30 juillet 2010

Photographie avec paroles : Olot avui, Barcelona demà ?

Olot, mars 2009

Larmes de crocodile


Il faut bien le dire, ma revue de presse n'est pas allée bien loin - désolé par le niveau de ce que j'ai pu lire et entendre dans notre langue sur la décision du P
arlament, je n'ai guère poussé avant les recherches. Le journalisme espagnol a certainement bien des défauts, mais il a la qualité d'appeler souvent un chat un chat (un mafieux un mafieux aussi) et d'utiliser des termes que les taliban que nous sommes, avons parfois des scrupules à publier. A propos de taliban, avez-vous lu l'histoire de Bâmiyân jeudi matin chez le cèpe argenté ? Vous y apprendrez, et les principaux intéressés également sans doute, que le mouvement des taliban (qui émergea en 1994 au beau milieu d'une guerre civile afghane) a en fait bouté les Soviétiques sur l'autre rive de l'Amou-Daria en 1989... Mais que sont 5 ans (même à rebours) dans l'histoire, n'est-ce pas ?
Mais place à Antonio Lorca d'El País dont l'article, "Lágrimas de cocodrilo", valait bien une modeste traduction (gracias a Bego por la ayuda en "los puntos vocabularios"...) :

Larmes de crocodile
L’interdiction est désormais une triste réalité. La politique a été le bourreau de la fiesta de los toros, rejetée pour son identité espagnole. Mais le terrain était laissé en friches depuis la mort de Pedro Balañá Espinós, l’un des plus grands imprésarios taurins de l’histoire. Après la mort de Don Pedro, personne ne suivit ses pas et alors que l’Afición languissait, la politique s’est mise à occuper le terrain, lentement mais sûrement et a miné toutes les sphères de l’édifice taurin de Catalogne jusqu’à atteindre son but final.
La politique est entrée en trombe par la porte des cuadrillas et la liberté est sortie tête basse, meurtrie et blessée par celle de l’équarrissage. Elle a fait peu de cas des gestes qui ont eu lieu à El Torín, Las Arenas ou à la Monumental, ces trois arènes qui avaient en leur temps fait de Barcelone le centre du monde taurin, comme dans d’autres arènes de toutes la Catalogne. La politique a essayé de donner le coup de grâce au sentiment, à l’art, à l’émotion et à la grandeur de la tauromachie. Et le pire dans tout ça est que ceci fut fait sans nécessité aucune. Il est vrai que les aficionados catalans sont peu nombreux mais pourquoi interdire à une minorité le droit de profiter d’un spectacle dont la faiblesse du pouls indiquait déjà l’agonie ? Pour protéger les animaux ? Les députés abolitionnistes savent que ceci n’est pas la vérité. Le toro, dans ce cas, n’a jamais été rien d’autre qu’une excuse.
La décision prise par le Parlement catalan est donc bien gravissime mais pas moins grave que celle qui incombe au monde du toro qui, pour la première fois peut-être de son histoire, se retrouve complètement démuni face à sa honteuse misère.
Le problème le plus grave est que de nombreux bons aficionados désertent chaque année les arènes, las de supporter stoïques un spectacle cher, dépassé, ennuyeux et manipulé. C’est un fait que le toro a été dénaturalisé, qu’il n’est plus cet animal puissant et hautain des temps anciens, mais au contraire un malade invalide qui fait de la peine. La fraude s’est frayée un chemin en toute impunité. On ne parle plus d’afeitado mais il existe le soupçon généralisé qu’aujourd’hui peu de toros sortent avec des cornes intactes. Il est tabou de parler de substances qui modifient le comportement des animaux : de drogues en fin de compte. Il n’y a plus de respect pour le protagoniste principal de la Fiesta. Et les toreros ne sont plus des héros mais des infirmiers se prenant pour des danseuses qui se jouent la vie, indéniablement, mais sans donner d’émotion. Les ganaderos, qui sont au service de ces dites figures, ne sont plus maîtres dans leur finca et se sont dépouillés de leur propre chef de la dignité que leur confère leur condition de chercheurs en génétique autodidactes. Tous : toreros, ganaderos, organisateurs, apoderados, etc., ont fait de la Fiesta une farce, une tromperie...
Quelqu’un a-t-il entendu les figuras actuelles, les ganaderos prétentieux, les empresas d’arènes de première ou les apoderados célèbres parler de modernisation du spectacle ou de régénération du toro bravo ?
Les taurins constituent un milieu curieux. Ils ressemblent à des gens ancrés dans une autre époque, sans aucun sens de la modernité, ni solidarité, astucieux, méfiants et cupides. Même les jeunes qui débutent se trouvent contaminés par ce virus et ressemblent vite à des retraités. Ce qui préoccupe le taurin, au sens général du terme, est en fait l’argent qu’il pourra gagner rapidement mais pas le présent ni le futur de la tauromachie.
C’est un peu tout ça qui pourrait expliquer que le mundillo taurin ait laissé filé le match en Catalogne. Face à une lente évolution des us sociaux et la pression continue des nationalistes, les taurins se sont retirés dans leurs quartiers d’hiver et laissée pour perdue une communauté qui avait été emblématique pour la Fiesta. La nouvelle situation exigeait des exposés imaginatifs et de nouvelles méthodes, mais c’était trop demander à un collectif aussi sclérosé. Au contraire, les taurins ont fui et laissé le champ libre aux abolitionnistes. Il serait injuste d’oublier une autre cause qui n’est pas moins importante : les corridas de toros n’ont jamais réussi à s’implanter solidement en Catalogne, pas plus que la tauromachie ne fut un élément structurel. Les arènes se remplirent au temps de Pedro Balañá avec la même intensité qu’elles se vidèrent à sa mort.
De toutes façons, aujourd’hui éclatent les complaintes et grincent les dents, montent les lamentations, les accusations diverses et jusqu’à l’insulte aux ennemis de la Fiesta, mais on attend toujours et on attendra en vain un sérieux examen de conscience du rôle joué par les taurins dans la débâcle catalane.
Depuis longtemps déjà la Catalogne a cessé d’intéresser les taurins, y compris le patron actuel de la Monumental – petit-fils du fameux Don Pedro – qui a déjà essayé de la faire fermer en 2007 et qui garde aujourd’hui un silence plus que suspect, peut-être à l’affût d’une juteuse indemnisation qui pourrait lui tomber du ciel.
Combien de ceux qui se lamentent aujourd’hui ont vraiment soutenu les aficionados catalans, qui se sont acharnés dans leur tentative solitaire, aussi osée que naïve de faire front aux politiques ?
Tous les taurins savent que la Catalogne n’est qu’un début. Avant que ne se produise le veto nationaliste, les aficionados avaient abandonné les gradins des arènes. L’image offerte dimanche dernier par la Monumental avec à peine plus d’un quart d’arène n’était que le reflet fidèle du faible écho des corridas dans la société catalane. Il y aura certainement de nouveaux sursauts mais le plus difficile et le plus dangereux continuera à être sans aucun doute l’abandon constant d’un spectacle qui a perdu son intérêt d’autrefois.
Ceci est le véritable problème, et pas une vaine complainte. Est-il possible que le taurinisme actuel arrête de se regarder le nombril et affronte le présent et le futur de la Fiesta avec toute la rigueur nécessaire ? La présence du toro bravo continuera-t-elle à tenir de l’utopie ? Quelqu’un pourra-t-il endiguer l’hémorragie dont souffre la Fiesta ?
Pendant ce temps, il ne nous reste plus qu’à pleurnicher comme un enfant ce que l'on n’a pas su défendre comme des hommes. Il ne reste plus qu’à répandre des larmes de crocodile, des larmes qui semblent feintes.
Antonio Lorca - El País, 29 juillet 2010.

29 juillet 2010

Tout ça...


Je pense aux noirs, aux gris, aux jaunes, aux pédés, aux petits, aux gras du bide, aux mous du cul, aux petits seins, aux petites bites, je pense aux mal foutus, aux mal baisés, aux pas finis, aux mal nés, aux autres, aux pas comme tout le monde, je pense à la Différence, je pense aux salopes, aux "343", je pense à Jaurès, je pense à Ferré, je pense à Ferrat, je pense à nos bleds décorés d'obélisques de mort, je pense à la Bastille, je pense à Dany de 68, je pense à Derry de 72, je pense à Pékin de 89, je pense à l'Afghan, je pense au Tibétain, je pense au Birman, je pense à l'Iranien, je pense à Gaza, je pense à Allende, je pense à Moulin, je pense à Voltaire, je pense à Guernica, je pense à Puig Antich, je pense à Onfray, je pense à Tolstoï, je pense à Saint Augustin, je pense à Thomas d'Aquin, je pense à Ned Kelly, je pense à Baltazar Garzón, je pense à Karla, je pense à Mario, je pense à René, je pense à l'ANDA, je pense aux fous, je pense aux rêveurs, je pense à la Liberté, je pense aux libertaires, aux humanistes, je pense que je les aime, je pense que je suis tout ça et que je suis fier d'être tout ça, du coup je pense que j'ai de la chance d'aimer la corrida.

Et puis j'ai pensé à Fabrice


Horrible.
RTL, RMC, Europe 1 et toutes les autres. Je les ai toutes faites, j'ai zappé de l'une à l'autre, pendant deux jours, vers 8h30, puis à 13h...
La parole aux auditeurs. Atroce, pas une pour rattraper l'autre, d'un côté ou de l'autre.
Le débat du moment, la corrida, interdiction, évolution, barbarie, connerie... surtout connerie. Mais évolution aussi : "Monsieur Casas, si vous m'écoutez, supprimez donc les piques. Jouez avec les toros mais sans les piques. Moi, la corrida sans les piques ça me va."
Le type ne le savait pas, mais ils ont déjà commencé en fait. Cela ne se voit pas vraiment, mais ils ont déjà commencé.
Corrida, interdiction, évolution, barbarie, ignorance surtout.
Le problème, souvent, c'est lorsque le "toréador" s'y reprend à trois fois à la fin. Ça ils ne supportent pas. Ils ne sont pas contre complètement. Mais que le "toréador" s'y reprenne à trois fois pour en finir, ça n'est pas supportable.
Et puis, je ne sais plus sur quelle station, ils ont ouvert l'antenne à un vieux monsieur à la voix nasillarde que l'âge a rendue hésitante :
- Eh bien moi madame, je suis opposé à l'interdiction. Ce n'est pas que j'aime la corrida, notez bien. Jusqu'à il y a peu j'étais même contre. Mais il y a quelque temps, j'ai fait un voyage en Andalousie. Et là, on nous a emmenés visiter un élevage. Il y avait un monsieur dans cet élevage qui expliquait, un monsieur très compétent. Il nous a tout expliqué, de la vie du toro, de sa naissance jusqu'à l'arène. Le monsieur très compétent nous a vraiment bien expliqué. Alors l'interdiction moi, eh bien je suis contre.
Hier, dans cet univers de médiocrité radiophonique ininterrompue, un vieux monsieur a décroché son téléphone pour raconter le campo. Alors j'ai pensé à Fabrice, à "Mirandilla", au printemps, aux toros, à ce que nous aimons... Enfin, vous savez.

La prohibition par Antonio Lorca


La prohibition en Catalogne vue par Antonio Lorca, critique taurin du quotidien El País...
Je vous donne également le lien...

La prohibición, tristemente, se hizo realidad. El brazo ejecutor ha sido la política, que rechaza la fiesta de los toros por su identidad con España, pero el terreno estaba abonado y en celo desde que en 1965 falleció Pedro Balañá Espinós, uno de los más grandes empresarios taurinos de la historia. Muerto don Pedro, nadie siguió su estela, y, mientras languidecía la afición, ocupaba su terreno la política, que ha minado, sin prisa pero sin pausa, todos los cimientos taurinos de Cataluña hasta alcanzar su objetivo final.
La política ha entrado en tromba por la puerta de cuadrillas, y la libertad ha salido cabizbaja, magullada y herida por la del desolladero. Flaco favor ha hecho a las gestas acaecidas en el Torín, en Las Arenas y en la Monumental, tres plazas que convirtieron a Barcelona en el centro del mundo taurino, y en tantos otros cosos repartidos por toda Cataluña. La política ha pretendido apuntillar el sentimiento, el arte, la emoción y la grandeza de la tauromaquia. Y lo peor de todo es que lo ha hecho sin necesidad. Es verdad que los aficionados catalanes son escasos; pero ¿por qué prohibir un derecho de una minoría a disfrutar de un espectáculo que, además, carecía por sí mismo de pulso vital para continuar? ¿Para proteger a los animales? Los diputados abolicionistas saben que no es verdad. El toro, en este caso, no ha sido más que una excusa.
Gravísima, pues, la decisión adoptada por el Parlamento catalán; pero no menos grave que la que corresponde al mundo del toro que, quizá por vez primera en la historia del toreo, queda completamente desnudo frente a sus lacerantes miserias.
Porque el problema más grave es que muchos aficionados de bien desertan cada año de las plazas, cansados de soportar con estoicismo un espectáculo caro, caduco, aburrido y manipulado. Es un hecho que se ha desnaturalizado al toro, y ya no es ese animal poderoso y altivo de otros tiempos, sino un enfermo inválido que produce lástima y pena. El fraude se ha abierto paso con arbitraria impunidad. Ya no se habla del afeitado, pero existe la sospecha generalizada de que pocos toros salen con los pitones intactos; hablar de sustancias que modifican el comportamiento de los animales -drogas, al fin y al cabo- está maldito. Se ha perdido el respeto por el protagonista de la fiesta. Y los toreros ya no son héroes, sino enfermeros con aspiración de bailarines. Se juegan la vida, claro que sí, pero no emocionan. Los ganaderos están al servicio de las llamadas figuras, no mandan en sus fincas y se han despojado libremente de la distinguida dignidad que les confiere su condición de genetistas autodidactas. Entre todos ellos, toreros, ganaderos, empresarios, apoderados, etcétera, han convertido la fiesta en una farsa; en un engaño...
¿Alguien ha escuchado a las figuras actuales, a los ganaderos de postín, a los empresarios de plazas de primera o a los apoderados famosos hablar de modernización del espectáculo o de la regeneración del toro bravo?
Es un colectivo curioso este de los taurinos. Parece gente anclada en otra época, sin sentido alguno de la modernidad; insolidaria, astuta, desconfiada e interesada. Incluso los chavales que empiezan se contagian del virus y pronto parecen jubilados. Al taurino, como personaje genérico, lo que le preocupa, de verdad, es él y el dinero que pueda ganar con rapidez, y no el presente y el futuro de la tauromaquia.
Algo de todo esto explicaría que el taurinismo se haya dejado ganar la partida en Cataluña. Ante un paulatino cambio de usos sociales y la presión continuada de los nacionalistas, los taurinos se retiraron a sus cuarteles de invierno y dieron por perdida una comunidad que había sido santo y seña de la fiesta de los toros. La nueva situación exigía planteamientos imaginativos y nuevos métodos, y eso es pedir demasiado a un colectivo tan inmovilista. Por el contrario, los taurinos huyeron y dejaron el campo libre a los abolicionistas.
Sería injusto olvidar otro extremo no menos importante: las corridas de toros nunca echaron raíces en Cataluña, ni la tauromaquia se convirtió en un elemento vertebrador. Con la misma intensidad que se llenaron las plazas en los tiempos gloriosos de Pedro Balañá, comenzaron a quedarse vacías cuando este falleció.
De cualquier manera, ahora toca el llanto y el crujir de dientes; el lamento, las acusaciones varias y hasta el insulto a los enemigos de la fiesta. Pero está por ver, y seguro que no se verá, un serio examen de conciencia del papel jugado por los taurinos en la debacle catalana.
Es más, hace tiempo, muchos años ya, que Cataluña dejó de interesar a los taurinos; incluso al actual dueño de la plaza Monumental, -nieto del famoso don Pedro- que ya intentó cerrarla en 2007, y que ahora guarda un más que sospechoso silencio, quizá a la espera de una sabrosa indemnización que le podría llegar caída del cielo.
¿Cuántos de todos estos, que tanto se lamentan hoy, han apoyado de verdad a los aficionados catalanes, que se han dejado la piel en el intento solitario, tan osado como ingenuo, de hacer frente a los políticos?
Todos ellos, los taurinos, saben que Cataluña es solo el principio. Antes de que llegaran los vetos nacionalistas, los aficionados habían abandonado las plazas. La imagen que ofrecía el pasado domingo la plaza Monumental, con poco más de un cuarto de plaza, era fiel reflejo del escaso eco de las corridas de toros en la sociedad catalana. Con toda seguridad, habrá nuevos sobresaltos, pero el más duro y el más peligroso seguirá siendo, sin duda, el abandono constante de un espectáculo que ha perdido todo el interés de antaño.
Éste es el verdadero problema y no el lamento vano. ¿Será posible que el taurinismo andante deje de mirarse el ombligo y afronte el presente y el futuro de la fiesta con la crudeza necesaria? ¿Seguirá siendo una utopía la presencia del toro bravo? ¿Alguien pondrá coto a la sangría que sufre la fiesta?
Mientras tanto, solo queda lloriquear como un niño lo que no se supo defender como un hombre. Ahora, solo queda derramar lágrimas de cocodrilo... Lágrimas que parecen fingidas.
Antonio Lorca - El País, 29 juillet 2010.

28 juillet 2010

Orthez 2010 - Dolores Aguirre


>>> Depuis la rubrique RUEDOS du site www.camposyruedos.com, retrouvez une galerie photographique dédiée à l'excellente corrida de Dolores Aguirre combattue à Orthez le week-end dernier.

dolores

Photographie avec paroles : Figueres avui, Barcelona demà ?


Figueres, février 2009

C'est Clayderman qu'on assassine !


C'est fait et plus à faire : ce qu'il restait de corrida formelle en Catalogne Espagnole (l'inadéquate majuscule à l'adjectif tabou n'est que pur sadisme de ma part) devrait disparaître dans les mois à venir. Vous irez lire (sans y être obligés) les analyses technico-tactiques de ceux qui prétendent à la fois savoir et nous prévenir de pareil fléau. Quel impact ? Franchement, on reste loin du souffle d'Enola Gay dans le petit monde des taurins, bien que tout le monde en profite pour sortir bannières et oriflammes, grands mots et concepts grandiloquents avec des accents avignonnais et coupe au bol de rigueur : "Que l'on touche à la liberté et Paris se met en colèèèreuh !". J'ai eu droit à un SMS type poujadiste hier soir alors que je traitais mes photos quasi anti-taurines de descabellos novilleriles inefficaces : "Si Cataluña prescinde de los Toros, los aficionados prescindiremos de Cataluña : sus productos y servicios. Pasalo, por favor." Aussitôt je me marre en vertu du principe qui veut que l'humour constitue une réponse appropriée à la consternation face à la bêtise. Illico, je réponds à ce copain sudiste que, pour ma part, je continuerai à être fidèle à Céret et à aller manger côté Catalogne "Sud" à cette occasion. M'est avis que pour la prochaine branlée que l'OL prendra au Camp Nou, vous me trouverez à l'heure tardive du déjeuner chez Cal Pep. Julien n'a pas répondu, je ne crois pas que ses amis taurins verraient d'un bon oeil qu'il vienne à fréquenter le Vallespir.

Honnêtement, pour les quelques rares souvenirs que j'ai de corridas à Barcelone (José Tomás bien sûr mais aussi pour des moments partagés avec des personnes chères), je conviens que la nouvelle ne me laisse pas aussi indifférent qu'il me plairait de le feindre. Faudra-t-il se résigner à Nîmes en septembre ? Voyons ! Le désespoir lui-même a ses limites et l'homme moderne, certes souple de principes comme de ceinture, doit savoir se refuser à la désillusion qui l'envahit de compromettre ses actions futures.

La Catalogne semble donc en finir avec une Fiesta qui a trop souvent pris les apparences d'une carte postale pour touristes entassés dans le béton de la Costa Brava : du "Olé !" facile, de l'espagnolade d'opérette et sur le carton imprimé à timbrer, un bout de chiffon à pois cousu pour figurer la robe de la danseuse. Du "l'ottentique" à la Pagnol pour des hordes de bossus en short en quête d'un peu de folklore. Rien de très respectable en général (bien qu'à l'occasion, les toros tuaient aussi en Catalogne). Ne rêvons toutefois pas trop fort a posteriori d'une authenticité dressant un rempart imprenable autour du sanctuaire de la Fiesta, imaginez pareil débat quelques kilomètres au nord : que pèseraient les bonnes intentions cérétanes face à pareilles manigances ? Mais bien sûr, que ce constat ne constitue pas une raison pour transiger sur notre idée sauvage de la chose car dans l'affaire qui nous occupe, personne n'a transigé sur ses intérêts. Dans les jours à venir, cette mesure d'interdiction sera récupérée par le mundillo taurino avec des formules définitives et indignées qui se répandront comme giclée d'ados sur les réseaux "sociaux".

Pour finir, mon ami JotaC, natif de Catalogne Sud et résidant en Catalogne Nord s'indigne à juste titre. Je me fais porte-parole de sa légitime colère car le combat ne saurait s'arrêter là : "Je demande solennellement que la conception, la production, la consommation et la vente de churros soit totalement interdite en Catalogne. Ce vestige aliénant de la culture culinaire "espingouine", centralisatrice et totalitaire dont l'expression de la barbarie la plus calorique se concentre dans cet étron jaunâtre de pâte frite dans le gras doit disparaître définitivement. Une telle violence gustative, un tel déferlement lipidique n'est plus tolérable au siècle du donuts roi et du string en dentelle."
Le message est passé, merci José !

27 juillet 2010

Orthez 2010 - Exterminator


L’an passé, ou il y a deux ans, Môssieur Zocato s’était laissé aller à écrire que les toros de Palha n’avaient plus leur place dans nos ruedos contemporains.
Lorsque j’écris "Palha" il faut entendre "Folque de Mendoça" parce que l’autre, Fernando, pour les gens comme Môssieur Zocato, c’est déjà comme s’il n’existait pas. Il n'a d'ailleurs jamais existé.

Ce week-end, à Orthez, Môssieur Zocato a remis le couvert.
Victime désignée à la vindicte populaire : les Saltillo d’Enrique Moreno de la Cova. Les lecteurs de Camposyruedos savent de quoi il en retourne avec ces Saltillo-là. Ils sont allés les voir comme on va voir certaines courses à Céret, avec l'espoir d'une renaissance et la crainte que le rêve ne soit prématuré, ou illusoire.
Ça marche, ou pas, mais on essaie, on innove, on tente et toujours avec l'espoir de lendemains meilleurs. D’ailleurs, il fallait voir à Orthez le nombre d’aficionados venus de partout, de toute la France, d’Espagne aussi : l’Afición quoi.
Seulement voilà, Orthez n’est pas Céret. Orthez n’est rien en fait. Orthez a juste commencé à avoir des idées l’an dernier, et a juste commencé à tenter de les mettre en œuvre, avec plus ou moins de réussite, ce qui est logique.

Une partie du mundillo n’apprécie pas, et ce que l’on ne se permet plus avec Céret, on se le permet évidemment avec Orthez.

Monsieur Zocato remet donc le couvert. Et pour se payer Orthez il désigne à la vindicte populaire la tentative romantique d’Enrique Moreno de la Cova de redonner vie à ses Saltillo : « novillos-mastodontes... plus armés que le débarquement normand... des mammouths... l’ultime "Jurassic Park"... salaire de la peur... » jusqu’à décrocher le pompon avec le très définitif : « Chair à canon, chair à taureau inutile, dérangeante, mal à l’aise, une brin malsaine ? Chacun jugera. »

Evidemment, après la diatribe qui précède, poser la question c’est y répondre.
Que Monsieur Zocato exècre les toros avec de grandes cornes, les toros retors, « les choisisseurs » orthéziens, qu’il ait trouvé les toros grands, petits, laids, beaux, qu’il se permette de s'en aller dire ses aigreurs d’estomacs au président à la fin de la course, tout le monde s’en fout, qu’il l’écrive également. Nos plumes et nos esprits sont libres.

En revanche, qu’il prône publiquement la disparition d’un encaste qui n’entre pas dans les canons classiques et contemporains du toro monopiqué, et présente forcément les inconvénients d’un chef d’œuvre en péril en cours de restauration, à Camposyruedos cela a du mal à passer.
Cette après-midi, l’ami Angulo me fit cette remarque que je reprends bien volontiers à mon compte : « Comment peut-on écrire que dans une arène les "bestioles" présentées ne doivent pas être dangereuses pour les jeunes éphèbes pubères qui sont censés les combattre ? C'est quoi un toro sans danger ? Une entrecôte au roquefort ? Une palourde nyctalope ? Un hérisson chauve ? Une bitte d'amarrage ? Un piranha végétarien ? »

Dans un coin d’Andalousie, Enrique Moreno de la Cova, à force d’afición, a entrepris de redonner vie à un encaste en voie de disparition, un encaste qui participe à la diversité du campo bravo. Il y parviendra peut-être, ou pas. On ne sait pas. Mais il donne de son temps et de son argent pour une tentative, peut-être vaine, mais magnifique, que l'Afición ne peut considérer qu'avec respect et intérêt.
Au même moment, en Catalogne, des politicards s’apprêtent, peut-être, à amputer la Fiesta d’une partie de son histoire.
Prôner, au même moment depuis nos rangs, la disparition d’un encaste, condamner une démarche ainsi romantique est profondément choquant. D’autant plus choquant que ce n’est pas la première fois...
Vous me direz que Môssieur Zocato n'a rien fait d'autre qu'emboîter le pas d'un certain Paco Chaves, novillero, qui déclara après avoir échoué face au bétail de Moreno de Silva à Madrid : "De tels élevages ne devraient même pas exister." Pour de tels propos certaines arènes ont jugé bon de le déprogrammer...

>>> Retrouvez en rubrique RUEDOS du site www.camposyruedos.com une galerie dédiée à ces Saltillo à exterminer.

26 juillet 2010

Orthez 2010


Orthez 2010, les galeries sont à venir...

Déception pour les Saltillo malgré la présentation. Le risque était pris et assumé, le chemin tracé, n’en déplaise aux thuriféraires d’un certain mundillo professionnel. Encore faut-il être capable, ou plutôt avoir l’honnêteté intellectuelle de juger cet élevage dans son contexte...
Satisfaction en revanche avec une excellente corrida de Dolores Aguirre, entretenue et passionnante malgré l’incapacité des matadors à se hisser à la hauteur de l'adversité et malgré des chevaux de picadors démesurés.
¡Fuera El Pimpi!

orthezflic

24 juillet 2010

Aurelio Hernando


Quelques petites nouvelles d'Aurelio Hernando, l’ex-associé de Javier Gallego qui vient de faire sa présentation à Céret. Les Veragua d’Aurelio subissent la crise, comme tous, donc pas de corrida pour cette année où ses toros « tan bonitos » sont partis pour les rues de la région de Castellón. Il y aura tout de même une novillada qui sortira à Cercedilla le 11 septembre. Et une autre, moins charpentée, reste à vendre.

Et pour compléter les informations sur cette jeune ganadería vous pourrez vous référer à son tout nouveau site Internet : http://www.ganaderiaaureliohernando.com/.

Toros en Vic


On clique sur le cartel.

22 juillet 2010

En vrac


Ce dimanche, en terre béarnaise et à l'occasion d'une journée taurine sin fundas (tout le monde ne peut pas en dire autant !), les températures n'atteindront vraisemblablement pas les sommets de l'année dernière, ce dont nous ne nous plaindrons pas — cette nouvelle ne constituant pas non plus pour moi une raison suffisante pour me départir du fidèle couvre-chef.
Source : Météo-France.

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C'est un fait avéré, ma boîte à e-mails ne déborde pas de lettres d'information et autres newsletters ; la seule que j'aie jamais reçue : celle de la ganadería Murteira Grave. Ces derniers jours elle arrive de plus en plus fréquemment avec, parfois, des remarques sur les toros à lidier apportant leur dose d'amertume et de frustration bien compréhensibles : « Uma estampa! Pena ter que levar bolas... » Sans commentaires. Enfin, si... Est-ce que quelqu'un aurait l'amabilité de dire à don Joaquim que je n'y suis pour rien, moi, si les « plazas de première », tant espagnoles que françaises, s'évertuent à présenter des lots « à chier » d'élevages — toujours les mêmes — qui le sont tout autant ?

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Les carteles complets et amaigris de la prochaine Feria de la Virgen del Roble 2010 de Cenicientos (Madrid) sont désormais connus — y lire les noms de Yonnet et de José Ignacio Ramos me fait grand plaisir :
Samedi 14 août Toros d'ALCURRUCÉN pour José Ignacio Ramos, José Pacheco 'El Califa' et Fernando Tendero (alternative).
Dimanche 15 août Toros d'HUBERT YONNET pour Iván García, Luis González et David Mora.

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The Festival of San Fermin, 2010
Laurent, notre sanferminero de choc (quelle paire ils font El Batacazo et lui !), nous l'avait glissé dans un récent e-mail ce lien du Boston Globe.
On restera bouche bée devant la plupart des clichés*, on s'étonnera de devoir cliquer sur certains, cachés... et puis, si l'on en a le courage et que l'on maîtrise un tant soit peu la langue, on jettera un œil à quelques-uns des 634 commentaires (insulte, haine, ignorance et sentimentalisme exacerbé à quasiment tous les étages) dont l'un, pépite à l'ironie mordante, que je ne retrouve plus, s'étonnait que les Etats-Unis n'aient pas encore déclaré la guerre à l'Espagne... ¡Je, je, je!
Mais au fond, c'est vrai, qu'est-ce qu'ils attendent les Ricains ?
* Superbe la vue plongeante sur les Géants, épatante l'enfilade de balcons...

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Pour finir, deux concours de photographie taurine sont organisés en Espagne :
— l'un par l'empresa Taurodelta (¡fuera!) /// Remise des œuvres une semaine avant le terme de la temporada madrilène, fin octobre 2010 (source : Cope) ;
— l'autre dans le cadre du congrès Fundamentos y Renovación de la Fiesta (tout un programme...) de Séville /// Remise des œuvres avant le 16 septembre 2010.

Voilà, ce sera tout pour aujourd'hui...

Image Yonnet n° 561 prévu pour Cenicientos © François Bruschet

21 juillet 2010

Orthez, dimanche 25 juillet 2010

Nous avons reçu de la part de la commission taurine d'Orthez le communiqué figurant ci-dessous :

Les toros de Doña Dolores Aguirre Ybarra et les novillos de Saltillo ont été débarqués ce matin. Les Dolores Aguirre Ybarra attendent le 25 juillet dans les corrales de la plaza de Dax alors que les novillos de Saltillo patientent à Saint-Sever. Nous tenons d'ailleurs à remercier ces deux cités landaises d'avoir bien voulu nous ouvrir leurs corrales.

Nous rappelons à tous ceux qui viennent à Orthez le dimanche 25 juillet 2010 que la novillada (11h) est composée de 4 novillos de Saltillo plus un qui, s'il n'est pas utilisé comme sobrero, sera lidié par un des deux novilleros désigné par un jury. Le sobrero de la corrida de l'après-midi (18h) portera le même fer que les toros, c'est-à-dire celui de Dolores Aguirre Ybarra.

Nous rappelons aussi que c'est la cuadra de caballos d'El Pimpi (déjà vue à Samadet en début de temporada) qui aura la charge des tercios de piques. Comme l'an dernier, un jury décernera le prix de la meilleure exécution du tercio de piques (Prix Ville d'Orthez le matin & Prix Roger Dumont l'après-midi) au terme des spectacles. Ce jury, composé de sept membres, sera co-présidé par Bernard Desvignes et Mario Tisné.

Enfin, les présidences techniques de la novillada et de la corrida sont les suivantes :
Novillada /// Président : Olivier Barbier / Assesseurs : Thomas Thuriès et Patrice Maubecq.
Corrida /// Président : Bernard Dussarat / Assesseurs : François Baju et Jean-Pierre Alphonse.

Merci à toutes et tous,
La commission taurine d'Orthez (http://torosorthez.blogspot.com/)

Réservations : 05 59 69 95 17 ou http://www.mairie-orthez.fr/
.

Affirmer que nous sommes heureux de retourner à Orthez est un doux euphémisme. L'originalité des choix, le sérieux dans l'organisation et l'enthousiasme de cette dernière ne doivent pas, ne peuvent pas laisser les aficionados indifférents ; sinon, c'est à désespérer.

L'intérêt que suscitent les deux élevages sélectionnés par la commission est grand. Ils sont donc arrivés, les toros. Il ne reste plus qu'à espérer que nos attentes seront comblées, et que les gradins seront bien remplis pour participer à la fête.

Les occasions de se réjouir d'une programmation — ou, pour les dubitatifs, de satisfaire leur curiosité — sont hélas peu nombreuses. Sachons en profiter quand l'occasion se présente.

Photographie sans paroles (XXXI)



20 juillet 2010

Antes y después del Juli



Pamplona 2010. Une présidence, peut-être injustement, refuse une oreille à Julián López 'El Juli', qui déclare : "Lo de los presidentes cada vez me afecta menos, porque algunas de estas faenas a las que no han premiado han sido las mejores faenas de mi vida. Muchas veces hacen el ridículo (por los presidentes). Creo que estamos en manos de gente que no tiene respeto y no saben lo que es esta profesión. No me gusta en manos de quien estamos, pero imagino que será una cosa que tengamos que cambiar."

Cela n'a pas toujours existé. Par conséquent, cela n'avait pas l'importance que ça a aujourd'hui.
Une bonne centaine d’années avant le présent siècle, ce qui ne fait pas tellement vieux si on veut bien y réfléchir posément deux minutes, on ne coupait pas d'oreilles. Cela ne se faisait pas. Il faut lire l’incontournable Antes y después del Guerra de Félix Borrell Vidal (F. Bleu) pour constater que cela n’existait pas, ne poluait pas l’atmosphère et que personne ne s’en portait plus mal. Applaudissements, vueltas et pluie de cigares, comme d’étranges oiseaux noirs sans ailes. C’est ainsi que l’on fêtait les vaillants.

"Segundo toro. Diez y nueve pases, dos pinchazos en hueso y una muy buena al volapié. Muchos aplausos y cigarros.
Tercer toro. Cuatro pases de telón y dos muy arriesgados de pecho y una magnifica arrancando. Aplausos, cigarros y gavinas."

Antes y después del Guerra, un demi-siècle de toreo en 450 pages sans jamais évoquer le moindre coupage d’oreille. Pour certains, aujourd’hui, cela doit être de la science-fiction. Et pourtant, non.
Cent quarante et quelques années après Lagartijo et Frascuelo, une oreille, deux oreilles, trois oreilles, quatre oreilles : une idée fixe.
T’es chroniqueur taurin, toi, ou t’es expert-comptable ?
Les oreilles sont aujourd'hui un objectif obsessionnel chez les taurins professionnels et les gogos dans leur sillage.
Sans oreille(s) pas de presse, pas de portada Internet, pas d'Aplausos, pas de 6TOROS6, pas de publicité, pas de retombées et rien à raconter à la voisine pour les gogos.

Tout ceci est d'un vulgaire. La servilité journalistique au niveau du caniveau.

La pétition était-elle majoritaire ? L'oreille était-elle méritée ? Le président a-t-il vraiment compté tous les mouchoirs ?
Et les gens qui crient, on en fait quoi des gens qui crient ?
Et là, on fait quoi ? Fallait-il donner la seconde pour compenser celle qui ne lui a pas été donnée au toro précédent mais-que-quand-même il méritait ?
Et Menguano, qui en a coupé une un peu généreuse au premier, est-il raisonnable et juste de lui en donner deux au second ? Mais si on lui en donne deux maintenant, on fera quoi ensuite selon que Fulano...
Et machin, ça serait bien qu'on lui en donne une à machin, pour lancer sa carrière.
Cela me rappelle un toro d'alternative, ici chez nous, et le président qui refuse l'oreille au toricantano. Ni une ni deux, carrière brisée, fauchée en plein vol. La puissance de ces choses-là tout de même, et la haine dans les yeux des suiveurs. Fallait voir ça. Surréaliste.

Tout ceci est d'un vulgaire. La servilité journalistique au niveau du caniveau, je vous dis. Car, n'en doutez pas, c'est du niveau du caniveau que ces choses-là sont entretenues. Franchement, ça intéresse quel aficionado digne de ce nom les oreilles ?
On nous bassine perpétuellement avec des approximations sur l'art, la grandeur de la Fiesta, la culture taurine, la profondeur de ceci, la vérité de cela. Mais à l'heure de rendre compte, il n'y a plus de place que pour la comptabilité médiocre des oreilles coupées.
On compte les oreilles comme d'autres au football comptent les buts. Tu parles de la grandeur d'un art.
Cela doit en soulager quelques-uns remarquez. Cela leur donne l’opportunité d’insulter le président, se sentir tellement supérieur, et philosopher, oui, philosopher sur le nombre d'oreilles coupées, sur celles qui auraient dû se couper et sur celles qui auraient pu se couper. La nuance est de taille.
Tout ceci est d'un vulgaire. Les oreilles, il faudrait les supprimer, les liquider purement et simplement, qu'on n'en parle plus, qu'on nous en débarrasse le plancher. De l'air ! Hélas, il suffit de lire la presse taurine, imprimée, et surtout celle autorisée du Net, celle entre les mains de qui nous sommes, pour se rendre compte que ce n'est pas pour demain. Il faudrait pourtant supprimer les oreilles. Cela ferait du bien à tout le monde, même au Juli...

>>> F. Bleu, Antes y después del Guerra. Medio siglo de toreo, Espasa-Calpe ed., Selecciones Austral, Madrid, 1983.

Photographie sans paroles (XXX)



Catalunya y olé


Lorsque la presse à grand, voire très grand tirage, s’intéresse à la tauromachie c’est généralement pour vous montrer une corne sortant de la bouche de Julio Aparicio, ou José Tomás se vider de son sang de l’autre côté de l’océan.
Une fois n’est pas coutume, les collaborateurs de Camposyruedos ne sont pas mécontents d’avoir guidé les journalistes espagnols du magazine Interviú jusqu’à Céret de Toros. Résultat des courses, Céret et sa féria sont à l’honneur ce lundi dans tous les kiosques de la péninsule, et en très charmante compagnie, celle de Tamara Gorro, une fille nue, très nue et en 3D, une première !
Pour en revenir à Céret et l’ADAC, l’Espagne entière verra donc cette image tout de même assez réjouissante d'un ramassis d’antis vulgaires et affalés se faire traîner, ridiculiser et expulser sans ménagement par de jeunes catalans portant fièrement
espardenyes et barretina. Les meilleurs areneros du monde, dixit JotaC, qui en connaît un rayon sur le sujet.

Vous pouvez cliquer sur les photos pour lire l'article d'Eva Díaz.



19 juillet 2010

La fête sauvage


À Christophe

Passent Yolanda y "sus huevos", puis Cara Vinagre et son escorte mythologique de gigantes y cabezudos, tonne la "Jota a San Fermín" dans le silence sonore du 7 au matin, ses gaïtas y tamboriles, claquent enfin les cloches de San Cernin, la grand-messe "rouge et blanc" consiste ensuite à chercher un joli sardo dans le lot de Pamplona, ou au moins un burraco, voire un salpicado, comme un cadeau au peuple de Navarre, une offrande au santo des santos... L'encierro de Don Salvador García Cebada est un feu d'artifice qui pète dans la pénombre de Santo Domingo ou Estafeta, et on ne s'en lassera jamais. Une Ôde aux forces divines de la nature fantaisiste, capable de tant de caprices qu'elle seule sait transformer en joyaux. Le galop piquant et le coup de teston hargneux et véloce, cul bas et coffre épais, la dégaine de Tyson et le sens de la médiation de Bakkies Botha. La gueule en haut et la puissance de feu de la "plus grande armada que l'histoire ait connue" dans le regard.
Pamplona sans ses Cebada, se acaba la historia, Pamplona sans ses "Gago", y al lomo falta el pimiento. Voilà pourquoi, nous, on est gagas des "Gago".

Il y a des années, je me souviens que le vieil homme, un peu allumé, siégeait là, à la porte de la Jarana. Regard vague de celui qui vient de se faire déniaiser, le sombrero de biais, la trogne frippée par 95 années de vent épicé de l'Atlas et de fournaise andalouse, calé au milieu des socios borrachos "bleu et blanc" qui ne prêtaient aucune attention à ce "dinosaure" savourant lentement son 45 ou 46ème txacoli, avec 50 kg de bois et de plomb "made in Euskadi" en guise de trophée, que ladite peña venait de lui coller sous les aisselles pour le remercier de tant de peleas, données le menton haut et l'oeil luisant, par ses rejetons l'année passée, celle d'avant, et celle d'encore avant... Don Salvador appréciait Pamplona, Pamplona aimait Don Salvador, et c'est ainsi que l'histoire de ces deux noms a toujours flirté. Nous, pleins comme les coffres de la daronne Bettencourt, on lui baisait les pieds. Moi, je savourais, et mon ami Christophe pleurait... comme toujours. La fête était belle et on célébrait le soleil de Navarre et les petits toros de Paterna.

Sauf que voilà, les petits toros de Paterna éclatent un peu moins, ces temps-ci... et forcément, San Fermín fait la gueule... Usain Bolt au départ du 100 mètres avec une jambe de bois, t'imagines un peu le malaise ?

8 juillet 2010, 21h... Fin de la journée, reprise des hostilités. Les tendidos Sol baignent enfin paisiblement dans leur jus de merde et se remettent à peine de la torgnole de rouge crado qui vient de les noyer. La "Chica Yéyé" est partie voir ailleurs si on y était. La course est finie : rien d'autre à dire. On se regarde les godasses. Rien d'autre à faire. Nous claque juste au museau le triste souvenir de cette journée sévillane d'avril 2009 qui nous avait mis les amygdales comme des enclumes, et qui annonçait déjà une traversée du désert velue. Bingo ! Les toros de Don Salvador ont toujours la gueule de bois. Oh bien sûr, un "Gago" reste un "Gago", et je constate avec délectation que les minets du toreo fleuri préfèrent encore se cogner le Santa Coloma d'Ana Romero que le Domecq/Núñez de Cebada ! C'est ainsi... Faut dire que les trois clampins du jour ont quand même tous pris leur volée respective, mais non, ce n'était pas bien, et la petite agitation de fond de bide après la peur, l'inquiétude, la tension, ne sont jamais venuse. Pas un "toston", mais pas loin. San Fermín n'aura pas "lazarifié" les "Gago" de la fournée 2010. Alors, on est allé se noyer à Jarauta... deux fois plus.

Au fond, il n'y eut pas cette pétaradante rage qu'on aime voir dans les hachazos "tihuts" des petits toros multicolores de "La Zorrera", ces départs arrêtés de bout de piste pour se déglinguer les naseaux contre un peto récalcitrant, et puis ce pet majuscule qui flambe en piste quand un tío décide de poser son derche dans le fauteuil du boss. Alors y'en a des plus braves, c'est vrai, mais bordel de bordel, combien de "Desgarbado" niaiseux je gracierais pour voir un "Gago" débouler aussi sauvagement que Ribéry sur un plateau-télé pour s'enquiller une muleta aux petits oignons, et réclamer du rabe en cuisine !... Bref, y'avait la guerre dans les veines de ces tíos-là... Et si l'histoire de la grande cité navarraise et des "Gago" ne s'arrêtera probablement jamais (¡¡¡santo bendito!!!), on brûlerait bien quelques tonnes de cierges pour que les petits toros de Don Salvador la déterrent à nouveau cette putain de hache de guerre, afin que les serpents de mauvaise augure restent planqués au chaud sous la rocaille, et qu'ils y crèvent s'ils le veulent... filho da puta !

La roue tourne, Don Salvador, la roue tourne... Ils reviendront un jour, fiers combattants. Ils reviendront un jour, plus tranchants que jamais, comme les terribles panzers de Huelva l'ont fait cet hiver, et défieront de nouveau de leurs regards de boxeurs défoncés au Synthol et de leurs pitones hauts, forts et cons comme des secondes lates sud-af', les tendidos les plus arrogants de la planète Toros. Plaise à Dieu que vous soyez encore là pour les voir revenir, vos petits toros multicolores, Don Salvador.

Et plaise à Dieu, mon Christophe, qu'on pleure encore longtemps comme des drôles devant l'encierro des "Gago", dans la fraîche pénombre matinale d'Estafeta, en écoutant encore une fois le sifflement de la gaïta dans ce chant d'un autre temps à la gloire de la fête sauvage.

Dessin Encierro © Jérôme 'El Batacazo' Pradet

Le blog des Coquilla de Sánchez-Arjona


Après celui de Mariano Cifuentes, voici un nouveau venu dans la blogosphère taurine et plus spécifiquement ganadera : le blog des Coquilla de Sánchez-Arjona mené par le fils de Javier Sánchez-Arjona.

Au sujet des Coquilla de Sánchez-Arjona, ils sortiront cette année lors de la traditionnelle novillada du 15 août à Roquefort dans les Landes. Au cartel :
6 novillos de Coquilla de Sánchez-Arjona pour Gómez del Pilar, Esaú Fernández et López Simón.
Pour tout renseignement au sujet de cette novillada : mairie de Roquefort.

Bonne visite de ce nouveau blog.

Photographie Un toro de Coquilla de Sánchez-Arjona en 2008 © Laurent Larrieu/Camposyruedos.com

18 juillet 2010

Yonnet en Cenicientos (I)


Cette fois-ci c’est officiel, six toros d’Hubert Yonnet prendront la route de Cenicientos pour y être combattus le 14 août prochain en ouverture de la féria. Suivront une corrida d’Alcurrucén et une autre de Samuel Flores. Ce numéro 577 (on clique sur la photo) fera partie du voyage.
L’histoire de cette corrida, cinqueña dans sa majorité, est rocambolesque. Elle a débuté en juillet 2008 lorsqu'un groupe d’aficionados madrilènes en visite à "La Bélugue" prit l’initiative de proposer très officiellement à la direction des arènes de Madrid de la faire combattre dans la capitale à l’occasion du cent cinquantenaire de l’élevage.
Ce qui s’est passé entre ce mois de juillet 2008 et la temporada 2009, période au cours de la quelle la course ne fut, évidemment, jamais embarquée, était quasi kafkaïen...
— Oui, oui, aucun souci, nous allons venir la voir, les choses vont se faire... Aucune inquiétude à avoir.
Les jours passèrent, les semaines même, et certains en Camargue s’étonnaient de ne toujours pas voir débarquer Florito, veedor de l’époque pour le compte de Taurodelta.
Des coups de téléphone se donnaient, des choses se disaient, des bouches parlaient beaucoup, mais toujours pas de veedor jusqu’au jour où l’on apprit que Florito avait peur de l’avion et-que-donc il ne pouvait pas venir en Camargue. Hallucinant...
Je vous la fais courte mais des épisodes tragi-comiques comme celui-ci il y en eut assez pour écrire un livre.
Et puis Cenicientos, l’amitié de quelques aficionados catalans avec ceux de là-bas, des coups de téléphone, des vrais, des langues qui parlent mais pas pour ne rien dire, le coup de pouce final de Stéphane Fernández Meca et les choses se font, pour de bon.
Le samedi 14 août 2010 donc, à Cenicientos, épicentre de la vallée du Tiétar, "coursasse" d’Hubert Yonnet comme dirait l’ami Angulo.

Rappel Retrouvez sur le site, rubrique CAMPOS, une galerie consacrée aux tíos de "La Belugo".

17 juillet 2010

"Merci Chopera !"


En faisant la queue pour récupérer des places achetées une semaine auparavant, je jetais un coup d’œil sur le supplément spécial Madeleine du journal Sud Ouest que lisait mon compagnon d’attente (scandaleuse attente au guichet spécial des arènes : certaines personnes n’ont pu arriver dans l’arène que durant la lidia du premier toro !). Interview d’un des hermanos Miura à propos de la course qui sortirait dans 10 minutes : "Nous n’avons jamais amené au Plumaçon une corrida aussi imposante."
20h10. On remballe.
Les six Miura sont occis et le frère Miura aurait mieux fait de fermer son clapet à moustache. C’est la course la plus laide et la moins présentée de Miura vue ces dernières années dans le coin. Le matin, sur les ondes de la radio locale et dans une émission où le président de la commission taurine inutile de Mont-de-Marsan venait achever une campagne de pub digne du Tour de France, tout le monde déclarait que la course était belle et que les Miura allaient donner du spectacle. Wouarrrff ! Hormis le premier qui ressemblait à un taureau de combat, les autres ne pouvaient que susciter moqueries et mauvaises blagues. Des têtes de novillos, des corps loin des canons de Miura voire même de taureaux de combat (mention spéciale à la limande sortie en quatrième position), des cornes franchement abîmées et, pour certains, des armures indignes comme ce playero affreux sorti en troisième position bis. Une horreur !
On s’étonne qu’une telle empresa (Marie Sara/Simon Casas) ait commis cette immense erreur de casting (quoique non, on ne s’étonne pas). Dans les gradins, certains "perturbateurs"» ont hurlé à plusieurs reprises "Merci Chopera !" Ne soyez pas inquiets, l’équipe des pisse-froid qui se croient à la messe n’hésitèrent pas à leur répondre les traditionnels "Ta gueule !"» ou "Vous faites chier !". Avant, il fallait se taire pour ne pas leur gâcher le plaisir. Dorénavant, et c'est une nouveauté, il va falloir se taire pour ne pas leur gâcher leur contemplation passive et soumise de la médiocrité.
De comportement, la course fut... minable. Hormis le premier, donc, qui se comporta en toro et en Miura, le reste fut un défilé de bêtes plus faibles qu’une horde d’escargots anémiés. Le troisième fut donc changé par un sobrero de José Vázquez, plus minable encore que les nuls Miura. Un bœuf qui marchait en crabe, comme drogué ; qui s’effondrait toutes les 10 secondes comme en pèlerinage. Ne restent dans les souvenirs que les combats vrais de Rafaelillo, en particulier dans sa lutte avec le cinquième, sorte de long rectangle noir sans forme aucune.
A 20h10, en quittant ce rond de nullité où l’on fait jouer la banda pendant l’arrastre des toros (insupportable), les dames derrière moi faisaient ce constat accablant : "Il n’y a pas eu d’oreilles aujourd’hui, quel dommage." Ne vous inquiétez pas mesdames, il vous reste encore quatre chances au tirage.

>>>
Retrouvez sur www.camposyruedos.com, rubrique RUEDOS, une galerie consacrée à cette pseudo miurada.

Photographie La mort d'un Miura © Laurent Larrieu/Camposyruedos.com

15 juillet 2010

Trifino y sus toros flacos

Les week-ends de novembre ont pour point commun avec leurs cousins l'inéluctabilité du dimanche et nous avons commis des constats plus révolutionnaires. Nous avions pris la direction du Campo Charro un jour de commémoration d'une guerre déjà presque centenaire et miracle : ni pluie ni acier, le ciel tenait ! Le soleil ne donnait plus de sa toute-puissance verticale mais, avec une tendresse d'aïeul, nimbait les vieux murs infinis et les encinas d'une lueur que les complices brumes matinales semblaient s'efforcer de multiplier. Une fois de plus, nous avions laissé Salamanca à sa splendeur historique pour concentrer notre émerveillement à la recherche toujours incertaine de portails disjoints de ganaderías.

— Ça doit être là.
— Mais non, plus loin.
— Mais si, regarde le fer... Tu vas ouvrir ?
— Allez laisse, j'y vais !

Mais je vous parle de dimanche, de retour et d'impératifs aériens et puis de cette route tellement déserte qu'elle nous semble dédiée. Midi battait son plein sous un feu oblique et voilé, une légère amertume et l'impression que la bohème campera, pourtant minutée d'ordinaire, prenait un tournant tristement sérieux. Nous n'avions pas encore passé Valladolid.


La ganadería était introuvable, bien entendu, et il fallut demander à Matapozuelos au détour d'un comptoir au chocolat accueillant dans un décor d'armoires vitrées de pharmacie sortie des temps précoces du siècle défunt. Lorsque nous pénétrâmes dans les premiers cercados qu'il fallait traverser pour atteindre la finca, nous fûmes frappés par l'environnement : des pins aux allures maritimes répandaient leurs aiguilles sur un sol sablonneux, les clôtures n'avaient pas la classe sans âge des murs salmantins et la vague cour où nous trouvâmes le vaquero était jonchée d'objets hétéroclites tenant tous plus ou moins du rebut : ferraille, plastique — un cauchemar écolo. Parfois, le ciel s'obscurcissait. Trifino Vegas : un nom comme pseudonyme de joueur de poker. Thomas nous avait prévenus, au téléphone il n'avait pas l'air en grande forme mais plutôt d'âge avancé. Il n'avait pas tout compris, mais avait pris rendez-vous, plus ou moins. Et Thomas parle tous les castillans de la terre.


Nous le trouvâmes en lisière d'un bois de pins, le long d'une clôture de barbelés qu'il fallait réparer, entourés de quelques ouvriers agricoles attentifs au vieux. Trifino l'appelaient-ils simplement avec une déférence familière comme s'il s'eût agi de leur grand-père, ou d'un proche de la famille. Trifino, de velours ganadero, nous reçut avec son élocution ralentie par le poids des ans et s'appuya muet contre la portière du 4x4 comme pour y chercher un souffle rare. Un soupçon d'inquiétude parcourut l'assistance. Mais Trifino se hissa au volant et embraya vers les premiers cercados. Gestes mesurés et mots aux comptes-gouttes, sous les pins un peu plus haut attendaient les novillos. Martínez Elizondo, le fer à la chaîne. Santa Coloma par Buendía humainement modifié par Chopera en son temps : plus de coffre et de cornes. Peut-on jouer avec le type ?


Il me semble que le ciel avait déjà viré au gris, à moins que ce fut l'ombre des sous-bois. Du pin sur du sable, pas une mer à l'horizon et des toros gris dessus. "Son muy flacos" égrena Trifino de sa voix quasi transparente parvenant malgré tout à exprimer une déception teintée de colère et de mépris.

Flacos ? Après la ribambelle de Santa Coloma pur jus contemplée autour de Salamanca, ceux-ci nous paraissaient des monstres.

Et pour cause, Martínez Elizondo sortait à Pamplona, en 1972 en tout cas, j'ai une affiche avec une demi-tête de toro qui en atteste. Peut-être même que ce fut devant eux, sur le pavé navarrais, que mon oncle tout frais débarqué de Madagascar connut la plus grosse frayeur de ces vingt-et-une premières années. Si vous passez par Antsirabé, demandez-le lui, il a une tête d'imprésario mexicain et un souvenir toujours ému de ses seules Sanfermines... mais a probablement oublié le fer des monstres.


Alors flacos ces vestiges ? Non, Trifino devait crâner, l'air de rien caché derrière sa voix effilochée : ces bêtes-là n'embistent peut-être pas le mufle au sol, ni ne répètent au cheval, elles ont probablement troqué leur gaz pour des kilos et du bois, mais flacos, non. "Encore une photo s'il vous plaît, je me régale. - Euh non, là on est arrêté devant un arbre. Dis-le lui Thomas !"


Trifino nous montra avec ce même air un peu blasé les enclos suivants. Une grande lassitude emplissait son oeil mais son regard avait gardé une intransigeance rude et campera. "Soy Español, y a mi me gustan los caballos, los toros y las mujeres", sans préciser l'ordre avoua-t-il dans un sourire inédit. Passés les cochons, nous entrâmes dans le bois réservé aux vaches. Grises et grandes, des cornes pareilles à des enluminures de bibles médiévales. Innombrables et magnifiques, approchant de toutes parts, elles étaient le clou de quatre jours de vadrouille. L'oeil humide et la mine résignée, Trifino soupira : "Si quelqu'un voulait de tout ça, je vendrais..." Une vie balayée d'un revers de main rageur.


Et puis plus rien ! Dans quel souvenir Trifino avait-il sombré ? Où son esprit s'était-il alors enfui ? En prenant congé de longues minutes plus tard, nous ne le savions toujours pas. Lui n'était pas revenu. Nous saluâmes vainement notre hôte absent, parti depuis longtemps régler d'inutiles comptes avec sa vie, ses toros flacos et quelques déceptions.

— Tu vas ouvrir le portail ?
— Laisse, j'y vais...

>>> Retrouvez sur www.camposyruedos.com, rubrique CAMPOS, une galerie consacrée à la ganadería de Trifino Vegas.

Photographie
Chez Trifino Vegas López © Frédéric 'Tendido69' Bartholin/Camposyruedos

14 juillet 2010

Le capucino n'est pas un café


Retour de Céret.
Direction le Pelajes y Encornaduras del Toro de Lidia de notre ami Adolfo Rodríguez Montesinos pour tenter d’en savoir un peu plus sur le pelage de l’Escolar Gil qui a clôturé la féria.
J’ai interrogé le mayoral qui n’avait pas grande idée sur la question. Il m’a seulement répondu : « On dit qu’il est gris... »
Bon, jusque-là...
Il est gris, ça c’est certain. Mais gris, gris... d’accord ! Mais la tête, et cette traînée noire ?

Le mayoral me précise que le toro est né tout noir, puis a changé. On pense alors à un problème de dépigmentation, pas forcément à un pelage en tant que tel.
Mais on cherche tout de même, pour le plaisir. Et on apprend que l’on trouve des toros capirotes même chez les cárdenos claros ce qui ne doit pas courir les rues tout de même, ou plutôt le campo. Le cárdeno claro capirote est donc un toro gris clair avec une tête plus foncée.

Dans la foulée, Adolfo évoque le capuchino, un cas spécial de capirote chez lequel la tache obscure de la tête se prolonge en forme de pic vers l’arrière, donnant l’impression qu’il s’agit d’une capuche. Il semblerait que la chose soit extrêmement rare. Dans le cas présent, le prolongement de la tache noire ferait plutôt penser à du listón qu’à une capuche, sauf que ça ne fonctionne pas non plus. Ou alors il s'agit d'un capuchino tendance pénitent andalou...


Le listón est un toro qui présente sur le haut du dos et sur tout son long, jusqu’à la queue, une fine bande de couleur différente du reste du pelage, laquelle bande peut apparaître soit comme une décoloration, soit comme une intensification du pelage de base.
Dans le cas présent l’Escolar pose deux problèmes : l’épaisseur de la bande qui n’a rien d’étroit et le fait qu’elle soit très courte, même s’il existe des listón cortado ou listón interrumpido qui sont évidemment rarissimes, sinon ce ne serait pas amusant. Les débats sont ouverts, mais j'ai bien peur que ce pelage n'existe pas.

Petite parenthèse concernant le pelage du toro de Yonnet qui sera combattu à Vic-Fezensac. Ce toro présentant des poils noirs, blancs et rouges, il ne fait guère de doute à mes yeux qu’il est sardo, même si les poils rouges sont peu nombreux...

Courir !


À Eric...

Combien de pas pour ne pas y penser ? Marcher. Lentement. Marcher pour courir. Devant des toros. Combien de marches ? Cinq étages au bas mot d’un vieil immeuble en bois. La lumière du jour peine à guider les pas. Combien de marches ? Combien pour se dire qu’on aurait dû pisser un coup avant de démarrer ? Combien pour se demander comment éviter de regarder dans les yeux des copains dans 30 secondes, dans deux minutes, dans deux étages encore, pour ne pas y voir ce qui traîne au fond de nos propres entrailles ? Un étage encore. Quelques marches. Assez pour remettre en place la faja et remonter le pantalon. Il faudra en changer demain. La fête salit. Il faudra aussi appeler la famille pour dire que tout va bien. La porte. Le bruit. Ça y est. Le ronronnement d’un peuple en éveil forcé qui s’installe et attend l’ultime vacarme des pavés avant de se coucher. Mercaderes. La curva. Combien de pas encore ? Combien pour embrasser les amis qui ne regardent pas dans les yeux ? Leur dire de faire attention. Marcher. Lentement. Cette ville pue "comme un bordel à marée basse". L’odeur ne compte pas. Marcher. Il fait frais. Marcher fait du bien. On mangera plus tard. En bas de la ville. Entre potes qui marchent pour courir. Loin du bruit. Abrazo. Fais attention ! Les balafres de la nuit tirent les yeux vers les pavés mouillés. Les membres s’étirent. Plaza Consistorial. Combien sont-ils en équilibre sur les poutres de bois ? Regarder passer les toros. Et ceux qui vont avec. Devant, derrière, autour. Partout. Trop de monde. Après Pamplona ? D’autres courses aux quatre coins de la Navarre, de La Rioja, jusqu’à Madrid. Plus au sud ? Non. Plus au sud, les toros se parfument. Santo Domingo. C’est bon de marcher à cette heure. Le ronronnement grossit. Les balcons overdosent. Les bars se taisent. Combien de pas encore ? Combien pour ne pas y penser ? Les toros ? Ne pas les voir avant. Combien de pas ? Le ciel est bleu ce matin. Deux murs. Sombres. Raides comme des falaises. Santo Domingo. Ne pas y penser. Marcher. Lentement. Marcher pour courir.
Ici ! 8h00.
Courir !

>>> Retrouvez sur www.camposyruedos.com, dans la rubrique RUEDOS, une galerie consacrée aux Sanfermines 2010 (corrida de Cebada Gago et encierro de Fuente Ymbro).

Photographie Encierro de Fuente Ymbro © Laurent Larrieu/Camposyruedos.com

Palco


>>> Retouvez une galerie consacrée à la novillada de Javier Gallego en rubrique RUEDOS du site http://www.camposyruedos.com/.

ceretdepalco

13 juillet 2010

Céret : comme prévu


A Sébastien, planta aficionada vindicative d'une dizaine d'années (et assis derrière moi aux arènes).

Comme prévu, il faisait chaud sur la Catalogne Nord ou Sud et lourd de part et d'autre des Albères. Comme prévu Céret, perdue dans son décor lointain, a servi de base de lancements pour divers équidés au fil des toros passant mourir par là. Quick, Quince ou Paco, que sais-je : la cuadra Bonijol a connu des perturbations aériennes ces jours. Qui se voyant Pégase et contrebraquant dans les cieux ainsi que dans sa légende avérée, finit quatre fers en l'air, Bellérophon pataud en vrac sur le sable, qui prétendant suivre les traces d'Appollo s'avéra Challenger rétamé contre les planches, qui Spoutnik en orbite géostationnaire s'abîma telle une station Mir dans l'océan de solitude inondant ces instants de dangers. Caídas dantesques : résistance admirable et féline aux coups de boutoirs du destin. Héroïsme anachronique de cavalerie polonaise, stoïcisme contraint d'homme-grenouille voyant plier la cage au baiser cruel du squale, aguante démesuré sous la pluie des tablas voltigeurs. Batacazo : final de trayecto.

« ¡Aquí hay un par! » observe Bego quand le Mexique se joue l'objet en question sous le cagnard et face au Veragua. Notre muse secrète a trouvé le leitmotiv du week-end. Toreros de tous métaux, monosabios costauds et palefreniers garibaldiens associés, chacun à son poste, ça va secouer. C'est chaud sur le ciment numéroté, bouillant en bas et quasiment tout le monde aguante.

Comme prévu : supposé, espéré, prié. Attendu ? Attendu que les toros sur le papier se froissent trop souvent au contact de la réalité, l'impression de mauvais déjà-vu assortit tout "prévu" d'un "pourvu" adverbial et exclamatif. On n'est jamais trop prudent, on est surtout prévenu. Les férias ne sont jamais gagnées d'avance en dépit du soin attaché au choix des ingrédients et si tout ne fut pas parfait pendant deux jours, les corridas s'avérèrent toujours pour le moins entretenidas. Deux jours en forme de récompense, d'encouragement. Un cageot entier de poires au pays des cerises pour la persévérance, la soif de caste, les longues soirées d'hiver et les jours difficiles qui continueront à venir. Avec un peu de recul, je plains ceux pour qui ce fut le premier shoot de toros, pour la quête d'intensité qui s'en suivra. Ça leur coûtera un bras. Le concept reste extrême, âpre et limite, berceau outrancier sur sardine sobrera chez Fidel San Román, poids des novillos pudiquement dissimulés, maintien de Paco Chaves, un puyazo de plus (prononcez pouillaaasse) pour la gourmandise ou par nécessité, toros de tous âges et tailles, larmes inutiles et émouvantes de Meca et Aguilar quand deux (vueltas) valent mieux qu'une (petite oreille), du Vázquez qui se crame consciencieusement au premier tiers, des Portugais jetant un regard affamé au cheval tels des cannibales tombant sur un missionnaire et un Albaserrada punk et décoloré pour clore le cycle... En voulez-vous ?

Vous n'emmènerez jamais votre belle-mère voir une corrida là-bas (déjà votre copine ça ne sera pas chaque année), parce qu'après avoir trop cherché la fraîcheur dans votre bière sous les platanes périphériques entre deux courses, vous ne sauriez décemment lui proposer une sieste à l'ombre des pins dans le parc, qu'elle n'a pas l'odorat raffiné pour apprécier les effluves de crottin ni l'audacieuse politesse de demander au voisin de tendido d'allumer un autre cigare pour le bonheur du mélange. Parce que Céret reste un lieu d'amateurs à partager avec les fols amis, les amoureux transis ou dépités, les Madrilènes égarés et les futurs mariés qui en fait ont annulé. Parce qu'un match de foot à la saucisse, fut-ce une finale, c'est beaucoup après douze toros dans la journée. Parce qu'elle a un gros cul sur les gradins étroits et que le mien déborde déjà un peu mais surtout parce que si par hasard elle s'avérait anti-taurine, il n'est pas exclu que la prochaine fois, on préfère lâcher le toro.

12 juillet 2010

Céret de Toros 2010 - Ruedo


coimbra

>>> Retrouvez les galeries consacrées aux courses de Coimbra et Escolar Gil à la rubrique RUEDOS du site http://www.camposyruedos.com/.

¡Campeones!


Céret – 11 juillet 2010.
17h28 à l’horloge. Quelques petites minutes avant que ne débute une passionnante corrida d’Escolar Gil en clôture d'un grand Céret de Toros ; alors que Martín, Bego, Pepina, Xavier et les autres ont déjà un peu la tête en Afrique du Sud, un concentré de crétinisme envahit la piste avec l’espoir de s’y enchaîner.
Ni une ni deux, les areneros catalans, soudés comme un pack de rugby, expulsent du temple ce ramassis de crétins en moins de temps qu’il ne m’en faut pour vous l’écrire. Un ramassis de crétins traîné dehors un peu comme un vulgaire sac à merde. Ils n'ont même pas réussi à retarder le début de la corrida.
Pendant le paseo, immense ovation du public aux areneros, les premiers campeones de la journée. Et la soirée ne faisait que commencer.
On clique sur la photo.

09 juillet 2010

Dins de poc, Ceret


23 ans de fers
N’attendez de ma part aucune objectivité, pas une once. Ici, c’est chez moi. Pousser la porte d’entrée bleu azur c’est rendre visite aux copains, à la famille. C’est revenir à la maison en s’essuyant les pieds au seuil du paradis. Encore un pas pour changer de monde. Un an est passé... déjà.
Sur le long mur ocre, à gauche, tous les fers sont accrochés, noir sur blanc, 23 ans de bêtes à cornes qui vous tapent dans la cornée. Direct à la face.
Là-bas, au fond, les corrales. Dans l’atmosphère moite, de loin, on hume une présence magnétique. Les entêtantes effluves d’une fragrance musquée pénètrent les narines. En s’avançant à peine, à travers les fenestrons creusés dans le béton, on devine un balancement lourd, le lent déplacement d’une imposante masse.
Ils sont là... Enfin.
Ici, on aime les Toros. On le dit, on l’affirme et on le revendique.
On les aime énormes, grands comme des cathédrales païennes de chair et de sang, aux hautes flèches orgueilleusement dressées défiant le ciel comme un blasphème.
23 ans à débarquer des monuments, classés au patrimoine tauromachique, à la rubrique des raretés, entre le chef-d’œuvre en péril et le cristal de Bohême. 23 ans à déplacer des monstres avec l’infinie précaution des porteurs de reliques, dans la ferveur feutrée de la nuit, entre les ombres diaphanes de la lune et, parfois, la silencieuse solennité des rougeoiements de l’aube.
Ici, les Toros sont sacrés et les messes sont noires.
Ici, on aime les Toros, on les vénère et on ne ménage pas sa peine.
Tout commence à l’automne. Premières réunions, premières ébauches, premières discussions, premiers choix... Toujours le premier choix !
Pendant l’hiver, on continue. Premiers voyages, premières images, premières impressions, premières décisions, premières engueulades...
Au printemps, on affine. Deuxième voyage, nouvelles images, nouvelle affiche, nouvelle présentation... Engueulades nouvelles...
Après dix mois de gestation, l’été venu, on tourbillonne. Les Toros sont là, tranquilles.
Les Toros dans les corrales et les hommes partout. Un essaim qui s'agite et bourdonne. Depuis un mois, ils désherbent, arrachent, déplantent et replantent, et tondent et scient et tapent, clouent, retapent, reclouent et rabotent, raclent sans renâcler, percent, bouchent et débouchent, colmatent, cimentent et rebouchent avant de peindre — Oh, non ! Pas la peinture... Si, si... —, placent, déplacent, remplacent et replacent, déblayent, balayent, ratissent, vissent, martèlent, tapent et retapent avant de badigeonner — Oh, non ! Si, si, si... —, de laver, de récurer, d’essorer, de dégraisser et d’arroser, de décoller, de coller, de recoller, et encore et toujours de peinturlurer, de barbouiller — Non ! Si, si — pour accrocher, décrocher et raccrocher...
Dins de poc, dans peu de temps, tout sera prêt.
Dins de poc, les grands Toros entreront dans la petite arène, ce minuscule écrin aux rêves d’absolu. Dins de tan poc !
Ici, on aime les Toros, à en rêver, à en bouffer... C’est écrit :

NOUS, CATALANS ET TORISTAS,
NOUS BUVONS LE SANG DES TOROS
CAR IL EST LE NOTRE !

NOUS MANGEONS EN SILENCE LEURS COUILLES
CAR ELLES SONT LA FORCE !

Comme dans une toile de Goya, l’ogre dévore ses enfants mais les enfants croient-ils aux ogres ?

Jaume
Jaume était là. Tranquille.
Ici on aime les Toros. On aime aussi les hommes mais on ne le dit pas.
On aime les Toros et ceux qui les affrontent... Ça va de soi.
On l’a écrit, là-bas, sur le socle de la statue — AUX TOREROS DU MONDE.
On l’a pudiquement gravé dans la pierre pour ne plus avoir à le dire.
Jaume était là. Il avait bâti un monde sur un coin de la table. Mille rêves d'enfant, dins de tan poc, un monde de géant !
Il m'a parlé sans se retourner pour éviter de perdre le fil de l'histoire.
— Tu as vu les Toros ?
J’ai fait signe que oui.
Il tenait dans sa main titanesque un cheval en plastique qu'il a déposé, là, minutieusement.
— Ils sont beaux.
Il n’attendait pas de réponse.
Jaume n’a pas peur des ogres. Ici, c’est chez lui.
Dins de tan poc, tous ceux qui aiment les Toros seront ici chez eux.

>>> Pour voir les photos des Toros dans les corrales, cliquez ici.
>>> Pour plus d'informations : le site de l'ADAC.

Traduction Dins de poc : dans peu, d'ici peu.