29 mai 2009

Vic J-1


Un novillo de Flor de Jara dans les corrales vicois.

Demain...

Il faut sauver le pottok


Ils ont tout essayé. Le pâté, les rillettes, le boudin, la saucisse sèche, le rôti, le jambon et même l’axoa. Ils ont tout essayé mais rien n’y fait. Le pottok se refuse aux plaisirs du palais. Trop sec, trop dur, difficile à mâcher, fibreux à souhait, le pottok est immangeable, même en soupe. Ca pourrait faire rire mais il en va de sa survie, rien moins que cela. Ce petit cheval fort comme un première ligne tongien écoute encore, la nuit venue, les rires malfaisants de sorcières en bringue au tréfonds des grottes de Zugarramurdi ou de Sare. Le pottok est encore là mais il ne sert plus à rien aujourd’hui. Et qu’y a-t-il de plus sordide en 2009 que de n’avoir aucune utilité ?
Alors, au regard du succès du sauvetage de la crevette espagnole initié par José Tomás et dans un souci écologique et civique en phase avec notre belle époque de grands sentiments barbapapa, l'équipe de Camposyruedos a décidé de se porter au secours du pottok basque et de lui donner la place qu’il mérite dans ce monde cruel. Ainsi, nous proposons à toutes les instances taurines officielles qui ont un certain pouvoir – en espérant que cela existe – de promouvoir auprès des empresas et des plazas l’utilisation du pottok comme cheval de picador. Sus au percheron, on veut des pottoks ! Et toc.
Le pottok serait idéal à plus d’un titre.
Son utilisation permettrait tout d’abord de baisser considérablement la taille et le poids du cheval puisque le pottok (en exagérant un peu) est au percheron ce que le chihuahua est au labrador. De ce fait, les piqueros retrouveraient cette prestance sombre et massive qui impressionnait jadis les aficionados. Avez-vous remarqué qu’il y a eu ces dernières années un amaigrissement notoire de la gent piquera ? Tout fout le camp. Sur un pottok, le picador redeviendrait un varilarguero gros et inquiétant.
De même, cela obligerait les cuadras de caballos à repenser à la baisse la taille et le poids du peto et cela irait bien-sûr dans le sens de toutes les préconisations actuelles concernant la refondation unanimement demandée du tercio de piques.
Enfin, le caractère particulier du pottok donnerait l’occasion de voir toréer des chevaux à visage découvert, sans cet odieux ruban rouge en traves de la tronche. En effet, le pottok n’a pas peur. Le pottok est fort, le pottok est fier, le pottok n’a pas mal. Le pottok est Basque, ne l’oublions pas. Il pousse en mêlée, il tire à la corde, il mange des piments crus et il a de la corne sous les sabots à force de renvoyer la pilota contre le fronton du village rouge et vert. Le pottok est un combattant au poitrail large et solide. Le pottok a fait sienne cette maxime essentielle du cinéma français : "un coup de boule, ça part de là [du buste]". Au printemps venu, quand chantent pintades et hirondelles, le pottok s’émeut en dévorant des yeux sa "pottokette" qu’il ne goûte qu’un instant seulement car même pour ce genre de commerce le pottok est solitaire, oserions-nous écrire autonome.
Mais le pottok est en danger de mort et sa place face au toro le sauverait d’un chaos annoncé.
Bien sûr, nous avons conscience que cette mesure radicale ne sera pas facilement admise par le syndicat des picadors sveltesse 0%. "Don’t worry" comme le disait un jour un pottok bravissime à un ours pyrénéen du côté d’Iparla, nous avons la solution.
Pour compenser perte de hauteur et de poids, munissons les piqueros d’une puya… mexicaine. Que les instances taurines officielles cessent sur le champ de lire ou d’écouter les thèses tarabiscotées de chargés de communication [de grandes plazas françaises entre autres] à la gomme et qu’elles ouvrent les yeux – on se demande parfois si ce ne sont pas elles qui jouent le rôle de percheron. Que la puya andalouse reste à Séville où, c’est une évidence, tous les aficionados présents auront remarqué un profond changement dans le tercio de piques depuis 2006. Ah, vous n’aviez pas remarqué de différence vous ? Mais c’est pourtant ce qui était prévu par ces mêmes chargés de communication à la gomme. Se seraient-ils trompés dans leurs élucubrations quotidiennes ?
Bref, des piques mexicaines et sans cordelettes et un bon pottok ! Ainsi, le tercio de piques sera mieux dans ses basques et les picadors redeviendront gros.
C’est avec espoir que nous proposerons donc ces idées aux instances taurines officielles. Nous nous permettons pour conclure d’y ajouter cette dernière réflexion.
S’ingénier à refonder ou repenser le tercio de piques n’est pas en soi une mauvaise préoccupation mais la lidia d’un toro, c’est trois tercios. Pourquoi donc ne pas prendre le problème à l’envers et réfléchir à une pure et simple réduction de ce troisième tiers interminable ? 20 passes 30 au plus, 5 minutes maximum ! Et si un toro montre des signes évidents de faiblesse au sortir des piques contre les pottoks, puntilla en piste sur le champ et au suivant ! La corrida dure 2 heures, au-delà, c’est l’apéro qui trinque.

28 mai 2009

Communiqué officiel du Club Taurin Vicois


Aujourd'hui jeudi 28 mai 2009, et après examens médicaux, José Pedro Prados 'El Fundi' ne pourra assurer ses engagements à la corrida concours et à la corrida du lundi 1er juin.
Il sera remplacé par Fernando Robleño le dimanche matin.

La place du lundi laissée libre sera attribuée au triomphateur des premières corridas.

Israel Lancho gravement blessé par un toro de Palha à Las Ventas


Post de Bastonito dans Taurofilia du jeudi 28 mai 2009. Israel Lancho gravement blessé par un toro de Palha à Las Ventas

Le propriétaire de l’élevage de Palha, João Folque de Mendoça, a envoyé hier à Madrid une sacrée course. Il s’agissait de six bêtes très bien présentées, encastées, offrant de la variété dans le jeu et dotées de suffisamment de puissance pour supporter, debout sur leurs pattes, l’ensemble du combat, ce dont ne peuvent se prévaloir la plupart des ganaderías de la féria choisies pour les sommités de la hiérarchie des toreros qui sait compter sur l’aide inestimable du tandem Choperita/Florito et sur le consentement de la Communauté de Madrid.
A dire vrai, monsieur Folque n’est pas le genre d’individu ou d’impresario taurin que j’adule, mais, en tant qu’éleveur, il ne cesse de monter dans mon estime et c’est au fond ce qui importe.
Globalement, la corrida fit montre de vivacité lors des premiers tiers et de noblesse dans le dernier. A cet instant il me semble important de préciser qu’il y a lieu bien évidemment de ne pas confondre la noblesse avec la niaiserie. Les Palha étaient nobles lorsque les choses étaient bien faites mais ils ne permettaient pas le moindre faux pas. C’est précisément pourquoi personne ne s’est ennuyé durant tout le spectacle malgré la maladresse des matadors qui s’évertuèrent à étouffer la charge des six toros.
L’épouvantable accrochage vécu par Israel Lancho, lors de la mise à mort du sixième est venu ternir un après-midi qui s’est achèvé par le salut du mayoral en piste en réponse à l’insistante demande d’une Afición reconnaissante. Pour le reste, mieux vaut ne pas s’étendre sur ce que firent ou ne firent pas les matadors.

Le docteur García Padrós se montre beaucoup plus laconique que son père dans la rédaction de ses actes médicaux. Il indique que : "Israel Lancho souffre d’une blessure par corne dont l’orifice d’entrée se situe dans l’hémisphère thoracique gauche. La plaie d’une une trajectoire ascendante de 20 centimètres perfore la cavité thoracique jusqu’à son orifice de sortie établi dans le cinquième espace intercostal entraînant un pneumo et un hémothorax. Le pronostic vital est grave. L’intervention s’est déroulée sous anesthésie générale puis le patient a été transféré vers la clinique Vigen del Mar."
Bastonito traduit par JotaC & la photo est évidemment de Manon.

27 mai 2009

Un miracle


Le premier, des cornes pour le rejón. Sospechoso de pitones qu’il faut dire.
Le second ça va. Ensuite, tout et n’importe quoi. Mais ces cornes, ces cornes...
Dans le fond les cornes, ce n’est pas le plus grave. Le plus grave et le plus triste c’est la faiblesse, le manque de force, de puissance, de sauvagerie, de trapío, de tout.
L’illusion, l’illusion que ce sont des miuras, nous l’avons uniquement lorsqu’ils entrent en piste. Et l’illusion ne dure pas, jamais, sauf avec le cinquième, le quinto, une teigne méchante et dangereuse ; une teigne enfin digne de ce que fut cette devise. Rafaelillo s’expose et se la joue et tout le monde s’en fout, ou ne se rend pas compte. C’est un peu normal dans le fond, ils n’ont plus l’habitude. Sont-ce encore des Miura ? Y a-t-il encore ici quelques aficionados pour se rendre compte de la difficulté du cinquième ?
A propos d’aficionados, je téléphone à ceux qui sont à Madrid. Ils en sont au cinquième Palha et ils sont contents. Ce n’est pas du niveau de l’an passé, mais c’est encasté et mobile. Une après-midi entretenue à Madrid, calle Alcalá. Remarquez, ça n’empêchera pas l’autre d’en dire du mal, mais on s’en fout.
A Nîmes – faut suivre –, l’ensemble fut comme ils ne furent jamais auparavant, historiquement je veux dire, plutôt braves sous le fer et plutôt maniables par la suite. Pas des Miura quoi… Le sixième ? Un Garcigrande oui, me souffle mon voisin de droite. Une peine, et pas de miracle.
Enfin si, un miracle. Un vrai miracle même, médical : Padilla, dimanche dernier à Alès, après s’être fait bousculé par son premier Palha, Padilla souffrait d’une luxation de l’épaule. Il ne put donc tuer son second adversaire.
Aujourd’hui, mon voisin de devant, kiné de profession, blogeur à ses heures, s’esclaffe : « Une luxation de l’épaule. Tu parles ! Avec une luxation de l’épaule comme annoncée dimanche, il ne risquerait pas d’être ici maintenant… ou alors c'est un miracle. »
Mon voisin de droite, médecin de son état, et lecteur assidu de Camposyruedos confirme : "Impossible avec une luxation dimanche de toréer aujourd’hui." Vous voyez, les miracles existent !

>>> Vous avez une galerie en rubrique RUEDOS du site. Mais je vous préviens, elle n’a rien de miraculeux, ou alors la cour des miracles. Et dire que j'ai fait la fine bouche sur la corrida de Palha d'Alès...

No sólo castaño


Occupé à rentrer des données pour un site ami, je suis tombé en arrêt sur un pelage, etc.
Non, en fait ce n’est pas vraiment le pelage castaño qui m’intrigua de prime abord mais une tête, une tête sérieuse ; plus exactement le regard mystérieux qui en sortait. Une tête avec deux taches claires parfaitement symétriques à la place des yeux : « 'Opresor', le toro qui n’avait pas d’yeux ! ». Brrr !!! Afin de saisir toute la subtilité du propos, on clique sur le lien1.
Ne cherchez pas, 'Opresor' de Guadaira n’était ni llorón (tache claire sous l’œil pareille à une larme) ni zarco (tache blanche dans l’œil) ni ojalado (auréole décolorée entourant l’œil) ni « bien évidemment » ojo de perdiz (particularité rattachée au seul pelage colorado)... Et il avait des yeux !
Bien, maintenant vous savez ce que l’on va faire ? Non, vous ne savez pas, alors je vais vous le dire. Nous allons soumettre ce cas exceptionnel à la sagacité de, de... d’Adolfo Rodríguez Montesinos ! En attendant — nous vous tiendrons au courant —, comme nous nous permettons à peu près tout à Campos y Ruedos, je me suis permis de qualifier 'Opresor' de cejado2.
— Si cela te fait plaisir...
— Ben ouais, ça m’fait plaisir.

Bon, ceci dit, l’empresa Taurodelta jouant la carte de l’économie... même en ce qui concerne les reseñas des toros, 'Opresor' était ni plus ni moins annoncé castaño. Et c’est vrai qu’il l’était, mais pas seulement. Il était aussi bociblanco (plus clair que bocidorado) ET carifosco.
Selon l’incontournable Adolfo3 est carifosco « le toro de n’importe quelle robe présentant en abondance des poils frisés sur la tête et le front4 [...] contribuant à doter ces exemplaires d’un air fier et sérieux. Cette particularité influence de manière positive leur trapío. Anciennement, les toros carifoscos étaient dénommés foscos ou de cara seria. » Sérieux de tête donc, et à voir 'Opresor' on comprend mieux pourquoi...

1 'Opresor', castaño carifosco et bociblanco. Avouez qu’il y avait de quoi être intrigué...
2 De ceja qui signifie sourcil. Ah, ils ne sont pas là les sourcils ? Tant pis, ça sonne bien cejado...
3 In Pelajes y Encornaduras del Toro de Lidia, Co-édition Consejo General de Colegios Veterinarios de España (Madrid) et Ibercaja (Zaragoza), 1994.
4 Est astracanado le toro présentant un morrillo et un cou frisés.

Rappel Retrouvez El Batacazo & l’élevage de Guadaira en lisant
Le campo aux mille drôles et en visitant la galerie.

Image Le 25 mai dernier à Las Ventas, 'Opresor' qui, quelques minutes avant d’être ovationné à l’arrastre, n’entendait pas (ou ne voulait pas entendre) Manon lui demandant d’arrêter de bouger deux secondes ! Sur cette photo, 'Opresor' me donne l’impression d’avoir un groin (caricerdo ?!) © Juan 'Manon' Pelegrín. ¡Gracias Juan!

26 mai 2009

Premier tiers (III)


Suite de « Premier tiers (I) » & de « Premier tiers (II) ».

Il serait souhaitable, pour…
obtenir du toro des charges rectilignes et qu’il concentre son attention sur une cible unique :

 Que matadors et peones ne fassent pas de manière intentionnelle cogner violemment le toro contre la barrière et les burladeros ; le reçoivent avec un minimum de coups de cape tout en remettant au goût du jour ceux délivrés à une main et ceux conduits à deux mains (ah, le jeu de jambes !), plus efficaces et moins traumatisants pour le toro alors en pleine possession de ses moyens.
>>> On pourra faire la grimace (voire un peu plus) quand un matador « claquera » d’entrée de jeu — sans qu’il y ait eu réception préalable de la part des peones ou de la sienne — sa série de véroniques et la demie finale.

Le picador rentre sur ordre de la présidence, celle-ci estimant que le toro est « sous contrôle », suffisamment « fixé », intéressé par les capes qui lui sont présentées...

 Que le torero ne sorte ni ne reste du « côté de la queue du cheval » après avoir placé (abandonné parfois) le toro face au picador — l’alguazil se chargeant d’houspiller les indisciplinés depuis le callejón ;

Qu’un maximum de deux toreros (en incluant le matador en action, les deux autres se partageant le burladero) soient présents en piste, immobiles non loin de la barrière côté « tête du cheval » et qu’il n’y ait aucun mouvement dans le callejón — le monosabio s’y tiendra « en cas que » — susceptible de distraire le toro…

Il serait souhaitable, pour…
apprécier la valeur du picador, que celui-ci : Vous trouverez ci-après davantage une conception qu’une méthode, encore moins LA méthode, qui, si elle n’était pas appliquée à la fois complètement, scrupuleuseusement et systématiquement quel que soit le contexte — plus que tout autre, le tercio de varas est affaire de compromis —, nous autoriserait à clouer au pilori l’homme au couvre-chef en peau de castor — pauvre bête...

 Ait son nom affiché en piste, et/ou inscrit sur la fiche sorteo.
>>> J’avoue avoir un peu de mal à imaginer en quoi l’indépendance des picadors vis-à-vis des matadors changerait quoi que ce soit à leur manière de procéder. Mais si certains d’entre vous estiment le contraire, qu’ils n’hésitent pas à s’exprimer.

• Monte sa pique à l’endroit et… la tienne à l’endroit, face plane vers le haut — une bande de peinture sur la hampe aisément visible depuis les tendidos serait la bienvenue.

 Manœuvre son cheval ; cite le toro de face (en attirant son attention de la voix et du geste) et « allonge » sa pique, « s’engage » (les fesses décollées de la selle) en portant le fer DANS le morrillo avant que le toro ne rencontre le cheval (de biais selon un angle de 20 à 45°).
>>> De biais et non perpendiculaire à la trajectoire du toro comme on le constate malheureusement trop souvent. Cette manière de « piquer de côté », outre son manque d’honnêteté et son inesthétisme, enferme le toro dans le peto l’incitant davantage à soulever (romanear c’est autre chose) qu’à pousser, en sollicitant trop exclusivement son train avant : le toro y exprime sa force mais s’y épuise.
>>> Dans l’action de romanear, le toro « pèse » le cheval, le suspend au bout de ses cornes « en mettant les reins », cherchant à occasionner sa chute, puis, si chute il y a, à l’encorner (le tuer !) au sol. Romanear prolonge naturellement une charge franche, une poussée puissante et d’une grande fixité : le toro y exprime sa bravoure de façon éclatante. Quand cela se produit, il n’y a rien d’autre à faire qu’à ouvrir en grand ses mirettes et à profiter de l’instant ; c’est si rare…
>>> Où l’on peut voir des picadors allonger la pique et piquer le toro (bien) avant la rencontre ; d’autres l’abaisser rapidement (comme une « tapette à mouches » !) et piquer peu de temps avant l’impact. Il est possible que cette dernière manière soit de préférence utilisée en présence de toros particulièrement « fougueux » ; à moins qu’il ne s’agisse d’une habitude comme une autre…

 Présente l’« arrondi » épaule/poitrail de sa monture au toro et lutte en portant son poids sur la pique tout en ayant à l’esprit, à défaut que cela soit possible dans les faits, de protéger son cheval (même « caparaçonné ») contre la corne en faisant SEULEMENT « action de contenir » la charge du toro.

 Résiste au mieux à la charge en tentant de conserver, grâce à sa main gauche, l’angle « cheval-toro » acquis lors de la rencontre et, lorsque le point de rupture est imminent, donne la sortie au toro par-devant en dégageant sa monture vers la gauche, le torero se tenant prêt à le recevoir dans sa cape — c’est pas beau ça ?

 Ne rectifie sa pique (a fortiori pour enlever celle portée dans le morrillo et la replacer en arrière et/ou dans un impact précédent !), ni ne la vrille ni ne « pompe » avec (effet « marteau-piqueur »).
>>> La pique tombant en arrière (puyazo trasero), on pourrait imaginer — soyons fous ! — que le quite intervienne immédiatement afin que le toro puisse être remis en suerte — pour ce faire le picador ôtera sa pique quand le torero sera prêt à recevoir le toro dans sa cape.
>>> Soit dit en passant, et non parce que la vue du sang est rebutante, on rejettera avec force l’idée curieuse selon laquelle un toro « correctement » piqué devrait en avoir jusqu’aux sabots — ceci dit, la perte de sang serait aussi « négligeable » que préventive d’une éventuelle congestion (augmentation subite de la quantité de sang contenue dans les vaisseaux d’un organe ou d’une partie d’organe).

 Ne prenne pas appui contre la barrière (le picador étant invité à s’avancer jusqu’à la raie concentrique afin, justement, de s’en éloigner) et ne « propose » pas au toro son lourd étrier en fer qui sera protégé par une enveloppe de caoutchouc — c’est la botte du picador que nous entendrons désormais cogner dans l’étrier et non plus le front du toro !
>>> Un picador en appui contre la barrière est potentiellement en danger, car, coincé, il se trouve dans l’impossibilité de manœuvrer sa monture.

 Ne réalise pas la carioca (action totalement déloyale et irrespectueuse du toro, voir « Premier tiers (II) »), celle-ci étant, dans tous les cas, formellement interdite sous peine de sanction. Si le toro présente des signes manifestes de mansedumbre, le picador, éventuellement après accord de la présidence, serait autorisé à franchir la raie concentrique (et/ou à la contourner, celle-ci ne mesurant qu’une quinzaine de mètres) et à « aller chercher » le toro, qui sera piqué autant de fois que nécessaire — si cela doit prendre vingt minutes, cela prendra vingt minutes et certains patienteront comme d’autres s’ennuient ferme lors d’interminables et soporifiques troisième tiers.
>>> Toro piqué « de côté » et, s’il y a lieu, près du toril — le point de retraite « naturel » de tout toro étant le centre de l’arène, point le plus éloigné de la barrière.

Il serait souhaitable, pour…
apprécier le travail des chevaux :

 Que ceux-ci soient correctement dressés et montés par des picadors sachant les manœuvrer.

 N’aient pas les yeux bandés [ou seulement le droit, ou portent une/des œillère/s (?!), mais qu’ils ne soient pas rendus « aveugles »] et les oreilles « bourrées » et/ou scotchées.
>>> Au diable la « picaresque » ! si nous avons à faire à des chevaux spécialistes de la suerte de vara, donc spécialement entraînés et connaissant parfaitement l’environnement dans lequel ils évoluent. On peut aussi se demander si la « picaresque » n’augmenterait pas le niveau de stress de l’équidé…

 Portent un caparaçon (vous savez le gros matelas) le plus souple et léger possible afin que le toro puisse avoir la sensation d’atteindre le cheval dans sa chair (c’est bon pour le « moral »), tout en étant beaucoup plus seyant (c’est bon pour la mobilité) et donc bien moins volumineux.
>>> Et si l’on se mettait « sérieusement » à penser AUTANT au toro qu’au cheval lors de la conception du peto ? D’aucuns me rétorqueront que c’est déjà le cas…

 Soient plus légers (rien de tel qu’un mur pour « casser » un toro, tant physiquement que « moralement »), plus toniques (rien de tel qu’un bloc de marbre peu maniable pour augmenter le risque de chute) et moins hauts (un gage de stabilité !) qu’ils semblent ne l’être actuellement, en présentant notamment un type « trait » moins marqué…


Je vous épargne une conclusion bidon (c’est déjà bien assez long) et j’en profite pour remercier tous les aficionados ayant d’une manière ou d’une autre alimenté ces lignes. Si de grosses âneries ont été écrites, ayez l’amabilité de (me) le faire remarquer… FIN


Images Notez la piña sur le castoreño qui semble être une vraie pomme de pin et non une en tissu. Ignacio Ugarte (Saint-Sébastien, 1858 – 1914) / Picador herido, ? / Huile sur toile, 97 x 67 cm © artnet J’avais pourtant juré de ne pas illustrer mon propos par une photo. « Piquer « proprement » ? Mais oui, mais oui, c’est possible et ça peut être beau. » Madrid, le 9 juin 1994. Toros de Miura pour la confirmation d’alternative de Domingo Valderrama reçue des mains de José Antonio Campuzano en présence d’El Fundi © François Bruschet in Joël Bartolotti & Pierre Dupuy, TOROS. Regards sur la tauromachie, La Renaissance du livre, 1999, p. 137. Le texte est la légende d’une photo de J.-F. Grousset in Claude Popelin, La Tauromachie, Seuil, 1994, p. 220 Castoreño y estribo © Manon Allez, et si on allait s’en prendre une petite, histoire de se consoler un peu d’avoir à supporter tant de médiocrité — la plupart du temps sans rouspéter sinon vous ne feriez que ça. À la vôtre ! The Picador © Salle de concerts à Iowa City (États-Unis).

25 mai 2009

Céret, 13 juillet 1996


En farfouillant dans mon stock de négatifs je redécouvre ce cliché pris à Céret en juillet 1996. C’était le jour de l’alternative de Rafael González, qui pour l'occasion s’était envoyé une très sérieuse corrida portugaise de Quinta da Foz. C’est Luis Francisco Esplá qui avait été le parrain de Rafa, et Pepín Liria le témoin. Le maestro alicantin, montera visée sur la tête, avait conclu la cérémonie par une virile poignée de main, en lieu et place des très contemporaines embrassades. Virile l’alternative, et très viril le corridón de Monsieur Fernando Palha. Je ne sais pas vous, mais je trouve que sur cette photographie le maestro Esplá a des airs de Joselito 'El Gallo'. La coiffure peut-être. Depuis ce 13 juillet 1996, Esplá a pris quelques rides. Nous aussi sans doute. Du coup, j’ai failli débuter, avec ce cliché, une nouvelle série intitulée « vieilles photos ». Mais à la réflexion, quatorze ans ce n’est pas si vieux que cela. Depuis, Rafa est devenu banderillero, Pepín a tiré sa révérence, et le maestro Esplá va clôturer en 2009 une très respectable trajectoire. Quatorze ans ce n’est pas si vieux, mais le temps a fait son oeuvre. On clique sur la photo, c'est bien mieux.

24 mai 2009

Alès, Palha


Pour ceux qui ont vu celle de Sevilla, cette corrida de Palha alésienne lui fut supérieure, ce qui ne semble pas non plus l’exploit du siècle eu égard à la catastrophique sortie andalouse.
Pour qui a vu le corridón de la San Isidro 2008 cet encierro-là est évidemment une déception.
Ce n’est pas qu’elle ait été mauvaise cette corrida, plusieurs toros offrant d’évidentes possibilités de triomphe pour quelqu’un en mesure d’en profiter. Une corrida de Palha commerciale en quelque sorte. Cette course, sans être faible, manqua de puissance et d’alegría pour se suffire à elle-même et ne pas avoir besoin d’être mise en évidence par les toreros. Elle a en outre souffert de la comparaison avec l’impressionnant volume et caractère des aguirres de la veille. Sans éclat particulier au cheval elle fut néanmoins sérieusement châtiée. De vrais toros quoi.
Les toreros aujourd’hui ont été... pires que la veille. Ni hablar. Simplement souligner dans cette après-midi ennuyeuse le sixième toro, très supérieur à ses frères, fortement piqué, très fortement piqué, et mobile ensuite quoique pas évident, remuant constamment du chef. Un toro de caractère avec des qualités, des défauts, et l’émotion de la caste. Mais il était un peu tard pour nous redonner moral et entrain. Une autre fois.

Le campo aux mille drôles


Le séjour touchait à sa fin. On avait bouffé du toro à toutes les sauces, au campo ou dans le ruedo, de pas d’heure le matin à pas d’heure le soir. Les filles, qui jusque-là avaient préféré les tentations de la calle Sierpes, se désolaient en silence, parce qu'elles comprenaient bien l'importance de cette escale sévillane de début de temporada. Il faisait beau, il faisait chaud et l’on avait donc décidé de faire partager un peu de cette si singulière passion du campo, à nos chères et tendres, qui ne rechignaient finalement pas devant la proposition de visiter un élevage de bravos andalous, du moment que ce n’était pas loin, que c’était joli, de préférence équipé de toilettes, qu’on pouvait s'y dorer la couenne et y profiter du soleil et que patati et patata... semblant offrir toutes garanties, on partit donc chez Guadaira.
Au premier abord, on n’y voyait pas d’intérêt capital, si ce n’est celui du plaisir rétinien. Certes, ces toros-là, essentiellement sortis en novillada, affichaient une bonne forme dans les ruedos les plus significatifs de la planète taurine, mais nous autres, couillons que nous sommes, on s’attache parfois trop à quelques idées parvenues et un peu faciles d’apparence : ces Guadaira sont des Domecq, et ça raisonnait dans nos tronches comme si le CAC40 avait pris du plomb dans l'aile pendant la nuit. En gros, ça nous touchait de loin, cette affaire-là. Mais bon, why not ? Et puis, on avait promis aux gonzesses, alors...

Du coté du Río Guadaira, le campo a de la gueule. Tu quittes l’urbaine folie sévillane et à quelques stations Repsol de là, les champs sont dorés jusqu’à l’horizon, quand ils ne sont pas entachés de quelques rangées d’oliviers, d’eucaliptus ou de parquets de fleurs parmes. Le ciel est bleu, pardi : la carte postale pour baisouilleurs transis, l’Andalousie comme tu la rêves. Au milieu, la « Dehesa del Conde », elle aussi, superbe. De part et d’autres, les toros.
Ici, la vie est paisible. Il y a le vent, le poids du soleil, la mouche sur ton front qui manque de prendre ta main sur la gueule à chaque instant, le vol des cigognes et l’amour du toro. On ne parle pas beaucoup, à la « Dehesa del Conde », mais on t'ouvre le portail comme on t'ouvre les bras : chaleureusement. T'aimes les toros, amigo, alors t'es un frangin...
Le mayoral de la maison est un type charmant, la tronche du brave mec gentil, qui pue la « Passion » à plein pif. As-tu déjà vu un gars plus amoureux de son métier, plus amoureux de sa terre, plus amoureux de ses bestiaux... plus amoureux de sa vie ? Suis-le, il fera le reste. Rien que pour toi, il te débusquerait un tigre du Bengale derrière chacun de ces buissons, tellement il est sûr que tu ne t'es pointé chez lui que pour y voir ce que tu n'attendais pas. Et il avait raison, le "con" !
Dans les cercados vastes comme des champs à pétrole texans, on observe les joyaux de Guadaira, aux pintas domecquisantes , du jabonero au negro absoluto. C'est paisible. Ombre et poussière. Des novillos, beaucoup, puis quelques sementales, dont un, là... tu le vois pas ? Mais si, penche-toi, regarde bien, là, juste là, dans le fourré, planqué comme un croco dans la mangrove du North Tropical Queensland... T'inquiète pas, il va te le sortir de là, notre mayoral ! 3 caillasses que je te balance par le museau, et té ! Tu l'as là, ton tigre du Bengale qui reprend le large du cercado. Fallait le voir, le bestiau, dans les branchages. Et puis il fallait l’en sortir aussi... Lui , il te l’a fait, rien que pour toi, sans que tu lui demandes rien, pour 0 centime, même.
Je te le dis, ne résiste pas, laisse-toi juste emporter. Il te révélera les secrets de la tienta al campo abierto comme on la pratique ici... du coup, le 4x4 à bloc, comme si on jouait a l’accoso y derribo, on regardait ce grand enfant qui s’imaginait sans doute lui-même toro, galopant comme un con dans les hautes herbes jusqu'à y croiser le fer avec le cavalier à la longue lance. Là-bas, t'aurais rêvé si t'avais vu ce troupeau d’erales transporté dans un nuage de poussière, mélancolique, comme une caravane touareg qui déchire le désert de sa lame de poussière. La photo est belle, et il le sait. Ensuite, il s’arrêtera au milieu d’un champ mauve et te fera remarquer la cigogne plantée, là-bas, tout au fond, et que t'aurais pas pu voir s’il ne l’avait pas trahie pour toi. Un régal. Puis la confrérie paisible des cabestros, surpris au détour d’un bosquet joliment fleuri, et dont les cornes « festives » émergent à peine.
On regardait ses yeux s’ouvrir comme ceux d’un drôle devant un sapin de Noël . Ce mec jubilait autant que nous, et semblait découvrir son campo à chacun de ses battements de cils. Tout l’émerveillait. Sûr qu'il prenait son pieds, le type !
« Cherry on the cake », il nous révélait enfin LA novillada qu’il offrait à Las Ventas. Du vrai Toro de Madrid, con trapío, sérieux et solide. Un imposant jabonero, un impressionant colorado, un tío negro, on scrutait avec précaution le guarismo de tous ces magnifiques spécimens et nous finissions par admettre qu’il s’agissait bien là d’une novillada. Terrifiant !
On savait que cette ganadería avait été Buendía, un temps, et on savait aussi que, depuis dix ans, elle s’était domecquisée, et plus particulièrement « jandillisée », ça nous piquait un peu mais bon, on se consolait en se disant que, après tout, Fuente Ymbro était Jandilla aussi, et que ma foi, avec un peu de bol... Et puis, en fait, on s'en foutait. On était bien, là, avec rien pour te gâcher la vue, rien pour te gâcher le vie. Tudo bom.

Quand on revint sur terre, que le charme s’apprêtait à rompre et que nous réalisions enfin le précieux moment campero que nous venions de vivre en silence et les yeux grands ouverts pour ne rien manquer du spectacle, trois énormes et affreux bus à tête d'insecte stagnaient à l’entrée de la finca comme pour nous rappeler que la fête était finie. On entendait des cris de mômes, surréalistes dans pareil lieu, et l’on découvrit avec étonnement et non sans ravissement, que les gamins de l’école du bled, camarades de la nièce du ganadero, venaient également se défaire du stress de leur vie de nains à la « Dehesa del Conde »... C’était bien la preuve que la vie règne en art dans cet endroit.
Notre ami mayoral, lui, repartait « tranquilot » à dos de canasson s’émerveiller davantage de ce campo qu’il découvrait à chaque battement d’aile des cigognes. Dieu sait où il s’en allait... mais si le campo ressemble à ceux qui le font, celui de Guadaira est un oasis de silence émouvant et de tendre passion. Même les filles le disent...
El Batacazo

>>> Retrouvez sur le site, rubrique CAMPOS, la galerie de la camada de Guadaira.

Photographies Chez Guadaira © El Batacazo

Alès, Dolores Aguirre


La corrida de Dolores Aguirre lidiée hier à Alès s’est avérée irrémédiablement mansa, puissante, parfois inapprochable, parfois propice.
Jamais ennuyeuse cette course n’a cependant pas été aussi passionnante que celle de l’an passé. La mansedumbre de la première partie peut-être par trop criante et la caste pas aussi affirmée qu’en 2008 en sont probablement les causes principales.
Par contre, la seconde partie de la course a offert trois toracos mansos également mais importants, absolument passionnants, qu’il fallait lidier et toréer. Il y avait matière, énormément de matière. Et c’est à cet instant qu'il importe d'évoquer la faute à des matadors absolument pas à la hauteur des possibilités de certains toros. Savalli était très attendu après son succès arlésien. Il a été aujourd’hui rattrapé par la dure et âpre réalité des pupilles de la banquière, notamment son second qui ne demandait qu’à s’élancer de loin et qui le fit sécher sans palliatif. Sánchez Vara se confirme dans un toreo extrêmement marginal, trop pour émouvoir. Rafaelillo dans son style habituel est celui qui s’en est le moins mal sorti malgré de nombreux enganchones. Pas de quoi non plus hisser pavillon. Mais au moins nous avons vu des toros.

>>> Une galerie est accessible depuis la rubrique RUEDOS du site.

23 mai 2009

Esto no debería estar ahí


Va por ti Manon. No creo que esto tampoco necesita muchos comentarios. ¡Esto no debería estar ahí!

22 mai 2009

Premier tiers (II)


Suite de « Premier tiers (I) ».

Il serait souhaitable, pour…
révéler, juger la bravoure (instinct offensif et agressif) du toro, ainsi que sa force et sa puissance,
 Qu’un seul picador soit présent en piste et se tienne en face du toril — le picador, cet intrus qui n’était pas là tout à l’heure, ce provocateur qui agresse et « fait mal » (comprenez l’expression dans le sens qu’il vous plaira), cette menace qu’il faut dégommer et bouter hors du cercle.
>>> Ce combat que les hommes proposent au toro, celui-ci l'expérimente, y « prend goût » (ou non) lors du premier tiers.

 Qu’il soit, dans l’idéal, présenté au moins 3 fois au cheval — vous connaissez sans doute le dicton qui vaut ce qu’il vaut et qui dit qu’« à la 1re pique vont tous les toros, à la seconde les braves et les idiots, et à la 3e seulement les braves ».
>>> En aucun cas la présidence (de préférence indépendante de l’organisation et stable sur la durée d’une féria), dont le rôle est ici capital, ne devrait accepter une et une seule pique. En rencontrant les cuadrillas avant la course, le président prendra soin de leur signifier clairement qu’elle ne changera pas le tercio après la re pique — les règlements en imposant d’ailleurs deux — malgré la durée exagérée de celle-ci et/ou la demande insistante du matador.

 Qu’il soit arrêté et chaque fois placé à une distance plus importante (5 ou 6-10 m, 10-15 puis 15-20, etc.). L’unique raie concentrique invitant le picador à s’avancer jusqu’à elle serait tracée à 6 ou 7 mètres de la barrière, peu importe, en face du toril ; serait longue d’une quinzaine de mètres et, s’il devait quand même y en avoir une seconde, celle-ci, de même longueur, serait située à 5 ou 6 mètres de la 1re ;
>>> Encore qu’il vaut mieux un toro non arrêté (au picador de prendre le relais et d’attirer l'attention de la voix et du geste) ayant reçu un faible nombre de capotazos, qu’un qui le serait après de multiples essais.
>>> Tracer une seule et unique raie peut s’avérer intéressant dans la mesure où la présence de la seconde, à la distance aberrante de seulement 3 mètres de la première (comment peut-on dès lors juger un quelconque « instinct offensif » ?), a pour effet regrettable de voir trop fréquemment les toreros être tentés de venir placer les toros à proximité d’elle, comme si cette seconde raie les attirait. De plus, qu’il n’y en ait qu’une laisserait davantage de liberté aux matadors et à leurs picadors qui, par la même, se sentiraient certainement un peu moins « dirigés ».

 Que la première pique soit brève — quite rapide avec actions simultanées du picador « montrant » la sortie au toro et du torero tentant de l’attirer dans sa cape — et les suivantes dosées : seul moyen et d’évaluer la bravoure sans hypothéquer de nouvelles rencontres et de redécouvrir la variété du toreo de cape qui ne se limite pas à la chicuelina.
>>> Ne pas se laisser berner par ceux qui estiment que depuis l’apparition du caparaçon, il n'est plus raisonnable d'escompter juger la bravoure du toro lors du tercio de varas… Il serait plus juste d’imputer la dérive actuelle de ce tercio à un désintérêt croissant des aficionados pour le toro — des aficionados, et non d’un soi-disant « grand public » !
>>> Si d’aventure un toro venait à manifester des signes de faiblesse (affalement sous le cheval, génuflexions répétées) au sortir de cette (courte) 1re pique, nous pourrions solliciter son remplacement auprès de la présidence, celle-ci se contentant en général d’un changement de tercio. On veillera tout de même à prendre en compte la catégorie de l’arène : Nîmes, par exemple, n’est pas Madrid ! Madrid, ses gros moyens et sa colonie de sobreros.
>>> C’est quoi une pique dosée ? Euh, une pique montée et utilisée à l’endroit ; une pique donnée « de face » sans « servir l’étrier » et placée dans le morrillo ; une pique ni pompée ni vrillée, ni d’une durée exagérée, donc sans carioca mais avec des quites résolument efficaces (torero placé afin de pouvoir être vu du toro et picador qui enlève la pique au lieu de la redresser en laissant le fer en place !). Vous m’avez compris, la probabilité de voir une pique dosée est à peu près aussi forte que celle de voir mes cheveux repousser !
>>> Carioca en se plaçant derrière le toro : action de fermer, d’empêcher la sortie naturelle du toro (vers la droite, en fait vers le centre) en faisant pivoter le cheval vers la droite (en direction du centre de l’arène). Le cheval se retrouvant alors positionné entre le toril et le toro (situé entre la barrière et le cheval), provoque chez ce dernier une débauche d’énergie néfaste pour la suite de son combat. Ceci dit, ce scénario devenant par trop voyant, désormais la carioca débute en sens inverse ; le picador positionne son cheval à la perpendiculaire (voire plus, les axes du cheval et du toro formant parfois un angle de plus de 90° !) de la course du toro et laisse « sciemment » celui-ci percuter avec violence l’épaule droite de sa monture qui amorce ainsi, aussi naturellement que soudainement, une rotation vers la gauche en direction de la barrière… Le cheval finissant par se situer entre le toril et le toro ; le tour est joué.

Il serait souhaitable, pour…
régler son port de tête en l’abaissant et en diminuant la mobilité de l’ensemble « tête-encolure », que le fer soit porté DANS le morrillo (siège des muscles extenseurs du cou) et nulle part ailleurs afin de ne pas créer de dégâts dans la région de la croix (où est portée l’estocade !) et de ne pas risquer d’entamer des muscles locomoteurs (aïe !), des vertèbres ou des côtes (ouille !), voire atteindre des organes vitaux tels que les poumons (!!!).
>>> Fer : soit la pyramide en acier (aux arêtes tranchantes) et elle seule ; encore qu’il faudrait pour ce faire repenser le dessin de la pique et revoir les dimensions du fer à la hausse puisque « les cordes » (censées être un butoir !) ne pénétreraient plus ; vu qu’un butoir efficace placé juste après l’acier permettrait au seul fer de pénétrer. Fer dont la taille ne serait pas aussi importante que celle du couple actuel « pyramide + cordes » mesurant un peu plus de 8 cm ! (Cf. « La bonne blague ».)
>>> On peut lire çà et là que piquer dans le morrillo n’est pas possible (ah bon ? je l’ai pourtant déjà vu !), que la région idéale serait la terminaison du morrillo aux environs du garrot — je veux bien, moi, mais pourquoi demander aux picadors de viser une cible de 5 à 10 cm de diamètre alors qu’ils éprouvent toutes les peines du monde à en atteindre une dix fois plus importante ?! Peut-être aussi qu’une pyramide avec des arêtes substantiellement agrandies permettrait aux lanciers (les inciteraient à ?) d’« accrocher » plus sûrement le morrillo…

J’ouvre une parenthèse pour aborder une question…de principe. Au prétexte que la pique actuelle a permis (et permet encore) des premiers tiers de haute tenue ayant nullement empêchés des toros puissants et d’une grande bravoure de poursuivre valeureusement leur combat (c’est un fait incontestable !), le dessin de la pique ne mériterait pas d’être revu et corrigé ! C’est un peu court... On peut, on a même tout à fait le droit de trouver farfelu, sinon absurde, qu’un matériau tel que de la corde puisse pénétrer dans le corps du toro — et ce depuis un sacré bout de temps sans que cela n’ait déclenché beaucoup de réactions dans les rangs des aficionados. En admettant, enfin, que la pique soit non seulement un instrument de « mesure de la bravoure », mais également un instrument de défense (une arme en quelque sorte), il est dans ce cas difficile de bien voir en quoi la corde aurait une quelconque « utilité ». Je referme la parenthèse.


Prochainement, la fin.


Images Excusez cet a priori coupable mais quelque chose me dit que convaincre ce vieux grognard de Dioniso Grilo ne sera pas chose aisée... © Manon El Picador, aquarelle © Santiago Martínez Delgado (Bogotá 1906 – Hacienda el Molino 1954) Pablo Gargallo (Maella, Zaragoza 1881 – Reus, Tarragona 1934) / Picador, 1928 / Fer forgé & bois, 24,7 x 34,2 x 20 cm © MoMA New York

21 mai 2009

Pocas palabras


Nîmes, jeudi 21 mai 2009. Sur le coup des 21 heures, Jaime de Pablo Romero et son épouse Menchu regagnent la cour où les attendent les membres du club qui porte leur nom. Jaime vient de visiter le musée, inauguré dans l’intimité avant une présentation plus officielle et sans doute plus bousculée. Jaime prend le micro et d’une voix éraillée, rauque mais sure, profonde comme le poitrail de ses toros qu’il a tant aimé mais qu’il n’a pu sauver prononce ces quelques mots : « Pocas palabras, je ne vais pas m’étendre, simplement vous dire que Menchu et moi-même, après avoir visité ce musée, sommes confirmés dans la décision qui a été la nôtre de vous confier ce qu’il reste du patrimoine de l’élevage. Merci ».

Le dernier propriétaire de la devise mythique est visiblement ému. Il en oublie de donner la parole à Manolo Muñoz, son fidèle mayoral. Il a fait lui aussi le déplacement pour l’occasion et a quelque chose à dire : « Voilà, je voulais moi aussi apporter ma contribution à ce musée. Alors je vous confie ceci. Je vous ai apporté un fer, le fer historique de l’élevage, le fer avec lequel ma famille a marqué les toros de Pablo Romero depuis plus de cinquante ans. Celui-là, ils ne l’auront pas. »

Pocas palabras, pas besoin d’en dire plus, juste imaginer l’émotion.

20 mai 2009

La vieille dame, le portail et les petites filles


Aux filles, maintenant que le décor est planté...

Le lendemain, elle était assise devant la vitrine de la boutique, sur le trottoir de droite où nous marchions la veille. On l’avait mise là. Elle prenait l’air velouté des fins de journées sévillanes alanguies par la tiédeur d’un souffle baladé depuis le fond de la rue Castilla. Rien n’avait changé depuis hier.
— T’as vu. C’est la vieille dame d’hier. Celle de la boutique où on a acheté ma robe. T’as vu, c’est la vieille dame. On lui dit bonjour tu crois ?
J’avais prévenu. On s’arrête rapidement devant le portail et puis on s’en va. Des toros, ici, on n’en verra pas. Rien n’avait changé ici depuis hier. En arrivant par Lora del Río (en direction de La Campana), une fois dépassés les grands cercados pointillés d’un mauve bientôt à l’agonie, l’aficionado et les autres savent qu’il y a là, quelque part à leur droite, ce portail vu, revu, partout, depuis toujours. Il pourrait passer inaperçu, comme dévoré par le décor. Il ne devient lui que de face, quand le moteur est arrêté, que le bruit s’escapade et que le silence lointain du grondement des toros oppresse ce paysage sans verticalité. Elles se sont plantées crânement face à lui. Elles qui découvraient. Elles l’ont regardé comme ça quelques instants, le cou cassé, comme si leurs billes rondes d’enfants roulaient le long des étages de l’Empire State building. Comme si cette course avait été subitement stoppée par cinq lettres évadées de leur préhistoire, un M, un I, un U, un R et un A. MIURA.
Nous marchions sur le trottoir de droite. Elle aurait pu passer inaperçue, comme dévorée par le décor. Elle-même semblait en faire partie, en être une pièce de plus. Elle lui appartenait. Sans lui, elle n’était qu’une vielle dame assise là à regarder défiler les clients sans mot dire. Sans elle, ce décor n’était qu’une boutique de plus dans laquelle s’entassait jusqu’au placard l’exotisme parfois kitsch des parures flamencas. C’est lui qui leur a dit d’entrer. De toute façon, nous devions acheter une robe. C’était dit, c’était comme ça, c’était ici. En entrant, c’était lui, le décor, qui les guidait mais elles ne purent pas ne pas voir la vieille dame assise là qui les observait la regarder du coin de l’œil. Comme cinq lettres avaient stoppé la course de leurs billes rondes d’enfants, mille rides s’asseyaient maintenant entre elles et lui qui leur tendait les bras.
L’instant d’avant, il traversait un parterre de A qui dévalaient les marches des corrales de la placita. Comme si cinq lettres n’avaient pas suffi. De peur qu’un jour ne reste de tout cela que cet escalier et ces allées grisâtres marquées au fer. Maintenant, à la manière d’un singe savant, il posait sa truffe de rat au-dessus de bouts d’oreilles salies de sable jaune et séchées par le temps. Les petites filles suivaient son manège, l’abandonnaient un court instant pour s’imaginer au mieux les scènes qui se jouaient dans l’enfermement de ces quatre murs rouges, revenaient à lui. Elles n’étaient pas impressionnées. Leur regard, du haut de l’escalier, suivait les lignes de fuite qui filaient droit sur les toros, derrière, vers le portail. A leurs yeux, tout était beauté ; une beauté inédite pour elles. Les couleurs qui peignaient leur imaginaire, les A qu’elles couvraient de leurs pieds et même les restes de cornes coupées et oubliées à l’ombre d’un burladero. A l’école, elles raconteraient que c’étaient des cornes de vaches de COMBAT !
— On en verra quand des Miura ?
La robe, c’était prévu, était achetée.
— Elle est trop belle. Tu sais, c’est celle-là que je voulais vraiment. La rouge avec des pois blancs. Et en plus, t’as vu, le monsieur, il nous a donné des castagnettes !"
Les petites filles avaient détaillé tous les modèles, jusqu’aux chaussures. Elles connaissaient par cœur le décor maintenant. En quittant la boutique, pourtant, c’est le visage figé de la vieille dame assise qui les a poursuivies à travers les reflets de la vitrine, malgré les tissus et les talons hauts, malgré les pois blancs sur une robe rouge.
— C’était qui cette vieille dame ?
Le lendemain, elle était assise devant la vitrine de la boutique, sur le trottoir de droite où nous marchions la veille. On l’avait mise là. Rien n’avait changé depuis hier.
Elle donnait l’impression d’avoir toujours été là. Assise et immobile. Une vieille dame posée là et qui avait regardé changer le monde du bas de sa chaise, au fond d’une boutique, calle Castilla. Et Miura ? Une autre vieille dame ridée qui aurait oublié au long du siècle que le monde se bouleversait.
Au fond, pour dire vrai, nous savons que tout cela est faux, parfaitement faux, mensonger, que cette vieille dame a été jeune dans une autre Séville, que Miura a changé, comme les autres et, malgré tout ce qui est écrit sur le mystère, la légende noire et toutes ces foutaises hagiographiques de magasins de souvenirs.
Nous savons que tout cela est faux mais il reste le nom, nos souvenirs et cet infime espoir. Et l’envie simple de transmettre aux petites filles une part de notre enfance, un pan de décor de nos jeunesses perdues.

>>> Retrouvez sur le site, rubrique CAMPOS, la galerie consacrée à Miura.

Photographie La vieille dame de la calle Castilla © Laurent Larrieu/Camposyruedos.com

Quand Alès en pinçait pour les bêtes du curé


Vous n’êtes pas sans savoir que, samedi prochain, les toros de Dolores Aguirre Ybarra fouleront le sable alésien après l’avoir honoré en 2008. En vingt ans — 1989 marquant la réouverture sans interruption des arènes du Tempéras —, le nombre d’élevages programmés deux années consécutives en corrida1 s’élève à cinq : Valverde, bien sûr, en 1990 & 1991 ainsi qu’en 1994 & 1995, Palha en 2003 & 2004, Tardieu Frères en 2004 & 2005, Héritiers de Christophe Yonnet en 2007 & 2008 et Dolores Aguirre Ybarra en 2008 & 2009.
En revanche, pas une seule ganadería n’a réussi le tour de force de faire combattre ses toros trois ans d’affilée — à moins que ceux de Dolores rééditent la course de leurs grands frères —, pas même celle de Valverde, emblématique dans les Cévennes, qui n'aura envoyé QUE quarante et quelques toros et novillos2 pour bien rappeler à ceux qui avaient oublié ce que poder et genio veulent dire...

Quand, en 1998, Jacques Durand écrit son article, le curé s’en est allé quatre ans auparavant mais son esprit plane encore un peu au-dessus des cercados — la flamme brillant assez pour permettre aux héritiers de voir où ils mettent les pieds. Aujourd’hui, du côté d'Horcajo Medianero, le cierge ne semble éclairer qu’un morceau de table et un journal froissé, des lunettes rafistolées, un cendrier froid ; qu’un pan de mur blanchi à la chaux supportant non sans mal le portrait jauni de Don Cesareo au campo fumant un cigare sur fond de « toros néolithiques aux cornes démesurées. »3

1 En novillada, Granier Frères en 1993 & 1994.
2 Six corridas en 1990, 1991, 1994, 1995, 1998 & 2002 ; une novillada en 1999 ; deux toros en corrida concours en 1992 & 1996.
3 Citation tirée de la légende de la photo illustrant le texte de Jacques Durand.

En plus
Sur le site de la Feria 2008, deux historiques : celui (expéditif) des arènes et celui (approximatif) des carteles... Approximatif car, comme le fait justement remarquer Florent dans son commentaire, ce sont les novillos de Quinta da Foz (Fernando Palha), et non les toros de Hnos. Frías, qui ouvraient le cycle en 1998.
Pour le souvenir, voici les noms des hommes — une pensée pour José Pedro — qui ont affronté les toros de Valverde à Alès : Dimanche 13 mai 1990 - Paco Alcalde, José Luis Galloso et José Antonio Campuzano /// Dimanche 9 mai 1991 - Richard Milian et El Fundi /// Dimanche 15 mai 1994 - José Manrique, El Fundi et Domingo Valderrama /// Dimanche 28 mai 1995 - José Antonio Campuzano, Richard Milian et Domingo Valderrama /// Dimanche 24 mai 1998 - El Fundi, Stéphane Fernández Meca et Ruiz Manuel /// Dimanche 12 mai 2002 - El Fundi, José Ignacio Ramos et José Antonio Iniesta.

Image L’article de Jacques Durand, illustré par une photo de Michel Volle, a paru dans © Libération des 23 & 24 mai 1998. Pour passer un excellent moment de lecture, on clique sur l’image.

19 mai 2009

Chamón Ortega, Cenicientos


Ce n’est pas une photographie sans paroles, sans nom, ou anonyme.

C’est à l’inverse un émouvant souvenir. Chamón Ortega, Cenicientos, une novillada terrible, un vieux négatif argentique remonté du fond de mes archives.

Chamón Ortega n’a pas percé, n’est pas devenu une figure du toreo. Mais le souvenir de cette course, et ce vieux négatif, hantent souvent mes rêves d’aficionado.

Je me demande ce qu’est devenu Chamón Ortega.

Cartel de la novillada d'Orthez

La commission taurine d'Orthez a arrêté le cartel de la novillada piquée qui aura lieu dans la matinée du dimanche 26 juillet 2009. Les novillos d'Ángel Nieves García (Santa Coloma) seront combattus par les deux novilleros José María Arenas et Juan Carlos Rey.

De plus, le ganadero et la commission taurine ont décidé d'offrir au public le novillo sobrero prévu pour cette novillada (si celui-ci n'est pas sorti avant). Un jury composé d'aficionados membres de peñas orthéziennes et présidé par un aficionado "extérieur" aura la charge de désigner le novillero qui affrontera ce novillo.

18 mai 2009

Cárdeno chorreado


Occupé à rentrer des données pour un site ami, je suis tombé en arrêt sur un pelage, etc. Bon, n’allez pas vous imaginer non plus que je passe mon temps à vérifier, corriger ou compléter toutes les reseñas des toros combattus à Las Ventas.

À dire vrai, j’attendais avec quelque impatience la course de José Escolar lidiée ce samedi à Madrid afin de pouvoir éventuellement rencontrer un détail que j’avais déjà eu l’occasion de repérer sur le moreno silva de la « concours » madrilène du 30 avril dernier. D’après Adolfo Rodríguez Montesinos1, « quand l’accident chorreado apparaît sur un pelage cárdeno », il se présente sous la forme d’« un trait très fin et d’un noir intense qui tend à passer inaperçu à l’heure de réaliser la reseña. »

Et en effet, il convenait de regarder avec beaucoup d’attention certains toros d’Escolar pour distinguer sur leurs flancs ces traits propres aux chorreados en verdugo. Avec d’autant plus d’attention que les pelages cárdenos, « dans n’importe quel cas, absorbent la totalité des ondes lumineuses par l’intermédiaire de leurs poils noirs et les réfléchissent totalement par l’intermédiaire des blancs. » Ce qui, en fonction du lieu, du moment de la journée, de la position, que sais-je encore ?, peut modifier sensiblement l’aspect du pelage et rendre compliqué le choix entre le cárdeno oscuro, le cárdeno claro et le cárdeno tout court ; sans compter les éventuels accidents du type chorreado et autres particularités qui ne manquent pas. Du coup, n’ayant rien trouvé de franchement probant à vous montrer chez José Escolar, je me suis rabattu sur ‘Artesano’ de Moreno Silva qui, lui, les affichaient fièrement ces fameux traits fins d’un noir intense...

Alors pourquoi cet accident n’apparaît-il jamais dans la reseña des cárdenos ? Sans doute parce que si discret il ne mérite pas d’être mentionné ? Ou parce que « chorreado en verdugo » c’est comme « ça dépend » ?, ça dépasse... Si ça dépasse, on pourra éliminer « en verdugo », dans la mesure où l’autre chorreado, le morcillo (dégradation pigmentaire), concerne principalement les sujets negros et tostados. Le verdugo (« intensification pigmentaire de la couleur de base du pelage » — le noir chez les cárdenos) s’appliquant à tous les autres, hormis bien évidemment les toros noirs.

Non, en fait si, contrairement à ‘Bullanguero’2 et ‘Lagunero’ (photo du bas), ‘Artesano’ et certains toros d’Escolar n’étaient pas chorreados, c’est pour la simple et bonne raison que leurs fines bandes noires, si elles couvraient le ventre, ne partaient pas de l’épine dorsale3 — condition indispensable pour recevoir le qualificatif de chorreado, à en croire Adolfo. Ceci dit, pas plus ‘Lagunero’ que ‘Bullanguero’ n’avaient été en leur temps définis comme cárdeno chorreado...

1 Adolfo Rodríguez Montesinos, Pelajes y Encornaduras del Toro de Lidia, Co-édition Consejo General de Colegios Veterinarios de España (Madrid) et Ibercaja (Zaragoza), 1994. Toutes les citations entre guillemets en sont issues.
2 Le 6 septembre 2008, ‘Bullanguero’, novillo cárdeno chorreado (en verdugo) algo gargantillo bragado et axiblanco de Partido de Resina (© Juan Pelegrín).
3 Ou ne remontaient pas assez haut pour l’atteindre.

En plus Puisque je vous ai parlé de la course d'Escolar, j’en profite pour vous diriger vers l’iconoclaste et mystérieux ‘Sol y Moscas’ qui rend un hommage décalé des plus salutaire à ‘Cerillero’.

Images © Juan ‘Manon’ Pelegrín pour las-ventas.com / Le 19 avril dernier, ‘Artesano’, toro cárdeno oscuro meano caribello (?) de José Joaquín Moreno Silva Le 10 août 2008, ‘Lagunero’, toro cárdeno chorreado (en verdugo) bragado corrido de Araúz de Robles.

17 mai 2009

Dans la tête d'Hervé Galtier (II)


Vous le savez maintenant. La semaine il est prof de sport. Le week-end, il est susceptible de s’envoyer une paire de toros, comme moi je peux m’envoyer une demie douzaine de gambas de Roses, énormes.
Ce n’est pas rationnel. Réfléchissez trois minutes, et vous verrez que ce n’est pas rationnel.
Ce qui est étonnant chez Hervé Galtier, c’est cette manière de ne pas y toucher, cette façon de faire, simple, naturelle, sans chichi, et sans rouler des mécaniques.
Ce matin il s’est habillé, chez lui. Et lorsque Hélène, encore à moitié endormie, l’a aidé à ajuster une bretelle rebelle, il lui a lâché, sans même desserrer les dents : « faut être con pour aller tuer six toros»
C’est à peu près tout ce que vous saurez de l’intimité d’Hervé Galtier.
Dans la voiture qui nous conduit de Nîmes à Franquevaux je me sens obligé de lui demander s’il n’est pas trop stressé. Il répond que oui, que la pression est là. On a presque du mal à le croire, à le voir un peu perdu dans des pensées et un ailleurs qui n’appartiennent qu’à lui. L’ailleurs forcément mystérieux d’une sorte d’anti-héros.
Alors, nous parlons de tout, et de rien, mais surtout de campo, de vaches et de ces toros qu’il achetait les plus gros possible, pour revendre un maximum de viande. Les temps ont changé.

— Tu te souviens de Châteaurenard ?
— Si je me souviens… Oui bien sûr. C'était la première fois que je te voyais toréer.

Châteaurenard, c’était il y a 15 ou 20 ans. J’étais un photographe débutant, venu photographier un aficionado qui tuait des toros en privé m’avait-on dit. Nous étions loin des débuts de la photographie numérique. C’était l’époque où l’on grillait de la pellicule. Je ne connaissais pas Hervé et je ne savais pas où je mettais les pieds. Et puis j’ai vu débouler ce toraco, énorme, puissant. Et Hervé s’y est mis devant, sans appréhension apparente, avec déjà cette simplicité comme une évidence.

Aujourd’hui Hervé s’est envoyé ses six toros, sans hésitation, sans temps mort, sans chichi et sans rouler des mécaniques, naturellement. Un mystère je vous dis.
A la fin de cette encerrona Hervé a fait une vuelta. Ce n’était franchement pas déplacé, peut-être libératoire. Arrivé à notre hauteur il est venu donner un énorme abrazo à Edouard. Faut dire qu’ils avaient deux trois trucs à se chuchoter ces deux-là. Et c’était le moment.
Nos regards se sont trop furtivement croisés pour que j’aie simplement le temps de lui faire un clin d’œil et éventuellement lui lâcher le seul mot qui m’est alors venu à l’esprit : Respect.

>>> Une galerie est visible sur le site, rubrique PHOTOGRAPHIES.

La web no oficial de la feria taurina de Pamplona


Un temps, je l'ai cru mort. Un des seuls sites taurins consacré à la Feria de San Fermín, c'était un peu comme s'ils avaient collé un toit sur la plaza navarraise.
Mais non, il y a quelques semaines, presque par hasard, je suis tombé sur ce blog richement entretenu par Mariano Pascal, blog qui n'est autre que la résurrection modernisée de l'ancien Feria del Toro.

C'est une bonne nouvelle, une très bonne même. Longue vie à Feria del Toro, Feria de San Fermín et ¡Viva san Fermín! comme ils disent.

16 mai 2009

Herradero en Garcigalindo


La dehesa de Garcigalindo se encuentra situada al suroeste de la provincia de Salamanca. Es ya una zona alta, cercana a la sierra. Es también una zona de denso arbolado, encinar fundamentalmente.
En tiempos se criaba allí ganado bravo. La finca aún conserva la antigua plaza de tientas, de piedra; los corrales y los alares de granito. Eran dehesas de bravo. Algunas todavía lo crían: Terrones; Cortos de la Sierra, Herreros; Peña de Cabra… En otras, ya ha desaparecido: en Castroverde, en Olmedilla…
En la actualidad, en Garcigalindo se cría ganado morucho. Morucho y cruzado. Los actuales ganaderos, Juanjo y Pedro García, realizan el herradero de las novillas una vez al año. Hasta aquí, todo acostumbrado. Al herradero se invita a amigos y vecinos y se celebra como un rito anual. La marca de la casa, el guarismo, el número a fuego… Después vendrá la merienda. Con patatas de herradero, como su propio nombre indica. Que no son otra cosa que patatas meneadas, con panceta y pimentón. Nada menos. Luego, costillas y aguardiente; vino y perronillas. Lo normal.
El herradero en Garcigalindo se realiza al estilo tradicional. Es decir, a campo. Es decir, como en el siglo XIX. Las novillas se tienen que correr a pleno campo, derribarlas al lado de la lumbre en donde se calientan los hierros. Y allí, sujetas por los vaqueros, se le colocan los hierros al modo usual: la marca en la paletilla, el guarismo en el cuadril; el número debajo. O al revés. Eso ya varía según la costumbre de la casa.
Herrar a campo, aunque semeje lo contrario, supone un sufrimiento mucho menor por parte del animal que el herradero moderno, en el mueco. Se evita el stress de los cajones, el mueco y las cadenas. Pero es mucho más complicado. Se necesitan los garrochistas que derriben en el lugar adecuado; los caballos con el oficio y la doma suficientes – o sea, mucha -; los vaqueros que aparten las novillas en el rodeo; los que las sujeten en el suelo; los que mantengan la lumbre y los hierros... Y todo tiene un aire mucho más antiguo.
O sea, una función que es un ritual. Anual, como casi todos los ritos del campo. Compleja, como el saber tradicional. Es una ideología de la repetición, no de lo insólito.
Esta es la crónica de un herradero a campo. Es una crónica fotográfica. Las fotografías son de un excelente fotógrafo y aficionado, Antonio Novillo. Lo que ellas recojan nos exime del texto. Ya.
Vicente Llorca

Las fotos son de Antonio Novillo y se encuentran en nuestra sección PHOTOGRAPHIES de la Web.

15 mai 2009

Dernier inventaire avant archivage

Vous trouverez en rubrique RUEDOS du site une galerie consacrée aux piteuses courses d'El Torreón, El Ventorrillo et Jandilla, qui se sont déroulées à Séville à l'occasion de la dernière Feria de Abril. Que dire ? Que dire de plus que tout ce qui a déjà été dit au sujet de ces corridas, de la présentation des taureaux, de leurs cornes, de leur comportement, de l'indifférence quasi généralisée du public ? Rien. En tout cas, je laisse ce soin à d'autres et préfère tourner les yeux vers d'autres horizons. En attendant des jours meilleurs.

Il serait d'ailleurs incongru de conter ces non-courses par le menu, à l'heure où la San Isidro bat son plein, et je serais bien en peine de le faire : à part un goût amer et quelques moment du Juli, tout a disparu de ma mémoire.

C'est bien foutu, l'oubli, tout de même...

Azules y Corinto


Il avait écrit « Campo de la verdad » en hommage à José Tomás. Vicente Amigo remet ça avec « Azules y Corinto » en hommage à notre cher Manzanita.

14 mai 2009

Premier tiers (I)


« Premier tiers (I, II & III) » se donne pour ambition de constituer une espèce de synthèse foutraque et utopique (indigeste ?) sur ce fichu tercio qui vient coup sur coup, à Madrid et à Saragosse, de subir deux affronts de 1re catégorie, qui plus est lors de corridas concours ! À Madrid tout d’abord où le jury, en attribuant à Antonio Núñez ‘Alventus’ le prix au « meilleur picador » (sic), a donné un très mauvais signal à sa corporation ; songez seulement qu’il a eu les honneurs d’une « plaque commémorative » (re-sic) sur les murs de Las Ventas. À Saragosse ensuite où le jury — encore lui ! —, en primant le labeur de Juan Manuel Sangüesa, a fini d’assomer une (infime) partie de l’Afición…

« Premier tiers (I, II & III) » n’est ni le point critique d’un délire paranoïaque ni même l’expression d’une quelconque volonté de rétablir la vérité. La suerte de picar revêt aujourd’hui essentiellement deux formes. À quelques exceptions près, tous les toros sont cités de face mais, au moment de la rencontre, soit :
1. Les axes du cheval et du toro dessinent un T et le contact a lieu franchement sur le côté — le toro percutant trop fréquemment l’étrier qu’on lui sert !
2. Les axes du cheval et du toro forme(raie)nt grosso modo un angle de 20 à 45° et le contact a(urait) lieu entre l’étrier — que le toro ne ferait jamais « sonner » — et le poitrail (inclus).
La première devrait concerner uniquement les invalides, les mous et les grands mansos (en lieu et place de la sacro-sainte et inadmissible carioca) ; la seconde tous les autres. Permettez un constat : la première — la plus efficace pour qui veut « châtier » le toro — est pour ainsi dire systématiquement utilisée, la seconde pratiquement* jamais ! De là à prétendre que tous les toros actuels sont des invalides ou des mansos perdidos…

« Premier tiers (I, II & III) » ne saurait être lu sans avoir, préalablement ou en suivant, jeté les deux yeux aux contributions des camarades Thomas Thuriès et Yannick Olivier, qui, au travers de leurs textes respectifs « Premier tiers, la révolution en marche » et « Premier tiers, la révolution en marche (II) », ont abordé la montagne par une voie non moins périlleuse, mais probablement moins technique. Eux ont atteint le sommet quand j’en suis encore à démêler les nœuds des cordes !

« Premier tiers (I, II & III) », enfin, ne vous proposera aucune photographie pour illustrer son propos, et ce afin d’éviter toute polémique quant à la pertinence (ou non) de « faire parler les images ».

* Pratiquement, car pas plus tard que l’année dernière, à Céret un 13 juillet au soir, je me souviens fort bien de ce veinard de ‘Dominico’ qui, s’il fut piqué un poil en arrière, eut à en découdre avec un picador torero. Son nom ? Je ne l’ai jamais su… et pourtant on nous l’avait affiché !

Parce que le premier tiers (devrait) constitue(r) le moment privilégié pour :

 Révéler, « découvrir », juger la bravoure (instinct offensif et agressif) du toro, ainsi que sa force et sa puissance.

 Abaisser son port de tête en diminuant la mobilité de l’ensemble « tête-encolure », notamment en vue de la mise à mort.

 Obtenir du toro des charges rectilignes et qu’il concentre son attention sur une « cible » unique (tout d’abord les capes et le picador puis le banderillero et enfin la muleta).

 Apprécier les compétences des matadors, celles des banderilleros et des picadors ― ainsi que le travail des chevaux ― dans leur souci de mettre en valeur le toro en le « préparant » pour les étapes suivantes de son combat, notamment le dernier tiers.

 Redécouvrir la variété du toreo de cape au travers des mises en suerte (placement du toro, arrêté, face au picador en mouvement) et des quites (utiles pour permettre à la bête de « se reprendre » et aux matadors de mieux analyser le comportement du toro tout en rivalisant de technique et d’originalité à la cape).

 L’éleveur d’évaluer dans l’arène le degré de bravoure de ses toros afin de confirmer ou d’infirmer ses choix dans la conduite de son élevage (tel toro de telle famille, issu de telle vache et de tel semental lui a donné entière satisfaction, tandis que…) tâchant de ce fait d’assurer un haut niveau de « qualité » et d’intérêt à la corrida.

 Pour nous, aficionados a los toros, de profiter de l’esthétique de ce duel sans équivalent dans la relation que l’homme entretient avec l’animal, ainsi que de montrer tout le respect que nous vouons à cette bête unique qu’est le taureau de combat dans toute la diversité de ses origines (encastes) : un animal intègre, c’est-à-dire en bonne santé, avec l’âge requis, des cornes « propres » (non manipulées et/ou non prisonnières de fundas), le poids juste et « dans le type » de son encaste.

J’ouvre une parenthèse. En ne considérant toutefois pas cet « effet » comme un « objectif » en soi, on peut cependant rajouter, en citant le professeur Juan Carlos Illera del Portal (6Toros6 du 27 janvier 2007), que « si le toro n’était ni piqué ni banderillé, il conserverait probablement le très haut niveau de stress qui est le sien lors de son entrée dans l’arène. La pique provoque un double mécanisme chez le toro : d’un côté elle le stresse et d’un autre côté elle produit une douleur ; et, donc, en ressentant (verbe sentir en espagnol dans le texte) la douleur il commence à libérer les bêta-endorphines qui l’atténuent. » Et attention, ne déconnez pas en allant jusqu’à prétendre, au risque de vous attirez les foudres de quelque éminence grise, que le toro souffre ! Non, non, il ressent la douleur mais ne souffrirait pas… Cette question (de la douleur, de la souffrance), visiblement de la plus haute importance, semble d’ailleurs transcender les clivages en vigueur chez les aficionados. À grand renfort d’arguments scientifiques, et sans craindre le moins du monde la caricature, le petit monde des toros convoque tout ce(ux) qu’il lui est permis de convoquer afin de faire la nique — une bonne fois pour toutes ? — aux antis. En tout cas, c’est l’impression que toute cette agitation (aux allures de propagande ?) me fait et à laquelle je ne manque pas, même petitement, de participer ! Je referme la parenthèse.

Mais il n'en va pas toujours ainsi… Et pourquoi donc ? vous demandez-vous. Peut-être parce que :

 Pour les besoins de « la cause », les ganaderos élèvent — en lieu et place d’un toro offensif et agressif, puissant et vendant chèrement sa peau — des animaux ainsi faits (au port de tête moins « arrogant », de peu de puissance et faibles voire invalides) que le tercio de varas serait devenu un « mal nécessaire ».
>>> La cause, jamais très clairement exprimée mais défendue, entre autres, par un prétendu déplacement de la véritable expression de la bravoure au troisième tiers, pourrait se résumer ainsi : transformer le combat du toro en une sorte de douce « chorégraphie » au danger estompé dont le triomphe facile des matadors serait le but ultime, au détriment de la notion de combat et des principes de la lidia (conduite du combat au cours des 3 tiers).

 Les matadors savent qu’ils « réduiront » rapidement et aisément le toro en le contraignant à une « méchante » 1re pique (en arrière du morrillo, longue, « carioquée »…), le rendant moribond tant physiquement que « moralement » — il faut bien admettre que, la plupart du temps, un (ou deux) picotazo(s) suffi(sen)t !

 En l’état actuel des choses, et avec notre assentiment — celui des aficionados et des présidences —, les matadors obtiennent malgré tout trophées et triomphes.

 Nous, aficionados, ne prenons pas en compte la qualité du déroulement du premier tiers au moment de « récompenser » un matador et sa cuadrilla — sinon cela se saurait et (pratiquement) toutes les dépouilles quitteraient l’arène avec leurs oreilles !


Prochainement, la suite. Elle proposera un rappel de points réglementaires ou non — rien de révolutionnaire — en vue d’une exécution espérons-le plus vivante et loyale du premier tiers, moment fondamental sans qui la corrida ne serait plus tout à fait la corrida — ce rituel délicieusement anachronique.


Images Dessin de notre ‘Batacazo’ © Jérôme Pradet Castoreño © Manon Pablo Picasso / Tête de picador au nez cassé, 1903 / Bronze & marbre, 19,69 x 14,92 x 11,43 cm © SFMOMA San Francisco Museum of Modern Art Picador de l’affichiste riojano © José Ángel Ligero Martínez