A
Camposyruedos nous avons toujours considéré qu’il était néfaste pour l’intérêt de notre passion de donner trop d’écho aux hurlements des protectards. Ils sont de ce fait très peu évoqués sur le site, sauf depuis quelques jours... Il faut dire que nous ne représentons personne d’autre que nous-mêmes, soit une demi-douzaine d’aficionados indépendants de toute organisation ou association. En conséquence, nous avons toujours estimé que ce combat incombait aux entités organisées et responsables, censées représenter et défendre notre culture millénaire et méditerranéenne. Cela n’exclue pas, bien au contraire, que nous nous sentions concernés, comme aficionados, par les tenants et les aboutissants de ce combat et qu’il nous arrive d’écrire, à l’occasion, ce que nous pensons être juste.
Depuis quelques jours cependant, nous nous sommes rendu compte que les lignes ont bougé. Le premier épisode de cette triste péripétie fut, pour nous, la prise de connaissance de la lettre envoyée à notre Président de la République par les signataires de l’ « Appel de Samadet » (février 2007), à l’exception de l’ANDA, soit :
Union des Villes Taurines de France
Association des Organisateurs de Corridas du Sud-Ouest
Groupement des Entrepreneurs de Spectacles Taurins
Musée des Cultures Taurines de Nîmes
Association Française des Eleveurs de Taureaux Braves
Fédération des Sociétés Taurines de France
Fédération des Clubs Taurins Paul Ricard
Union des Bibliophiles Taurins Français
Amicale des clubs Taurins gersois
Association Française des Vétérinaires Taurins
Association Française de Chirurgie Taurine
Syndicat Français des Picadors et Banderilleros
Association des Critiques Taurins de France
Association des Aficionados Prácticos
Ecole Taurine d’Arles
Ecole Taurine de Béziers
Centre de Tauromachie de Nîmes
Ecole Taurine d’Hagetmau
Collectif Terres Taurines
Ce sont donc toutes ces entités qui se sont adressées à Nicolas Sarkozy dans un courrier ayant pour vocation la défense de notre culture. Si quatre-vingt-dix-neuf pour cent de la lettre est irréprochable et même remarquablement argumentée, le un pour cent restant est tout simplement incroyable, car voici ce qui est réclamé au Président de la République par les entités susnommées : « Nous vous demandons donc de ne pas interdire l’entrée des arènes à nos enfants dès lors qu’ils sont accompagnés de leurs parents. »
Autrement dit, l’
afición elle-même, et toutes tendances confondues, sauf l’ANDA, il faut le souligner, demande au Président d’interdire la corrida aux mineurs non accompagnés de leurs parents… Au pluriel qui plus est. Incroyable mais vrai, nous nageons en plein cauchemar. Au moment même où au Pays Basque les Chopera et la Junta essayent d’inverser la tendance d’une semblable décision, chez nous, les nôtres demandent au Président de nous tirer une balle dans le pied.
Face à la gravité de la situation, nous avons alors pris la liberté de contacter André Viard, instigateur et semble-t-il rédacteur de ce courrier. Nous lui avons demandé des explications pour tenter de comprendre. Nous n’avions alors qu’un but, peut-être naïf, penser qu’André Viard reconnaisse son erreur, leur erreur, et puisse corriger le tir.
Mais non, l’échange de correspondance, quoique très courtois, ne nous laissa aucun espoir.
Considérant qu’en tant que modeste site de photographies et d’opinion il n’était pas dans nos attributions de gérer ce délicat problème, nous avons conclu en souhaitant que jamais cette lettre ne tombe entre les mains des "antis" et que le Président Sarkozy, ou ses conseillers, aient la bonne idée de glisser sur cette position suicidaire qui, de fait, reconnaît officiellement à la Fiesta un côté malsain. Les "antis" n’en demandaient sans doute pas tant.
D’autres que nous, la revue
Toros en l’occurrence, ont pris sur eux de rendre public ce courrier pour mieux dénoncer et combattre cette proposition ahurissante. Vous pourrez lire ci-après le communiqué en question, déjà diffusé à l’heure actuelle sur le site
Toreria.net, la liste de diffusion
Afición, et d’autres médias.
A la lecture de ce communiqué, nous ne pouvons qu’adhérer à l’argumentaire réfléchi de la revue. Les inquiétudes avancées et les conséquences éventuelles mises à jours par ces quelques mots de trop sont en totale adéquation avec nos propres positions (cf. «
Moins de seize »). De même, nous ne pouvons que renvoyer le lecteur à l’article « La parole est aux élus du midi » publié également par la revue nîmoise dans le n° 1813 daté du 12 octobre 2007. Ces deux textes mettent en évidence l’importance que la justice peut donner au moindre mot et les conséquences néfastes que ces mots pourraient engendrer pour notre passion commune.
Aujourd’hui
Toros critique André Viard, sur son excès de zèle. Nos convictions sur la question d’une interdiction superficielle ou conditionnelle de l’accès des mineurs de moins de 16 ans aux corridas ne peuvent que nous inciter à aller dans le sens de la plus vieille revue taurine du monde.
Oui, mais ! Car il y a un mais. Dans cette contre-attaque de
Toros, un élément notoire fait défaut : la liste des signataires. Elle est impressionnante.
Trois jours après notre découverte de l’existence de cette lettre adressée au Président de la République, quelle ne fut pas notre surprise de constater que l’UBTF se fendait d’un communiqué critiquant et rejetant la phrase « accompagnés de leurs parents » présente dans la lettre dont elle était co-signataire. Laquelle UBTF a été depuis rejointe par la section Sud-Est de l’association des Critiques Taurins. Quid du Sud-Ouest ? Le plus étonnant est que le communiqué de l’UBTF fut publié sur le site de la Fédération des Sociétés Taurines de France, elle-même co-signataire de la lettre ! Dans un texte publié le 21 octobre 2007,
Camposyruedos faisait également allusion à ce communiqué en soutenant le fond du discours des membres de l’UBTF.
Et aujourd’hui, c’est au tour de
Toros, qui, certes, n’a pas signé la lettre en tant que revue mais qui compte en son sein une majorité de critiques ayant donné, par le simple fait d’appartenance à telle ou telle entité, leur aval pour signer la lettre d’André Viard. Peut-on signer une lettre en appartenant à une association et le lendemain revendiquer le contraire sous l’appellation de revue ? Il y a là un paradoxe que nous avons du mal à expliciter, sauf à entrer dans des considérations qui à ce jour nous échappent. En attendant, André Viard s’entête à défendre en prenant pour exemple ce qui vient de se faire dans la communauté autonome du Pays basque. Pour s’en persuader, une fois de plus, il suffit de lire son éditorial du vendredi 26 octobre de son site
Terres Taurines. Selon lui, cet accès aux arènes sous condition pour les mineurs de moins de 16 ans serait un « compromis » fait aux entités taurines en lieu et place d’une interdiction ipso facto ; envisagée par le Président Sarkozy ? Finalement, pour lui, ces quelques mots désastreux ne sont qu’un « accessoire » sur lequel il faut savoir faire glisser son regard pour sauver ce qu’il nomme « l’essentiel ». En fin de texte, comme il est de coutume dans sa prose, il en appelle à une unité de l’
Afición qui serait la seule capable de sauver les meubles. L’idée de l’unité peut paraître sympathique mais faut-il pour autant qu’elle se construise sur le sentiment d’une culpabilité fondée sur le manque d’actions passées ? Le procédé employé par l’ancien matador ne nous semble ni clair ni prompt à réunir les « multiples chapelles » de l’
Afición. En effet, écrire que « si les familles du secteur taurin s’étaient mobilisées depuis six ans comme elles le font depuis quelques semaines, sans doute serions-nous fondés à parler autrement » relève purement et simplement d’une dialectique de reproche et d’accusation. Or, on ne s’autoproclame pas leader sur les erreurs ou les manquements du passé. Peut-être André Viard pense-t-il être le seul à avoir agi durant ces six dernières années et grand bien lui en fasse. Cependant, nous osons croire le contraire, nous qui ne sommes les représentants ou l’incarnation de personne, si ce n’est de nos propres idées. Aller aux corridas chaque année en y vidant son porte-monnaie, dénoncer les abus commis à l’encontre des
toros de lidia par ceux qui les élèvent, ceux qui les achètent ou ceux qui les combattent, ne pas prêter volontairement le flanc à une infime minorité criarde d’'antis', c’est aussi cela quelque part défendre l’
Afición. C’est certes plus discret, moins pédant et moins communicatif mais cela participe en quelque sorte du même combat. Nous n’écrivons pas pour autant qu’il s’agisse là d’un moyen de défense idéal et parfait mais nous nous autorisons à penser qu’André Viard vient de commettre une erreur dans sa stratégie globale de lutte contre les anti-taurins. Et quant à choisir entre « l’accessoire » et « l’essentiel », il nous semble en réalité que la
lidia complète et totale d’un
toro n’est que la somme de petites choses qui paraissent accessoires mais qui sont finalement l’essence de cette
lidia.
Vous pouvez lire
la charge de Toros sur le site Toreria.net et la réponse maladroite et hors sujet d’André Viard sur le site
Terres taurines, éditorial du 29 octobre 2007, ainsi que celui du 30 où le fonds du problème n'est toujours pas abordé... Bon surf !