03 août 2013

Six novillos de combat


Ce 28 juillet, à Orthez, sous un soleil de plomb plus propice à l’assoupissement qu’à la concentration, à chaque fois que j’ai ouvert la bouche ou frappé des mains, j’ai aussitôt eu la désagréable sensation de l’avoir fait à tort et à travers — il a bon dos le soleil…
Sans compter que j’ai éprouvé les pires difficultés à traduire clairement ce que je voyais, — et je n’ai pas tout vu, ni tout compris ! —, en voici une synthèse.

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En matinée, l’absence de combattants n’a pas permis aux noirs novillos de Miguel Zaballos (élevés sans fundas), sérieux et durs de pattes, de s’exprimer complètement. Tous sont morts tête haute et gueule fermée, quasi « entiers », à peine essoufflés. La plupart ont lutté avant de s’effondrer. Je ne me suis pas ennuyé.

Auteur d’un tiers de banderilles entretenu, succédant à quatre tampons contre le caparaçon, le vilain premier aurait pu tuer Jesús Fernández au son des cuivres et des tambours. Il a été achevé par derrière. Piste arrosée.
Le deuxième, devise clouée dans le dos et pas franchement typé Saltillo, a été reçu par Iván Abasolo avec des véroniques néfastes. Non piqué en trois rencontres, il s’appelait ‘Islero’.
Le beau troisième, après avoir mis K.-O. Alberto Pozo, a été abandonné non loin d’un attroupement d’une petite dizaine de personnes, seulement surveillé par un péon décati auquel je ne confierais rien, pas même mon goûter — « Très danger, très danger. » (sic). Piste sèche.
Accueilli avec des véroniques impropres, le costaud ‘Rumboso’ a subi une première pique lamentable au cours d’un tiers mené en dépit du bon sens du haut d’un cheval char d’assaut. Piste très sèche.
Dans un océan de passes de cape, ‘Señorito’, un señor novillo qui, las, portait la queue courte, a agressé le picador à quatre reprises, puis s’est désintéressé du travail médiocre du novillero. Piste arrosée.
Avec son frère sorti en quatrième position, ‘Hurón’ s’est révélé, en trois occasions, le moins couard et violent du lot, et a eu droit à une première pique qui, en plus d’être abusivement longue, fut déloyale.
Pour finir, je regrette sincèrement que des novillos si bien présentés, à l’exception du premier, n’aient pas été gardés une année ou deux de plus au campo pour être combattus toros.

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L’après-midi, les Raso de Portillo (élevés eux aussi sans fundas), plutôt bas, formaient un lot musclé et bien balancé. Tous ont conservé leurs oreilles, alors même que la señal (à droite) donnait l’impression qu’elles pouvaient tomber à tout moment. L’ennui n’est resté qu’une menace.

Le premier de Fernando Robleño partait de loin avec ardeur. Point.
Le numéro cinquante-six m’a ébloui de ses puissants galops annonciateurs de chutes, qui jamais ne vinrent, puis la présidence a opportunément soulagé une cuadrilla aux abois en changeant le tiers après trois banderilles posées, mais n’a rien pu pour un Morenito de Aranda ballotté de toute part.
Avec ses faux airs de Domingo Valderrama, Oliva Soto est un type atypique qui ne s’embarrasse pas de si peu de chose, à savoir affronter un Raso de Portillo de quatre ans et demi. Il compte sur ses jambes pour ne pas froisser la cape, sur ses péons pour s’occuper de la bête et sur sa brièveté à la muleta (hip hip hip ! hourra !) pour ne pas tacher son bel habit.
Le faible quatrième a eu la chance de passer entre les mains du Madrilène, qui s’est montré expert dans l’art de ne pas le laisser choir. Toujours aussi inspirée, la musique a cru bon d’accompagner cette faena d’infirmier.
Le superbe cinquième, ‘Manzanillo’, très Santa Coloma, a été sacrifié sur l’autel de la bêtise. Le comportement du matador est d’autant plus blâmable que ce dernier avait fort bien dirigé le tiers de piques précédant. Le toro a poussé ; le picador a « carioqué » ; un banderillero a salué ; Morenito a abdiqué, et le public l’a conspué.
Au dernier, j’ai lâché stylo et papier afin de mieux apprécier la prestation de l’enfant de Camas, grosso modo similaire à la première. C’est décidé, en août, je fonde une peña…


NOTA 1. — À une ou deux astillas près, je n’ai rien trouvé à redire aux vingt-quatre cornes de cette journée taurine orthézienne.
NOTA 2. — Parce qu’un toro ça se pique, la présidence n’a ordonné, sauf erreur, que trois changements de tiers suite à la (sempiternelle) seconde pique. Piques qui, malheureusement, furent toutes placées en arrière, c’est-à-dire hors morrillo.
NOTA 3. — Autant les estocades matinales m’ont dans l’ensemble paru correctes, autant celles des matadors ont franchement laissé à désirer (certaines affreuses).

Image Un Saltillo — JotaC/Campos y Ruedos