12 avril 2008

Toros y Vinos… à "Mirandilla" (III)


Nous continuons avec Fabrice Torrito notre plongée dans la troisième dimension de deux univers pas vraiment parallèles. Ce sont maintenant les similitudes perverses qui sont l’objet de sa réflexion. A ce stade, je ne peux que vous renvoyer sur le Mondovino de Jonathan Nossiter et son ouvrage récemment publié : Le goût et le pouvoir et rebondir par anticipation sur ce que va vous exposer Fabrice. Les vins à la mode, modernes et faciles, présentent un aspect sucré, pas forcément décelable de prime abord pour un palais non éduqué. Tous les vins contiennent un peu de sucre même si à la dégustation celui-ci n’est pas perceptible. Je ne parle pas ici des liquoreux mais bien des vins secs. Or, pour flatter les palais de ces nouveaux consommateurs les winemaker à la mode élaborent des vins moins acides, moins tendus, plus sucrés que les vins traditionnels. C’est rapidement agréable, mais souvent vite écoeurant et généralement totalement dépourvu de personnalité. Découvrir les réflexions de Fabrice a fait remonter à ma mémoire ce passage de l’ouvrage Vérité et mensonges des corridas concours de l’incontournable Luis Fernández Salcedo : « Il ne faut pas perdre de vue que la bravoure est le café-café et la suavité, l’indispensable sucre. Le café seul est amer ; mais avec cinq morceaux de sucre il devient écoeurant. Le fondamental c’est le café. C’est pour cela que l’on a coutume de dire « dans ce bar ils servent un bon café » et non « dans cette cafétéria ils donnent beaucoup de sucre. »
Sans compter le nombre d’amateurs de café qui le dégustent sans le moindre petit morceau de sucre. Sans doute des ayatollahs de l’arabica !

• Les fraudes, les triches, avec une perte de l’éthique, de la déontologie. Le négoce quantitatif et la recherche du spectaculaire vont à l’encontre de la patience que doit avoir un éleveur.
• Le phénomène du produit standard dans le vin et le taureau. L’objectif est d’obtenir une plus grande part du marche, en élevant un vin « bien fait », mais en perdant de la typicité, de la spécificité, du caractère. En tauromachie, on se tourne vers le sang commercial par excellence : Domecq (famille française d’origine qui élevait d’ailleurs du... vin). Il existe un grand vin « Château Domecq » au Mexique.
• Aseptisation de la corrida pour la rendre moins sauvage, plus facilement accessible à un public non connaisseur. Le succès des vins rosés ou l’apparition des vins d’été ou encore le Seven-up rajouté à la manzanilla dans les férias espagnoles ! Pourtant, le vrai connaisseur cherche le vin et le taureau avec un caractère bien marqué.
• Ces vins d’été sont jeunes, issus d’un monocépage, fruités (raisin gorgé de soleil). Le packaging est tape-à-l’œil, aux couleurs vives et à la typographie moderne. On joue sur la clarté et la simplicité. C’est le phénomène du nivellement pas le bas en tauromachie, de la perte de culture taurine du public. On cherche le produit facile à identifier. C’est le taureau que tout le monde comprend, c’est le taureau qui sert... le spectacle !
• Le marketing influence de plus en plus. Le design du contenant et son étiquette. Certains éleveurs achètent des pages de publicité dans les revues spécialisées pour vanter les mérites de leurs taureaux.
• Les critiques plus ou moins intègres dans les deux milieux, les médias indépendants ou proches des décideurs taurins, les récompenses (médailles en concours internationaux ou palmarès en tauromachie).
• Le phénomène Parker. On se dirige vers le goût d’une personne. On oublie les différences de ressenti (dans l’arène et devant le vin). Lectures différentes, appréciations opposées, subjectivité, irrationnel. Il n’y a pas qu’une vérité en corrida ou en vin. Il ne s’agit pas d’une science exacte, mathématiquement quantifiable.



Photographie Chez Pablo Romero par Gilles Gal.