12 septembre 2010

Éloge du toupillon


Avant, les toros étaient moins lourds (ou plus lourds) ; avant, les toros avaient des grandes cornes (ou des petites) ; avant, les toros sortaient mansos (ou bravos) ; avant, les toros tombaient souvent (ou rarement) ; avant, les toros disaient bonjour en rentrant dans l'arène, tandis qu'aujourd'hui... Avant ce peut être hier ou il y a trente, cinquante, quatre-vingts ans. Avant, des toros portaient la queue courte, comme aujourd'hui, comme demain, aussi, probablement.

La queue : le voilà l'attribut du taureau de combat que l'on aurait facilement tendance à oublier, à ne plus remarquer tant sa présence ne fait aucun doute — un peu comme l'élève qui bulle, sagement calé près du radiateur au fond de la classe, et qui ne manque jamais l'école, lui.

Et pourtant, l'utilité de la queue n'est plus à démontrer, elle qui chasse les mouches, préservant ainsi la tranquilité et le confort du bovidé. Et pourtant, esthétiquement, elle se révèle indispensable, assurant l'équilibre de l'animal. Et pourtant, taurinement parlant, un toro avec une queue sans sa touffe de poils (j'en vois qui se trémoussent), sans son toupillon donc, se classe illico dans la catégorie du toro sin trapío, s'excluant par avance de toute arène de première catégorie qui se respecte.

Et pourtant ! Il n'est pas rare de voir le sable de Las Ventas foulé par des animaux laids amputés d'une partie de leur toupillon (Garcigrande, El Puerto de San Lorenzo, Conde de Mayalde, Núñez del Cuvillo), voire de la totalité (Toros de Cortés, autrement dit Victoriano del Río) ! « ¿A quién defiende la autoridad? »
(Photos de Paloma Aguilar et Juan 'Manon' Pelegrín pour Las-Ventas.com.)

Images Un toro de Murteira Grave arborant une superbe queue munie d'un non moins superbe toupillon. L'élevage sort tout à l'heure à Madrid, en novillada, et nous ne pouvons que souhaiter bonne chance au fer portugais © François Bruschet  Un toupillon digne de ce nom, celui de 'Grajito I', toro Núñez d'El Cortijillo (autrement dit Alcurrucén) de cinq ans et sept mois © Paloma Aguilar