21 juin 2011

La censure et le sourire


À Marie-Reine, Papa et Charlie...

J’aime bien Aire-sur-l’Adour. Peut-être parce que j’y suis né, peut-être parce que j’y ai grandi, peut-être parce que j’en suis parti. Je n’étais pas à Aire dimanche pour assister à la traditionnelle corrida des fêtes. On a le droit de ne pas goûter le cartel et de ne pas être convaincu par cette promotion par la compétition des élevages français. Je n’étais donc pas à Aire dimanche mais j’ai tenu à connaître le résultat de cette course. Parce que c’était Aire, un peu chez moi quand même encore. Ne furetant plus beaucoup dernièrement sur Internet, je m’enquis donc de la chronique du journal régional Sud Ouest ne fût-ce que pour prendre le pouls de cette corrida ; cela fait longtemps que j’ai appris à lire entre les lignes souvent fleuries du chroniqueur vedette. Mais il n’y était pas lui non plus à Aire, pas plus paraît-il que son plus jeune coreligionnaire. Quelle ne fut pas ma surprise de découvrir ces quelques lignes au bas de la page sport du supplément du lundi, édition Pays basque : "Aficionados du Sud-Ouest, si vous ne trouvez pas dans cette page de compte rendu de la corrida des fêtes d’Aire-sur-l’Adour d’hier, ce n’est ni une erreur, ni un oubli. C’est tout simplement dû aux organisateurs de la féria, la société Caltoros, qui a refusé de nous laisser entrer aux arènes pour faire notre travail. Toutes nos excuses pour cette absence d’une reseña que nombre de nos lecteurs, qui n’ont pas pu se déplacer, attendaient."
Depuis que je suis aficionado, je ne crois pas me souvenir avoir jamais lu un tel texte dans le journal Sud Ouest et, n’hésitons pas à l’écrire, je trouve cela particulièrement lamentable d’interdire un accès presse à un journal régional pour lequel on pense ce que l’on veut de la ligne éditoriale taurine (et j’ai déjà été ici même très critique à ce sujet), mais qui a encore la démarche de rendre compte de toutes les férias de la région et des grandes férias espagnoles. A priori, et d’après ce que j’ai pu en savoir, il semblerait que l’empresa des arènes d’Aire n’ait pas apprécié une phrase publiée quelques jours auparavant dans ledit quotidien, phrase qui soulignait qu’à Aire les "arènes se vident depuis deux ans". Je ne suis pas au fait du remplissage des arènes d’Aire et je ne sais aucunement si celles-ci "se vident" réellement depuis deux ans, mais force est de constater qu’elles ont toujours eu beaucoup de mal à se remplir malgré la succession à peu près ininterrompue d’empresas depuis une trentaine d’années. Bientôt, certaines empresas en viendront même à repérer les râleurs dans les tendidos et à demander à la sécurité de les mettre dehors. Bientôt...
Comme je n’étais pas à Aire ce dimanche de censure de la presse, une amie a eu la gentillesse de m’écrire un rapide e-mail pour me tenir au courant de ce que j’avais choisi de ne pas voir.
Cette amie, c’est Marie-Reine. Marie-Reine vit à Aire et tout le monde connaît Marie-Reine à Aire. Elle connaît d’ailleurs tout le monde à Aire elle aussi. Marie-Reine assiste chaque année à quelques corridas dans le Sud-Ouest, chez elle à Aire, parfois à Mont-de-Marsan quand son emploi du temps de jeune retraitée lui laisse la possibilité de le faire. Car Marie-Reine n’a pas que les toros dans la vie mais les toros elle aime bien ça, Marie-Reine. Marie-Reine a beaucoup lu dans sa vie et continue de le faire aujourd’hui, mais je ne parierais pas qu’elle ait un jour parcouru le Popelin ou le Cossío. Trop d’autres choses à faire, et elle a bien raison. Quand elle va aux arènes, Marie-Reine est souriante (même quand elle ne va pas aux arènes d’ailleurs) et a décidé que de toute façon, aller aux arènes, c’était avant tout passer un bon moment de vie avec ses amis. Marie-Reine a raison, elle aime la vie et ses amis.
Padilla a coupé deux oreilles hier à Aire. Je crois que Marie-Reine a bien aimé ça. Marie-Reine, pour moi, c’est un peu le grand public rêvé. Pas celui qui existe dans les faits. C’est la joie et la bonne humeur, le plaisir de se délecter de ce qu’elle vit. C’est surtout affirmer ses goûts avec un sourire même face à un "puriste", comme elle écrit, c’est aussi respecter ce "puriste" quand il roumègue après un tercio de piques affligeant ou une faena de pico. Marie-Reine c’est l’anti "chut", le contraire du "ne franchis pas la ligne" ! Marie-Reine elle censure pas, elle vit en souriant !
« Cet aprem corrida à Aire...J'ai aimé le spectacle avec l'ambiance sous le soleil estival! Padilla a bien planté les banderilles et nous avons vu des mises à mort correctes et de jolies passes ....pas toujours académiques...pour les puristes! 2 oreilles pour Padilla et 1 pour Juan Bautista et 1 Milleto.
Toros autour de 500 kgs énergiques sauf le dernier...braves à la pique...picador renversé...tour de piste pour un d'entre eux. En gros après-midi sympathique pour Aire-sur-Adour
Bises  MReine »

Photographie 
Juan José Padilla à Vic en 2011 © Laurent Larrieu / www.camposyruedos.com