Ce soir, j’ai passé ma soirée avec des pédés parce que c’était la Gay Pride, et avant tout parce que ce sont des copains. Oui, j’ai des amis pédés, je les aime, ils m’aiment, j’entends ce qu’ils vivent, ce qu’ils sont et je suis à l’écoute de comment toute leur existence s’organise au sein d’une société volatile vis-à-vis de l’« autre », et que c’est comme ça, et qu’il faut faire avec… J’ai plein d’amis hétéros aussi, plein d’amis arabes, juifs, noirs, jaunes, colorés, frisés, bridés, gros ou petits, différents… Voilà, pédés, hétéros, ou autre chose, je m’en fous… Ils ne me tripotent pas le zguègue, et je n’ai que foutre du leur… Moi, je n’aime que ma femme, belle, forte, fière, pleine de nichons et de cuisses, pleine de hauteur et d’arrogance… Une parfaite connasse que j’aime pour ce qu’est elle, et je défie le monde de lui imposer d’être différente, de se fondre dans le moule, là, tout de suite, celui de la société mignonne, bien pensante, bien rangée, catho ou je ne sais quoi, polie, blonde avec la raie sur le côté, le col remonté jusqu’au menton et le bas de la jupe sous les genoux… juste pour voir. Allez…
Personne ? C’est mieux pour vous, je vous l’affirme. Venez maintenant me dire que le bouffon d’Arcangues, ce couillon des îles, ce Rantanplan basquignous jusqu’au ras du front, juste entre le béret et le foulard rouge, dont le droit de se représenter comme tel se situe entre un mur à gauche de village et la kermesse de l’école, n’ayant peut-être jamais foutu l’orteil au-delà du pas de porte, au-delà de la vue de la Rhune, au-delà d’une couenne de jambon de salaison bayonnaise, se permette aux yeux de la populace d’afficher son intolérance vis-à-vis du monde tel qu’il est, comme un dogme, une loi, une vérité de vie, une permission d’être… c’est le fond du puits, le fond du seau, le fond de la marre qui vous crache à la face, amis de partout et républicains de tous bords, le fond du toupin de fayots, le fond de la gamelle qui se rebelle contre une décision votée démocratiquement dans le berceau des droits de l’homme. Visiblement, seul contre le reste du monde, le maire d’Arcangues sait ce qui est bon pour vous et pour la République, et vous prouve sans plus attendre que si vous décidez de vous promener à poil dans votre salon ou votre jardin avec une plume dans le fion, il se portera garant de la feuille de vigne, devant Dieu ! Frère Beuglot amènera les hosties, ou les outils du châtiment… c’est selon.
Tandis que moi, moi qui ne suis rien de rien, pour qui personne n’a jamais eu l’occasion de voter, je vous le dis, tout bête que je suis : que les pédés se galochent goulûment, se roulent des pelles baveuses, se collent des doigts fougueux, et qu’ils le fassent ouvertement de la rue Pannecau jusqu’aux portes de la cathédrale… et que celui qui s’en offusque rentre à la maison et s’y enferme en n’oubliant pas de se poser des questions sur le bien-fondé de son existence, à lui… Qui suis-je, moi, pour juger de ce qui est bon pour les autres… Qui suis-je, moi, pour juger des droits auxquels les autres peuvent aspirer… Qui suis-je, moi, pour décider, bien au-delà du bien-fondé de l’existence de l’humanité, de ce qui est bon pour elle… Tu parles, Charles ! Hé, monsieur le maire d’Arcangues ! Moi, j’ai mal à ma République rien que de savoir qu’elle ait pu vous faire maire… en dépit de ce que la majorité a voté, le moment venu…
Voilà pourquoi je dis, là tout de suite, Beuglot, tu es grand couillonnasssssse… non pas de beugler ta gêne que les autres aient des droits, les mêmes que toi, mais de l’afficher sur ton site taurin, comme une fierté barbare, comme une petite vérité de semaine, entre trois bouffonneries sur des bêtes à cornes dont la majorité de l’humanité se branle copieusement, quand d’autres, ceux qui sont vraiment concernés, font d’une loi le combat d’une vie… Facile pour toi de te poser en inquisiteur du droit des autres quand t’es pas concerné, quand t’as peut-être jamais eu à regarder ton fils dans les yeux pour lui dire que tu l’aimeras quand même, quoi qu’il fasse, quoi qu’il arrive, qui qu’il soit… Trop facile… C’est quoi ta vie, à toi, c’est quoi qui arrangerait ton quotidien, c’est quoi qui te faciliterait l’existence et celle des tiens sans piétiner la petite vie tranquille des autres ? Rien ? Un callejón ? Une entrée au patio de caballos ? Alors, accepte au moins que tous, dans cette société, n’aient pas la même chance que toi dans leur petit quotidien minable et aspirent à une légère amélioration, voire à quelque opportunité… car je crois comprendre que l’acquis de droits pour une catégorie qui n’en avaient pas nuit à la tolérance de ceux qui en jouissaient… Ton édito, Patrick Beuglot, en est la preuve.
En attendant, monsieur le maire d’Arcangues, pour un bled qui vend sa bidoche sur le cul de Luis Mariano, le plus grand pédé d’opérette jamais recensé, vous faites bien rigoler ou pleurer la planète entière… Honte à vous ! Et honte à toi, Patrick Beuglot, de saisir l’occasion pour lécher l’infamie jusqu’aux couilles…
Petit bonhomme d’Arcangues, dont on dit que tu es le digne représentant républicain, à cause de toi, j’ai mal à ma démocratie au point que je finis par me dire que Flambi c’est toujours mieux que ça… Quant à ceux qui rampent derrière, je les plains de toute mon âme d’hétéro qui a eu le droit de pouvoir se marier, car un droit, c’est une chance, une opportunité sociale que seule la solution républicaine, — Liberté, Égalité, Fraternité —, vous octroie sans discernements moraux. Par chance, Dieu, le pape et ses prophètes n’ont rien à voir dans tout ça.
Nota. — Je n’ai malheureusement pas de crédit pour la photo. Que son auteur m’en excuse, ou se fasse connaître sans attendre.