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24 juin 2013

Une passe n’est pas toréer


La tauromachie peut-elle n’être qu’esthétisme ? À observer les novilleros venus hier à Saint-Sever, il serait envisageable de le croire tant leur démarche semble se résumer à enchaîner des passes sans avoir une once de souci de la lidia idoine.

Hier, la meilleure illustration est venue d’un certain Tomás Angulo, dont la détermination était lisible sur son visage un rien féminin, dès le paseíllo. Angulo a proposé de biens beaux gestes tout l’après-midi — chacun étant ponctué par les olés vulgaires, parce qu’exagérés, de deux béats en barrera. Pourtant, Angulo n’a pas toréé, et c’est bien ballot pour un torero. 

Toréer ?… Toréer : c’est-à-dire prendre la mesure d’un novillo, savoir juger de sa charge, des défauts de celle-ci, de ses qualités, de sa longueur ; c’est-à-dire savoir jauger le châtiment correct à donner au novillo, et ne pas demander automatiquement un changement après la première rencontre — heureusement, le président Amestoy fut sur ce point intraitable ; c’est-à-dire trouver le sitio et évaluer la bonne distance pour exploiter au mieux les charges intéressantes du novillo ; c’est-à-dire tirer la main pour donner une sortie au novillo, et non pas l’ouvrir pour l’envoyer sur l’extérieur ; c'est-à-dire avancer la jambe et tendre le bras vers la corne contraire pour se croiser; se croiser d’autant plus quand le novillo l’exige par des charges lourdes, pesantes et un retour rapide ; c'est-à-dire tuer avec la main gauche et non pas en plongeant sur le frontal du novillo.

Tomás Angulo a de très beaux gestes et un poignet soyeux, déjà. Tomás Angulo est jeune et encore inexpérimenté, en devenir donc, et il convient de lui accorder son manque d’expérience pour juger sa prestation. Tomás Angulo fait partie de ces rares novilleros qui acceptent de s’envoyer des Escolar Gil quand d’autres chipotent sur des Fuente Ymbro. Tomás Angulo a envie de toréer, mais, hier, Tomás Angulo n’a pas toréé. Il a seulement enchaîné des passes. Tomás Angulo pourrait être Borja Jiménez ou Cayetano Ortiz, à qui sa cuadrilla susurrait depuis les burladeros de toréer en ligne droite. Tomás Angulo a fait deux vueltas al ruedo et coupé une oreille. Il souriait, mais n’avait pas toréé.

01 juin 2013

Adieu, torero


« Adieu, torero. »

C’est l’histoire d’un matador pas tout à fait abouti et d’un Français pas tout à fait soldat. Mais les deux sont tout à fait, parfaitement, totalement dans la merde de la guerre d’Espagne, sur le front de l’Èbre, coincés sous l’ombre caressante d’un olivier.

J’ai lu quelque part que c’était construit comme une scène de théâtre. Peut-être, mais j’ai trouvé que ça ressemblait à une lidia en trois tiers durant laquelle on passe de la brutalité de la rencontre à la prise de conscience de son adversaire et à la tentative désespérée de le « lidier », de tendre le bras bien devant en avançant la jambe, puis d’emballer le tout, de guider la charge, de convaincre ! Et de « rémater » la sortie.

Il y a des toros dans ce livre, il y a du toreo, il y a du sang, il y a des tripes, il y a des larmes et il y a le furieux désir de vivre ce que l’on a décidé de vivre — être matador ou baiser Fanchon —, quitte à mourir si l’impossible prend le pas sur l’espoir.

Deck vient d’écrire un très beau livre ; lisez-le.


>>> Olivier DECKAdieu torero, Au diable vauvert, 2013.

Photographie José Calvo, Saint-Sever, 8 mai 2013 © Olivier Deck

18 avril 2013

Le cartel des Sánchez-Fabrés de Saint-Sever


Comme annoncé il y a quelques jours, les Sánchez-Fabrés (Coquilla/Buendía) vont finalement être combattus à Saint-Sever grâce à la mobilisation des aficionados autour du Collectif Pedrollen.
Le cartel de cette corrida, qui aura lieu le 8 mai 2013, est désormais connu : Luis Bolívar, Thomas Dufau et José Calvo.

Photographie Laurent Morincome (Merci à lui.)

09 avril 2013

Coquilla en Saint-Sever


Communiqué du Collectif Pedrollen

Aujourd’hui 7 avril, les Coquilla de Juan Sánchez-Fabrés s’éloignent de l’abattoir et se rapprochent des arènes de Saint-Sever. 

L’Afición a été sensible à notre appel ; nous avons réunis les deux tiers de la somme que nous nous étions fixés comme seuil pour permettre à l’unique corrida de quatre ans d’encaste Coquilla d’être combattue dans l’arène. 

Nous tenons à remercier les nombreux soutiens et les marques d’encouragement reçus depuis le début de cette aventure. 

Les tous prochains jours seront décisifs, et une décision sera prise dans la semaine qui vient. 

Vous pouvez encore nous adresser vos dons :
— Par chèque libellé à l’ordre du Collectif Pedrollen (8 impasse Gayon, 64100 Bayonne).
— Par virement en nous demandant un RIB sur notre e-mail : collectifpedrollen[@]gmail.com (remplacer « [@] » par « @ », mesure antispam).


P.-S. : Avec vos dons, merci de nous communiquer vos e-mails. Pour nous joindre par téléphone, contacter Luc Larregain (06 40 22 40 66) ou Antoine Capdeville (06 33 15 02 82).

25 juin 2012

À hurler


Hier, 6 novillos de Montealto sont morts dans les arènes de Saint-Sever. Ils n'avaient rien de fantastiques, ni dans leur présentation très desigual, voire limite pour les numéros 2 et 3, ni dans leurs armures escobillées pour certains, ni dans leur comportement somme toute dans l'air du temps, sans fanfare ni trompette donc. Question trompette, d'ailleurs, ce fut calamiteux du côté des clarines, mais ceci est une autre histoire.

Bref, un lot comme on en voit très souvent et que l'on oublie sur la route du retour en s'émerveillant devant la beauté des Pyrénées au soleil couchant.

Cela étant écrit, on ne peut que faire une fois de plus le constat affligeant, agaçant et usant des errements conjoints de l'incapacité notoire des novilleros à mener correctement une lidia, à la penser même, des mauvaises manières de picadors assassins, et du manque de vista et d'esprit d'une présidence atone et sans critère aucun. Pour donner un exemple, les tiers de piques furent changés sans considération aucune des potentialités de bravoure de l'animal, et le 3, par exemple, laissait entrevoir de belles qualités en ce domaine. 

Les actuels novilleros sont formatés au-delà du raisonnable. C'est à pleurer. Leur obsession est d'entendre tonner la musique, de lier vingt séries de derechazos, peu leur important le terrain dans lequel ils sont donnés, et d'achever leur œuvre par ces infâmes et vulgaires redondos inversés, popularisés entre autres par El Juli. Des trois, seul le jeune Cerro démontra des qualités certaines malgré une tendance avérée à la verticalité et au toreo profilé.

Pour le reste, passons, il faisait très beau et les Pyrénées sont belles à hurler quand on rentre chez soi.


>>> Retrouvez une galerie de cette novillada sur le site sous la rubrique « Ruedos ».

16 novembre 2011

Cosas de toros


L'idée était bonne et pétrie d'afición. Tienter en public 5 machos de 5 encastes différents. Le public, assez nombreux pour un lancement des hostilités à 9 h 30, était cantonné dans un coin de l'arène pour ne pas déconcentrer la lidia des bichos. Le callejón n'était occupé que par ceux qui avaient quelque chose à y faire en de telles circonstances, c'est-à-dire les cuadrillas, les ganaderos et quelques membres de l'organisation. Tout était donc préparé pour un spectacle sérieux dans lequel le toro aurait la première place. À peu de choses près c'est ce qui se passa. À peu de choses près malheureusement car au final nous avions plus le sentiment d'avoir assisté à un festival gentillet qu'à une sélection de futurs sementales. La faiblesse quasi généralisée des novillos, la très mauvaise manière de donner les piques — cheval placé perpendiculairement, piques traseras, trop longues sur la première rencontre, sortie fermée de manière systématique —, la longueur des faenas de toreros désirant être vus, le nombre trop important de capotazos de réception — parfois destructeurs — et les applaudissements du public rappelaient trop ce que l'on rencontre tout au long d'une temporada en corrida formelle. Nous avions vécu la même chose à Orthez en avril pour la tienta des Saltillo de Pérez-Escudero.
Mais ne boudons pas cependant cette belle initiative car il faisait plaisir de revoir les amis et de savourer une journée d'automne particulièrement ensoleillée. La Peña Jeune Aficion a bien mené son affaire, le reste n'est que cosas de toros.

>>> Retrouvez sur le site, rubrique RUEDOS, une courte galerie de photos consacrée à cette matinée de tienta.

08 novembre 2011

Fête des encastes


Saint-Sever, présentation des élevages du 11 novembre 2011

La diversité génétique des taureaux de combat est très importante, si bien que l’on parle dans le jargon tauromachique d’encaste, véritable « sous-race » de la famille du taureau de combat. Le terme de « sous-race » est particulièrement bien choisi puisqu’une étude récente1 a démontré que la distance génétique entre deux taureaux braves est en moyenne trois fois plus importante que celle existant entre deux bêtes de races bovines européennes. Concrètement, ceci revient à dire que la différence entre un toro d’Atanasio Fernández et un de Carlos Núñez est trois fois plus importante que celle existant entre une vache limousine et une vache Aubrac.

La même étude a quantifié le nombre des encastes : 29 ! Pourtant, au quotidien, bien peu de ces 29 encastes sont proposés aux aficionados. À vrai dire seule une petite poignée d’encastes écrase, par sa représentation excessive, tous les autres, et par la même la diversité. La Peña Jeune Aficion propose aux aficionados d'en découvrir 11 en une seule journée, soit presque la moitié du capital génétique actuel de la cabaña brava ; ce qui fait du 11 novembre 2011 une journée véritablement exceptionnelle sur le plan de la diversité des encastes. Habituellement, il faut attendre une temporada pour trouver un tel éventail, en n’omettant toutefois pas de préciser que celui-ci se cantonne aux encastes dits classiques, dont le porte-drapeau n’est autre que le sempiternel Domecq. Mais la Peña Jeune Aficion a choisi d’aller au bout de son extravagante idée en ne cédant pas à la facilité. Ainsi, nul Domecq en ce 11 novembre, pas plus que de Núñez ou autres mélanges habituels de ces deux sangs, mais des encastes rares, singuliers, qui renforcent le caractère exceptionnel de cette journée... tout en nécessitant quelques explications.

Pour choisir les 11 élevages, la Peña Jeune Aficion a donc puisé dans les races les moins communes. Il était alors impératif de retenir un élevage de race Vazqueña pour contrecarrer l’omniprésence du toro de la rame Vistahermosa, qui représente 99 % du « marché ». Le choix s’est porté sur la devise Pablo Mayoral. Un choix qui peut surprendre, vu que cet élevage n’appartient pas à la traditionnelle liste des représentants de l’encaste Vázquez, mais plutôt à celle des Santa Coloma. Cependant, l’idée, certes originale, n’est pas totalement saugrenue puisque Pablo Mayoral Herranz, grand-père du ganadero actuel, avait fondé son élevage dans les années 1950 en regroupant du bétail des encastes Martínez, Santa Coloma et Vázquez. Même si l’élevage s’est clairement orienté sur l’origine Santa Coloma et que le métissage des lignes anciennes s’est avéré inévitable, l’origine Vázquez conserve dans sa ganadería les caractéristiques qui lui sont propres. La finca se situe dans la province de Madrid, au pied de la demeure royale El Escorial. Les photographies des jaboneros vazqueños de Pablo Mayoral avec en second plan El Escorial constituent à la fois un classique du campo madrilène et un clin d’œil à l’histoire — l’élevage de Vázquez fut un temps l’élevage royal de Fernando VII.

Outre Vistahermosa et Vázquez, les autres castes fondamentales, comme il est habituel de les nommer, ont toutes disparu. Presque toutes car lorsque l’on conte l’histoire des fameux Jijón, ces toros imposants aux robes marron et aux armures d’aurochs, on ne peut s’empêcher de citer l’élevage Martínez. En injectant le sang andalou dans les gênes de ses toros de Castille, Vicente Martínez avait su donner une seconde vie à cette caste, même si ses negros et berrendos (mélange de larges taches blanches avec une autre couleur) n’avaient plus rien de commun avec leurs ancêtres Jijón. Les fers revendiquant l’héritage des Martínez ne sont pas rares, mais peu nombreux sont les ganaderos ayant réussi à préserver ce sang. Le plus connu est celui de Montalvo, la base de l’élevage Cruz Madruga. Installé dans le Campo Charro, Ángel Cruz Bermejo maintient avec beaucoup de nostalgie cet encaste aux pelages typiques (berrendo en negro ou berrendo en colorado).
L’élevage de Fernando Madrazo El Gustal de Campocerrado tient lui aussi de l’origine Martínez via Montalvo. Mais lorsque ce sang était la propriété de Manuel Arranz, un étalon de son voisin Graciliano Pérez-Tabernero influença fortement cette origine, au point de créer un nouvel encaste. Encore donné pour mort il y a peu, Fernando a comme ressuscité cet encaste en faisant de nouveau parler de ses « arranes », les toros de son grand-père. Installé dans un coin reculé de la vaste finca de « Campocerrado », il soigne avec grande attention son petit trésor en n’espérant qu’une chose : en faire profiter les aficionados.

Avant d’attaquer le large chapitre des Vistahermosa, arrêtons-nous un instant sur le compromis créé par José Vega au début du siècle dernier, et repris ensuite par les frères Villar : les fameux Vega-Villar. Mieux connus sous le nom de patas blancas, les toros de cet encaste proviennent d’un croisement de vaches Veragua (Vázquez) avec un étalon Santa Coloma (Vistahermosa). Le mélange donne l’un des plus beaux taureaux de combat que l’on puisse voir au campo. Bas, ramassé, charpenté et muni de larges armures, le Vega-Villar est lui aussi habillé d’une robe berrenda. Parmi les grands éleveurs de cette race figure Arturo Cobaleda qui l’a essaimée dans tout le Campo Charro. De cette source découle en cascade, via Miguel del Coral, les patas blancas de José Luis Rodríguez, propriétaire de la devise Valrubio.

Vistahermosa. Aujourd’hui, à quelques rares exceptions, tout est Vistahermosa. Cela dit, l’élevage du Conde de Vistahermosa fut divisé il y a plus de deux siècles, et l’isolement génétique ajouté à la puissance du génome de la race du taureau de combat a permis la création de nouveaux encastes. La filiation de Vistahermosa tient aujourd’hui en deux rames : schématiquement, Murube et Saltillo.
Étrangement, pour cette journée des 11 encastes, aucun élevage de la rame Saltillo et de ses cousines n’est présent, même si l’encaste Santa Coloma, mélange des rames Saltillo et Murube, sera représenté par deux de ses lignes : Dionisio Rodríguez et Coquilla — toutes deux d’ascendance Murube.
L’encaste Coquilla ne peut guère mieux être défini que par la célèbre phrase : « Un toro de peu de contenant mais de beaucoup de contenu. » Son développement s’est centré sur les noms de Sánchez-Fabrés, Sánchez-Arjona et du célèbre « Raboso », duquel Mariano Cifuentes détient ses Coquilla. Installées près de Plasencia dans un cadre idyllique, les 300 vaches de ventre de don Mariano forment un cheptel plus important que celui de tous les autres éleveurs de l’encaste Coquilla réunis !
L’encaste Dionisio Rodríguez est quant à lui difficile à cerner. Bien que d’origine Buendía, c’est-à-dire d’ascendance Saltillo, c’est la rame Murube qui a finalement pris le pas. Dionisio Rodríguez fut lui aussi un des éleveurs emblématiques du Campo Charro, et sa descendance se retrouve encore dans de multiples petites devises de la zone, parmi lesquelles on trouve le fer Andrés Celestino García Martín, qui a très récemment (2004) reconstitué son troupeau avec des bêtes provenant directement de la maison mère. Il est bien sûr trop tôt pour émettre un avis sur cet élevage, mais on donne le bétail acquis comme issu de la meilleure origine.

La rame Murube, comme celle de Vistahermosa, a subi de fortes évolutions qui ont donné de nombreuses versions. Certaines restent proches de la version originale tandis que d’autres présentent des mutations spectaculaires.
Les encastes Murube et Contreras demeurent très proches, le second découlant directement du premier. Il s’agit là d’un toro ramassé, bien rempli, aux formes arrondies et à l’armure peu agressive. Si les robes sont variées dans la version Contreras, le noir est l’unique cape du Murube. La famille Murube appliquant durant de nombreuses années le célèbre dicton « le noir est le plus brave » a, par conséquent, éliminé impitoyablement toute les bêtes possédant le moindre poil blanc. Le galop allègre (à la classe inégalée) continue de faire la réputation du toro de Murube. Typiquement andalou, cet encaste sera pourtant représenté ce 11 novembre par une ganadería de Salamanque : Castillejo de Huebra — propriété de José Manuel Sánchez, qui détient également les devises Sánchez-Cobaleda et Terrubias. Côté Contreras, l’organisation a fixé son choix sur l’« élevage-encaste » Baltasar Ibán. Bien que du sang d’origine Domecq ait (trop) largement été injecté dans les années 1980, la devise madrilène reste le meilleur élevage d’ascendance Contreras. On ne compte plus ses succès, même si, actuellement, les novillos offrent davantage de satisfaction au ganadero et aux aficionados que les toros.

L’encaste Urcola est un cas particulier souvent oublié. De pure souche Vistahermosa, il demeure un encaste génétiquement isolé — sa dérivation étant antérieure aux Murube — qu’il est néanmoins assez logique d’apparenter à la rame Murube, et ce pour deux raisons : tout d’abord parce qu’il s’agit de la même branche de Vistahermosa, celle du Barbero de Utrera ; ensuite parce qu’il y a eu un rafraîchissement de sang par le Conde de la Corte, qui dérive de la rame Murube. L’un des élevages phare de l’encaste Urcola est celui de la famille Galache, dont Victorino Martín a acquis un lot inscrit au nom on ne peut plus explicite de Ganadería de Urcola. Il voit dans cette entreprise la réhabilitation d’un encaste oublié ; l’œuvre de toute une vie, avoue-t-il en toute sincérité.

Venons-en, pour finir, au Parladé qui provient des Murube par Ibarra. Nous sommes ici en présence d’une version mutante du Murube ayant bien peu de ressemblance avec l'originale. Ultraprésente dans les ruedos (sangs Domecq et Núñez), la Peña Jeune Afición a opté, et cela ne vous étonnera guère, pour sa version la plus marginale : Pedrajas — toro rustique, fort et armé, assez fidèle au toro ancestral de Parladé. La famille Guardiola a tenu très longtemps cet encaste au plus haut, avant que celui-ci ne perde, ces derniers temps, quelque peu de sa superbe. En 1992, Jean-Louis Darré acheta à son ami Jean Riboulet un lot de Guardiola « français » qu’il installa à Bars, dans le Gers ; en une vingtaine d’années sa Ganadería de l’Astarac a franchi tous les échelons pour finir par se présenter en corrida à Vic-Fezensac — plus aucun aficionado français n’ignore désormais son existence.

Enfin, petite concession aux encastes en vogue avec la présence des Atanasio Fernández. Depuis la fin de l’embargo dû à la langue bleue, le qualificatif « en vogue » peut paraître discutable, d’autant plus qu’il est question ici d’un « plat » plutôt pimenté grâce à la présence du sang Conde de la Corte — cette ligne, via Antonio Ordóñez, a alimenté l’élevage d’El Palmeral avant de donner naissance à la ganadería locale de Malabat. Mené par Pascal Fosolo, ce jeune fer sera une découverte pour la plupart des aficionados ayant fait le déplacement à Saint-Sever à l’occasion de cette Fête des encastes.

1 « Estudio de los encastes y ganaderías utilizando marcadores ADN », par le professeur Javier Cañón.

Illustration Représentation graphique des encastes proportionnelle à leur présence dans les ruedos. La ligne du bas représente les encastes présents à Saint-Sever ce 11 novembre 2011.

30 octobre 2011

11/11/11


Saint-Sever, le lundi 1er janvier 2011 au soir.

Il est tôt, pourtant la nuit est déjà là. Une brume mélancolique bien caractéristique de cette période de l’année s'est emparée de la cité. Le silence renforce encore cette impression étrange des soirs bien particuliers où la chaleur humaine se mélange à la fatigue, donnant un sentiment de joie dans une ambiance triste qui s'allie à la fraîcheur hivernale. Les branches s’agitent sous la petite bise et un corbeau s'envole, sans troubler toutefois la résonance du silence qui règne autour du cloître des Jacobins. Soudain, à quelques pas, un bruit rompt ce vide étourdissant. Le bruit devient pluriel, des sons qui à leur tour deviennent des mots. Des mots pour des phrases, des idées, un événement, un rêve.
« Eh, Jojo ! T'as vu on est le 01/01/2011. Ça fait beaucoup de 0 et de de 1 !
― Depuis quand tu t'y connais, toi, en informatique ? Tu "beugues" ?
― Je ne suis peut-être pas informaticien, mais on est le 01/01/2011 et, en 2011, notre jour c'est le 11/11/2011. 11/11/11 ! C’est quand même pas tous les jours. Faudrait faire quelque chose. Moi, c'est c'que j'dis ! »

Jojo et Beber sont là, dans le vide landais à palabrer. D’ailleurs, Jojo et Beber ils sont toujours là, même quand ils ne sont pas là. Ils sont membres de la Peña Jeune Aficion, Jojo et Beber. Les plus vieux, ou peut-être bien les plus jeunes, qu'importe. En tout cas, ils ont de l'afición et sont de Saint-Sever. Et si Jojo et Beber lancent des paroles en l'air, leurs mots ne s’envolent pas pour autant. Ils retombent.
Jojo, il aime le fino et a l'habitude de le siroter avec Beber, le soir, dans leur bonne petite ville de Saint-Sever. C'est leur petit moment à eux, le sirotage, et à chaque fois le sirop est accompagné de toro. Il y a d'abord cet Osborne noir gravé sur leur verre. Mais le Juan PedrO, chez Beber et Jojo, ça s'arrête là. À eux, leur truc, c'est plutôt l'irréel, ce qui n'existe pas. Enfin, ce qui n'existe pas chez les autres, mais qui existe chez eux et pas seulement dans leurs têtes.

Jojo et Beber ils ont des rêves, trop de rêves ; c’est ça en fait leur problème à Jojo et Beber, c’est qu’ils ont trop de rêves et n’ont qu’une peur : ne pas pouvoir tous les réaliser. Alors ils sirotent. Mais plus ils sirotent et plus ils ont de rêves. Foutu esprit ! En plus, siroter ils adorent ça, faut bien l’avouer. Alors que d’autres feraient tout pour avoir des idées, comme organiser des colloques, des réunions de travail ou des séminaires, payer des penseurs : rien ne prend ni ne pousse. Alors que, chez Jojo et Beber, à la moindre gorgée tout prend. Foutu sirop ! Jojo et Beber ils les donneraient bien leurs idées car ils n’en tirent aucune gloire, c’est juste qu’ils en ont trop. Mais leurs idées à eux, ça ne les fait pas rêver les autres, ceux qui sirotent jamais parce que ça leur ôte les idées qu’ils n’ont pas. Vous avouerez qu’il est bizarre ce sirop.

« 11/11/11 tout de même !
― Il faut faire quelque chose, quelque chose de...
― 11 novillos !
― Chiche !
― Oui, mais 11 novillos de 11 élevages différents !
― 11 novillos, 11 élevages et 11 encastes. 11/11/11 !
― Et pas de Juan PedrO !
― Tope là ! »
Jojo et Beber ils balancent pas des paroles en l’air. Leurs rêves ils les réalisent. Ils sont comme ça Jojo et Beber.
Texte de Thomas Thuriès

Liens Le programme de la semaine taurino-culturelle de Saint-Sever sur le site de la Peña Jeune Aficion & la présentation des élevages de la Fête des encastes du 11/11/11 par Thomas Thuriès.

Images Affiche de la journée des encastes © Mathieu Sodore & photographie d'un exemplaire de l'élevage Valrubio (Vega-Villar) qui sera tienté le matin © Peña Jeune Aficion

09 octobre 2011

El Toro de Salamanca


195 pages qui ne sont finalement qu’une photographie de famille. Une photographie sur laquelle on est enfin arrivé à réunir tout le monde, un jour de mariage peut-être, de baptême pourquoi pas ou d’enterrement. Mais on ne prend pas de photos les jours d’enterrement. Ils sont tous là, ils posent, cousins, frères, sœurs, grands-parents, parents, tante qui pique, nouveau-né "trop mignon", pépé qui vibre sur une chaise, les dents longues du beau-frère qui vous rayent le cuir de godasses achetées à prix d’or pour l’occasion. Il fait beau et on prend trois fois la photo pour être sûr, pour en avoir au moins une à l’arrivée. À l’arrivée, c’est un pan d’histoire figée à jamais. Une histoire de famille avec ses rires, ses déchirements, ses secrets et ses morts. Une histoire de famille, rien de plus, rien de moins. C’est important dans une vie les histoires de famille. Vicente Sánchez López est un aficionado d’Alba de Yeltes. Son livre, El Toro de Salamanca. Pasado, presente y futuro del campo charro, est une photographie de famille du Campo Charro. C’est par la famille qu’on y entre et qu’on en sort ; ce sont les familles charras qui sont les guides de cette saga campera. Finalement, quoi de plus logique pour une activité (la ganadería) si intimement liée à la terre ? Quand on regarde une photo de famille, on pense toujours, c’est inévitable, à ceux et celles qui ne sont pas dessus mais pas loin, au cimetière, et qui persistent à insuffler un bout d’eux-mêmes dans ceux qui restent. Vicente Sánchez López raconte les vivants et les morts de ces dynasties charras, navigue entre images sépias et le gris vert des encinas qui, elles, pourraient conter le temps jadis car elles l’ont vu.
Les familles ne meurent pas, ou lentement. Il persiste des noms, des titres, par le père, par la mère. On transmet, on hérite, on est un Fraile, un Tabernero, un Madrazo, un Cobaleda, un Clairac. Le Campo Charro survit bon an mal an sous les nuages que souffle le Portugal voisin, sous la neige l’hiver et la poussière d’été, le long des ríos et sous les nids de cigognes. Mais les toros d’ici sont partis pour beaucoup. Sur la photo, ils manquent. On le savait, on l’écrivait déjà, mais ce livre, cette photo de famille d’un bout d’Espagne des toros, fige pour demain une réalité contre laquelle aucun logiciel de retouche ne pourra rien. Pour faire croire, pour combler les vides sur les bancs, on y met du Domecq, du racine carrée de Domecq, de l’extrait de Domecq, de l’aspartame de Domecq, du Domecq made in China.
Au milieu du livre, il y a le fer de Joaquín Matías Bernardos, un point d’interrogation à l’envers. Ça aurait fait une jolie couverture.

À lire Vicente Sánchez López, El Toro de Salamanca. Pasado, presente y futuro del campo charro, Genoves Libros, Salamanca, 2011.

Vicente Sánchez López viendra présenter son livre à Saint-Sever (40) lors de la 27e Semaine taurino-culturelle qui se déroulera du 4 au 11 novembre 2011 et dont vous pouvez découvrir le programme ici : Semaine taurine 2011. Il sera présent le jeudi 10 novembre en soirée aux côtés de ganaderos comme Fernando Madrazo, Mariano Cifuentes ou Juan Sánchez-Fabrés, mais également aux côtés de Thomas Thuriès (collaborateur de www.camposyruedos.com et animateur du site www.terredetoros.com) qui présentera les 11 encastes qui seront combattus à Saint-Sever le vendredi 11/11/2011.

>>> Le blog de Vicente Sánchez López : Albaserrada.

29 juin 2010

Saint-Sever 2010, Escolar Gil


Sur le site http://www.camposyruedos.com/, retrouvez une galerie consacrée à la novillada d'Escolar Gil sortie dimanche 27 juin 2010 à Saint-Sever, rubrique RUEDOS.

Novillada encastée, globalement noble, moyennement bravita mais avec certains exemplaires plus compliqués et plus avisés. De l'intérêt tout au long de la course malgré certains novilleros encore verts.

18 novembre 2009

Saint-Sever, bis


Pour ceux auxquels cela aurait échappé, il a beaucoup plu sur le Sud-Ouest ces derniers temps. Ainsi, la novillada non piquée prévue le mercredi 11 novembre 2009 à Saint-Sever a-t-elle été reportée au samedi 28 novembre 2009 à 15h30 avec le même cartel et, en particulier, avec du bétail encasté Coquilla de Mariano Cifuentes (par El Raboso).

Photographie Une vache Coquilla cousine de celles de Mariano Cifuentes puisqu'elle aussi descend de l'élevage de El Raboso - vache de La Interrogación © Camposyruedos

13 octobre 2009

À Saint-Sever, en novembre


Le programme est long ! Il est même écrit en tout petit sur leur site mais y'a soirée relâche le jeudi 12 novembre. Ça va causer de toros parce que ça s'appelle la Semaine taurino-culturelle (la 25e paraît-il) mais la culture taurine a bon dos quand il ne s'agit ni plus ni moins que de rassembler des copains vieux de toujours autour d'une glutte (ne t'énerve pas Ciego, je sais que vous boirez aussi du vin...) d'arrière saison. Alors les conférences, les rastros taurins et autres vernissages, ce n'est pas à nous que vous la ferez les gars !
En lisant les toutes petites lettres, on découvre qu'il y aura une soirée débat avec Juan Sánchez-Fabrés, María Jesús Gualda (El Añadío) et Mariano Cifuentes, débat évidemment tourné autour de l'encaste Coquilla. Ce sera d'ailleurs une novillada non piquée de Mariano Cifuentes qui sera lidiée le mercredi 11 novembre à 16 heures aux arènes de Morlanne.
En s'approchant encore des petites lettres, ils vont se faire du cinéma avec le film La main bleue de Floreal Peleato qui, dixit le synopsis, "décrit le processus créatif chez Mathieu Sodore lors de la réalisation d’une série de grands formats inspirés par certains chants flamencos". Et c'est justement une oeuvre de Mathieu Sodore qu'on a volontairement emprunté sur le blog du Ciego... On salue les deux et les autres !

Ça se passera à Saint-Sever du 5 au 14 novembre 2009, organisé par la Peña Jeune Aficion avec la présence des habituels buveurs de gluttes d'arrière-saison... À la vôtre !

21 août 2009

Carcassonne... et Saint-Sever


Petite piqûre de rappel à l'usage de ceux qui auraient l'opportunité de se rendre ce week-end dans le chef-lieu de l'Aude, où Carcassonne Toros organise sa féria les 21, 22 et 23 août.

On retrouve à la lecture de l'affiche l'esprit qui anime cette organisation depuis quelques années, avec notamment la programmation fort intéressante d'une novillada de Moreno de Silva (encaste Saltillo).
Avant les désormais traditionnels miuras du dimanche après-midi, les frères Granier feront courir une novillada sans picadors, pour les élèves des écoles taurines.

C'est à la mort du sixième saltillo que je comptais finir une saison française décevante et qui ne passera hélas pas à la postérité (même la mienne). Il n'en sera malheureusement rien et c'est sous des cieux moins cléments et surtout moins taurins que je passerai une bien maussade fin de semaine.

Profitez-en bien les amis, et que les pupilles de Moreno de Silva sortent en grand !

Et pour en rajouter une couche, il y a une novillada d'Escolar Gil à Saint-Sever dimanche 23 août. Comme l'écrit Ludo (merci à lui de nous avoir rappelé cet oubli...), hay toros ce week-end !

29 juin 2009

Saint-Sever, 28 juin 2009


Hier à Saint-Sever, il y avait une novillada de Fuente Ymbro affrontée par "El Califa de Aragua", Santiago Naranjo et Angelino Arriaga.

Retrouvez sur le site, rubrique RUEDOS, la galerie de cette novillada.

Bonne visite.

02 novembre 2008

Saint-Sever, n° XXIV


Du 4 au 11 novembre 2008 aura lieu à Saint-Sever, dans les Landes, la 24e Semaine taurino-culturelle organisée par la Peña Jeune Aficion.

Il y aura donc pleins de trucs à faire, à voir et à écouter sur les bords de l’Adour. Le programme est chargé avec en particulier un encierro de toros de Macua et une novillada non piquée avec du bétail peu connu de La Constancia annoncé d’origine Conde de Mayalde.

Pour le reste des animations, nous vous invitons à vous rendre directement sur le site de la Peña Jeune Aficion. Bonne visite à tous...

Peña Jeune Aficion de Saint-Sever

25 août 2008

Recherche et développement


C’est le genre d’expérience qui convient à une demi-arène de pueblo, qui plus est française. Si ça loupe, peu de monde aura l’idée saugrenue d’en causer.
Le 24 août 2008, la placita landaise de Saint-Sever a fait mieux que le CTV quelques mois auparavant. Eux, pôvres petits Vicois, avaient seulement testé la puya de tienta à la quatrième rencontre (en corrida concours). C’était tellement ridicule comme expérience qu’ils n’avaient même pas osé la rendre publique avant et pendant la course. Le courage… Sur le coup, face à tant d’audace dans le désir de moderniser la corrida, certains avaient ressenti force tressaillements là où ça fait du bien, comme emportés par promesses abyssales de l’avancée scientifique.
Le 24 août 2008, la placita landaise de Saint-Sever a fait mieux que la plaza de Beaucaire. Ceux de Beaucaire, eux, n’avaient rien trouvé de mieux pour se la péter dans le monde taurin que d’expérimenter la puya andalouse en France. Expérience grandiose s’il en fut, si géniale même qu’elle ne fut menée que sur deux toros de Victorino Martín Andrés. Mais là aussi, et malgré les vrais résultats des effets de ces piques, la demi-molle n’était pas loin pour ces certains en quête de sensations à peu de frais. Une demi-molle oui, de celle qu’on aimerait bien voir s’épanouir franchement en rêvant à mieux, à pire, à plus…
Le 24 août 2008, Saint-Sever est devenue l’immense érection de la section Recherche et développement de la tauromachie actuelle. Et les certains de Vic et de Beaucaire n’étaient même pas là !

Hier à Saint-Sever, on a été au bout de la démarche visant à tuer le tercio de piques… On a piqué sans picador ! Les organisateurs ont attendu le dernier novillo de Fuente Ymbro pour tester l’idée folle. Un cheval, un toro y nada más. Le toro a poussé, le cheval s’est bien déplacé et les gens ont applaudi. A la seconde rencontre, les penseurs sans fin de l’avenir de la corrida ont pris le parti de tester une autre nouveauté qui pourrait faire des petits dans les années à venir. On a monté un picador sur le canasson mais au lieu de lui donner une pique normale, on lui a refilé une puya encapuchonnée, comme au campo les cornes des novillos combattus. Fallait l’avoir l’idée… Mieux que la risible puya andalouse, mieux que tout ce que les certains avaient imaginé pour dénaturer le tercio de piques. La pique sous cellophane ! Avouons tout de même que le concept n’est pas encore adaptable à la réalité mais l’idée est là, convenons-en !
A l’heure où nous écrivons ces lignes, nous apprenons qu’en vérité, il ne s’agissait pas du tout d’expériences fabuleuses destinées à faire rêver certains mais tout simplement d’accidents de lidia dus à une catastrophique cuadrilla aux ordres d’une certain Román Pérez. Là, malheureusement, il y a bien longtemps que le secteur Recherche et développement de la tauromachie actuelle ne peut plus rien…

Retrouvez la galerie de la bonne novillada de Fuente Ymbro dans la rubrique RUEDOS...

Photographies Le 6° Ymbro à la pique © Camposyruedos

28 juin 2007

"Il n'y a pas grand-chose à écrire..." Novillada de Saint Sever 2007


Je ne voulais rien écrire sur cette course. Il n’y avait pas grand-chose à en dire finalement, si ce n’est que ce fut une course très moyenne mais dans laquelle beaucoup espéraient au regard de celle de l’an dernier. Je ne voulais rien écrire mais je viens de lire le compte rendu de cette novillada de Scamandre paru dans le quotidien Sud Ouest ; compte rendu signé par le jeune et habituel sobrero de la casa déniché par Marc Lavie de Semana Grande. Sur le fond général de sa reseña, je ne peux qu’être d’accord, surtout quand il écrit qu'"il est des soirs où l’on aurait aimé éviter le rgard d’un ganadero déçu au sortir d’une course de son élevage". Mais il est des détails qui agacent, encore et toujours.
"Saluons en revanche la superbe présentation de l’ensemble du lot, du petit mais très armé animal d’ouverture à l’imposante carcasse sortie en dernier." J’ai du mal à comprendre ce que l’on peut saluer dans cet incertain méli-mélo de novillos. Les cornes ne font pas le trapío et ne doivent pas cacher d’autres défauts. Ainsi, le premier avait à peine le physique d’un becerro et dépareillait déjà dans les corrales. Le second, applaudi à son entrée en piste comme le fait remarquer notre sémillant chroniqueur, était laid et affublé d’une épine dorsale en montagne russe... On aurait dit qu'il avait été fabriqué avec un rabot peu soucieux du détail et de la beauté des lignes (photo du haut). Le dernier était le plus beau des atanasios, haut sur pattes mais avec de l’allure, trapío qui se confirma d’ailleurs aux piques puisqu’il fut le seul à montrer fijeza et envie. Le lot était donc desigual voire même très critiquable par moments mais il est vrai que la camada doit être très courte, et surtout que le public est resté les yeux accrochés aux défenses de ces novillos, tous armés vers le haut, pour certains en pointe. Cependant, et je comprends tout à fait que notre sobrero de la plume n’ait pas osé l’écrire (ce n’est pas la tradition de la maison qui l’emploie), certains pitones étaient franchement abîmés pour ne pas dire suspects. Ainsi, ce cinquième qui n’aurait jamais dû sortir dans le ruedo de Morlanne (escobillado dès sa sortie en piste, cf. photo de droite), ainsi ce sixième qui s’abîma bien vite les pinceaux au cours de sa lidia. Mais ceci ne s’écrit pas, quel intérêt ? On ne parle pas non plus des tercios de piques dans ces reseñas où le seul objectif est de limiter au maximum la critique. Sur une trentaine de lignes, l’auteur n’utilise qu’une fois le mot de pique pour évoquer la belle charge et la poussée du dernier animal. Dans l’ensemble, les Scamandre furent décevants au tercio de piques, par manque de bravoure (tête en haut, cabeceando...) pour certains mais aussi par manque de force pour d’autres comme ce pauvre cinquième qui avait envie mais qui s’affala lamentablement sous le cheval en baissant trop la tête. De cette faiblesse intrinsèque à ce lot de novillos, nulle mention évidemment et il y aurait pourtant des choses à dire tant le lot manqua de poder, de souffle et de pattes.

Quand manque le trapío... Il serait d’ailleurs judicieux de savoir à quoi sont nourris les Riboulet pour présenter des formes aussi fines voire maigres avec ces os du haut du cul qui affleurent bien trop et ces côtes décharnées. Je ne suis pas partisan des toros cochons mais l’inverse (maigreur, apparence très frêle) est également préjudiciable pour la force d’un toro de combat, me semble-t-il. Pour revenir aux piques, nulle mention non plus des coutumières mauvaises habitudes des piqueros. On s’habitue... Le quatrième (d'origine Guardiola vu le physique différent des autres = plus bas, profil de tête moins fin, plus rempli et plus large de poitrail, les cornes moins effilées) fut proprement détruit par le castoreño aux ordres de Ronquillo avec un puyazo sauvage dans l’épaule qui annihila une partie des forces et de l’envie de ce bicho. Il y eut six cariocas, mais c’est normal aujourd’hui, la carioca est l’unique manière de piquer de l’immense majorité des varilargueros. Il n’y a rien à écrire dessus donc...
Les Scamandre furent décevants pour ces raisons-là, c’est-à-dire leur manque de force, de trapío et de vraie bravoure. Pourtant, certains ont montré des envies et de belles choses lors du troisième tiers avec des têtes qui faisaient l’avion (2nd et 5°) quand d’autres posaient des problèmes intéressants à corriger sans pour autant être des tueurs-nés. C’est là que ce qu’il nomme le "sérieux des novilleros" est à relativiser tant ces futurs matadores de toros proposent une tauromachie déjà modélisée et polie, seulement apte à dessiner des passes à des animaux chargeant droit comme des trains. La tauromachie parallèle, décentrée et principalement axée sur l’esthétisme a de beaux jours devant elle. Et ce manque d’engagement se concrétise malheureusement lors des mises à mort qui pour la plupart furent catastrophiques avec une mention spéciale à El Santo qui décidément a des progrès à faire dans cet exercice difficile. La course du Scamandre a déçu car le piquant de l’an dernier fut mis en berne par une faiblesse inquiétante que le manque de trapío de ces novillos pouvait laisser présager. Elle fut également décevante car de jeunes novilleros ne veulent toréer que des carretones qui passent sans défauts... et ils sont soutenus par ceux qui rendent compte de leurs exploits dans la presse locale et ailleurs...

>>> Retrouvez la galerie de la novillada sur le site à la rubrique RUEDOS.