Mardi 30 avril 2013
Les toros de Dolores Aguirre Ybarra dégagent une impression de grand calme au campo. Ils vont et viennent, rejoignent leur querencia naturelle, clopin-clopant, dodelinant de la tête, grattant parfois le sol et chassant quelques mouches, qui reviennent inlassablement. L’air est frais et le soleil perce maintenant à travers les milliers d’encinas de la finca. Ils sont regroupés par lot, et, plus ou moins, chacun s’est déjà vu assigner une destination : Pamplona, Bayonne, Saint-Vincent-de-Tyrosse, Tafalla et, semble-t-il, un « pueblo de aquí », mais lequel ?
Seule attend une grosse demi-douzaine de cuatreños initialement « réséñés » pour la San Isidro de Madrid. Las, ceux-ci ne fouleront jamais le ruedo venteño, car remplacés par six cornalones — on imagine — de Samuel Flores. Le mayoral n’est pas inquiet : Valencia en julio ou Logroño à la fin de la saison. C’est la tête de camada de l’élevage cette année, una tía con toda su barba.
Les voir là, sereins, l’air de rien, la tête au vent, le mufle au sol, les reins au soleil, on se dit que nous n’aimerions pas être torero. Ni matador, ni peón de brega, ni banderillero, ni picador, ni aucune fonction qui nous obligerait à mettre le bout du petit orteil sur le sable d’une arène.
Dimanche 28 avril 2013
Les novillos de Núñez del Cuvillo dégagent une impression de grand calme dans le ruedo. Ils vont et viennent, chassant sans trop y croire la muleta qu’on leur présente, de profil ou de trois quarts, et qui revient inlassablement. L’air est frais — glacial, selon les Sévillans — et le soleil perce parfois au-dessus de la Puerta del Príncipe. Les présents trouvent les deux premiers intéressants, les autres ennuyeux et faibles. Les novillos s’ennuient eux aussi.
Les voir ainsi, l’air de rien, l’air de ne pas être venus pour combattre, mais seulement pour suivre gentiment un leurre qui répète le même geste sans fin, on se dit — mais c’est très présomptueux, évidemment — que nous pourrions nous aussi être torero. On accepterait sans trop d’inquiétude toute fonction qui nous obligerait à mettre le bout du petit orteil sur le sable des arènes de Séville.
Lundi 6 mai 2013
C’est par là qu’elle disparaît, dans cet instant où les taureaux de combat qui n’en sont plus vraiment font croire que nous pourrions être tous toreros.
Photographie Un novillo de Núñez del Cuvillo, à Séville, le dimanche 28 avril 2013.