Bon, on aurait pu délirer, remercier nos parents, nos femmes, nos maîtresses, nos voitures, enfin délirer quoi... Mais non. Pour fêter notre prix décerné par l’ANDA, nous l’avons fait discrète, entre nous, en toute intimité autour de quelques bonnes bouteilles dont la liste est ci-contre. Mmmmm... Le pire ? C’est que cette dégustation a réellement eu lieu... ou va avoir lieu plus précisément. Oui ça existe, mais pas à Camposyruedos je vous rassure. Pas encore ! Le lieu et l’endroit ? Je n’ai pas le droit de les communiquer !
30 novembre 2007
Merci l'ANDA
Bon, on aurait pu délirer, remercier nos parents, nos femmes, nos maîtresses, nos voitures, enfin délirer quoi... Mais non. Pour fêter notre prix décerné par l’ANDA, nous l’avons fait discrète, entre nous, en toute intimité autour de quelques bonnes bouteilles dont la liste est ci-contre. Mmmmm... Le pire ? C’est que cette dégustation a réellement eu lieu... ou va avoir lieu plus précisément. Oui ça existe, mais pas à Camposyruedos je vous rassure. Pas encore ! Le lieu et l’endroit ? Je n’ai pas le droit de les communiquer !
Le duende de Manon (II)
Si le message de Solysombra vous a mis en appétit et si, pendant cette période creuse, les photos de Manon vous manquent, vous pouvez admirer une autre facette de son talent en visitant le site Internet de la Casa Patas, rubrique "Galería de Fotos". La plupart des superbes photographies qui y sont présentées sont de notre ami. Voici le lien : http://www.casapatas.com/index.asp.
Bonne visite.
Image Belén López, à la Casa Patas © Juan Pelegrín
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29 novembre 2007
Raso de Portillo - Parentis
25 novembre 2007
Venise, terre taurine
On a coutume de dire que les voyages forment la jeunesse. Rien n’est moins sûr à la vérité. Car les taurins, ces êtres étranges venus d’une autre planète sont partout. Leur destination : la Terre. Leur but : en faire leur univers. A Camposyruedos nous les avons vus. Tenez, par exemple, prenez une ville, a priori épargnée : Venise.
Pour moi, tout a commencé par un après-midi brumeux, dans les méandres des couloirs de la Fondation Peggy-Guggenheim, une bâtisse au bord du Grand Canal, solitaire en ce mois de novembre, alors que trop fatigué pour continuer la visite de cette sublime fondation, je cherchais, dans les jardins, un banc pour me reposer, un banc que je n’ai jamais trouvé.
Cela a commencé par cette statue isolée, et par un touriste que le manque de sommeil avait rendu trop las pour continuer sa visite. Cela a commencé par la vision de cette statue, au cœur de ce jardin. Cet objet dont vous avez la photographie au début de l'article est d’une violence rare. Un trident camarguais surmonte une immonde créature accompagnée d’un squelette représentant une tête de taureau. Je n’ai pas osé le photographier, mais on peut distinguer clairement sur le dessus du crâne un énorme trou, symbolisant sans doute un ultime et fatal coup de lance venant achever l’animal en lui perforant le crâne. Si ce n’était la forme des cornes, et le trident, j’aurai sans doute songé à une évocation du Toro de la Vega de Tordesillas. L’auteur de cette monstruosité, de cette évocation taurine d’une insupportable violence, se nomme Germaine Richier (1902 – 1959). Et cette œuvre (?) a vu le jour en 1959, autant dire le Moyen Age.
Je n’étais pas au bout de mes peines. A peine venais-je de réaliser la brutalité et la sauvagerie de cette représentation que deux enfants, mineurs, honteusement abandonnés par leurs parents, probablement irresponsables, et qui se désaltéraient, à trois mètres cinquante de là, à la cafétéria, sont venus contempler, sans être accompagnés, sans que personne ne soit en mesure de leur donner la moindre explication, cette œuvre absolument traumatisante pour leur âge. Et là, je dois bien avouer que face au trouble provoqué par la puissance de cette vision j’ai été incapable de prendre cette scène en photo, trop impressionné pour cela.
Et ça n’était pourtant qu’un début. Ce ne sont que quelques heures plus tard que j’ai compris à quel point, cette ville, Venise, peut être traumatisante et dangereuse pour des mineurs non accompagnés. Vous sortez de la Fondation Peggy-Guggenheim, vous prenez un vaporetto croyant remonter tranquillement le Grand Canal vers la Ca d’Oro, ou Piazzale Roma, vous croyez être sauvé, à l’abri, et subitement, sans la moindre mise en garde, sans la moindre explication, sans la moindre prévention, vous saute au visage, le Palazzo Grassi, et cette monstrueuse tête de mort faite de boîtes de conserves géantes et dont l’ombre, effrayante et sinistre, se projette sur la façade de ce palais, comme pour l’engloutir et le dévorer.
En vérité je vous le dis, Venise est une ville affreuse et effrayante, qui devrait être interdite aux mineurs non accompagnés, une ville qui sent le passé, la mort et mille choses plus horribles les unes que les autres.
A Venise, même la gastronomie porte en elle quelque chose d’effrayant, de passéiste et de violent, oui, de violent. La gastronomie vénitienne est violente.
Ces gens-là, des barbares sans doute, ont une spécialité culinaire particulièrement insupportable : les moeche. Les moeche sont des crabes. Et ces pauvres crabes sont capturés, sans la moindre compassion, au moment de leur mue. Ils sont donc mous, sans défense, et ces barbares en profitent pour les faire paner, et les dévorer ainsi, entièrement. Je n’ai pas osé photographier les crabes ainsi assassinés mais je vous ai tout de même rapporté un cliché exclusif, alors qu’ils sont encore vivants sur un étal du marché du Rialto. Déjà pêchés, mais pas encore massacrés.
Je l’ai vécu et je peux témoigner. Je ne sais pas si vous imaginez bien le traumatisme qu’un tel plat, méditerranéen, peut engendrer chez des mineurs normaux, non accompagnés, habitués aux rondeurs rassurantes d’un hamburger MacDonald, ou à la forme rationnelle, répétitive et linéaire des cubes de poissons panés et surgelés. Je n’ose imaginer quel traumatisme pourrait engendrer chez ces mineurs la vision d’Italiens dévorant ces moeche, entiers, les yeux, les pattes, le corps, tout, absolument tout le corps de ce pauvre animal ainsi livré à la folie des hommes.
En vérité je vous le dis, Venise devrait être interdite aux mineurs non accompagnés. D’ailleurs c’est bien simple ! Je n’en n’ai pas vu ! Cela est bien la preuve de ce que j’avance.
Maintenant à Camposyruedos nous savons, les taurins, la mort et la barbarie sont à Venise, ils ont pris forme humaine et il nous faut convaincre un monde incrédule que le cauchemar a déjà commencé !
NDLR En fait moeche c'est du vénitien pas de l'italien et c'est le pluriel de moleca mais la lettre "l" est à peine prononcée en vénitien, donc parfois on simplifie l'ecriture en "moeca". Le pluriel est "moleche" ou "moeche", et bien sûr le "c" reste dur (prononcer : mo-é-ké). C'est un pote vénitien qui éclaire notre lanterne... Non mais !
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La coleta de Rincón
Une amie colombienne m'envoie de temps à autre des liens sur des sujets taurins piochés sur le web des Amériques.
Daniel Samper Pizano, journaliste au Tiempo narre quelques anecdotes amusantes et comme à Campos y Ruedos, nous tenons Rincón en haute estime et nourissons a priori pour les Colombianas morenas une grande passion, voici quelques lignes savoureuses :
- ¡Que no se la corta, macho! ¡Que los toreros nunca se cortan la coleta! La prueba es que hace poco intentó reaparecer José Ortega Cano, y ya es casi sesentón...
- ¡Que se la corta, te lo digo yo! Que César se corta la coleta. Ese tío no habla en vano.
(El diálogo parece tener como escenario algún bar español; pero lo mismo podría desarrollarse en una cafetería bogotana, porque los aficionados a los toros hablan con el acento de Carabanchel). El objeto materia de debate, la coleta, es una prenda arcaica, heredada de los matadores del siglo XVIII: un pequeño moño redondo que se sujeta con ganchos a la parte posterior de la cabeza. Antes, cuando un torero colgaba los trastos, le cortaban literalmente la coleta con unas tijeras y le quitaban un bocado de pelo. En nuestros días, la coleta es postiza y se desprende sin demasiada dificultad, pero con mucha ceremonia.
Para que produzca suerte, la coleta debe estar confeccionada con un mechón de cabellos femeninos: los de la madre, la novia, la esposa, la hermana, la hija del torero. La coleta de César es quizás la única en la historia de la tauromaquia anudada con pelo de una agente de tránsito. Ocurrió en Manizales a mediados de los años noventa. Rincón acababa de triunfar en la plaza de esta ciudad -tan taurina que tiene un pasodoble por himno-, cuando, al dirigirse en carro a su hotel, lo detuvo una mujer policía. Era una muchacha atractiva, de pelo oscuro, que lo llevaba atado a modo de cola de caballo. En vez de multarlo, como temió el matador, la agente le confesó que era desmayada admiradora suya y, para demostrarlo, allí mismo sacó unas tijeras y de dos cortes se mochó la cola de caballo y la puso en manos de Rincón.Éste, sorprendido, solo pudo agradecerle y llevarse el trozo de melena. Un tiempo después, ordenó que hicieran con él la coleta que actualmente usa: la que se cortó en Barcelona el 23 de septiembre; la que caerá a la arena de la Plaza de Santamaría dentro de tres meses y medio.
- ¡Que se la corta, te lo digo yo! Que César se corta la coleta. Ese tío no habla en vano.
(El diálogo parece tener como escenario algún bar español; pero lo mismo podría desarrollarse en una cafetería bogotana, porque los aficionados a los toros hablan con el acento de Carabanchel). El objeto materia de debate, la coleta, es una prenda arcaica, heredada de los matadores del siglo XVIII: un pequeño moño redondo que se sujeta con ganchos a la parte posterior de la cabeza. Antes, cuando un torero colgaba los trastos, le cortaban literalmente la coleta con unas tijeras y le quitaban un bocado de pelo. En nuestros días, la coleta es postiza y se desprende sin demasiada dificultad, pero con mucha ceremonia.
Para que produzca suerte, la coleta debe estar confeccionada con un mechón de cabellos femeninos: los de la madre, la novia, la esposa, la hermana, la hija del torero. La coleta de César es quizás la única en la historia de la tauromaquia anudada con pelo de una agente de tránsito. Ocurrió en Manizales a mediados de los años noventa. Rincón acababa de triunfar en la plaza de esta ciudad -tan taurina que tiene un pasodoble por himno-, cuando, al dirigirse en carro a su hotel, lo detuvo una mujer policía. Era una muchacha atractiva, de pelo oscuro, que lo llevaba atado a modo de cola de caballo. En vez de multarlo, como temió el matador, la agente le confesó que era desmayada admiradora suya y, para demostrarlo, allí mismo sacó unas tijeras y de dos cortes se mochó la cola de caballo y la puso en manos de Rincón.Éste, sorprendido, solo pudo agradecerle y llevarse el trozo de melena. Un tiempo después, ordenó que hicieran con él la coleta que actualmente usa: la que se cortó en Barcelona el 23 de septiembre; la que caerá a la arena de la Plaza de Santamaría dentro de tres meses y medio.
L'article entier, c'est ici !
24 novembre 2007
23 novembre 2007
Villes Taurines de France
Les communes des Saintes-Maries-de-la-Mer et de Fourques, par délibérations en date respectivement du 7 et du 15 novembre 2007, ont emboité le pas à celle de Bellegarde, et ce en des termes très proches, dont vous pourrez prendre connaissance en consultant le site Internet de la FSTF.
Il est important de souligner que chacune des deux municipalités, d'une part, appelle fortement de ses voeux le maintien d'un accès aux arènes totalement libre et, d'autre part, prend bien le soin d'inscrire leur tradition tauromachique (aussi bien camargaise qu'espagnole) dans "un large territoire où [elle] est un fait social, culturel et humain, aux profondes racines rurales, qui appartient au plus grand nombre dès le berceau".
Ce qui va sans dire va encore mieux en le disant.
22 novembre 2007
"Le toro doit être combattu mais pas abattu"
Cette phrase extraite du déjà célèbre Philosophie de la corrida orne l'annonce du millésime 2007 du palmarès de l'ANDA. L'auteur de ce magnifique ouvrage, Francis Wolff, occupe donc une place à part au sein des primés, une place tout à fait justifiée compte tenu du contexte actuel et de la rareté d'oeuvres aussi profondes consacrées à la tauromachie espagnole.
Car depuis José Bergamin (que le philosophe-universitaire a manifestement fort bien digéré, comme en témoignent un certain nombre de sujets dont il semble s'être inspiré, nous les restituant non seulement de façon très personnelle et pertinente, mais surtout avec une clarté aveuglante difficile à atteindre lorsqu'il s'agit d'aborder certains thèmes chers à l'auteur "birlibirloquèsque"), nul ne s'était aventuré sur ce terrain ardu avec autant de talent et, c'est suffisamment rare pour être noté s'agissant d'une oeuvre philosophique de façon générale, en suscitant autant l'intérêt des profanes.
Toutefois, quand on considère que la publication de Philosophie de la corrida est une bonne chose au moment où nous subissons des attaques incessantes et des accusations scandaleuses, ne nous y trompons pas. En effet, et ce n'est pas le moindre de ses mérites, le livre n'est en aucun cas un plaidoyer en faveur des courses de taureaux, pas plus qu'un petit guide à l'usage des aficionados désireux de se munir de quelques arguments pré-machés, comme cela existe sur les sites Internet militant pour la suppression des corridas. Son objectif, et son propos, sont tout autres. Ceux qui l'ont lu comprendront ; quant aux autres, qu'ils se précipitent pour combler cette lacune, sans se laisser apeurer par la matière. Ils y trouveront sans doute exprimés de manière limpide bien des sentiments éprouvés sans qu'ils aient jamais atteint le langage. Ils y trouveront encore des pistes de réflexion intéressantes sur l'objet de leur passion : pourquoi le taureau meurt-il ? Quel est le rapport de l'Homme à l'animal ? Etc.
Point n'est besoin d'être diplômé de philosophie pour lire cet ouvrage. Mais il n'est pas non plus nécessaire d’être aficionado. La pédagogie de Francis Wolff permet à tous de trouver profit à la lecture de son livre. Ceux que la tauromachie n'intéresse pas s'enrichiront de développements qui posent la question de l'Homme... au travers de son combat face au taureau et de l'afición a los toros. En effet, le propos de Francis Wolff est universel lorsqu’il soulève des questions relatives aux rapports entre les hommes et la nature, aux sacrifices et à leur ritualisation, à l’éthique de l’être et celle de la liberté et, enfin, à l’esthétique du sublime.
La qualité de ce livre a suffisamment bien été relayée pour qu'il soit besoin d'y insister ici. Il y a cependant un point sur lequel je souhaiterais insister : en plusieurs passages de la lecture du livre, j'ai eu le sentiment très fort, tout en adhérant pleinement aux considérations de l'auteur, que la corrida ne devrait exister, ne doit exister, que telle que nous l'aimons, telle que nous essayons de la défendre sur Campos y Ruedos. Que sans un toro intègre, sans combat authentique, la corrida n'est qu'un spectacle vulgaire et indigne. Comment parler d'éthique de la corrida sans ces ingrédients de base ? Comment parler d'esthétique quand ce à quoi nous assistons consiste en un ballet plus ou moins réussi, à base de passes truquées, données à un animal diminué avant d'entrer dans le ruedo par un homme en habit de lumière et aux petites chaussettes roses ?
J'ignore si l'auteur fut conscient de cet aspect au moment de la rédaction de son livre. Mais celui-ci n'a sans doute pas échappé aux membres de l'ANDA qui depuis des années et des années poursuivent, de plus en plus esseulés, ce combat jugé d'arrière-garde. Et qui doivent trouver un certain réconfort dans une affirmation aussi brillante de leurs certitudes.
Ils en ont bien besoin... Dans le mot du président, daté du 15 novembre 2007, soit quelques jours après la trentième assemblée générale de l'association, qui a semble-t-il bien failli être la dernière, on sent une certaine lassitude. Une lassitude que d'aucuns (et ils sont malheureusement nombreux) verraient d'un bon oeil se transformer en renoncement. Il convient d'ailleurs de noter qu'une semaine après qu'il fusse rendu public, le palmarès ne trouva pas le moindre écho dans les médias taurins spécialisés. Nada de nada.
Mais il n'en est rien. L'ANDA s'accroche au mât et compte sur les jeunes pour assurer l'avenir de la course de taureaux véritable, davantage que sa propre survie qui n'a d'autre raison d'être que la défense de la première. Les jeunes et leur formation d'aficionado. Tel semble être le souci légitime de la trentenaire. C'est vers eux que doivent tendre tous nos regards et tous nos efforts. Pour qu'ils comprennent qu'il y a mieux que ce qu'on leur propose aujourd'hui, et que grâce à eux tout n'est peut-être pas perdu.
En ce qui concerne le palmarès lui-même, je m'associe pleinement aux "Pitos" et aux "Palmas", ainsi qu'à l'attribution de la Plume d'Aigle à Francis Wolff, comme on l'aura compris. Je n'ai (à mon grand regret pour ce qui est des novilladas du Raso de Portillo et Sánchez-Fabrés) assisté à aucune des courses auxquelles il est fait référence et ne peux donc pas porter de jugement sur le bien-fondé des trophées attribués ; je fais toutefois confiance aux amis qui m'ont dit beaucoup de bien des deux novilladas. Le prix attribué à la CTEM montoise (deux piques au minimum et président unique) me paraît particulièrement heureux : c'est aux maestros et à leurs cuadrillas qu'il appartient à présent de transformer l'essai, en rendant aux Landais un tercio de varas digne de ce nom (mises en suerte, positionnement de la pique et, tant que nous en sommes à rêver, retour en grâce des quites). L'absence de publicité donnée à ce palmarès, pourtant ancien, semble corroborer une certaine raréfaction - employons ce terme pour rester pudique - de ceux qui placent le toro, protagoniste de la Fiesta, au-dessus de tout. La lutte face aux "antis" et les guerres intestines n'ont fait que précipiter cette déchéance, et l'affirmation criante de vérité de Francis Wolff, selon laquelle "le toro doit être combattu mais pas abattu", sonne comme une voix solitaire dans le désert de l'afición.
Image 1 Un picador à Mont-de-Marsan, lors de la dernière Féria de la Madeleine © Laurent Larroque
Image 2 L'un des sánchez-fabrés combattus à Saint-Martin-de-Crau, ici au campo © Laurent Larrieu
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21 novembre 2007
La suerte de vara n'existe pas
En 1917, le Règlement des corridas de toros, novillos et becerros, précisait que les picadors piqueront « là où l’art de piquer l’éxige, c’est-à-dire, dans le morrillo ». Tous les règlements1 qui viendront après, outre le fait que le terme morrillo a disparu, ne feront plus allusion à une quelconque recommandation sur l’implantation de la pique. Autorisant de fait bien des pratiques, comme le laisse sous-entendre ce passage du Règlement des spectacles taurins de 1996 : « il reste défendu [...] de maintenir la pique incorrectement appliquée. » !
Les vétérinaires (ces incompétents...) sont pourtant unanimes : la pique doit être portée dans le morrillo. La chose est, je crois, acquise ; inutile d’en rajouter une couche. En revanche, il n’est pas inintéressant de constater que l’absence du mot morrillo des textes réglementaires (à partir de 1923) survient, grosso modo, avec l’arrivée du peto (de 1926 à 1930). Dans leur ouvrage Suerte de vara, Luis F. Barona Hernández & Antonio E. Cuesta López tirent, à l’issue du chapitre consacré au peto, un certain nombre de considérations liées à son apparition, dans les textes et en pratique (pardon pour la traduction) :
« 1/ l’adaptation du peto est à l’origine d’un effet contraire à celui recherché. La protection de l’équidé rend propice l’exécution statique de la suerte ;
2/ l’évolution progressive de son dessin a, en même temps qu’il a apporté une meilleure protection du cheval (jupe complète + manchons), réduit de façon criante la mobilité de celui-ci ;
3/ une fois la préservation de la vie de l’équidé assurée, sont introduites les races de trait (croisements avec elles), de poids et de volume plus importants et qui supportent mieux la poussée. Picador et cheval composent ainsi un ensemble statique, dont le mouvement le plus naturel consiste à tourner sur son axe afin d’éviter la sortie du toro quand celui-ci le heurte (carioca) ;
4/ le peto permet une pique prolongée et "efficace", empêchant le dosage du châtiment (note personnelle : on n’a toujours pas trouvé mieux, castigo signifiant également "punition" !) et l’appréciation de la bravoure du toro ;
5/ le peto sur lequel le toro s’épuise facilite son affaiblissement excessif, rendant impossible, dans la majorité des cas, l’expression de ses aptitudes et qualités ;
6/ il permet de faire réaliser la suerte à des picadors peu expérimentés et d’utiliser des chevaux insuffisamment dressés ;
7/ l’adoption du peto coïncide avec l’augmentation des dimensions de la partie pénétrante de la pique ;
8/ il conviendrait de légiférer sur l’utilisation d’un peto qui permette une meilleure mobilité du cheval. Il conviendrait d’empêcher que le toro n’atteigne le peto pendant la réalisation de la suerte. »
Comme de coutume, les toros sortent du tercio le morrillo impeccable ; foutu peto-blindage qui autorise les picadors à ne plus (savoir) déplacer leurs tanks2 aveugles (cf. Lumière !), à ne plus s'engager dans la suerte, à ne plus défendre le cheval contre la corne et, de fait, à ne plus donner la sortie au toro ! Attention, il n’est pas écrit que toutes les piques étaient portées dans le morrillo avant l’invention du peto. Et je ne remets pas non plus en cause son utilisation. Cela étant, vous connaissez la chanson : il apparaît clairement que si les petos étaient plus seyants, les chevaux moins imposants et plus mobiles, les picadors des cavaliers (!), les matadors et leurs cuadrillas des gens habiles3, etc., etc. ; la suerte de vara aurait une tout autre gueule ! Bref, on ne verrait pas une, ni deux, ni trois mais (au moins) quarante-douze mille piques, certes courtes pour la plupart, mais intenses et mouvementées. Aussi, on verrait des mises en suerte dignes de ce nom avec des toros qui ne seraient pas rendus moribonds, on verrait des quites, des ganaderos prendre des notes, etc., etc. ; croyez-moi si vous voulez, on finirait par s’habituer et peut-être même qu’on écrirait : « Les picadors, ces héros ! » Pauvre de nous ! On en est seulement à faire appliquer les deux malheureuses piques règlementaires... Et là, pour la quarante-douzième mille fois, elle a dit : « Philippe ! Tu viens manger ! »
1 A l’exception relative du Règlement taurin andalou (2006), qui stipule que le picador portera la pique « de préférence dans le morrillo ».
2 600-650 kg (cheval "nu") + 30 kg (peto, manchons compris ?) + une quinzaine de kg au bas mot (selle+tapis+sangles+mors+étrier+estribo, celui sur lequel le toro se fracasse le crâne, et ce n'est pas une image) + 85-100 kg (picador tout équipé, vara incluse) = entre 730 et 800 kg !
3 Selon Le Petit Robert : « Qui exécute ce qu’il entreprend, avec autant d’adresse que d’intelligence ou de compétence. = capable. »
En plus Lire, si cela n'est pas déjà fait, la synthèse d'Yves Charpiat dans Terre de toros & la série El eje de la lidia publiée dans Toro, torero y afición (en castillan).
Image Une fois n’est pas coutume, une pique dans le morrillo d’un La Quinta, à Céret en 2003 © David Cordero
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20 novembre 2007
Pasionaria
Les camps fourbissent leurs armes et affutent leurs arguments les plus percutants pour la grande bataille à venir vous disais-je il y a quelques semaines... Le jeu des alliances se développe, se complique, les antichambres bruissent de mille complots, les stratèges se déchirent quant à la tactique à adopter, à l'aube du grand affrontement, toutes les éminences sont grises et de part et d'autre on traque les possibles appuis, on consolide les soutiens et tente de recruter de nouveaux alliés.
Dans le camp "anti", on essaie de resserrer les rangs, alors que l'heure semble au papillonnage... Le chanteur gouaillant son amour de paname et brodant des mélodies cristallines sur un parallèle sociologique de haute volée entre Afghanistan et Etats-Unis, se préoccupe scandaleusement de la vétille que constitue la détention en pleine jungle colombienne d'une femme politique... Est-il au moins sûr que celle-ci avait bien inscrit l'abolition des tortures taurines au pays de Botero ?! Mais là n'est pas la question... car aussi populaire que soit ce gars de là-haut, le voici balayé par la nouvelle pasionaria de la cause taurine au niveau international : l'incarnation de la voix féminine, la vocalise personnifiée, des millions d'albums écoulés de l'Alaska au Kamchatka (en passant par l'est, je vous rassure)...
Dessay ? Bartoli ? Montserrat Caballé ? Maria Callas ? (mais non, elle est morte, suivez un peu !)
Non...
Plus puissant que tout cela réuni : l'inénarrable Céline Dion ! HERSELF ! Nom d'un caribou !
En furetant sur les news ayant trait à la corrida sur le Net, je suis tombé sur la nouvelle qui fait frémir le camp "anti" et le fait s'agiter de convulsions, se tordre d'angoisse et partir en croisade contre le clip à venir de la belle Céline.
Céline D., dont le bon goût estampillé Vegas n'est plus à démontrer depuis longtemps a élu le beau Matías Tejela entre différents toreros sur un catalogue de photos pour participer à son prochain clip. On parle même à terme de reconstitution faramineuse, à faire passer BenHur, Titanic et une tournée des Stones pour d'aimables goûters d'anniversaire filmés en super 8, on parle de Las Ventas reproduit à Las Vegas, pas moins !
Le coup de force est d'envergure, alors qu'on croyait la Fiesta moribonde en Catalogne, menacée en France, la voici conquérant la capitale mondiale de l'entertainment !
Les paris sont ouverts pour savoir si le prix Campos y Ruedos du kitsch 2007 semblant jusqu'alors promis à la version allemande de "Vino Griego" pourrait passer sous le nez de l'adaptation teutonne du tube de Bayonne au profit de la prestation du maestro cape en main et torse nu (selon La Provence). A vos SMS surtaxés !!!
19 novembre 2007
Petite annonce
Vous vous souvenez sans doute du prix record atteint pas la Golf de Jean-Paul II. Eh bien, je compte battre ce record, figurez-vous, car la mienne est encore plus mythique !
Écoutez bien, elle est allée chez :
Le curé de Valverde ; Cuadri ; Pablo Mayoral (El Escorial) ; La Laguna, où elle a connu El Juli, encore inconnu ; Adolfo Martín ; « Valderrevenga » (Adolfo Rodríguez Montesinos) ; Cortijoliva ; Pablo Romero ; Escolar Gil ; Fernando Palha ; Dolores Aguirre ; Prieto de la Cal ; Barcial ; Fraile ; Sánchez y Sánchez ; Cenicientos, etc.
Elle connaît toute la vallée du Tiétar (Cadalso de los Vidrios, El Tiemblo, Los toros de Guisando…), la côte basque et même le Bulli, en Catalogne, à Roses.
Elle a vu les arènes de Gérone, avant un petit tour chez les frères Roca.
Elle est passée à Hoyo de Manzanares.
Elle m’a emmené jusqu'au Rocío, à Sanlúcar de Barrameda manger des glaces avec Menchu.
Elle m’a aussi emmené manger des gambas et queues de langouste au Puerto de Santa María.
Elle s’est arrêtée chez Vega Sicilia.
On est allé se faire cuire à Tolède, au mois d’août.
On s’est saoulé la gueule à Porto.
Elle m’a attendu au parking de Santa Ana des jours entiers pendant que je picolais à La Venencia.
Avec elle, j’ai amené Jorge Laverón voir une inoubliable corrida d’Escolar Gil.
Elle connaît par cœur le trajet Nîmes-Céret et Nîmes-Vic Fezensac… Bon, en revanche, je reconnais, elle n’a jamais foutu les pieds à Dax…
Putaing, quelle histoire ! J’en ai les larmes aux yeux… Je me demandais s’ils ne pourraient pas l’exposer au musée Pablo-Romero…
18 novembre 2007
Le mano a mano en question (II)
Il est parfois des commentaires publiés sur ce blog qui, à notre sens, méritent d'être mis en lumière. Voici celui de Jean-Marc Colomar :
Le 20 Août 95, j’ai assisté à une course de Valverde à Las Ventas avec au cartel Frascuelo, Juan Antonio Esplá et Miguel Martín. Ce fut certes une corrida sans « oreilles », mais une de celles dont se souvient longtemps après l’aficionado. Me reste en mémoire, l’image d’un Frascuelo jambes écartées, de face et en face de son toro pour un trincherazo impossible, énorme de domination et que je n’ai plus jamais vu réédité de la sorte (d’ailleurs quelqu’un saurait-il le nom de cette suerte ?). Il interrompit sa vuelta à hauteur du tendido siete pour un salut du buste, cape impeccablement pliée sous le bras et mèche en bataille. De fait, c’est l’essence même de la torería que nous avions pu renifler ce jour-là ; inconscients que nous étions de la précieuse rareté de ces instants. Emilio Martínez dans le El País du lendemain titrait : « ¡Cómo huele a torero! » Et voici en résumé ce qu’il écrivit de la tarde : « … Frascuelo destapó el tarro de las esencias y perfumó con aromas candeales de rancia torería la cátedra de la Fiesta. Tantos efluvios calaron en el corazon de esa especie a extinguir que son los aficionados feten, y uno no aguanto más. Saltó como un muelle, se le rompió el alma y se le quebro la garganta : « ¡Cómo huele a torero! » Mientras, el titular de la causa, ese veterano coletudo escapado de antiguas postales sepia de los padres de la tauromaquia… continuaba pariendo una intensísima sinfonia de olores, colores y sabores… » Il va sans dire que j’approuve l’idée de ce mano a mano.
Jean-Marc Colomar
PS - Je vous traduit ça dès que possible.
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Frascuelo - Pauloba, le mano a mano en question
Un sujet de débat est actuellement au cœur des discussions d’une partie de l’afición madrilène. Faut-il ou non appuyer la plataforma qui réclame l’organisation du mano a mano «Frascuelo» - Pauloba ?
Les frileux ont plusieurs craintes : une récupération de la chose par les taurinos et l’utilisation qui pourra en être faite. Est également avancé le fait que malgré l’immense cariño que nous avons pour ces deux toreros, la probabilité d’une tarde glorieuse est faible. D’autres avancent encore que les aficionados ne sont pas des organisateurs et n’ont pas à l’être. Mais l’argument, à mon sens, le plus pertinent est que nous demandons la programmation de deux matadors sans nous préoccuper, à priori, du principal : la ganaderia.
Ben oui... je reconnais et bien volontiers que pour cette fois nous prenons les choses à l’envers. Mais comme dit l’autre : «un coup fait pas la pute…» Nous reviendrons sur la question un de ces jours.
Pour le reste, les arguments de ceux qui sont favorables sont de plusieurs sortes.Que les taurinos récupèrent la chose est au bout du compte sans importance. S’ils la récupèrent de façon positive, en cas de succès, grand bien leur fasse. Tout le monde sera content. Si au contraire, en cas d’échec, plus probable, ils l’utilisent pour nous pointer du doigt et «se payer» une partie de l’afición, finalement, peu importe également. Au mieux nous ignorerons les attaques, au pire nous polémiquerons, ce qui, tout de même, devrait être à notre portée ! Pour ce qui est de jouer les organisateurs de corrida, disons que personne ne joue à rien. Des aficionados expriment publiquement un désir, c’est tout. D’ailleurs, si la corrida sort mal présentée et mauvaise, ça ne sera pas la faute de l’afición mais de l’empresa et du ganadero… Y no pasa nada. Quant aux toreros, s’ils fracassent eh bien ce sera de leur fait également…
Je ne pense pas qu’il nous faille chercher la petite bête, s’attarder inutilement ou se compliquer trop la vie. Il est vrai que la probabilité que cette course soit triomphale est faible. Et alors ? Faut-il rappeler le nombre de courses insipides, voire minables, organisées à foisons chaque temporada à commencer par certaines qui se déroulent dans la première arène du monde ?
Cette demande, n’est finalement rien d’autre que la constatation qu’il existe encore quelques aficionados romantiques, amoureux d’une autre conception du toreo que celle qui consacre le règne du derechazo à la chaîne, fut-il donné avec la plus savante des connaissance. C’est tout, et ça n’est peut être pas la peine d’en faire une montagne. Quel est le risque ? Aucun à mon sens. Au mieux nous prendrons plaisir à voir toréer ces deux là. Au pire nous nous ennuierons. Ca ne sera pas la première fois et pas la dernière. Il n’y a aucune raison, mais vraiment aucune, de nous auto flageller. Il me semble.
Pour voter c'est par là (firma aquí para pedir el mano a mano) : http://plataformamanoamano.blogspot.com.
17 novembre 2007
La corrida YouTube et Ferran Adrià Productions
Au risque de sembler cracher sur ce que nous avons tant aimé (le brindis du Pana restera un moment "youtubesque" d’anthologie) vous avez remarqué qu’à Camposyruedos nous avons pris nos distances avec la "corrida YouTube". Nous avons pris conscience du danger et de l’approximation de ce média à l’occasion des dérapages qui ont accompagné la mise en ligne de la faena de Juan Bautista à Madrid et dont tous les présents, ceux qui l’on vue, en vrai, ont confirmé la qualité. Mais YouTube ce n’est pas que les toros. C’est aussi les tapas et la cuisine espagnole par exemple. Tenez, en faisant une recherche sur un petit cuisinier de Roses, perdu au fond de sa crique, un certain Ferran Adrià, voilà ce que l’on peut découvrir… Camposyruedos est heureux de vous présentrer : Ferran Adrià Productions. De toute façon c’est bien connu, les trois étoiles Michelin sont peu rentables et il faut se diversifier pour équilibrer les comptes. Vive la cuisine espagnole ! Vive Ferran Adrià ! Et puis ça faisait longtemps que nous n’avions pas parlé cuisine…
Voici donc Ferra Adrià Productions. A regarder mais aussi à écouter !
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16 novembre 2007
Moins de seize : Aplausos en deux services
Dans son édition d’aujourd’hui André Viard expose l’explication et l’éclairage donné au nouveau ou futur règlement basque de la manière suivante :
« Aitor Uriarte, directeur des Jeux et Spectacles du gouvernement basque, a exposé à notre confrère Aplausos les raisons pour lesquelles le futur règlement taurin stipulera probablement que les mineurs de moins de seize ans pourront aller aux arènes en compagnie d'un adulte. "Cette mesure permet une perméabilité entre les générations. C'est ce qui se passe aujourd'hui dans les faits. Combien de mineurs de moins de seize ans se rendent-ils seuls aux arènes ? Ils le font en compagnie de leurs pères ou grand-pères qui sont les mieux placés pour leur expliquer l'essence du spectacle. Ce qui serait risqué me semblerait être le contraire, laisser un mineur aller seul à une corrida pouvant aboutir à ce qu'il en ait une perception faussée. Si nous exigeons une qualité supérieure du spectacle et que les jeunes vont aux arènes en compagnie d'un adulte qui leur en explique l'essence, nous favorisons l'émergence d'un aficionado de meilleure qualité." En réponse à la question de savoir quel est le but poursuivi par ce nouveau règlement, Uriarte répond : "Garantir une meilleure qualité de spectacle pour de longues années. Que les aficionados soient tranquilles, nous n'agissons contre personne." Propos à méditer sans esprit partisan ». (Fin de citation).
Vous connaissez tous la position de CyR sur la question. Aussi, pour ne pas nous faire taxer d’avoir un esprit partisan, plutôt que commenter nous-mêmes ces explications et précisions données par Luis Uriarte, nous laissons la parole au directeur d’Aplausos qui apprécie, ainsi que vous allez pouvoir le lire dans cet entretien publié dans son journal (pardon pour la traduction) :
« Journalistique et très opportun – un dix pour le compañero – le reportage-interview réalisé par Iñigo Crespo sur le directeur des jeux et spectacles du gouvernement basque, Aitor Uriarte, qui n’est rien d’autre que le père de ce brouillon du nouveau règlement taurin basque qui nous a tous fait dresser les poils dans la mesure où il interdit – les hommes aiment interdire, par vice – l’accès aux toros aux moins de seize ans non accompagnés.
La norme, cela n’aura échappé à personne, est un coup de feu en plein cœur du futur de la Fiesta ou un premier pas, une concession à la pression abolitionniste, d’une minorité infatigable et combative. Je ne vois pas comment l’interpréter autrement. Les explications données par Monsieur Uriarte sont pour le moins creuses et si ce n’est pas du pur cynisme c’est pour le moins une déconsidération de l’intellect des aficionados. Il dit que de toute façon les mineurs ne vont pas seuls aux arènes et je lui réponds que dans ce cas pourquoi alors l’interdire…
Il en arrive même à dire que l’intention de la loi est d’obtenir que les pères ou les grand-pères expliquent l’essence du spectacle aux mineurs. C’est à dire qu’il veille sur la Fiesta… Il dit également qu’il est dangereux qu’un mineur aille seul aux toros. Et il se fend d’autres perles tranquilisatrices comme considérer que l’objectif de cette mesure est la formation d’aficionados de meilleure qualité. Il doit forcément penser que nous autres, majeurs ou mineurs, sommes assez stupides pour avaler cela.
On pouvait penser de bonne foi que le risque pour les mineurs était d’aller au botellón, dans les stades avec les ultras, faire de la moto à des heures indues ou dans de mauvaises conditions, qu’ils achètent des publications qui promotionnent le nettoyage génétique ou le rôle de la femme comme objet sexuel, et qui sont vendues librement… mais non ; il résulte que ce qui est risqué, pour ce monsieur est que les mineurs puissent aller seuls aux toros… Si lo ha cagado, lo siento pero huele (euh là, je traduis pas…)
Et en outre il veut se faire mousser et dit que c’est pour améliorer la qualité des aficionados… La question est maintenant de savoir si les professionnels et les aficionados basques laisseront perdurer pareil abus. Cette justification n'est pas autre chose qu'une œuvre majeur du cynisme. »
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Revue Aplausos
Perle
Pour me rafraîchir la mémoire et ainsi mieux préparer la petite série de textes qui sera prochainement consacrée, sur le blog, au régime juridique de la corrida en France, je me suis replongé notamment dans les différentes décisions de justice concernant la corrida prises ces dernières années.
Et c'est là que je suis tombé sur une perle qui, je l'avoue, m'avait échappée.
Vous vous souviendrez sans doute du contentieux qui avait opposé à la fin des années 1990 l'association des Aficionados Prácticos et la Fédération anti-corrida, à l'occasion d'une fiesta campera organisée au Mas des Pointes. Ce contentieux avait fort heureusement connu une issue favorable pour l'association d'aficionados et leur hôte.
Mais ce qui a cette fois attiré mon attention, c'est l'attendu suivant :
"Attendu [...] qu'il est reproché au bétail de présenter des cornes afeitées alors que cette pratique est courante dans la corrida formelle même si elle est déplorée par le public" (partie de texte surlignée par mes soins).
N'est-ce pas magnifique ? Un arrêt de la Cour d'appel de Nîmes qui, certes de façon incidente, reconnaît explicitement le caractère courant de l'afeitado dans les corridas formelles !
Luis de Pauloba
Dans le cadre de notre soutien actif à la plataforma, je reprends ici une photographie qui m’est chère. Luis de Pauloba à Madrid, pour ce qui restera sans doute comme sa plus importante faena face à un toro portugais de Murteira Grave. Si l’épée... sans doute sa vie aurait changé...
Quant à la plataforma elle ne se porte pas trop mal et les débuts sont prometteurs : 100 signatures dès le premier jour.
http://plataformamanoamano.blogspot.com & pour voter c'est par là (firma aquí para pedir el mano a mano).
14 novembre 2007
Moins de seize : la lettre de Jean Grenet
Une autre pièce est à verser au dossier sur la lutte contre les "antis". Curieusement, cette pièce a été très peu citée, pour ne pas dire pas du tout. Il s’agit d’un document, à notre sens très important. En effet, Monsieur Grenet, maire de Bayonne a écrit, lui aussi, au Président de la République, en sa qualité de maire, en sa qualité de Président de l’UVTF mais également et surtout en sa qualité de Président du Groupe Tauromachie de l’assemblée nationale réunissant plus de 70 députés de toutes obédiences.
Et c’est finalement ce courrier, assez remarquable il faut bien le dire, qui aurait dû retenir l’attention de tous. Le texte est court, extrêmement pragmatique et surtout sans aucune concession aux "antis". Et il n’est pas interdit de supposer que le Président Sarkozy n’a pas été insensible à une telle prise de position émanant de plus de 70 élus du peuple. Nous n’hésitons pas, à Camposyruedos, à « rouspéter » après les autorités lorsqu’elles nous semblent défaillantes. Il serait injuste, cette fois, de ne pas souligner et se féliciter de cette initiative du maire de Bayonne.
Vous pouvez lire le courrier sur le site de l’UVTF.
13 novembre 2007
Votez !
C’est très sérieux figurez-vous. Quelques miens amis ont décidé de prendre l'initiative de demander à l’empresa des arènes de Las Ventas de Madrid l’organisation d’une corrida un peu particulière : un mano a mano. L'originalité du truc n'est pas la formule en elle-même ; ce sont les deux protagonistes qui seraient : Carlos Escolar 'Frascuelo', et Luis de Pauloba. Et donc, pour ce faire, une plataforma vient d’être créée, un peu comme celle de Luis Corrales, mais aux ambitions plus limitées, à la durée de vie logiquement plus éphémère. Voilà un délire tout à fait sérieux qui a toute notre sympathie et évidemment notre appui.
Pour ce faire il faut donc aller sur le site de la plataforma et voter. Pour voter c'est par là (firma aquí para pedir el mano a mano).
A ce jour, nous croyons savoir que la direction est d’ores et déjà informée de cette démarche. Nous n’avons évidemment aucune idée de son aboutissement. Il est encore bien trop tôt. Pour l’instant nous ne pouvons que vous inviter à voter, voter, voter.
Nous vous tiendrons bien évidemment régulièrement informés de l’évolution de la chose. En attendant : votez ! Et n’hésitez pas à diffuser l’information.
http://plataformamanoamano.blogspot.com
12 novembre 2007
Moins de seize : au tour du Sud-Ouest
Après ceux du Sud-Est, ce sont les critiques taurins du Sud-Ouest qui se sont prononcés sur l’éventuelle interdiction au moins de seize ans d’accéder librement à nos arènes. Les critiques du Sud-Ouest ont voté, à l’unanimité, la motion "Toros" pour dénoncer ce risque. Il n'est pas intéressant de souligner que ce vote a réuni des personnalités aussi différentes que Zocato, Marc Lavie et, évidemment, des collaborateurs de la revue Toros. Voilà un éclectisme qui tombe à point et qui devrait éclairer et ouvrir les yeux à ceux qui ne veulent voir dans cette affaire qu’une querelle de personnes, un vulgaire crêpage de chignon ou une guéguerre de chapelles sans intérêt. Je reconnais qu’il est infiniment plus simple de réduire le fond de ce délicat problème à une simple et inintéressante question de personne qu’à un véritable débat d’idées, ce qui, à la vérité, ne constitue pas autre chose qu’une manœuvre peu élégante et bien maladroite pour éviter de discuter du fond ; ce que nous continuerons à faire à Camposyruedos chaque fois que nous le jugerons nécessaire.
En revanche, à la lecture de l’édition de ce jour de Terres Taurines, il semblerait que les organisateurs du Sud-Ouest soient, eux, favorables à l’interdiction aux moins de 16 ans non accompagnés. L’histoire ne dit pas s’ils ont déjà réfléchi aux modalités d’application d’une telle mesure.
11 novembre 2007
Photographies (II)
Vous allez voir maintenant que sur le fond, la démarche photographique numérique est très similaire à celle, traditionnelle, de l’argentique. Que faisions nous à l’époque ? Putaing ! j’ai l’impression d’avoir quatre-vingts balais...
Donc, pour faire simple, nous faisions un tirage basique, histoire de voir. Nous nous rendions alors compte que le toro était trop sombre, l’habit de lumière trop clair, le visage du torero trop ceci ou trop cela... Et c’est à partir de ces constatations que nous commencions à travailler. Découper un cache pour exposer moins fort le toro, définir une durée d’exposition, rajouter un temps de pause sur l’habit de lumière. C’était du bricolage, de l’artisanat. On y allait doucement, on tâtonnait et peu à peu on obtenait le tirage souhaité. Voilà pour faire court, mais ça pouvait prendre des heures.
En photographie numérique c’est finalement la même chose. On ouvre l’image dans son logiciel, on corrige les niveaux, et si certaines zones sont trop sombres ou trop claires il existe différentes méthodes pour les foncer ou les éclaircir. C’est exactement comme pour une manipulation traditionnelle. Une des grosses améliorations apportée par le numérique est le réglage de la netteté. Il nous est possible de rendre une image bien plus nette que celle imprimée dans la carte mémoire.
Tenez, voici un exemple d’évolution photographique. Il s’agit d’un cliché de Juan Bautista pris en septembre dernier à la corrida goyesque arlésienne. Ce sera notre façon de rendre hommage au Camarguais pour sa sortie en triomphe madrilène...
« Domecquismo »
Nous avons vu récemment que, majoritaire au campo, l’encaste Domecq l’était aussi, sans surprise, dans le ruedo. Il y a près d’un an de cela, j’avais eu l’occasion de lire, dans l’édition internet de la Tribuna de Salamanca et via le blog de Rosa Jiménez Cano, un article polémique de Paco Cañamero sur la famille Domecq1.
Quelque temps auparavant, apparemment à la suite d’une critique des carteles de la féria locale lors de leur présentation à la presse, le journaliste charro se vit sanctionner par une mise au ban du journal. Histoire de réfléchir un peu...
Aux dernières nouvelles, il semblerait que Paco se soit calmé, si j’en juge par cet improbable papier « promotionnel », portrait consacré à notre « Dédou Premier »2 national, aussi mignon et convenu que celui sur Domecq était féroce ! Imprudent, Paco Cañamero fait le grand écart ; mal informé (?), il manie avec zèle la brosse à reluire. Décidément, André Viard est vraiment très fort !
1 Avant lui, son mentor Alfonso Navalón s’était déjà essuyé les bottes sur Álvaro Domecq…
2 Sobriquet © ANDA.
Un petit niveau de castillan comme le mien + un dico devraient suffire :
Juan Pedro Domecq, el verdugo de muchos históricos encastes (21.12.2006) ;
La pasión taurina de un entusiasta artista francés llamado André Viard (03.11.2007).
Image Des Domecq au campo © jamonesdomecq.com
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Domecq,
Encastes,
Paco Cañamero,
Philippe Marchi
Moins de 16 : la FSTF enfonce le clou
Voici le dernier communiqué de la Fédération des Sociétés Taurines de France sur le thème : "La corrida : une culture vivante indéracinable, un attachement inébranlabe, une liberté pour des millions de femmes, d'hommes et d'enfants". Nous espérons que l'élan constaté lors de la signature de l'Appel de Samadet, subsistera dans une période où il vaut mieux être unis pour défendre notre culture.
Ce communiqué doit connaître la plus large diffusion possible.
Nous l'adessons ce jour :
- A M. le Président de la République, M. le Premier Ministre, M. Jean-Louis Borloo, Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, Mme Roselyne Bachelot-Narquin.
- Aux présidents des quatre régions taurines, Mrs Michel Vauzelle, Georges Frêche, Martin Malvy et Alain Rousset.
- Aux 46 maires adhérents de l'Union des Villes Taurines de France.
- Aux 55 membres du groupe parlementaire d'études sur la tauromachie.
- Aux autres entités taurines.
- Aux agences de presse et de télévision.
- Aux journaux quotidiens nationaux et régionaux et aux principaux hebdomadaires.
- Aux journaux, sites et journalistes taurins.
Aficionados, transmettez-le à vos élus locaux et autour de vous !
Vous pouvez lire le communiqué de la FSTF par là.
10 novembre 2007
Campo
Une autre sorte de campo... dans les Corbières. Le plaisir et l'émotion sont différents, mais tout aussi intenses. Evidemment on clique sur la photo.
Libellés :
François 'Solysombra' Bruschet,
Photographie(s),
Toros y Vinos
09 novembre 2007
Plaisir d'offrir, joie de recevoir...
C’est au tour de l’ANDA de se pencher sur l’affaire des mineurs de moins de seize. C’est par là... Pour le reste, d'autres villes devraient très prochainement suivrent l'exemple de Bellegarde et se déclarer officiellement villes taurines de France. Nous vous tiendrons bien évidemment informés.
Photographies (I)
L’apparition de la photographie numérique a brouillé de nombreuses cartes, ouvert de multiples possibilités et changé énormément d’habitudes.
Nous nous y sommes tous mis, avec plus ou moins d’enthousiasme et avec une crainte avérée, eu égard au nouveau support, dématérialisé, et des débuts logiquement chaotiques. Oubliés les négatifs, leur fine pellicule de gélatine, les planches contact et les odeurs des produits chimiques. Oubliées les longues heures, passées debout, dans la pénombre d’une lumière inactinique – la mienne était jaune ! – à maquiller, faire monter, éclaircir pour enfin aboutir, plus ou moins, au résultat souhaité.
A mon sens, le principal défaut du numérique est d’avoir fait passer à la trappe la richesse du noir et blanc, son grain et sa profondeur à ce jour inimitables, sa chaleur et l’émotion qui s’en dégage. Ah… cet univers de Sebastião Salgado, ces gris profonds et émouvants, tout ça évidemment combiné à l’œil du maître. Nous avons vu que les dernières évolutions des logiciels comblent peu à peu mais lentement ces carences. Il reste du chemin à parcourir. Et sans doute l’avenir nous apportera de plus grandes satisfactions encore.
Quoi qu’il en soit, il ne me paraît pas inutile de faire ici un parallèle entre le post-traitement informatique et l’ancien, celui du labo traditionnel car au bout du compte le travail reste le même, éclaircir, maquiller, faire monter, avec des nuances évidemment et des améliorations également.
Un négatif a toujours été un document à interpréter. Tout le monde conçoit qu’il ne représentait pas, en tant que tel, un travail abouti. Ce n’était qu’une première étape, un point de départ. Le photographe photographiait et le tireur tirait les épreuves. Car le tirage était et demeure un travail et un métier à part entière. Les grands photographes, les très grands, ont même leur tireur attitré, toujours le même. Donnez le même négatif à quatre tireurs différents et vous n’obtiendrez pas une seule photographie mais quatre interprétations personnelles d’un même sujet.
Eh bien finalement, en numérique, c’est un peu la même chose. Un fichier numérique qui sort d’un appareil photo, c’est un peu un négatif, sauf que là il est positif, mais qu’au bout du compte cela ne change pas grand-chose à la démarche. Car un fichier numérique n’est pas pour autant un produit fini et abouti. Ce n’est pas à proprement parler une photographie achevée, sauf à se satisfaire d’une médiocrité certaine. Tout comme un vieux négatif, un fichier numérique n’est qu’un document brut à interpréter pour enfin le rendre présentable.
A suivre...
Bidouillage matinal ?
Et d’ailleurs, où commence vraiment le bidouillage ? Qu’y a-t-il de « faux » dans cette présentation ? A vrai dire rien… Vaste débat, que nous aurons un de ces jours sur Camposyruedos car depuis l’apparition de la photographie numérique, il ne sera pas inutile d’apporter au lecteur quelques éclaircissements.
Libellés :
Arles 2007,
François 'Solysombra' Bruschet,
Photographie(s)
08 novembre 2007
Statistiques
En juillet dernier Bastonito a présenté sur son blog des statistiques concernant la fréquentation des arènes et l’évolution de l’intérêt du public pour la chose taurine.
De manière assez morbide il faut bien le reconnaître, il s'est « amusé » à calculer combien de temps il reste à notre Fiesta avant que la modernité ne la fasse définitivement ranger au rayon des souvenirs.
A Camposyruedos, si nous sommes parfois « toca cojones » nous n’en sommes pas pour autant d’un pessimisme noir. Il naîtra toujours, quelque part sur la planète des toros, un José Tomás, un Manzanares, un Cid, un Rincón, un Fundi, ou plus simplement un modeste, même laborieux, décidé à se mettre devant, et à nous émouvoir.
Nous sommes plus inquiets à la vérité sur la véritable épuration ethnique qui se fait au niveau du campo et de la cabaña brava car nous voyons difficilement comme pourrait se faire un retour en arrière. C’est cette situation-là qui nous inquiète, plus que les aléas de l’escalafón lui-même, que, de toute façon, nous ne consultons plus et depuis très longtemps, ou même que l’afeitado.
Bastonito met, lui, le doigt sur un problème à la vérité très inquiétant, vous allez en juger par vous-même. Ce dernier est allé chercher les résultats d’une série d’enquêtes menées depuis 1971 par un institut espagnol : Gallup (aujourd'hui Investiga).
Cet institut mesure depuis 1971 l’intérêt que le peuple espagnol porte à la corrida. Si ces résultats sont utilisés par les "antis", les taurins, eux, semblent ne pas en faire cas.
Sur le graphique ci-dessus Bastonito a dessiné une ligne de tendance des trente dernières années. En fuchsia figure le pourcentage des personnes absolument pas intéressées par les toros ; en bleu la représentation celui de celles qui sont intéressées ou très intéressées par les toros.
Durant les 35 années qui vont de 1971 à 2006 les personnes intéressées par les corridas de toros sont passées de 55% à 28% alors que celles qui s’en désintéressent sont passées de 43% à 72%.
Il nous semble important de faire le distinguo entre, d’une part les personnes très intéressées soit 7%, c'est-à-dire les aficionados, et d’autre part, ceux qui éprouvent pour la chose taurine un intérêt simplement limité mais qui sont susceptibles de passer par la taquilla.
On voit bien que ce ne sont pas les aficionados qui font vivre le système ou alors très partiellement. Nous sommes minoritaires et ce n’est pas une nouveauté.
Et Bastonito de conclure par la question qui tue : quel est le pourcentage de « très intéressés » et surtout de « un peu intéressés » nécessaire pour que soit rentable l’organisation d’une corrida ?
C’est bien difficile à dire mais si les choses continuent ainsi et si la tendance ne s’inverse pas il est difficile d’envisager l’avenir avec optimisme.
Nous persistons ici à penser que ce n’est pas avec un perpétuel adoucissement des mœurs taurines, avec une perpétuelle « humanisation » de la Fiesta que la tendance peut s’inverser en notre faveur. Et la dernière évolution qui consiste à accepter la quasi disparition du tercio de varas, puisque, même à Madrid, aujourd’hui, on peut triompher avec un animal supportant à peine plus d’un picotazo, ne plaide pas en faveur de l’avenir. Ce n’est pas être ultra, ou taliban ou dieu sait quoi que de penser que la pierre de voûte de la Fiesta est le toro. Et que si ce qui sort en piste, en plus d’être mutilé, ne fait plus peur à grand monde, et ressemble plus à un agneau qu’à un fauve, alors nous passerons, et à juste titre, pour des barbares.
07 novembre 2007
Las Ventas, cuvée 2007 (II)
Dans un récent commentaire à Las Ventas, cuvée 2007, j’affirmais « qu'il aurait été plus judicieux de comptabiliser le nombre de bêtes effectivement combattues et tuées... » Finalement, je l’ai fait... En 2007, dans la Plaza de Toros de Las Ventas à Madrid, 384 bêtes (hors rejón, mais en intégrant la Beneficencia) ont trépassé, au cours de 38 corridas de toros et 26 de novillos, dont 1 novillada sans picadors. Sur ce total de 384 bêtes, 156 étaient des novillos et 39 sont sortis comme sobreros. Blogger n’acceptant pas, aujourd’hui comme hier, les tableaux... :
39,1 % DOMECQ (138 titulaires # 12 sobreros)
7,6 % ATANASIO FERNÁNDEZ (26 # 3)
7,3 % ALBASERRADA (28 tit.)
6,2 % SANTA COLOMA (22 # 2)
5,7 % DOMECQ/NÚÑEZ (19 # 3)
4,7 % TORRESTRELLA (16 # 2) ● NÚÑEZ (11 # 7)
3,4 % ATANASIO FERNÁNDEZ/CONDE DE LA CORTE (12 # 1)
2,9 % SALTILLO (11 tit.) ● VILLAMARTA (9 # 2)
1,8 % CONTRERAS (6 # 1) ● DOMECQ/CONTRERAS (5 # 2)
1,6 % CONDE DE LA CORTE ● CUADRI ● GALLARDO ● PEDRAJAS > 6 tit. chacun
0,5 % MURUBE (1 # 1)
5,2 % DIVERS : Araúz de Robles1 (6 tit.) ● Murteira Grave2 (5 tit.) ● Palha3 (6 tit.) ● DOMECQ/TORRESTRELLA ● MURUBE (ligne directe)/CONTRERAS ● GAMERO CíVICO/MURUBE > 1 sobrero chacun
La dernière fois, un lecteur m’a fait remarquer que Torrestrella pouvait être rangé avec Domecq. Pas si sûr, car lorsque l'on regarde à la loupe les mélanges du druide Álvaro Domecq, on serait plutôt tenté de l’incorporer avec les Domecq/Núñez ; un peu vexant pour celui qui fut le premier à oser le mélange des deux sangs parladeños... avec « quelques gouttes de sang vazqueño » ! Que dire de la n.s.p. de Torrenueva d’origine Cebada Gago (Domecq/Núñez/Torrestrella, tiens...) ? Encaste ou ganadería particulière ? Dans un registre un peu différent, j’ai choisi, cette fois-ci, de dissocier Albaserrada de Santa Coloma, suivant en cela la classification d’Adolfo Rodríguez Montesinos4 qui considère que les asaltillados Albaserrada, bien qu’apparentés à Santa Coloma, constituent un encaste propre. Du coup, Santa Coloma retrouve un niveau plus conforme avec son état de santé réel dans la cabaña brava ; la branche Buendía résistant tandis que celles de Graciliano et de Coquilla (peut-être une question de tamaño pour cette dernière, certainement pas de trapío !) sont priées d’aller voir ailleurs si l’accueil est meilleur ! D’autre part, Adolfo R. Montesinos, toujours lui, estimant que l’apport de Domecq (1985)5 chez Baltasar Ibán (Contreras/Domecq) n’ayant pas permis, sur une durée appréciable, de modifier significativement le type morphologique de la casa, classe cet élevage à la rubrique Contreras, tout comme El Jaral de la Mira (pur Ibán), etc.
Voilà, les seuls réels bénéficiaires de ce mode de calcul (prise en compte du nombre de bêtes, avec sobreros et Beneficencia inclus) semblent être : Núñez (7 remplaçants) et Murube qui fait, "purement" et simplement, son apparition. Sur ce, je m’en vais prendre un truc pour soulager ma pauvre tête !
1 Sangs variés/Gamero Cívico/Saltillo
2 Gamero Cívico/Pinto Barreiros/Domecq/Núñez
3 Pinto Barreiros/Pedrajas/Domecq/Torrestrella par Torrealta et Baltasar Ibán (séparé)
4 Adolfo Rodríguez Montesinos, Prototipos Raciales del Vacuno de Lidia, Ministerio de Agricultura, Madrid, 2002. (env. 20 €)
5 Bernard Carrère, Les élevages de taureaux de combat, Origine et évolution, 2ème édition, L’Atelier des Brisants, Mont-de-Marsan, 2007. (env. 50 €)
Image Puisqu’il en a été question... 'Cesguno', estampe de 528 kg annoncée berrendo en castaño, novillo d’El Jaral de la Mira lidié le 23 septembre 2007 à Madrid. 'Cesguno' est marqué à droite alors que les ibán le sont à gauche... © Manon
06 novembre 2007
El sitio donde cogen los toros
Un site espagnol a fait récemment état d’une réponse d’Enrique Ponce aux déclarations de José Tomás. Là aussi, la guéguerre continue. Le Valencien avance que la phrase « il faut se mettre dans le sitio où te prennent les toros » (hay que ponerse en el sitio donde cogen los toros) est une affirmation absurde et ignorante.
A la vérité j’ignore totalement si José Tomás, ou quelqu’un d’autre, a réellement prononcé cette phrase : « hay que ponerse en el sitio donde cogen los toros ». Je ne sais pas si cette idée de fouler un terrain par avance compromis a été énoncée comme un théorème du toreo, une règle de l’art de bien toréer.
Ce dont je suis certain, en revanche, c’est qu’avant son retour et la folie médiatico-intello qui l’a accompagné, nous disions de José Tomás : « il met son corps là où les autres mettent leur muleta ». Cette formule en revanche est une certitude ; c’était avant, et ce fut du vécu. Je ne sais pas pourquoi, mais ces échanges ont fait remonter à ma mémoire cette formule du maestro, Antoñete : « Si el riesgo y la cogida no tienen premio esto no es la Fiesta de los toros, sino un mercado persa. », soit plus ou moins : « Si le risque et la cogida n’ont pas de prix alors ceci n’est pas la Fiesta mais un marché persan. »
La photo qui illustre ce post, n’a pas de lien direct avec celui-ci. Quoiqu’en matière de cogida José Luis Bote a plus que son avis sur la question. Un lointain souvenir donc, cérétan, émouvant, et sous la pluie.
Les plaisirs de l'hiver
La pause hivernale est l'occasion de prendre du recul par rapport à notre passion. Elle est source de réflexion, et laisse plus de temps pour faire le point sur ce que l'on a vu pendant la temporada. Entre deux lectures et en attendant les visites au campo, elle permet de faire le tri des photos et, comme il n'y a pas que les toros dans la vie, nous laisse aussi plus de temps pour découvrir d'autres sources de réjouissance.
Bien qu'ayant vécu de nombreuses années dans le Sud-Ouest, auquel je demeure bien sûr fortement attaché, je n'avais jamais eu l'occasion de me rendre à la chasse à la palombe. C'est désormais chose faite grâce à un grand ami qui m'a invité dans la palombière familiale.
Qu'il en soit ici, de même que François et Danny, chaleureusement remercié.
Voici encore une tradition menacée et qui pourtant porte en elle beaucoup de valeurs chères à notre culture.
Bonne saison à tous les chasseurs, des Landes, du Gers et d'ailleurs !
05 novembre 2007
Yonnet : cinqueños pour 2008...
Une nouvelle galerie campera sur Camposyruedos et une nouvelle manière de vous présenter nos clichés. Vous aimez ? Surtout n’hésitez pas à nous faire part de vos commentaires sur cette nouvelle présentation car nous travaillons à une future organisation du site et donc nous essayons d’ores et déjà quelques petits changements. Ces photographies ont été prises au mois d’août dernier chez Quinquin Yonnet (pour les novillos) et chez Hubert ensuite.
Les toros adultes portent les fers d’Hubert et Françoise et seront lidiés en 2008, à l’âge de cinq ans. A ce jour et à notre connaissance aucune destination n’est encore envisagée. Nous devons retourner très prochainement sur ces pâturages toujours aussi émouvants et ne manquerons pas de vous en donner des nouvelles. En attendant envoyez vos critiques sur cette nouvelle galerie à : contact@camposyruedos.com.
Libellés :
Camargue,
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François 'Solysombra' Bruschet,
Yonnet
Joselito Adame
Au Mexique, Joselito Adame confirme les bonnes impressions laissées ici. Nous en sommes ravis pour lui. Cela me donne l'occasion de tester une nouvelle méthode pour passer de la couleur au noir & blanc. Les premiers essais avaient été effectués avec le logiciel Nikon Capture NX, celui-là avec Adobe Photoshop CS3... Il y a vraiment du progrès et du coup l'avenir du noir & blanc numérique s'éclairci !
Au fait... picoti picota... (... ?), c'est bien d'un plat du Bulli dont il s'agit : une sphérification de mozzarela ;-)) Rien à voir avec la première arène du cosmos, qui n'est pas Dax, meeerde !!!
04 novembre 2007
03 novembre 2007
Las Ventas, cuvée 2007
Madrid, c’est fini ! La temporada madrilène 2007 est close depuis le 28 octobre dernier ; 42 corridas et 26 novilladas, dont 1 n.s.p., furent organisées à Las Ventas par l’empresa Taurodelta. Avec 68 rendez-vous con los toros, Madrid est incontestablement la ville taurine la plus importante du cosmos ! N’en déplaise aux Nîmois(es)… Ne seront pas pris en compte dans la petite analyse qui va suivre, les sobreros (quelle galère !), les 4 corridas de rejón ainsi que le seul contre 6 de 5 élevages différents (sic) de la Beneficencia. Sur les 63 lots de toros et novillos qui nous intéressent ici, 25 étaient d’encaste Domecq ; comptabilisant à lui seul près de 40 % des élevages invités à en découdre sur le sable de la capitale ! Waouh ! Et l’on s’étonne de voir les ganaderos opter pour ce cépage ? À noter également que 64 fers (94 %) appartenaient à la toute puissante Unión de Criadores de Toros de Lidia (UCTL) et seulement 4 à la Asociación de Ganaderos de reses de Lidia (AGL). Quant aux deux autres…
Blogger n’ayant pas voulu de mon tableau (tant pis), le résultat des opérations sera présenté ainsi :
● après Domecq (25 élevages sur 63, dont quelques récidivistes # 39,7 %) et Santa Coloma (9, se déclinant en 5 Albaserrada — 2 contrats pour chacun des Martín ; pas de jaloux ! —, 3 Buendía et 1 Buendía/Graciliano # 14,3 %), viennent Atanasio Fernández (6, mais 3 apparitions pour le seul El Puerto de San Lorenzo !!! C’est bien connu, quand on aime… # 9,5 %) et Torrestrella (3 # 4,8 %) ;
● ensuite, avec 2 représentants (3,2 %), arrivent Núñez, Saltillo et Villamarta ;
● puis avec un seul (1,6 %), Conde de la Corte, Contreras, Cuadri, Gallardo et Pedrajas ;
● les 14,3 % restant se partagent entre du Domecq/Núñez (3 qui n’en font que 2, Núñez del Cuvillo doublant), de l’Atanasio Fernández/Conde de la Corte (2), du Domecq/Contreras (1), sans oublier les cas "compliqués" de Palha, Murteira Grave et Araúz de Robles.
Absents les encastes Hidalgo-Barquero et Murube (hors rejón), "pur" Gamero Cívico, Urcola et Vega-Villar ; absents aussi Coquilla et "pur" Graciliano ; absentes les castas Cabrera, Navarra et Vazqueña !
À titre de comparaison, Terre de toros nous proposait, pour la temporada madrilène 2005, une étude plus visuelle et complète. Allez-y voir !
Image En 1995, le grand peintre allemand © Gerhard Richter (Dresde 1932) réalise cette magnifique Arena (51 cm x 71 cm). À la rubrique Paintings, vous pourrez admirer toutes ses peintures ! Émotion garantie… Arena est disponible en format carte postale à la librairie du Carré d’Art de Nîmes. Il s’agit très vraisemblablement de Las Ventas si l’on en juge, notamment, par les drapeaux de la Comunidad de Madrid.
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02 novembre 2007
"Sire, lisez-les..."
Allez lire le nouvel édito de l'ANDA, eux aussi ont écrit au Président de la République... C'est moins ronflant que d'autres mais ça vaut vraiment le coup d'oeil... Bonne lecture.
"La vieille dame" répond à André Viard
La revue Toros nous a transmis ce communiqué du 1er novembre 2007 concernant l'affaire que vous savez.
Communiqué de la revue TOROS (1er novembre 2007)
Suite à son communiqué précédent, la revue a été prise à partie, avec véhémence, les 29 et 30 octobre, dans la rubrique « actualités » du site Terres taurines. Voici sa réponse.
« La vieille dame » répond à André Viard
Mon tout-petit,
Puisque tu persifles abondamment sur mon âge vénérable, tu permettras que je t’appelle ainsi, en souvenir aussi des dessins que tu m’envoyais si gentiment, dans le passé, et que je publiais alors avec plaisir. Trente ans se sont écoulés et, maintenant, dans tes « actualités » de Terres taurines (29-30 octobre), je lis sous ta plume que « je grince », que je suis « sourde », que j’ai des « aigreurs », et que je veux « faire croire que j’existe encore » — bref, tu t’imagines que le curé est déjà dans l’escalier, et ça a l’air de te faire plaisir. Je te dirai même que, quand tu écris « mon devoir est de la prier de se taire », je me demande si, te croyant investi de Dieu sait quelle mission, tu ne rêves pas de venir, un soir, m’étouffer avec mon oreiller !
Tout cela m’inquiète beaucoup. Pour toi, bien sûr, car je suis très gênée de penser qu’un matador de toros, et Français, puisse devenir un agresseur de vieilles dames. Et quand tu me compares à « l’hidalgo famélique du Lazarillo de Tormes qui sortait dans la rue un cure-dent à la bouche pour faire croire qu’il avait mangé », je suis tout simplement effarée de voir que tu connais dans les moindres détails cette littérature picaresque sans foi ni loi, qui fourmille d’arrivistes et de menteurs. Mais, en ce qui me concerne, je suis désolée de te l’apprendre, je mange à ma faim et, même si j’aurai quatre-vingt-trois ans aux prunes, je me porte comme un charme, d’autant que je suis bien gardée et entourée d’affection.
J’ai en effet une équipe de collaborateurs dévoués et compétents, dont le rajeunissement régulier constitue un bain de jouvence efficace. Tu écris qu’ils sont « déconnectés de la réalité » : c’est tout à fait vrai, si l’on entend par là qu’ils ne sont pas dépendants des empresas, des ganaderos et des toreros, et qu’ils refusent la pratique actuelle qui fait tendre la main pour obtenir des subventions et des publicités, officielles ou déguisées. Mais pour le reste, ce sont des gens bénévoles, honnêtes et désintéressés, comme tout le monde le sait.
J’ai aussi autour de moi un nombre appréciable de lecteurs fidèles, qui suffisent à assurer mon indépendance et ma liberté, et qui ne sont nullement « captifs et timorés », comme tu le dis. Ils ne cessent de m’envoyer de petits mots de longue vie, et de me soutenir dans les combats que je mène, depuis mon plus jeune âge, et avec la même détermination.
Ce qui m’inquiète aussi, c’est le risque du ridicule que tu prends lorsque tu tentes de faire croire que j’ai toujours été hostile aux toreros français. Quand ils sont bons, je le dis, et quand ils sont moins bons, je le dis aussi, et, selon la célèbre formule de Beaumarchais, « sans la liberté de blâmer, il n’est pas d’éloge flatteur ». Je juge sur pièces, tout simplement, c’est-à-dire sur ce qui se passe dans l’arène, et qu’il s’agisse de Français, d’Espagnols ou de Vénézuéliens, c’est ce jugement que je transmets, par mes articles, notamment à ceux qui n’ont pu assister aux corridas. Dans un message diffusé à tes connaissances, le 26 octobre, tu m’accuses même d’avoir brisé, il y vingt-cinq ans, ta carrière de matador : il me semble que là, c’est ta mémoire qui flanche, et que tu as tendance, avec le recul, à confondre Toros et les toros que tu as eu à affronter.
Justement, pour ce qui est de « juger sur pièces », j’ai l’impression que tu n’as pas compris le sens de ma réaction contre ton éditorial du 22 octobre, et, plus encore, contre la lettre que tu as envoyée le 3 octobre au Président de la République. Tu vas encore dire que je « radote », mais quand tu as écrit : « nous vous demandons de ne pas interdire l’entrée des arènes à nos enfants dès lors qu’ils sont accompagnés de leurs parents », je pense que tu n’as pas songé aux conséquences de cette formulation. Ni à ton cousin Jojo qui aime bien fréquenter les n.s.p. entre copains, ni à ma filleule Louisette qui est brinquebalée tous les dimanches entre deux parents divorcés, ni même à toi, mon tout-petit, qui serais sans doute entré beaucoup moins souvent aux arènes, avant ta majorité, s’il y avait eu ces conditions draconiennes.
Tu vas me rétorquer que tu y as pensé, mais que, selon tes propres termes, « on est parfois contraint de plier sur l’accessoire afin de se donner du temps pour n’avoir pas à le faire sur l’essentiel ». Donc, « plier », c’était de ta part un repli tactique. Or, celle que tu appelles « la vieille dame » te le dit, tu as pris là une responsabilité délicate : car, crois-en ma vieille expérience, quand les politiques et les cabinets ministériels ont dans leurs cartons une demi-mesure qui risque de faire des vagues, ils font souvent croire que le pire est inévitable, pour que les négociateurs aient l’impression d’avoir sauvé les meubles, et, mieux, qu’ils demandent eux-mêmes cette demi-mesure. Tous les syndicalistes le savent, et aucun d’entre eux n’est jamais entré dans une salle de négociations en ayant accepté, a priori, la moitié des licenciements qui menacent. Sans compter que, si l’on fait, soi-même, la moitié du chemin, on risque fort, à l’arrivée, d’être marron aux trois quarts…
Dans tout cela, ta bonne foi a peut-être été surprise – il n’y a jamais de honte à être un peu naïf, même si c’est souvent désastreux pour la cause que l’on défend. Mais cet inconvénient aurait été aisément pallié si, informé de l’ampleur du danger, tu avais largement alerté ceux au nom desquels tu as prétendu écrire – c’est-à-dire « le monde taurin français », « le million de spectateurs qui fréquente nos arènes chaque année » et « les millions de visiteurs qui voient dans nos férias un espace de liberté ». Tu aurais bénéficié d’abord de conseils de juristes compétents, de familiers des négociations difficiles comme il en existe dans l’afición, et ensuite de l’appui des publications spécialisées, des médias, et tout simplement de la « base » aficionada qui représente une vraie force.
Cet appui aurait été d’autant plus précieux et efficace que les aficionados français sont beaucoup plus déterminés que ta lettre au Président ne l’a laissé entendre. Jour après jour, Toros reçoit des motions (émanant, à ce jour, des Bibliophiles Taurins, des Critiques Taurins du Sud-Est, de la Fédération des Sociétés Taurines de France), des messages de présidents d’associations spécialisées (les chirurgiens taurins, par exemple), de clubs et de peñas, de maires de villes taurines, qui expriment tous leur même exigence d’un combat livré sur des bases claires, refusant toute restriction de l’assistance aux corridas, pour les parents comme pour les enfants. On voit se former là un beau mouvement collectif, qui rappelle à la « vieille dame » que je suis des luttes plus anciennes (et victorieuses) et il n’y aurait pas de gêne à ce que toi, comme d’autres, vous vous ralliiez à ce mouvement. Certains t’ont déjà demandé de rectifier ta position, tu t’y es refusé (pour le moment), en préférant affirmer que si d’aventure « en bon politique, le président coupe la poire en deux », il faudra considérer que « l’essentiel est préservé » (Terres taurines, du 23 octobre). Quand on voit l’évolution de la Catalogne, depuis la première mesure d’interdiction, il est permis d’en douter. C’est ce que fait, depuis l’origine, « la vieille dame », et désormais de plus en plus d’autres.
Tu le vois, quand tu écris : « la vieille dame se met à radoter, au risque de mettre en péril les stratégies mises en place, mon devoir est de la prier de se taire avant qu’elle ne fasse tout rater », ce n’est ni gentil, ni responsable. Si « tout rate », si l’on en arrive aux mesures radicales que réclament les « antis », et même si « ça rate à moitié », ce sera la faute, bien entendu, des gouvernants qui auront pris des décisions iniques. Mais, quoi qu’il arrive, l’afición aura le droit de se poser des questions sur « les stratégies » menées jusque-là, fondées sur les cachotteries ou les concessions préalables, et elle les posera à ceux qui ont voulu les définir et les conduire. Alors, essayer de faire porter le chapeau à « la vieille dame », c’est un peu fort de tisane. Mais ça n’est pas grave. « La vieille dame » sait que l’essentiel, c’est la présence libre de tous ses petits-enfants aux arènes, que c’est cela qu’il faut défendre sans faiblir, non seulement maintenant, mais plus tard, dans d’éventuelles résistances. Et si elle hausse un peu la voix, c’est au nom de beaucoup de braves gens, auxquels on n’a pas demandé leur avis, mais qui en ont un et qui veulent le faire entendre. En démocratie, la presse est là pour ça, tu devrais le savoir, pas pour « plier » ni « se taire »…
Voilà pourquoi, mon tout-petit, même si ça te contrarie, « la vieille dame » ne se taira pas, pas plus aujourd’hui qu’hier. Ni que demain, car, je vais te faire une confidence, j’espère bien devenir (au moins) centenaire, en gardant évidemment la même lucidité et la même combativité au service de la Fiesta Brava. Je vous en souhaite autant, à tes Terres taurines et à toi-même.
TOROS
Suite à son communiqué précédent, la revue a été prise à partie, avec véhémence, les 29 et 30 octobre, dans la rubrique « actualités » du site Terres taurines. Voici sa réponse.
« La vieille dame » répond à André Viard
Mon tout-petit,
Puisque tu persifles abondamment sur mon âge vénérable, tu permettras que je t’appelle ainsi, en souvenir aussi des dessins que tu m’envoyais si gentiment, dans le passé, et que je publiais alors avec plaisir. Trente ans se sont écoulés et, maintenant, dans tes « actualités » de Terres taurines (29-30 octobre), je lis sous ta plume que « je grince », que je suis « sourde », que j’ai des « aigreurs », et que je veux « faire croire que j’existe encore » — bref, tu t’imagines que le curé est déjà dans l’escalier, et ça a l’air de te faire plaisir. Je te dirai même que, quand tu écris « mon devoir est de la prier de se taire », je me demande si, te croyant investi de Dieu sait quelle mission, tu ne rêves pas de venir, un soir, m’étouffer avec mon oreiller !
Tout cela m’inquiète beaucoup. Pour toi, bien sûr, car je suis très gênée de penser qu’un matador de toros, et Français, puisse devenir un agresseur de vieilles dames. Et quand tu me compares à « l’hidalgo famélique du Lazarillo de Tormes qui sortait dans la rue un cure-dent à la bouche pour faire croire qu’il avait mangé », je suis tout simplement effarée de voir que tu connais dans les moindres détails cette littérature picaresque sans foi ni loi, qui fourmille d’arrivistes et de menteurs. Mais, en ce qui me concerne, je suis désolée de te l’apprendre, je mange à ma faim et, même si j’aurai quatre-vingt-trois ans aux prunes, je me porte comme un charme, d’autant que je suis bien gardée et entourée d’affection.
J’ai en effet une équipe de collaborateurs dévoués et compétents, dont le rajeunissement régulier constitue un bain de jouvence efficace. Tu écris qu’ils sont « déconnectés de la réalité » : c’est tout à fait vrai, si l’on entend par là qu’ils ne sont pas dépendants des empresas, des ganaderos et des toreros, et qu’ils refusent la pratique actuelle qui fait tendre la main pour obtenir des subventions et des publicités, officielles ou déguisées. Mais pour le reste, ce sont des gens bénévoles, honnêtes et désintéressés, comme tout le monde le sait.
J’ai aussi autour de moi un nombre appréciable de lecteurs fidèles, qui suffisent à assurer mon indépendance et ma liberté, et qui ne sont nullement « captifs et timorés », comme tu le dis. Ils ne cessent de m’envoyer de petits mots de longue vie, et de me soutenir dans les combats que je mène, depuis mon plus jeune âge, et avec la même détermination.
Ce qui m’inquiète aussi, c’est le risque du ridicule que tu prends lorsque tu tentes de faire croire que j’ai toujours été hostile aux toreros français. Quand ils sont bons, je le dis, et quand ils sont moins bons, je le dis aussi, et, selon la célèbre formule de Beaumarchais, « sans la liberté de blâmer, il n’est pas d’éloge flatteur ». Je juge sur pièces, tout simplement, c’est-à-dire sur ce qui se passe dans l’arène, et qu’il s’agisse de Français, d’Espagnols ou de Vénézuéliens, c’est ce jugement que je transmets, par mes articles, notamment à ceux qui n’ont pu assister aux corridas. Dans un message diffusé à tes connaissances, le 26 octobre, tu m’accuses même d’avoir brisé, il y vingt-cinq ans, ta carrière de matador : il me semble que là, c’est ta mémoire qui flanche, et que tu as tendance, avec le recul, à confondre Toros et les toros que tu as eu à affronter.
Justement, pour ce qui est de « juger sur pièces », j’ai l’impression que tu n’as pas compris le sens de ma réaction contre ton éditorial du 22 octobre, et, plus encore, contre la lettre que tu as envoyée le 3 octobre au Président de la République. Tu vas encore dire que je « radote », mais quand tu as écrit : « nous vous demandons de ne pas interdire l’entrée des arènes à nos enfants dès lors qu’ils sont accompagnés de leurs parents », je pense que tu n’as pas songé aux conséquences de cette formulation. Ni à ton cousin Jojo qui aime bien fréquenter les n.s.p. entre copains, ni à ma filleule Louisette qui est brinquebalée tous les dimanches entre deux parents divorcés, ni même à toi, mon tout-petit, qui serais sans doute entré beaucoup moins souvent aux arènes, avant ta majorité, s’il y avait eu ces conditions draconiennes.
Tu vas me rétorquer que tu y as pensé, mais que, selon tes propres termes, « on est parfois contraint de plier sur l’accessoire afin de se donner du temps pour n’avoir pas à le faire sur l’essentiel ». Donc, « plier », c’était de ta part un repli tactique. Or, celle que tu appelles « la vieille dame » te le dit, tu as pris là une responsabilité délicate : car, crois-en ma vieille expérience, quand les politiques et les cabinets ministériels ont dans leurs cartons une demi-mesure qui risque de faire des vagues, ils font souvent croire que le pire est inévitable, pour que les négociateurs aient l’impression d’avoir sauvé les meubles, et, mieux, qu’ils demandent eux-mêmes cette demi-mesure. Tous les syndicalistes le savent, et aucun d’entre eux n’est jamais entré dans une salle de négociations en ayant accepté, a priori, la moitié des licenciements qui menacent. Sans compter que, si l’on fait, soi-même, la moitié du chemin, on risque fort, à l’arrivée, d’être marron aux trois quarts…
Dans tout cela, ta bonne foi a peut-être été surprise – il n’y a jamais de honte à être un peu naïf, même si c’est souvent désastreux pour la cause que l’on défend. Mais cet inconvénient aurait été aisément pallié si, informé de l’ampleur du danger, tu avais largement alerté ceux au nom desquels tu as prétendu écrire – c’est-à-dire « le monde taurin français », « le million de spectateurs qui fréquente nos arènes chaque année » et « les millions de visiteurs qui voient dans nos férias un espace de liberté ». Tu aurais bénéficié d’abord de conseils de juristes compétents, de familiers des négociations difficiles comme il en existe dans l’afición, et ensuite de l’appui des publications spécialisées, des médias, et tout simplement de la « base » aficionada qui représente une vraie force.
Cet appui aurait été d’autant plus précieux et efficace que les aficionados français sont beaucoup plus déterminés que ta lettre au Président ne l’a laissé entendre. Jour après jour, Toros reçoit des motions (émanant, à ce jour, des Bibliophiles Taurins, des Critiques Taurins du Sud-Est, de la Fédération des Sociétés Taurines de France), des messages de présidents d’associations spécialisées (les chirurgiens taurins, par exemple), de clubs et de peñas, de maires de villes taurines, qui expriment tous leur même exigence d’un combat livré sur des bases claires, refusant toute restriction de l’assistance aux corridas, pour les parents comme pour les enfants. On voit se former là un beau mouvement collectif, qui rappelle à la « vieille dame » que je suis des luttes plus anciennes (et victorieuses) et il n’y aurait pas de gêne à ce que toi, comme d’autres, vous vous ralliiez à ce mouvement. Certains t’ont déjà demandé de rectifier ta position, tu t’y es refusé (pour le moment), en préférant affirmer que si d’aventure « en bon politique, le président coupe la poire en deux », il faudra considérer que « l’essentiel est préservé » (Terres taurines, du 23 octobre). Quand on voit l’évolution de la Catalogne, depuis la première mesure d’interdiction, il est permis d’en douter. C’est ce que fait, depuis l’origine, « la vieille dame », et désormais de plus en plus d’autres.
Tu le vois, quand tu écris : « la vieille dame se met à radoter, au risque de mettre en péril les stratégies mises en place, mon devoir est de la prier de se taire avant qu’elle ne fasse tout rater », ce n’est ni gentil, ni responsable. Si « tout rate », si l’on en arrive aux mesures radicales que réclament les « antis », et même si « ça rate à moitié », ce sera la faute, bien entendu, des gouvernants qui auront pris des décisions iniques. Mais, quoi qu’il arrive, l’afición aura le droit de se poser des questions sur « les stratégies » menées jusque-là, fondées sur les cachotteries ou les concessions préalables, et elle les posera à ceux qui ont voulu les définir et les conduire. Alors, essayer de faire porter le chapeau à « la vieille dame », c’est un peu fort de tisane. Mais ça n’est pas grave. « La vieille dame » sait que l’essentiel, c’est la présence libre de tous ses petits-enfants aux arènes, que c’est cela qu’il faut défendre sans faiblir, non seulement maintenant, mais plus tard, dans d’éventuelles résistances. Et si elle hausse un peu la voix, c’est au nom de beaucoup de braves gens, auxquels on n’a pas demandé leur avis, mais qui en ont un et qui veulent le faire entendre. En démocratie, la presse est là pour ça, tu devrais le savoir, pas pour « plier » ni « se taire »…
Voilà pourquoi, mon tout-petit, même si ça te contrarie, « la vieille dame » ne se taira pas, pas plus aujourd’hui qu’hier. Ni que demain, car, je vais te faire une confidence, j’espère bien devenir (au moins) centenaire, en gardant évidemment la même lucidité et la même combativité au service de la Fiesta Brava. Je vous en souhaite autant, à tes Terres taurines et à toi-même.
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