Curro Romero apoteósica en Sevilla que él supo trasladar a los que ni se nos había pasado por la cabeza acudir a la plaza, haciéndonos ver que nos habíamos perdido algo grandioso. Él también fue un maestro. »

Photographie © Gilles Gal

08 avril 2012

L'ove story


Jusqu'en 2005, Barcelone avait pour habitude de présenter une corrida le dimanche de Pâques. Depuis, on sait ce qu'il en est.

Ici, on dit volontiers dimanche de Résurrection, avec un R majuscule pour ceux qui croient aux miracles. Il est vrai que ces dernières années, pour maintenir la foi, on s'est beaucoup appuyé sur les prodigieux prodiges de José Tomás. L'illusion était souvent trompeuse : multiplications de petites passes, grâce et indulto, sorties en lévitation…

Lorsque le Messi était là (oui, à Barça on dit comme ça !), quelque soit le jour et l'heure, c'était plein comme un oeuf. Mais le reste du temps, même si la Monumental restait monumentale, ce n'était plus qu'une coquille vide.

Il ne faut pas s'étonner qu'à la fin, l'aficionado se retrouve chocolat !

Photographie sans paroles (LXXXIX)



07 avril 2012

La mente en « Blanco »


La noche ha sido corta, apenas unas horas de sueño. A pesar de todo, me levanto a la primera llamada del despertador. Hoy es 18 de marzo.

El sol empieza a asomar cuando cojo el coche en dirección de Massamagrell. No dejo de repetirme que va a ser un gran día. El método Coué para alejar mis angustias. La radio es patética esta mañana y no tengo ganas de escuchar todas las miserias del mundo. Pongo el CD “Siamese Dreams”: sueños siameses que, automáticamente, enfocan mis pensamientos hacia Ramón. Me acuerdo del mes y medio que acabamos de pasar para preparar este gran día. Una última aparición en su plaza de Valencia, el último toro para la salida de un artista. Más lo pienso y más me cuesta asimilar que tenemos que poner un punto final a esta aventura dentro de algunas horas.

Durante los veinticinco minutos del trayecto, me acuerdo de los secretos que hemos compartido. En la cabeza de Ramón galopan decenas de toros: ‘Faraón’ de Machancoses, ‘Membrillito’ de Hnos. Serrano, ‘Extravagante’ de Juan Pedro Domecq y ‘Fandango’ de Guadaira, cuya cabeza domina el comedor de su casa y que su pequeño  hijo saluda todas las mañanas. Pero el más importante es seguramente ‘Chorlito’, del Conde de Mayalde, imponente toro castaño armado como un tanque. Es, sin duda, el toro que volvió a poner a Ramón en el camino después de un periodo de dudas y frustraciones producidas por las cornadas que lo mutilaron en sus últimos concursos. El tipo de toro que te permite reencontrarte con el sitio y la confianza perdida. Fue en 2011, en el día de su peña. Ramón se ofrece voluntario para recibir el toro a la salida del cajón, en las calles abarrotadas de Massamagrell. A la hora prevista, Ramón se planta solo delante del cajón. Detrás de él, la multitud, delante ‘Chorlito’ que espera su liberación en la oscuridad relativa de su jaula. Sobre los hombros de Ramón, la presión y la responsabilidad de recibir a ‘Chorlito’ a su salida. La puerta se levanta y el morlaco aparece. “El Blanco” lo recorta y la relajación es total cuando los quinientos kilos de bravura lo rozan. Esta sensación de vacío y abandono, “El Blanco” las recuerda perfectamente. Para él fue un detonante. Ramón acaba de reencontrar “el sitio” delante de este toro. Por fin se siente preparado para realizar lo que le obsesiona desde hace varios años: despedirse del mundo del recorte.

Cuando la noticia de su adiós saltó oficialmente en el mes de enero, enseguida llamé a Albert de Juan:
« Albert, he leído que “El Blanco” se despide de los concursos en Fallas. ¿Le conoces?
— Sí, un poco.
— Habla con él y proponle hacer un reportaje. Quiero seguirle durante el mes precedente a su última actuación. Pienso que puede ser interesante. Hazlo conmigo si quieres. ¡Podemos hacer algo bonito!
— Intentaré hablar con él el sábado, van a sacar un toro en Massamagrell. Me imagino que estará.
— Apáñatelas para que esté de acuerdo, tenemos que hacerlo. No estaré el sábado, pero te llamaré para que no se te olvide.»

Esta idea le encantó a Ramón y, por mi parte, es una de las aventuras  más bonitas que se me ha dado la oportunidad de vivir en el mundo del toro. Me acuerdo de nuestro primer encuentro en un certamen de aficionados prácticos a principios de febrero. Me impactó su elegancia y simpatía, lo que contrasta mucho con la imagen que dan ciertos recortadores de hoy en día. Me acuerdo de nuestro primer viaje al Sur con “Chime” y Pepe. Los momentos en buena compañía, las anécdotas y las risas que amenizaron las toneladas de kilómetros realizados. Me acuerdo del entrenamiento en la ganadería de Luis Alcón, en una joya de placita, ubicada en la montaña de la Vall d´Uixo con vistas al mar. De la presencia de César Palacios, leyenda del recorte, rey del quiebro, que, a pesar de meses sin ver la sombra de un pitón, te deja boquiabierto por su habilidad y te contamina con su entusiasmo por volver a ponerse delante de unas vacas. Me acuerdo de ‘Ruiseñor’ y de su cruce de miradas con “El Blanco” durante una visita en su cercado de Moncada. Me acuerdo del fin de semana en Fuente Ymbro y el Marqués de Albaserrada, hinchándonos de vacas y afición. No hay precio para todo lo que hemos vivido.

La ‘despertà’ me saca de mis sueños. He aparcado el coche en frente de la casa de Ramón y los falleros disfrutan tirando petardos en la calle desierta. Un alboroto que despierta a los festeros para empezar un nuevo día de Fallas. Les veo girar la esquina y cuando me doy la vuelta, Ramón viene hacia mí. Nos saludamos, pero evito preguntarle cómo esta. Puedo adivinar el estado en que se encuentra a pocas horas de su actuación. Seguidamente llega Albert. Al igual que nosotros se lee en su rostro las pocas horas de sueño. El último en llegar es José y ya estamos todos para irnos a la plaza. Albert ha tenido un sueño en el cual esta mañana se le aparecía como un auténtico desastre… Le miro con cara de susto, Ramón frunce el ceño, y finalmente todo el mundo se tranquiliza. Albert es bastante guasón y su alusión relaja el ambiente.

A nuestra llegada a la plaza, vemos a Pepe “El Andarillo” que acompaña a ‘Ruiseñor’. Éste espera en el camión desde hace más de una hora y todavía no ha sido desembarcado. Pepe esta de mal humor. Le gustaría que todo estuviera arreglado rápidamente. Ramón necesita aislarse en una habitación encima de los corrales con vistas a la plaza. Coge un libro y se acomoda en el sofá mientras Albert y yo hacemos las primeras fotos. “El Blanco” está preocupado: un párrafo que narra la superstición de Juan Belmonte, le recuerda un hecho que ocurrió esta mañana. En los pasillos de la plaza, alguien le dio una imagen santa; casi nada para la gente normal pero la causa de muchos tormentos para un torero, pues el ritual preestablecido se va a hacer puñetas. Ramón ya tenía sus iconos. ¿Qué tiene que hacer con éste? ¿Tiene que ponerlo con los demás o dejarlo de lado? No necesitábamos esto… Para cambiarnos las ideas, miramos los corrales por la ventana donde están desembarcando la corrida de rejones del día siguiente. Los pupilos de Fermín Bohorquez se reparten leña a tutiplén.

Por mi parte, decido salir para ver si el turno de ‘Ruiseñor’ llega pronto. Me cruzo una vez más con Pepe, irritado como si le hubieran quitado el puesto en la cola del supermercado. Cojo la pasarela que domina los chiqueros y llega a los tendidos. Los primeros espectadores han cogido sitio pero dudo de que la plaza se llene. El día anterior ya hubo un concurso, y hoy mismo hay otro en Castellón.

Al igual que los matadores, “El Blanco”, ha preparado la silla del torero con su ropa. En una mesa pequeña, frente al espejo, ha instalado minuciosamente las imágenes santas, un rosario y unas medallas. Ramón está como un león en su jaula. La espera empieza a pesar y la tensión es palpable. “El Blanco” decide vestirse. Le queda aproximadamente una hora y necesito tomar el aire y fumar un cigarro. Tengo ganas de que desembarquen a ‘Ruiseñor’ ya. Este ambiente tenso lo conozco muy bien y quiero escaparme. Cuando llego a los chiqueros, Mónica, la mujer de Ramón, entra con su hijo Héctor vestido con la misma camiseta que llevará su padre. Me acuerdo de la primera vez que nos vimos cuando me explicó hasta qué punto deseaba que todo esto acabara pronto. Le gustan los toros, pero ya no quiere que se crucen en el camino de su marido. Recuerdo estar sentado en su cocina, un sábado de febrero, en compañía de “Chime”, mientras ella daba la comida a un pequeño Héctor insaciable. Teníamos que hacer algunas fotos, hablar de sus sentimientos, de anécdotas, de su marido, de toros y de todas las cosas que hacen el día a día de una mujer de recortador. Creo haberle hecho una única pregunta, anodina, sobre la última aparición de Ramón, pero su respuesta me dejó sin palabras. Una respuesta corta y seca, una especie de llamamiento de socorro, casi desesperado: simple realidad de una mujer de torero que tiene que vivir en la espera, la angustia y el miedo… Al final de un espeso silencio, decidí marcharme, pretextando que el pequeño tenía que hacer su siesta. Había detectado un verdadero sufrimiento; yo estaba conmovido y desolado. Hoy Mónica no se sentará en los tendidos; esperará con Héctor en los chiqueros. No sé qué es más difícil: ver la actuación o fiarse de las reacciones de la plaza. Ánimo Mónica…

‘Ruiseñor’ muestra el hocico en el corredor que lo lleva a los corrales. Tranquilamente, sin sobresaltos, se enfila hacia las puertas y se precipita en la manga que le conduce hasta su celda. Pepe está aliviado, todo ha ido muy bien para su protegido. Voy a ver a Ramón para avisarle de que todo ha salido perfectamente. En pleno recogimiento, “El Blanco” se encuentra de pie delante del espejo. Concentrado, no da importancia a las personas presentes en la habitación. “Moreta” y Carlos han llegado; son ellos los que le van a ayudar a colocar el toro.

¡Ay “Moreta”! Me acuerdo de nuestro fin de semana en Fuente Ymbro. “Moreta”, Ramón y Pepe habían afrontado las catorce vacas que nos había soltado el mayoral. Después de tres horas de entrenamiento, exhaustos pero felices, estábamos todos reunidos para disfutar una buena comida. Mientras “Moreta” devoraba su plato de carne en salsa, Ramón le pidió que le ayudara a colocar el toro en su gran día. “Moreta” palideció, puso el tenedor en la mesa y ya no volvió a tocar su plato:
« Moreta, ya llevamos dos fines de semana de entrenamiento juntos. Sabes donde quiero que esté el toro y por donde quiero que salga. Sólo necesito hacerte una señal y me entiendes enseguida. No vas a estar solo, Carlos también estará.
— Blanco, yo sólo quería estar allí, en vaqueros, en el callejón, por si pasa algo poder quitarte el toro…
— Si me pasa algo, la mitad de la plaza va a saltar al ruedo para echarme una mano. Yo, quiero que estés conmigo para poder colocar al toro ».
Con la idea de esta responsabilidad en mente, “Moreta” se saltará el postre para pasar directamente al gin tonic. Pero aceptará.

Ramón termina de guardar, una a una, las imágenes santas en su cajita. Es el momento de los saludos y los abrazos, en la quietud, sin efusiones, sin carcajadas. La paciencia tiene sus límites y las ganas de pelea crecen. Algunos estiramientos, una última conversación con Carlos y “Moreta”: ha llegado la hora de dejar la habitación para irse a la plaza.

Ramón llega a los chiqueros donde le esperan Mónica y el pequeño Héctor. La emoción es máxima cuando Ramón coge a su hijo en brazos y le abraza. Con los ojos humedecidos, parece que no quiere soltarle. Héctor adivina la intensidad del momento y pega su frente contra la de su papá. La pareja se abraza, se desea buena suerte en voz baja y los tres se funden en un gran abrazo. A regañadientes y muy afectado, Ramón se aparta para emprender el camino que le lleva hacia su destino. Durante el trayecto hacia el patio de cuadrillas, se adentra en la capilla. Yo, no entro. No quiero, no puedo. Intento huir de la emoción que empieza a invadirme y salgo corriendo hacia el primer piso de la plaza. Arriba, sé que existe una ventana que da a la capilla y me permite participar del recogimiento de Ramón a mi manera. Cuando se levanta, después de haberle pedido ayuda a la virgen, bajo las escaleras a toda prisa para volver a ponerme a su lado. La espera empieza de nuevo, insoportable. En el patio de cuadrillas, que está a reventar, es el momento de las palmadas, abrazos, bonitas palabras y ánimos. Se eterniza, “El Blanco” debería entrar ya. Temo que su concentración y su motivación se consuman poco a poco. Me acerco al ruedo y recibo una enorme bofetada, así como un subidón de adrenalina: ¡la plaza está llena a reventar! Ramón no lo ha visto aún. Tengo que decírselo, sé que se  pondrá contento. Voy a verlo, y tranquilamente le digo:
« ¡Ramón, está lleno! Han venido todos, para ti, para verte. Como en los viejos tiempos.
— Flo, han venido a ver a los Pablo Romero, me suelta con una sonrisa irónica.
— ¡Una polla! »

La presentación va a empezar. Bajo y me apoyo contra las puertas que abren al ruedo. Albert está detrás de mí. Uno a uno, los recortadores saltan al albero arropados por los aplausos y forman una hilera de honor en el centro. Ramón está solo en el túnel. Cuando el graciosísimo presentador empieza su interminable palmarés, el micro le abandona. Nada, ningún sonido, horror. Sólo faltaba eso. La cara de Ramón se crispa. Esperar, otra vez, cuando él, lo único que pide es salir del túnel para saludar a la Afición y desafiar a ‘Ruiseñor’. Carlos y “Moreta” le rodean ahora, al igual que una cuadrilla. Una sonrisa, una broma, un no sé qué y veo que Ramón se relaja y se lo toma con calma. Ya está, “El Blanco” se lanza, pasa de la oscuridad del túnel a la luz de la plaza, se planta en medio del ruedo y saluda como un torero. Por la reacción de la multitud, se entiende por quién han venido, quien les ha sacado de la cama un domingo por la mañana en plena celebración de Fallas. Tengo el corazón a mil.

Busco, en vano, a los padres de Ramón entre el público. Están aquí, estoy seguro. Hace un mes, me aseguraron que iban a venir. Pienso en su madre, Mercedes, en su padre, Ramón, y en todo lo que me contaron sobre su hijo: un niño bueno que dibuja toros desde su más tierna infancia y que, desde muy pronto, siguió a su padre en busca de los “bous al carrer”; unos padres repletos de afición transmitiendo el virus a su hijo que, muy pronto, pisa la arena y el asfalto para desafiar al toro. Ramón padre se acuerda de un acontecimiento que le quedó grabado en la memoria: una tarde, en Almenara, mientras persiguen un toro que galopa en la calle, su hijo  se distancia y lo pierde de vista. Cuando lo encuentra, su hijo está solo, plantado en medio de la calle, cara a cara con el toro. Al ver una presa fácil, el morlaco arranca y entra en el quiebro de Ramón. Echando la memoria atrás, es su primer quiebro. El padre está fascinado por la serenidad y la tranquilidad de su hijo en el momento crítico, por su manera de quedarse quieto a toro pasado: ha nacido un torero. Nada será como antes. Mercedes, por su parte me confía que “no había ninguna razón para impedirle ir a los toros. Siempre vimos que era prudente y no una cabeza loca. Un día volvió a casa con el formulario de solicitud de la escuela taurina de Valencia para que lo firmáramos. Lo rasgué y lo tiré a la basura. El niño se deshizo en lágrimas y me prometió que, entonces, sería uno de los mejores recortadores”…

Mercedes ha tenido que sufrir un montón de momentos duros y crueles. Ella, que vive en la preocupación perpetúa cuando su hijo sale de casa. Vacaciones de verano y fines de semana exclusivamente dedicados al toro: diez años, con unos cuarenta o sesenta concursos al año. Ramón ha recorrido España de Norte a Sur y de Este a Oeste. Varias veces, de vuelta a casa después de la compra, Mercedes rompe a llorar, víctima del celo y los reproches de otras madres que no entienden cómo una madre puede permitir que su hijo se juegue la vida persiguiendo toros.
Cuando estos pensamientos me abandonan, Ramón está en el ruedo con el equipo médico de la plaza: el homenaje del torero a las personas que le salvaron la vida. [Valencia, octubre de 2006, el pitón del toro atraviesa el cuello de ”El Blanco” que, operado por el médico de la enfermería de la plaza que no puede retener las lagrimas, guía al personal médico en su trabajo, y tranquiliza a sus padres que acudieron al lecho].

Después llega el turno de ‘Ruiseñor’ y del “Blanco”. Una señal con la mano y el torilero abre la puerta y libera a ‘Ruiseñor’ que entra al paso. Observa perplejo la plaza, a la izquierda, a la derecha, y se lanza a la otra parte del ruedo. Vuelta de observación, durante la cual “Moreta” y Carlos mueven el toro para que Ramón pueda adivinar sus reacciones y cogerle la medida. ¿El toro será fiel a lo que Ramón pensó detectar en el campo? El primer recorte es fundamental para estar seguro del comportamiento de ‘Ruiseñor’ y ganar confianza. Rápidamente, Ramón se posiciona en el centro del albero y llama a su adversario que arranca al galope. Ramón describe un arco de círculo que remata arqueándose en el momento del encuentro. ‘Ruiseñor’ superado por su velocidad, no puede alcanzar al hombre y pasa tras su espalda. Respiro. La plaza entera exulta y respira. Mónica, en la oscuridad de los chiqueros y guiada por la multitud, respira. Ramón padre y Mercedes respiran. “El Blanco”, que le ha tomado la medida a su adversario, sigue con el reverso que lo ha hecho famoso. La plaza tiembla y gruñe. La fiesta es total y puede continuar. Los quiebros y recortes se encadenan hasta que ‘Ruiseñor’ tira la toalla, dominado, vencido por la torería del “Blanco”. Un último desplante, rodilla al suelo, delante de su último toro, y Ramón recibe todo el cariño de su público que lo aclama puesto en pie. Un torero, un maestro de la tauromaquia a cuerpo limpio, saluda por última vez a su plaza antes de salir a hombros, llorando, bajo una tremenda ovación.

Desde el callejón, veo a Mónica y a Héctor en los tendidos. Acaban de entrar para disfrutar de la vuelta al ruedo de Ramón. Mónica está feliz. Una nueva etapa puede comenzar porque los fantasmas que la atormentaban van a desaparecer poco a poco, llevados para siempre por el toro ‘Ruiseñor’.

Fotografías Valencia, 18 de marzo de 2012 © Albert de Juan y Florent Lucas

04 avril 2012

« Alma herida »


Du 10 mai au 10 juin 2012, Madrid, Plaza de toros de Las Ventas. C'est notre copine Joséphine qui expose… Affaire à suivre, of course.


03 avril 2012

La mente en Blanco


La nuit a été courte, à peine quelques heures de sommeil. Malgré tout, je suis débout dès la première sonnerie du réveil. Nous sommes le 18 mars.

Le soleil pointe son nez lorsque je prends la voiture en direction de Massamagrell. Je ne cesse de me répéter que la journée va être bonne — la méthode Coué pour éloigner mes angoisses. La radio est pathétique ce matin et je n'ai pas la tête à entendre toutes les misères du monde. J'enclenche le CD « Siamese Dreams » : des rêves siamois qui automatiquement dirigent mes pensées vers Ramón. Je pense au mois et demi que nous venons de passer ensemble à préparer ce grand jour, une ultime apparition dans ses arènes de Valence, le dernier toro pour la sortie d'un artiste. Plus j'y pense et plus j'éprouve de difficultés à admettre qu'il me faudra, dans quelques heures, mettre un point final à cette belle aventure.

Durant les vingt-cinq minutes du trajet, je me remémore les secrets que nous avons partagés. Dans la tête de Ramón galopent des dizaines de toros : 'Faraón' de Machancoses, 'Membrillito' de Hnos. Serrano, 'Extravagante' de Juan Pedro Domecq et 'Fandango' de Guadaira, dont la tête trône dans son salon et que son jeune fils salue tous les matins. Mais le plus important est peut-être 'Chorlito' du Conde de Mayalde, imposant toro castaño armé comme un char d'assaut. C'est certainement lui qui a remis « El Blanco » sur les rails après une période de doutes et de frustration ; lui qui a permis au torero de retrouver le sitio et la confiance perdus. C'était en 2011, le jour de sa peña. Ramón est chargé de recevoir le toro à la sortie du cajón dans les rues bondées de Massamagrell. À l'heure prévue, Ramón se plante seul devant le cajón avec derrière lui la multitude et, devant, 'Chorlito' qui attend sa libération dans l'obscurité relative de sa cage. La porte se lève, le fauve jaillit et « El Blanco » le cueille dès la sortie ; lorsque la demi-tonne de bravoure le frôle, le relâchement est total. Cette sensation de vide et d'abandon, « El Blanco » s'en souvient parfaitement. Un déclic s'est produit, il se sent prêt pour réaliser ce qui lui trotte dans la tête depuis plusieurs années : tirer sa révérence au monde du recorte.

Quand la nouvelle de son adieu a été officialisée au mois de janvier, j'ai aussitôt appelé Albert de Juan : « Albert, j'ai lu qu'« El Blanco » allait se retirer lors les Fallas. Tu le connais ?
— Ouais, un peu.
— Contacte-le et propose-lui de faire un reportage. J'ai envie de le suivre au cours du mois qui précède sa dernière apparition. Je pense que ça devrait être intéressant. Fais-le avec moi si tu veux. On pourrait faire quelque chose de bien !
— J'essaierai de lui parler samedi prochain à Massamagrell. Ils vont “faire un toro” et je pense qu'il y sera.
— Débrouille-toi pour qu'il soit d'accord, il faut absolument faire ça. Je ne serai pas là samedi, mais je te rappellerai pour que tu n'oublies pas. »

Cette idée a enchanté Ramón, et c'est pour ma part une des plus belles aventures qu'il m'ait été donnée de vivre dans le monde du toro. Je me souviens de notre première rencontre lors d'un concours d'aficionados prácticos au début du mois de février, par un dimanche glacial avec un vent qui lacère le visage. J'ai été frappé par l'élégance et la sympathie de Ramón qui contrastent avec l'image que renvoient certains recortadores de nos jours. Je me souviens de cette première virée dans le sud avec « Chime » et Pepe : les moments passés en si bonne compagnie, les anecdotes et les rigolades qui ponctuèrent les tonnes de kilomètres avalés. Je me rappelle de cet entraînement chez Luis Alcón dans ce bijou de placita logé au cœur des montagnes de La Vall d'Uixó avec vue sur la mer, de la présence de César Palacios, légende du recorte, roi du quiebro, qui malgré des mois sans voir l'ombre d'une corne te laisse bouche bée par sa facilité, et te contamine par son enthousiasme à se remettre devant des vaches. Je me souviens de 'Ruiseñor' et de ce bras de fer avec « El Blanco » par regards interposés lors d'une visite dans son enclos de Moncada. Je me rappelle de ce week-end chez Fuente Ymbro et le Marqués de Albaserrada à se gaver de vaches et d'afición — vivre ce que nous avons vécu n'a pas de prix.

La despertà (tradition censée tirer les habitants de leur lit pour démarrer une nouvelle journée de Fallas) me sort de ce songe éveillé. Je viens de garer ma voiture et regarde les falleros s'en donner à cœur joie en lançant des pétards. Lorsque je me retourne, Ramón marche vers moi. On se salue mais j'évite de lui demander comment il va. Je devine assez facilement son humeur à quelques heures du concours. Albert nous a rejoints — le manque de sommeil se lit sur son visage —, suivi peu de temps après par José. Tandis que nous nous dirigeons vers les arènes, Albert nous raconte qu'il a fait un rêve dans lequel cette matinée lui était apparue comme un « désastre »… Je fais les gros yeux, Ramón fronce les sourcils, puis tout le monde se relâche — Albert est taquin et son allusion un peu douteuse a détendu l'atmosphère.

À notre arrivée aux arènes, nous croisons Pepe qui accompagne 'Ruiseñor'. Celui-ci attend dans le camion depuis plus d'une heure et n'a toujours pas été débarqué. Pepe n'aime pas ça ; il souhaiterait que tout soit réglé au plus vite. Ramón ressent le besoin de s'isoler dans une pièce qui surplombe les corrals et fait face aux arènes. Il s'empare d'un livre et s'installe sur le canapé pendant qu'Albert et moi faisons les premiers clichés. « El Blanco » est soucieux : un passage relatant la superstition de Juan Belmonte le renvoie à un petit incident survenu ce matin. Dans les couloirs des arènes, quelqu'un lui a confié une image sainte — trois fois rien pour le commun des mortels, mais la cause de bien des tourments pour un torero. Voilà que le rituel préétabli fout le camp. Ramón avait déjà ses icônes. Que doit-il faire de celle-ci ? Doit-il la poser avec les autres ou doit-il l'ignorer et la laisser de côté ? On n'avait pas besoin de ça… Pour nous changer les idées, nous regardons par la fenêtre les corrals où est en train d'être débarquée la corrida de rejón du lendemain matin. Les pupilles de Fermín Bohórquez s'en donnent à cœur joie et se distribuent les bourrades. Pour ma part, je décide de sortir pour voir si le tour de 'Ruiseñor' arrive bientôt. Je croise une nouvelle fois Pepe, irrité comme si l'on venait de lui piquer la place dans la queue du supermarché. J'emprunte la passerelle qui surplombe les chiqueros et mène aux tendidos. Les premiers spectateurs ont pris les meilleures places et je doute que les arènes se remplissent. La veille il y avait déjà un concours à Valence, et aujourd'hui même un autre a lieu à Castellón.

À l'instar des matadors, « El Blanco » a préparé la chaise du torero avec ses vêtements. Sur une petite table, face au miroir, sont minutieusement installés les images saintes, un chapelet et des médailles. Ramón est comme un lion en cage. L'attente commence à peser et la tension est palpable. « El Blanco » décide de s'habiller. Il lui reste environ une heure et il me faut prendre l'air et fumer une clope. J'ai hâte que l'on débarque 'Ruiseñor'. Cette ambiance tendue, je la connais trop bien et je veux m'en défaire. Lorsque j'arrive aux chiqueros, Monica, la femme de Ramón, fait son entrée avec leur fils Héctor vêtu du même tee-shirt que celui que portera son père. Je nous revois lors de notre première rencontre quand elle m'avait expliqué à quel point elle souhaitait que tout se terminât au plus vite. Les toros, elle aime bien ça, par contre elle ne veut plus qu'ils croisent le chemin de son mari. Je me souviens être assis dans sa cuisine, un samedi de février, en compagnie de « Chime » pendant qu'elle donnait à manger à un petit Héctor insatiable. On devait faire quelques photos, parler de ses sentiments, d'anecdotes, de son mari, des toros et de toutes ces choses qui font le quotidien d'une femme de recortador. Je crois bien ne lui avoir posé qu'une seule question, anodine, au sujet de la dernière apparition d'« El Blanco », mais sa réponse m'avait laissé sans voix. Une réponse courte et sèche, une espèce d'appel au secours quasi désespéré : simple réalité d'une femme de torero qui doit vivre dans l'attente, l'angoisse et la peur… Au terme d'un silence pesant, je décidai de partir, prétextant que le petit allait devoir faire sa sieste. J'avais décelé une véritable souffrance ; j'en étais remué et désolé. Aujourd'hui, Monica n'ira pas s'asseoir sur les gradins ; elle attendra avec Héctor du côté des chiqueros. Je ne sais pas ce qui est le plus difficile à vivre entre assister à la course et se fier aux réactions de l'arène. Courage Monica…

'Ruiseñor' pointe le bout de son mufle dans le couloir qui le mène vers les corrals. Tranquillement, sans soubresauts, il enfile les portes puis s'engouffre dans le corridor qui le conduit vers sa cellule. Pepe peut être soulagé, tout s'est bien passé pour son protégé. Je rejoins Ramón pour l'informer que tout s'est bien passé. En plein recueillement, « El Blanco » se tient debout devant le miroir. Concentré, il fait fi des personnes présentes. « Moreta » et Carlos sont arrivés ; ce sont eux qui l'aideront à placer le toro.

Aïe « Moreta » ! Je me souviens de notre week-end chez Fuente Ymbro. « Moreta », Ramón et Pepe avaient affronté les quatorze vaches que nous avait lâchées le mayoral. Après trois heures d'entraînement, rincés mais heureux, nous étions tous réunis pour profiter d'un bon repas. Alors que « Moreta » dévorait son plat de viande en sauce, Ramón lui demanda de l'aider à placer le toro pour le grand jour. « Moreta » devint tout pâle, reposa sa fourchette et ne toucha plus son assiette : « “Moreta”, ça fait deux fois que tu viens avec moi à l'entraînement. Tu sais où je veux que soit le toro et de quel côté il doit s'élancer. J'ai juste besoin de te faire un signe et tu comprends de suite. Tu ne seras pas seul, Carlos viendra aussi.
— “Blanco”, moi je voulais juste être là, en civil, dans le callejón, pour pouvoir intervenir s'il t'arrivait quelque chose…
— S'il m'arrive quelque chose, c'est la moitié des arènes qui sautera en piste pour me filer un coup de main. Moi, je veux que tu sois avec moi pour me placer le toro. »
À l'idée de cette responsabilité, « Moreta » sautera le dessert pour passer directement au gin tonic. Mais acceptera.

Ramón finit de ranger une à une les images saintes dans son coffret. C'est le moment des salutations et des embrassades, dans le calme, sans grande effusion, sans éclats de rire. La patience a ses limites et l'envie d'en découdre grandit. Quelques étirements, une dernière conversation avec Carlos et « Moreta » : l'heure est venue de quitter la pièce pour les arènes.

Ramón se rend jusqu'aux chiqueros où l'attendent Monica et le petit Héctor. L'émotion est à son comble lorsque Ramón prend son fils dans les bras et l'embrasse. Les yeux rougis, il semble ne plus vouloir le lâcher. Héctor devine l'intensité du moment et colle son front contre celui de son papa. Le couple s'embrasse, se souhaite bonne chance à demi-voix et les trois fusionnent dans une grande embrassade. À contrecœur et totalement bouleversé, Ramón s'écarte pour reprendre le chemin qui le conduit vers son destin. Dans le couloir le menant au patio de cuadrillas, il s'engouffre dans la chapelle. Je n'entre pas. Je ne veux pas, je ne le sens pas. Je tente de fuir cette émotion qui commence à m'envahir et cours à l'étage à toutes jambes. En haut, je sais qu'une fenêtre donnant sur la chapelle me permettra de participer à ma façon au recueillement de Rámon. Lorsqu'il se relève, après avoir demandé son aide à la vierge, je dévale les escaliers pour me remettre à ses côtés. L'attente recommence, insupportable. Dans le patio de cuadrillas bondé, tapes dans le dos, accolades, belles paroles et encouragements sont échangés. C'est long, il faudrait qu'« El Blanco » entre en piste tout de suite. Je crains que sa concentration et sa motivation ne se consument. Je descends alors pour m'approcher du ruedo et prends une énorme claque dans la figure, ainsi qu'une grande bouffée d'adrénaline : les arènes sont pleines à craquer ! Pleines comme un œuf ! Ramón ne les a pas encore vues. Il faut que je le lui dise, je sais qu'il en sera heureux. Je remonte le voir et, le plus tranquillement du monde, lui dis : « Ramón, c'est plein ! Ils sont tous venus, pour toi, pour te voir. Comme au bon vieux temps.
— Flo, ils sont venus voir les Pablo Romero du concours de recorte, me lâche-t-il avec un sourire empreint de malice.
— Mon cul, ouais !!! »

La présentation va démarrer. Je redescends me caler près des lourdes portes ouvrant sur le ruedo. Albert est derrière moi. Un à un, les recortadores pénètrent dans l'arène sous les applaudissements et forment une haie d'honneur au centre du ruedo. Ramón est seul dans le tunnel. Lorsque l'inénarrable speaker se lance dans sa présentation et énumère son interminable palmarès, le micro le lâche. Plus rien, plus de son, l'horreur. Il ne manquait plus que cela. Le visage de Ramón se crispe. Attendre, encore, alors qu'il ne demande qu'à sortir du tunnel pour venir saluer l'Afición et défier 'Ruiseñor'. Carlos et « Moreta » l'encadrent désormais, tel une cuadrilla. Un sourire, une blague, un je ne sais quoi et je vois Ramón qui se détend et prend son mal en patience. Ça y est, « El Blanco » avance, passe de l'ombre du tunnel à la lumière des arènes, se plante au milieu du ruedo et salue en torero. À la réaction de la foule, on comprend alors pour qui ils sont là, qui les a arrachés du lit en ce dimanche matin de pleine célébration des Fallas. J'ai le cœur qui bat à tout rompre.

Je cherche vainement les parents de Ramón dans le public. Ils sont là, c'est sûr. Il y a de cela un mois, ils m'avaient assuré qu'ils viendraient. Je pense à sa mère, Mercedes, à son père, Ramón, et à tout ce qu'ils m'ont raconté sur leur fils : un enfant sage qui dessine des toros dès son plus jeune âge et qui, dès qu'il le peut, suit son père sur les sentiers des bous al carrer ; des parents pétris d'afición transmettant le virus à leur fils qui, très tôt, foule le sable et l'asphalte pour affronter le toro. Ramón père garde un évènement gravé dans sa mémoire : un après-midi, à Almenara, tandis qu'ils poursuivent le toro qui caracole dans une rue, il est distancé par son fils et le perd de vue. Lorsqu'il le retrouve, c'est pour le voir seul, planté au milieu de la rue face-à-face avec le toro. À la vue de cette proie facile, le cornu s'élance et rentre dans le quiebro de Ramón. D'aussi loin qu'il s'en souvienne, c'est son premier écart. Le père est subjugué par la sérénité et la tranquillité de son fils au moment le plus critique, par sa façon de rester immobile après le passage du toro : un torero est né. Rien ne sera plus comme avant. Mercedes, quant à elle, me confia qu'« il n'y avait aucune raison de l'empêcher d'aller aux toros. On a toujours su qu'il faisait attention et qu'il n'était pas une tête brûlée. Un jour, il est revenu à la maison avec le formulaire d'inscription de l'école taurine pour que nous le signions. Je l'ai déchiré et jeté à la poubelle. Le gamin a éclaté en sanglots et m'a juré qu'il deviendrait un des plus grands recortadores »…


Des moments durs et cruels, elle en a vécu à la pelle, Mercedes, elle qui vit dans l'inquiétude perpétuelle dès que son fils quitte la maison. Des vacances d'été et des week-ends exclusivement dédiés au toro : dix années durant, à raison de quarante à soixante concours par an, Ramón aura parcouru l'Espagne en long en large et en travers. Plusieurs fois, de retour chez elle après les emplettes, Mercedes a fondu en larmes, victime de la jalousie et des reproches d'autres mères qui ne comprenaient pas comment on pouvait laisser partir son fils se jouer la vie à la poursuite du toro

Lorsque ces pensées m'abandonnent, Ramón est dans le ruedo avec l'équipe médicale des arènes : l'hommage du torero aux personnes qui lui ont sauvé la vie. [Valence, octobre 2006, la corne du toro transperce la gorge d'« El Blanco » qui, opéré en urgence par le médecin des arènes qui ne peut retenir ses larmes, guide le personnel du bloc opératoire dans son travail, tout en rassurant ses parents accourus à son chevet.]

Puis vient le tour de 'Ruiseñor' et d'« El Blanco ». Sur un signe de la main, le torilero ouvre la porte et libère 'Ruiseñor' qui fait son entrée au pas, observe perplexe l'arène, à gauche à droite, puis s'élance à l'autre bout du ruedo. Round d'observation au cours duquel « Moreta » et Carlos déplacent le toro afin que Ramón puisse deviner ses réactions et prendre ses marques. Le toro sera-t-il fidèle à ce qu'il avait cru déceler au campo ? Le premier recorte est fondamental pour s'assurer du comportement de 'Ruiseñor' et gagner en confiance. Rapidement, Ramón se positionne au centre de la piste et appelle son adversaire qui s'élance au galop. « El Blanco » décrit un arc de cercle qu'il parachève en se cambrant au moment de la rencontre. 'Ruiseñor', emporté par sa vitesse, ne peut attraper l'homme et file dans son dos. C'est passé. Je respire. Les arènes entières exultent et respirent. Monica, dans l'obscurité des chiqueros et guidée par la réaction de la foule, respire. Ramón père et Mercedes respirent. « El Blanco », qui a pris la mesure de son adversaire, enchaîne avec le reverso qui l'a rendu célèbre. Les arènes frissonnent et grondent. La fête est totale ; elle peut se poursuivre. Les quiebros et les recortes se succèdent sans fausse note jusqu'à ce que 'Ruiseñor' jette l'éponge, dominé, vaincu par la torería d'« El Blanco ». Un ultime desplante, genou à terre devant son dernier toro, et Ramón reçoit toute l'affection de son public qui l'acclame debout. Un torero, un maestro de la tauromachie a cuerpo limpio salue une dernière fois ses arènes avant de sortir a hombros et en larmes sous une terrible ovation.

Depuis le callejón, j'aperçois maintenant dans les gradins Monica et Héctor qui profitent du tour d'honneur de Ramón. Le visage de Monica rayonne de bonheur. Une nouvelle étape peut commencer, car les fantômes qui la hantaient vont peu à peu disparaître, emportés à tout jamais par le toro 'Ruiseñor'.

Photographies Valence, 18 mars 2012 © Florent Lucas

02 avril 2012

830


Le matin, ce n'était encore qu'un numéro.
C'était samedi, dernier jour de mars. Il avait sans doute quelque chose à fêter le 830. Son anniversaire ? Allez savoir… 830, né en mars 2008, à « La Bélugue », en Camargue. Mais la fête c'était surtout pour les gardians. Et ils ont trinqué ! Galopades, deux portes cassées, charges violentes, démarrages, esquives, le 4X4 éborgné, un phare en moins, poursuites, chevauchées, tours, détours, retours, contours, bonds et rebonds… 830, infatigable et toujours frais comme un gardon. C'est sous ce nom qu'il s'est présenté à Vergèze le lendemain dimanche 1er avril : 'Gardon'.
Demandez à Luis González comment il a trouvé le poisson…

'Gardon', n° 830, toro de Hubert Yonnet.

Dans quatre ans, le 1er avril c'est un vendredi… jour du poisson. À « La Bélugue », on frétille déjà ! 

Né en mars 2012.

En peu de mots #06


Question à cent balles

Le 25 août 2011 — à la vérité, Campos y Ruedos se fiche pas mal de l'actualité —, Vicente Sánchez López publiait cette photographie en demandant de qui pouvaient bien être ces toros.
Le jour même, un premier commentaire affirmait plein d'assurance qu'il s'agissait non seulement de Lisardo mais de Lisardo de D. Lisardo Sánchez — pfft, des Lisardo ça ?… L'auteur du commentaire suivant, « perdidito, perdidito », donnait prudemment sa langue au chat. J'ai quant à moi pensé d'emblée que ces deux-là étaient des Valverde du fameux curé, débarqués quelque part en Espagne, probablement à la fin des années 1980 — et ce malgré le rendu plus ancien du cliché.
Le 29, la réponse tombait : nous avions sous les yeux deux exemplaires… de D. Lisardo Sánchez, combattus… en France, dans les années… 1960 !