30 mars 2009

On Jupiter and Mars


A Camposyruedos, nous sommes évidemment et forcément d'accord avec tout ce que déclare Simon Casas. Nous faisons nôtre tous les jours cette sienne sentence que "c'est la magie de l'art qui n'a pas de limite" et c'est vrai que là, il n'y a plus de limites... Sauf une que s'est imposé M. Casas, malheureusement oserions-nous avancer. Ce n'est pas faute pourtant de lui avoir tendu la main ou de l'avoir incité en ce sens. M. Casas, permettez-nous de vous faire un reproche, et de taille. Quand vous déclarez que les arènes de Nîmes sont les premières du monde, vous avez tort. Grand tort même car la plaza nîmoise n'a jamais été la première du monde mais bien, faut-il le rappeler, la première du COSMOS. Vous n'avez pas osé le dire, par pudeur peut-être, par modestie certainement. Permettez-nous alors de corriger cette erreur, Nîmes est la première arène du COSMOS ! Un point c'est tout. Et puis, mieux vaut l'écrire ou le dire plutôt que de laisser Dax essayer de prendre la place (remarquez y'a du boulot).
Les propos qui suivent ont été tenus en public par M. Simon Casas lors de la conférence de presse d'annonce des carteles nîmois et publiés dans Midi Libre.

Alternative "Je prends le pari que Miguel Tendero sera la star annoncée. C'est ce qui justifie qu'il soit sacré matador à Nîmes. Aujourd'hui, tous les novilleros vedettes me demandent cette cérémonie ici. Et ceux qui écrivent que les alternatives de Nîmes sont de "pacotille", des "merdouillettes", doivent avoir un sérieux problème. Ils devraient consulter un psy...

Concurrence
"La France est un pays génial mais chagrin. On n'a pas le droit de briller et comme nous à Nîmes on brille, on a tendance à nous jeter la pierre."

Juan Bautista
"S'il vient à Nîmes, c'est parce que nos arènes sont les premières de France... et même du monde. Son père ? Je l'adore. Face à des toros de Miura, il signera une corrida-événement, il aurait pu se contenter du bling-bling."

Aparicio
"C'est un sublime artiste qui avait été jeté aux oubliettes. Il affrontera des toros de Zalduendo. Pour toréer avec la lenteur des anges, il faut que les toros puissent s'adapter."

Torerista
"Qu'est-ce qu'on peut entendre comme conneries en la matière. Moi je n'écoute qu'une voix, celle des statistiques qui disent que Ruiz Miguel a pris moins de coups de corne que Curro Romero. Les toreros artistes sont plus souvent blessés que les autres."

Castella/Perera
"Perera est l'idole absolue, inaccessible. Réunir Castella et Perera qui ne s'aiment pas, c'était le cartel impossible par excellence. Si vous saviez le nombre d'heures qu'il m'a fallu pour les convaincre l'un et l'autre ! Et puis l'argent a commencé à monter, mais je leur rends hommage car dès qu'ils ont été convaincus que ce mano a mano avait un sens, on n'a plus parlé d'argent. D'ailleurs je ne sais pas combien ils coûtent et eux ne savent pas combien ils vont gagner."

Empresa
"Dans la composition des carteles, il faut laisser une part à la passion, l'autre à la raison. Je revendique une corrida artistique. L'empresa doit être comme un producteur de cinéma, de théâtre... Il y a là-aussi compétition avec des surenchères, il faut négocier. Je m'étonne qu'inventer soit encore possible, c'est la magie de l'art qui n'a pas de limite."

Photographie La première arène du Cosmos © Campos y Ruedos

28 mars 2009

Vic-Fezensac online


Communiqué du Club Taurin Vicois

Feria del Toro 2009 : 30 -31 mai -1er juin.
Il est désormais possible de réserver ses places en ligne, à compter du 30 mars et ce jusqu'au 28 mai 18h, en allant directement sur le site officiel : www.clubtaurinvicois.com.

Toros au sud, Vic Fezensac

27 mars 2009

Toros Negros (II)


Aujourd'hui, vendredi 27 mars, un douzième membre a fait son entrée sur le pool Toros Negros. Et puis il y a eu cet instantané bilbaíno, qui me fait dire que j'ai bien fait de créer ce groupe...

Vista Alegre Bilbao

Román Pérez n’a jamais fait de partouze...


Enfin, de trio pour être précis. Mais il n’est pas contre notez bien. Encore que tout dépend de quel trio, avec qui et dans quelles conditions. On ne saurait le contredire. Non, vous ne rêvez pas. Je ne suis pas devenu dingo et Camposyruedos n’a pas décidé d’ouvrir une section X.
C’est juste que je vous fais profiter d’un des nombreux aspects de l’interview de ce novillero publié dans la Gaceta de Salamanca et pointée par Rosa Jiménez Cano sur son blog.
Dans le fatras des réponses, qui sont à la hauteur des questions posées, il en est une qui attire plus sérieusement l’attention de l’aficionado.
Lorsque la journaliste lui demande avec qui il n’aimerait pas aller voir une corrida, il répond : "Con uno del 7, son insoportables. Estuve allí el fin de semana y son terribles. En la novillada de Dani los hubo que contaban hasta los muletazos, son mala gente."

Alors là, je me dis que pour faire ce genre de déclaration quelques jours avant de se produire devant ces mêmes aficionados, soit il faut avoir le QI d’une huître, soit être ultra, hyper, suprapréparé à faire exploser le chaudron madrilène. Mais j’ai des doutes.
D’ailleurs c’est simple, j’ai failli titrer ce post : "Román Pérez, l’huître taurine". Mais j’ai préféré vous parler de cul pour ne pas trop dramatiser ce qui n’a pas lieu de l’être car, à la vérité, il vaut mieux en rire.

Pour en terminer avec ce dérapage, sans doute incontrôlé, notons au passage que l’inénarrable représentant de l’Aficíon française (sic) ne trouve pas ces déclarations déplacées, ou stupides, mais courageuses. Il est donc courageux pour un novillero, quelques jours avant une course, de manquer du plus élémentaire respect envers les aficionados qui vont payer pour le voir toréer, ou plutôt, "faire le paseo" comme l'ironise Rosa Jiménez. Comme disait l’autre : nous vivons une époque moderne, le progrès fait rage... et le futur ne manque pas d’avenir !

La photo est évidemment de Manon.

26 mars 2009

Carteles de Parentis-en-Born


L'ADA de Parentis fêtera cette année son 20ème anniversaire et annonce pour l'occasion une bien belle féria de la Sen Bertomiu.


Le samedi 8 août 2009 aura lieu une novillada concours au cours de laquelle fouleront le ruedo Roland-Portalier des novillos de : PARTIDO DE RESINA (Gallardo) - PRIETO DE LA CAL (Veragua) - BARCIAL (Vega-Villar) - MORENO DE SILVA (Saltillo) - ALONSO MORENO (Urcola) - COQUILLA DE SÁNCHEZ-ARJONA (Santa Coloma Coquilla).

Le lendemain, dimanche 9 août 2009, les RASO DE PORTILLO viendront pour la troisième fois consécutive enchanter (on le souhaite en tout cas) le public aficionado de la plaza landaise.

Pour plus d'informations, rendez-vous sur le site de l'ADA Parentis et suerte pour cette désormais grand-messe du novillo.

Photographie Baston au Raso de Portillo © Camposyruedos

Feria del Toro par Rafael Moneo


À l’occasion du 50° anniversaire de la Feria del Toro, la Casa de Misericordia a demandé à l’architecte navarrais Rafael Moneo (Tudela 1937) de concevoir l’affiche. Ce qu’il a fait avec force élégance ; de celle qui semble émaner de sa personne et qui se dégage de ses bâtiments : Bankinter à Madrid, Kursaal à Saint-Sébastien, les Archives de Navarre dominant Santo Domingo à Pampelune, l’auditorium de Barcelone ou une toute récente bibliothèque universitaire à Bilbao.

El pálpito vital del encierro
ressemble à s’y méprendre à un cartel des San Fermín. Peut-être une manière de dire qu'en l'absence d'encierros il n’y aurait pas de corridas à Pamplona...

En plus Sur Flickr, il existe AUSSI un « pool » consacré à l’architecte espagnol...

Image Rafael Moneo dans « ses » arènes, agrandies par lui en 1967 © Sanfermin.com

Toros Negros (I)


C'est tout récent mais le pool Toros Negros compte déjà quelques socios. Ce post me permet de saluer l'arrivée du onzième membre. Il est montpelliérain ; il s'appelle Julien et maîtrise parfaitement la technique de l'inégalable argentique, encore bien vivant heureusement. Et pour l'occasion, un petit avant-goût cérétan... Superbe.

En cliquant sur la photo vous pourrez aller visiter la galerie de Julien, directement sur sa page Flickr.

Corridas

25 mars 2009

Street shots


Après Flickr, nous restons dans l’univers photographique ; un univers totalement professionnel cette fois-ci puisque Bruce Gilden est membre de la très prestigieuse agence Magnum.

Gilden sillonne quotidiennement Manhattan, son Leica en bandoulière. Bienvenue à New York. C'est complètement hors concours, et totalement hallucinant... Enjoy.

24 mars 2009

Sexy women smoking


A la base, le nom n’incite guère à la convivialité. C’est le moins que l’on puisse dire. Il s’agit d’une sorte de Facebook pour les photographes. Ce n’est pas très bien vu par de nombreux professionnels car il semblerait qu’une certaine presse, professionnelle elle aussi, vienne s’y abreuver, aussi illégalement que gratuitement. Vaste sujet... car en le creusant on se rend vite compte que le manque d’éthique et de déontologie sont souvent l’apanage de grands médias professionnels, et non des modestes amateurs.
Et puis, comme le dit Doña Pepina del Toro, cela fait partie de l’évolution des choses, et il faut bien apprendre à faire avec.
Sur Flickr donc — putain mais quel nom ! — chaque photographe est en fait totalement noyé, perdu dans l’immensité du réseau mondial. Mais des groupes se créent, par thèmes, par affinités. Evidemment on y trouve de tout, et parfois même des choses absolument remarquables. Tenez, là, je ne sais plus comment je suis tombé sur un pool (un groupe quoi, mais sur Flickr on dit pool) étonnant : Sexy women smoking. Ça ne s'invente pas. Rien de bien rare en fait, mais j'aime bien l'idée. J’avais un copain pour lequel le summum de l’érotisme consistait à voir une femme mettre ses boucles d’oreille. Ça pourrait nous faire un pool ça aussi.
Il existe également un pool tauromachique. Je n’ai pas cherché, mais il doit bien y avoir quelques protectards égarés.

Pour notre part, nous avons créé un pool Toros Negros, les toros en noir et blanc, histoire de voir ce que ça peut drainer, et s’y retrouver entre copains. Manon est déjà là, parmi nous. Comme les nouvelles technologies autorisent le meilleur, mais aussi le pire, il faudra plaire pour y être publié ! Un minimum quoi...

La photo qui illustre ce post provient évidemment de Flickr... Par ici... Une sexy woman smoking...

23 mars 2009

Noir mais pas seulement


Occupé à rentrer des données pour un site ami, je suis tombé en arrêt sur un pelage, ou tout au moins une particularité, qu’il n’est pas si fréquent de rencontrer. ‘Tiradoro’, novillo de Juan Pérez Tabernero d’encaste Atanasio Fernández et combattu dimanche dernier à Madrid, ‘Tiradoro’ donc affichait une reseña à rendre jaloux 99,19 % de ses compères de la cabaña brava ! Il était officiellement « negro bragado corrido gargantillo girón coletero lucero ». Rien que ça.

Issue de gargantilla (collier), l’appellation gargantillo concerne, selon Adolfo Rodríguez Montesinos, seulement 0,81 % des bravos, ceux-là arborant « une tache blanche, nette ou constituée d’une multitude de petites faisant l’effet d’éclaboussures (salpicaduras en espagnol), située dans la partie inférieure du cou et qui le remonte sans aller jusqu’à l’entourer complètement, simulant ainsi une espèce de collerette ou de collier. »1

En plus d’avoir été, entre autres, negro et gargantillo, ‘Tiradoro’ aurait été girón. Toujours d’après Montesinos, le girón (ou jirón) « présente sur le fond de son pelage plus ou moins foncé une — ou plusieurs — tache blanche irrégulière, qui va généralement des flancs au grasset2, bien qu’elle puisse se situer à n’importe quel autre endroit du corps, à l’exception de la tête, du ventre et des extrémités, auquel cas la reseña sera enrichie des dénominations correspondantes. » Quand notre auteur, au sujet du salpicado cette fois-ci et après avoir précisé qu’il s’agissait d'un « toro au pelage foncé qui présente des taches blanches, petites et grandes, de formes irrégulières et qui ressemblent à des éclaboussures, lesdites taches se situant de préférence sur la partie postérieure et inférieure du corps de l’animal », poursuit en affirmant que le port du « collier » constitue l’accident le plus fréquent chez le toro « éclaboussé », tandis que le qualificatif gargantillo va (presque) systématiquement de pair avec celui de salpicado, il finit de vous convaincre que peut-être ‘Tiradoro’ aurait pu être salpicado ! Et si quelques-unes de ces petites taches apparaissent sur la partie supérieure du corps, c’est précisément parce qu’il s’agit d’éclaboussures...

Negro salpicado3 et gargantillo mais également coletero ! Là, si je peux me permettre, il y a erreur. Comme l’extrémité de sa queue ne comportait que quelques poils blancs, ‘Tiradoro’ était rebarbo. Et lucero !? Oui, il l’était et pour un atanasio c’est plus que rare, c’est très très rare voire très très très rare pour ne pas dire irréel. Sans compter qu’avec ses poils blancs (toro caribello ?), ‘Tiradoro’ possédait une bonne tronche de santacoloma... et constituait un parfait modèle de toro corniapretado.

Enfin — et parce qu’il faut bien conclure — ‘Tiradoro’ était officieusement negro salpicado gargantillo bragado corrido lucero et rebarbo.

1 Adolfo Rodríguez Montesinos, Pelajes y Encornaduras del Toro de Lidia, Co-édition Consejo General de Colegios Veterinarios de España (Madrid) et Ibercaja (Zaragoza), 1994.
2 « Région du membre postérieur du bœuf, du cheval, comprenant la rotule et les parties molles environnantes. » Le Petit Robert.
3 Et non burraco vu la faible quantité d’éclaboussures.

Images 'Tiradoro' dans les corrals de Las Ventas le 23 mars 2009 'Mete-Pata' de Guardiola Fantoni, toro negro girón lucero. Où l’on voit clairement que la tache blanche, au contour irrégulier, est relativement importante et nette, uniforme. Sans éclaboussures... © Manon

22 mars 2009

Céret de Toros 2009


Samedi 11 juillet - 18h00
Corrida D. Manuel Assunção Coimbra (Portugal)
Carlos Escolar 'Frascuelo'
Jesús Martínez Barrios 'Morenito de Aranda'
Alberto Aguilar

Dimanche 12 juillet - 11h00
Novillada Herederos de D. Alfonso Sánchez-Fabrés (Salamanca)
Fernando Tendero
Javier Cortés
Mario Aguilar

Dimanche 12 juillet - 18h00
Corrida Hijos de D. Celestino Cuadri Vides (Huelva)
Fernando Robleño
Sergio Aguilar
José Miguel Pérez 'Joselillo'

Samedi 4 avril - 20h30
Céret - Salle de l'Union - 1er étage, compte rendu : analyses de cornes 2008.
Vidéo-projection : blessures occasionnées par la pique - pose et dépose des "fundas" sur les cornes des toros.
Avec :
- Gérard Bourdeau, Président de l'Association Française des Vétérinaires Taurins ;
- Thierry Dhenin, spécialiste des méthodes d'analyses de cornes et
- Renaud Maillard, professeur à l'École Nationale Vétérinaire de Maisons-Alfort.

La photo est de notre compañero Manon. Rendez-vous également sur le site de l'ADAC...

Ida y vuelta, correspondance flamenca (V)


François,
Tu t'interroges sur les rapports entre afición a los toros et afición al flamenco.
Souvent on pense à la danse. Ce que je t'ai dit sur Javier Conde. Mais écoute ceci. C'est une anecdote et pourtant elle regorge d'échos qui peuvent expliquer pourquoi, intrinsèquement, le toreo est lié au cante. Il se trouve qu'Antoñete, Curro et Gitanillo de Triana décidèrent un jour d'enregistrer pour le montepio de toreros un disque de villancicos toreros. Les villancicos ce sont ces chants de Noël mais qu'on peut « cantar » por bulerías cadencées par le compas des palmas et de la zambomba. La zambomba c'est une sorte de « toupin » en terre cuite et recouverte d'une membrane qu'on fait vibrer en agitant un bout de bois passé par son centre. La rusticité magnifiée, avec un son de « voum voum » presque chamanique.
Donc nos trois compadres décident de se retrouver en studio pour graver des chants de nochebuena.
Gitanillo de Triana était en fait le frère du grand Gitanillo, mort de la gangrène laissée par la corne de 'Fandanguero' de Graciliano, et ce, dans d'atroces souffrances. Leur grand-père s'appelait Curro Puya (quel apodo !), cantaor qui dirigea, selon la légende populaire, les révoltes dans le barrio trianero car il était aussi réputé pour son cante que pour sa vaillance. Une letra le magnifie : "me llamo curro puya/por la tierra y por el mar/y en llegando a la taberna/la piedra fundamental".

On la trouve aussi sous cette forme :
" En el barrio de Triana
se han echao a temblar
cuando yegó Curro Puya,
la piedra .fundamental."


En tout les cas c'est une tona. Un chant a palo seco, sans guitare, un des plus archaïques, un de ceux qui préexistent à tout accompagnement instrumental autre que celui des pauvres d'entre les dépenaillés : "los nudillos" (compas, rythme donné par les coups des doigts repliés sur la table du café, du bistro, de la taverne, de l'arrière-cour familiale...).
La légende attachée à ce nom se perpétua puisque le fameux Gitanillo ("Est-ce que ton coeur s'arrête aussi quand tu torées Gitanillo ?" lui écrivit Corrochano) portait aussi le surnom de Curro Puya.
Donc, tous les matins, Antoñete passait chercher Gitanillo qui invariablement depuis le premier jour lui disait :"monte, on va boire un machaco (anis Machaquito, cépage matalahuga, mortal pero buenísimoooo !) comme doivent le faire les bons avant de commencer à chanter".
On imagine la suite... ainsi, invariablement, ils arrivaient complètement "moraos", calcinés (tiens on dit aussi "ciego") au studio où un Curro Romero imperturbable (il avait promis de ne plus boire par amour paraît-il) les attendait pour finalement reporter au lendemain le même inextinguible scénario.
Au bout d'un mois et demi l'enregistrement vit enfin le jour. Et le disque existe. En voici la portada . Cette entreprise bohème mais tenace, laisse voir la trame de cette union picaresque et viscérale entre los flamencos et los del toreo qui s'est toujours tissée depuis les origines.
Tu vois, je crois que, quand Antoñete tourna sa demi-véronique historique au toro blanc de Madrid, il y mit certainement tout l'arrondi des verres qu'il éclusa avec Gitanillo en l'écoutant, j'imagine, lui raconter la légende de Curro Puya dans l'histoire commune entre taureaux et chant.
Cette histoire fut narrée par Chenel lui-même dans un numéro spécial de la défunte revue "La Caña". Un numéro "Toros y Flamenco". Sur la couverture on voyait la version colorisée de maolo caracol (famille des Ortega, parent des Gallos, sa tante c'était la Gabriela, la mère de Joselito) toréant de salon sous l'œil de Paco Camino. ¿Pedazo de foto, no, fotógrafo?
Bien à toi,
Ludo

21 mars 2009

Castellón, des abonnés mécontents


Les abonnés de Castellón son mécontents, et le font savoir, en diffusant ce qui suit, via la blogosphère...

¿Van a torear hoy estos toritos El Cid, El Fandi y Manzanares ? :
http://uniontaurina.blogspot.com/2009/03/toros-de-manolo-gonzalez-ayer-en-los.html
¿Van a torear mañana estos toritos Rivera, Perera y Cayetano ?:
http://uniontaurina.blogspot.com/2009/03/toros-de-vegahermosa-ayer-en-los.html

¡ESTO NO ES SERIO!
¿DÓNDE ESTÁ LA INTEGRIDAD DE LA FIESTA?

20 mars 2009

Gudmundur Gudmundsson


Parce qu’à dire José Pedro Prados est difficile, José Pedro Prados a décidé qu’il s’appellerait El Fundi ». Et El Fundi — ce nom énigmatique — c’est quand même plus facile à prononcer que José Pedro Prados. Parce qu’à dire Gudmundur Gudmundsson est rude, Gudmundur Gudmundsson (Ólafsvík 1932) a décidé qu’il s’appellerait Erró. Et si vous vous demandez pourquoi Gudmundur Gudmundsson a choisi ce nom d’emprunt, Gudmundur Gudmundsson va vous l’expliquer : « Mon premier nom d'artiste était Ferro. Je l'avais trouvé à la suite d'un voyage en Espagne, en 1952. J'avais alors vécu une semaine dans un village, Castel del Ferro. J'avais trouvé ce nom très beau, d'autant plus qu'en islandais, « fer ro » signifie « la tranquillité qui part ». Je ne savais cependant pas qu'à Montmartre il y avait un artiste brésilien, Gabriel Ferraud. Or il y a une loi en France, de la période de Vichy, qui stipule que les étrangers ne peuvent pas prendre le nom d'un artiste déjà existant. J'ai donc eu un procès, que j'ai perdu deux fois. Avec Jean-Jacques Lebel, on a alors pensé écrire ce nom avec trois « r », mais cela n'a pas été accepté. Finalement, au tribunal, on a décidé d'enlever le « F ». Cela m'a plu. Et en islandais « er ro » veut dire « maintenant c'est calme ». »1

La temporada 2009 lancée, les carteles tombent les uns après les autres entraînant dans leur sillage des affiches à pleurer dans l’immense majorité des cas (Arles, Nîmes, Bayonne...). Peinte par Gudmundur Gudmundsson, celle de TOROS EN VIC 2009 pique les yeux et le CTV ne semble pas pressé de la présenter... Moi non plus.
À parler de Vic et de peinture, d’affiche et de Gudmundur Gudmundsson, le nom du peintre lot-et-garonnais Christian Babou (Villeneuve-sur-Lot 1946 – Paris 2005) s’impose avec force, lui dont les tableaux tirés au cordeau partagèrent plus d’une fois les cimaises avec ceux de l’Islandais.
Partez sans attendre vous perdre avec délice dans l’impressionnant catalogue raisonné2 qui n’est rien moins qu’une douce symphonie de courbes et d’ombres, une ode puissante à la couleur, un chant fervent à la ligne, un pacte avec la lumière : une déclaration d’amour à la peinture, en somme.

1 Entretien réalisé par Henri-François Debailleux et paru dans Libération le 27 août 2005 (source Wikipédia).
2 S’il se trouvait, sait-on jamais, parmi les lecteurs de Campos y Ruedos, un heureux détenteur d’une œuvre non encore mentionnée dans ce catalogue....

Image Une pique dans le morrillo... Affiche de © Christian Babou pour TOROS EN VIC 2002.

19 mars 2009

Afición a los toros


Ce n'est pas un nouveau blog mais juste un changement d'adresse et de style.

Florent invite les aficionados à se rendre à l'adresse suivante :
http://al-toro-rey.blogspot.com/ pour continuer d'y lire ses textes et ses humeurs.

Faut y aller, c'est bien !

18 mars 2009

Le mauvais œil


Le mauvais œil. Certaines femmes n’ont pas de chances avec les hommes chantait Barbara, certains hommes n’ont pas de chance avec les femmes lui rétorquerait-on et Aire-sur-l’Adour n’a pas de chances avec les toros.
Vendredi 13 mars 2009. Le mauvais œil. Annonce des carteles aturins. Manque de bol, de chance, malédiction, patte de castor et queue de rat musqué, Vic annonce les siens le lendemain. Le même week-end, il se murmure que le Juli se la jouerait solo en septembre à Bayonne.
Lundi 16 mars 2009. Rue Gambetta. On susurre sans trop oser y croire qu’un camion de pattes de lapin a été commandé en Garenne et que le haras de La Roche-sur-Yon aurait été contacté pour fournir un stock important de fers à cheval. Un mauvais œil peut se crever.
Aire-sur-l’Adour, donc, organise chaque année une novillada piquée pour la fête des Arsouillos le 1er mai et une corrida pour ses fêtes patronales vers la mi-juin. Il fait souvent beau en ce mois de juin à Aire-sur-l’Adour. L’été pointe son nez, le "Coq hardi" existe encore, les "33" sont toujours bloqués au feu place du commerce, le corso fleuri d’enfants est passé tout à l’heure et... les arènes sont vides.
Une malédiction de su puta madre !

Décembre 2005. "Cortijo Wellington", Madrid. Domingo González passe une tête ensommeillée par le peu de jour d’une fenêtre embuée. Il a presque neigé hier. La sierra se tait parfaitement, seuls les toros fanfaronnent dans le froid pour montrer qu’ils sont bien des toros.
Domingo n’aime pas du tout le lot réservé a priori pour Madrid en mai. "Demasiado" y "fuera de tipo". Domingo parle peu. Il fume des clopes deux cancers en un et regarde longuement ses toros. Domingo aime évoquer 'Bastonito'. Il en devient affable, presque causeur. Le souvenir des belles choses.
En quittant la finca, un panneau indique la direction de la "Valle de los Caídos", cette vérue odieuse dont le poil en forme de croix observe le campo alentour. Un mauvais œil pour sûr.
En juin 2009, à Aire-sur-l’Adour, il y aura des toros des héritiers de Don Baltasar Ibán Valdes. C’est un nouvelle sympathique pour les aficionados. Deux mauvais « œils », des pattes de lapin croisées de fers à chevaux pour un retour en France annoncé un vendredi 13...

Pour plus de renseignements sur l'ensemble des carteles aturins (tout ne fait pas rêver) : voir le site du Comité des fêtes.

Photographie Toros de Baltasar Ibán au campo en décembre 2005 © Camposyruedos

Orthez


La commission taurine d’Orthez nous fait savoir qu’elle organise un concours d’affiches pour sa prochaine édition. Les personnes intéressées peuvent consulter les modalités relatives à ce concours sur le blog de ladite commission : par là...

L’affiche ci-contre est celle de l’année dernière, signée par notre ami El Batacazo.

Bon concours...

17 mars 2009

50 años...


Bonne nouvelle : après un hiver sans fin, les toros ont recommencé à mourir. Du côté du Levant, en toute logique. Sans la mort des toros et le soleil, la vie manque de souffle. Exténués d'inactivité, nous voici aux premiers frémissements du printemps, un brin racornis par le froid, conscients de la chance d'avoir survécu à ces quelques mois. La nuit inextinguible, omnipotente, la nuit d'hiver dévorait de pâles journées et des plaisirs en sursis. La vie est autant une chienne qu'un hiver sans toros un pléonasme. Un hiver obscur pareil à un buisson incarcérant un visage livide où seuls subsistent deux yeux hallucinés, extravagants et soutachés de sombre. Des yeux implorant, inconscients du manque et pourtant affamés. L'hiver, superbe comme un soleil dédaigneux et lointain, dispense des poignées de sursis à des fantômes emmitouflés, comme d'autres arrondissent une media ou affûtent un trincherazo sans merci.
On a beau se divertir à parler d'argent évaporé, se ressentir dans la crainte de lendemains blêmes, on rame surtout pour parler de quelque chose qui en vaille la peine. Par chance, feulent encore ponctuellement les harpies du petit monde pour des histoires de rubans à breloque, suffisamment pour nourrir l'illusion du détachement de tout, à travers un mépris sans conviction. Les toros sont encore loin, finit-on par soupirer.
Ici et là, perce tout de même l'espoir, ces toros au fin fond de la Camargue qui mangent et frisent dans le froid, ces toros dont l'oeil garde quelque chose de mauvais, sont bien là pour quelque chose ! Pour le sable, la soie, l'acier lointains ! L'acier perpétuellement silencieux dont les cuivres ne résonnent pas jusqu'ici, pas encore. Et puis, tous ces gens qui les ont vus, eux-aussi, ces moments, entendu ces vivats, ces broncas, ces silences ! Ces gens qui semblent y croire si fort qu'ils ne parlent que de ça ! De ce fatras, de ces fracas ! Ces fantômes des jours de soleil qui prophétisent la révolution, dans son sens redondant, récurrent, annoncent la possibilité d'un retour.
Séville, terre promise, nourricière et de résurrection qu'on n'ose encore tout à fait envisager. Séville, loin de laquelle Curro prit l'alternative un jour de rien, en hiver, à Valence et déjà âgé. Il y a 50 ans. Demain. Hiératique, le sphinx arbore toujours un pelage noir clairsemé. Il feinte. Il feinte comme il n'a guère feinté pendant plus de 40 ans, à offrir le spectacle du ridicule et du sublime, du toreo le plus total, abandonné, inné, abouti. A offrir la possibilité de bâtir des légendes pour frémir d'hiver en hiver au fil des souvenirs.
Dans notre époque de comptables, on évoquera demain Curro en toute vulgarité arithmétique, pour combler le vide d'un jour de plus. Comme si on accompagnait Bashung en parlant de records de statuettes plaqué or, aussi dérisoires que des breloques et des rubans. Oui ! Ils osent ! Déployant une revolera d'incompréhension crasse et ravie. Je n'ai vu Curro qu'une fois et je devais voir Bashung ce soir. L'hiver est encore là, vacillant. Dans la tempête d'espoir qui gronde et qui gagne, il me reste quelques légendes meurtries et superbes. Pour tenir.

16 mars 2009

Ida y vuelta, correspondance flamenca (IV)


Ludo, tu trouveras en pièce jointe une nouvelle série de photographies. Ce coup-ci c'est Antonio Rey. L’autre fois, j'ai oublié de te dire, Diego Carrasco a rendu hommage à Ramón de Algeciras (frère aîné de Paco de Lucia) décédé le jour même. Antonio Rey en a fait de même.
Lorsqu'ils ont annoncé la disparition d'un grand de la famille du flamenco j'ai d'abord pensé à Chano Lobato qui est, parait-il, très malade. Je l'avais vu l'an passé à Nîmes et ça avait été très émouvant. J'ai pensé à lui car je venais d'en discuter avec
Paco Sánchez un photographe espagnol habitué du festival de Nîmes. Je ne sais pas si tu le connais. Il est très gentil. Nous avons pas mal discuté. Il est de Séville mais il n'aime pas les corridas figure-toi. Par contre, lorsque je lui ai dit que nous allions peut-être avoir la possibilité de photographier Agujetas, alors là son visage s'est éclairé et il m'a sorti un truc dans le genre : «Ah oui, mais là, Agujetas, c'est un peu comme si on parlait d'Antoñete tu vois.».
Je ne sais pas trop si on peut établir un parallèle entre Antoñete et Agujetas. Tu me diras. D'ailleurs, il n'a peut-être pas voulu établir un véritable parallèle, simplement évoquer deux personnalités hors du commun.
Un abrazo.

François,
Je connaissais le travail de Paco Sánchez et je me suis déjà servi de photos tirées de son site (en le citant bien sûr) pour los pinchos. Ce qui est extraordinaire c'est la galerie de portraits qu'il a mise en ligne. Je ne parle pas de la qualité, je ne suis pas assez calé en photo, mais il a cadré des visages qui sont les incarnations de "personnages" du mundillo flamenco dont tu lis les noms dans les pochettes d'albums depuis ou qui circulent dans les cercles de "cabales", et ce depuis mille ans, des sortes de familiers sans visage, mais dont personnellement, je ne n'avais aucune idée pour te dire s'ils étaient borgnes ou barbichus, replètes ou élancées. Je me souviens qu'avant Internet, pendant très longtemps, je fus obligé d'imaginer la tête qu'avait Joaquín Vidal et figure-toi qu'une nuit je rêvais qu'il était... noir. Sa condition de critique passée à la moulinette de la vindicte des taurinos, son statut de paria flamboyant et puis cette écriture extraordinaire en avaient fait dans mon imagination l'égal d'un Edouard Glissant (pas Césaire, je savais qu'il ne pouvait y avoir corrélation d'âge, même dans mon subconscient !).
Sinon, Antonio Rey, de lui je sais peu. Alors je vais te parler d'un autre guitariste, cher au coeur des aficionados al flamenco, cher à leur coeur blessé, puisque celui dont j'évoque la mémoire a disparu, brutalement, sur une route en rentrant d'un récital. Je veux parler de Pedro Bacán. Bacán c'est Lebrija. Lebrija c'est un des tirants du triangle fondamental : Séville, Jerez y los puertos. Lebrija c'est un chant qui oscille entre l'envoûtement monocorde et l'improvisation festive sans éviter et sans oublier, voire revendiquer, les écueils de la non modernité. A savoir du figé, du "pringao", et de la personnalité. De l'identitaire et de l'ampleur, Bacán avait ressenti cela. Le carcan et ce qu'il devait à la tradition. Il était né sous l'étoile de l'émotion qui se nourrit des rencontres et des affects. Il tenait à clamer sa "lebrijanité" et en même temps il ne cessait, les doigts sur la guitare, d'en appeler aux bienfaits et aux respirations de l'ouverture, de la connaissance de l'altérité. Un homme de sagesse et de savoir, de certitude entouré de doutes, et inversement. Mais le dieu de bonté et d'amour du prochain n'existe que dans les évangiles, les tartuferies et les letras. La béance laissée par la disparition de Pedro Bacán n'est pas aisée à combler, à perpétuer et encore moins à fructifier. Reste son toque subtil de robe blanche ajourée pour laisser la chaleur, la lumière et les larmes des autres se faufiler entre ses doigts de corne de gazelle. Reste l'héritage à travers le flambeau de la voix de sa soeur, Ines. Penser à Pedro Bacán c'est mouiller l'arbre du chant. Parce que son influence devient empreinte liquide aujourd'hui. Sans crier gare, son album "Aluricán" laisse un frisson. C’est un testament novateur, un canevas pour écouter et sursauter de plaisir. Te hecho de menos Pedro. Va por ti.
Ludo

15 mars 2009

A la droite du père... Chroniques amazoniennes


Nelson Beto Valdes est mort. Hier. A 10h du matin. Nelson Beto Valdes n’était pas si vieux et avait même de beaux jours devant lui. Enfin, je crois, je suppose, j’imagine. Car je ne connaissais pas Nelson Beto Valdes. Je sais juste qu’il était taxi. Un parmi tant d’autres, dans cette bonne vieille ville de Belém, « a Cidade da Mangueira ». Il avait aussi des fils, trois, Cuca, Celio et Rui, et puis une chère et tendre épouse, évidemment, qu’il laisse à leurs destinées respectives. Je les imagine bien malheureux, car je veux croire que Nelson Beto Valdes était bon père de famille, et mari aimant, même si, comme il est de coutume dans ces contrées trop chaudes, la passion vous dévore et l’impulsivité des esprits mâles pousse parfois à quelques regrettables coups portés sur la bien-aimée... mais c’est jamais bien méchant, ou pas vraiment intentionnel, et puis, quand même, elle l’a un peu cherché, et au fond, c’est pour son bien, c’est par amour... quoi qu’il en soit, c’était pas la première fois, ce ne sera sûrement pas la dernière... enfin, pour Nelson Beto Valdes, si.
Mais bon, de toutes façons, ça ne durait jamais bien longtemps, et tout cela finissait forcément en un syncrétisme de chairs, de sueur et d’orgasmes sous des draps toujours trop épais, dans ces terres trop chaudes, définitivement trop chaudes. Ainsi la vie reprenait au petit matin, normale à souhait, banale à crever ; et Nelson Beto Valdes repartait au boulot, dans son taxi blanc, tout blanc, la chemise impeccable, qui ne le restera, de toutes façons, pas bien longtemps. Mais Dilma, la tendre épouse qui se remettait de sa tumultueuse nuit, avait fait son boulot de femme docile et empressée, et c’est bien ça qui comptait.
Je ne sais rien des 3 fils, et je m’en fous. Un semblant d’études, peut-être, quelques trafics, sûrement, des petits boulots minables, à droite, à gauche, de temps en temps, histoire de payer la note laissée chez Rosario, après avoir passé la nuit à vider les stocks de Skol, et reluquer les « bichas » du quartier, en écoutant la brega lamentable plein tube dans d’énormes enceintes grésillant au fond d’un coffre de bagnole grand ouvert, pour mieux apprécier les nuances, sans doute.
Nelson Beto Valdes est donc mort, hier matin, à 10h. Sa journée était déja bien entamée quand cela est arrivé, et je l’imagine bien, l’ami Nelson, le long de la « Praça da Republica », nonchalamment assis sur son banc, à l’ombre des manguiers, supportant la chaleur tropicale, loin de songer à finir prochainement sa vie si quelconque, échangeant trois éclatantes conneries avec les collègues, sur le temps qu’il fait ou qu’il va faire, s’emballant passionnément pour ceux de « Paysandu » ou « Remo », sans jamais oublier de poser un oeil délicat sur une de ces paires de fesses rebondies qui déambulent ici à vous en coller des maux de tête vertigineux, d’un bout à l’autre de la longue « Avenida Presidente Vargas », interminable et dormante, sous son allée de robustes et verdoyants manguiers. Ah, les manguiers de Belém...
Se doutait-il, ce brave Nelson, qu’au même moment, plus au nord, en Europe, à la sortie d’un hiver rude et pas tout à fait clos encore, de tapageuses palabres tortueuses et torturées s’entremêlent afin de déterminer qui mettra sa vie en caution devant tels ou tels monstres assassins venues des plaines d’Andalousie ou de la rude Salamanque, pour quelques sacs d’or et autres promesses de fortune ? Pouvait-il s’imaginer que l’on pouvait autant s’amuser à parier sur l’hypothèse d’une fin de vie devant des Victorino, des Gago ou des Palha en plein coeur de Séville, de Bilbao ou d’ailleurs, ou encore quel genre de terreur évoquaient d’aussi doux noms que ceux de María Luisa, Prieto de la Cal ou Dolores ? Bref, Nelson Beto Valdes s’en foutait certainement, mais aurait été bien étonné d’apprendre que des êtres sains, de chair et de sang, se lèvent chaque matin en consentant que cela soit le dernier... et tout cela, au nom de la Passion, de l’Amour et de l’Art, et parce qu’il faut bien vivre aussi, un peu. Pouvait-il se douter, notre chauffeur de taxi « paraense », qu’on pouvait jouir d’autant d’imprévu et désirer se jouer de la mort au point d’en vivre passionnément ? D’en parler, et d’en parler encore, d’en rêver et d’en rêver toujours, de se voir et se revoir, nu, mutilé atrocement, pour toujours, dans un miroir impudique, avec cette douleur unique qui s’éveille au moindre regard posé sur la moindre scarification. Jouer avec la mort a un prix, et le corps et l’esprit s’en souviennent jusqu’au dernier souffle, et je ne peux croire qu’on puisse oublier la puissance, la souffrance, la peur, le regard de l’ennemi, son odeur, le déchaînement de poussière, de bruit, de violence, de terreur qui émergent de ces quelques instants qui vous soulèvent de terre, non je ne peux pas croire que l’on ne puisse pas envisager sa propre fin lorsque la bête vous transperce, vous bouscule, ou simplement vous regarde. Fermer les yeux et attendre que tout cela s’arrête. Adopter le principe en tant qu’Art de vivre. Car on ne vit pas des toros sans consentir à mourir... sans le désirer, même. Toréer est un acte fou, démesurément inhumain, opposé aux principes dogmatiques de toute théologie modérément appréhendée, opposé à tout instinct de chaque être pour qui la vie est évidemment un bien précieux, un don unique, un aveu de confiance et une chance qu’il ne faut pas gâcher, et que personne, je dis bien PERSONNE, n’a le droit de vous ôter. Toréer est un défi aux lois naturelles, un jeu morbide relativisant tous les principes fondateurs qui vous poussent à mettre un pied devant l’autre, en inspirant puis expirant, chaque jour, chaque seconde, parce que « la vie est tout simplement un ensemble de fonctions qui résistent à la Mort », et que c’est ainsi. Enfin, vous, moi, Nelson Beto Valdes sans doute aussi, admettrions que toréer est un renoncement à la vie consenti, peut-être desiré même, un acte d’Amour sans retour, une oeuvre suprême, le don de soi au nom de l’Art.
Ce matin-là, Nelson Beto Valdes, qui ne pouvait se douter qu’il vivait ses derniers instants, avait déjà traversé cinq fois la ville d’Est en Ouest, bu trois « cafés com leite » trop sucrés, s’était extasié huit ou neuf fois du but de « Ronaldo » face à « Palmeiras », savait qu’il devait ramener quelques « abacaxis » bien murs à sa douce Dilma, et se disait que Rogèrio, son collègue, avait une plutôt belle femme, et que, bon, quand même... d’autant qu’elle avait été plutôt souriante, la dernière fois. D’ailleurs, peut-être que cet après-midi-là, à l’heure de la digestion, il aurait même pu passer une petite heure sereine avec une de ces putes qui traînent sur la terrasse du « Bar do Parque »... Une petite heure, ou deux, le temps de quelques confessions, dans une chambre d’hôtel crasseux où le ventilo tourne pour rien dans un ron-ron hiritant, avant de repartir traquer l’homme d’affaires pressé ou le gringo avide de monuments à visiter, et de finir sa journée paisiblement, un peu comme tous les jours, depuis 30 ans, un peu comme tout le monde, depuis toujours.... Mais jamais, oh non jamais, il n’avait prévu, Nelson, que les mangues de Belém commençaient à mûrir, en cette saison, et que l’une d’elles, sur son arbre perchée, là-haut, un de ceux de « l’Avenida Presidente Vargas », sans doute un peu plus mûre, sans doute un peu plus lourde, allait rencontrer, là, dans quelques instants, quelques secondes, quelques centièmes de secondes, le sommet de son crâne, et le briser, mettant un terme à la vie de Nelson Beto Valdes, 56 ans, père de famille et mari aimant, taxi de la bonne vieille ville de Belém. Il avait pensé à tout, Nelson, ce matin-là, tout envisagé même, sauf sa propre mort, si connement exotique, si exotiquement conne.

Pendant ce temps-là, dans le froid de l’Europe, la temporada s’éveille, doucement, pour ceux qui ne pensent qu’à elle, la « Dame en noir », et s’ennivrent pleinement du défi morbide qu’ils lui servent en pâture chaque fin de journées chaudes et poussiéreuses, comme pour mieux la voir venir, la « Grande Dame » et pouvoir lui dire, le sourire aux lèvres : « C’était pas pour aujourd’hui »... Alors, on verra demain...

14 mars 2009

Toros en Vic 2009


Samedi 30 mai
11h - Novillada de FLOR DE JARA anciennement Bucaré
Juan Luis Rodríguez - Juan Carlos Rey - Thomas Joubert 'Tomasito'

18h - Corrida de ESCOLAR GIL
Rafael Rubio 'Rafaelillo' - Sergio Aguilar - David Mora

Dimanche 31 mai
11h - Corrida concours
MIURA - PALHA - VICTORINO MARTÍN - CEBADA GAGO - ESCOLAR GIL - FUENTE YMBRO
José Pedro Prados 'El Fundi' - Javier Valverde - Luis Bolívar

18h - Corrida de FIDEL SAN ROMÁN (origine Guardiola Domínguez)
Diego Urdiales – Julien Lescarret – Alberto Aguilar

Lundi 1er juin
17h - Corrida de LA QUINTA
Luis Francisco Esplá - El Fundi - Sergio Aguilar

Vendredi 7 août 21h 30
Corrida de L’ASTARAC de Jean-Louis Darré

11 mars 2009

Voyage au bout de l'afición (IX)


« LA MILANERA »

Vroum ! Le petit Gaspard a garé la voiture playmobil® sur le bas-côté de la route — la large bande grise du tapis —, un peu avant la station-service car les quatre playmobil® à bord ont déjà fait le plein d’essence. Comme il pleut, le petit Gaspard a relevé les essuie-glaces ; comme il fait froid, il a choisi des playmobil® avec des manteaux dessinés dessus et, comme son tonton, deux d’entre eux sont sortis « en griller une » — le playmobil® à la casquette et celui qui ne mange que des chips Lay’s®. De l’autre côté de la large bande grise du tapis, le petit Gaspard a installé une boîte — le restaurant — et une BD — le parking du restaurant.

Vroum ! Le 4x4 playmobil® offert par mamie Jeannette s’est arrêté sur la BD. Le petit Gaspard en soulève le toit et décroche le conducteur qui exhibe de bien belles moustaches — qui a dit que les playmobil® n’en avaient pas ? Il est vétérinaire — plus tard le petit Gaspard sera vétérinaire —, espagnol et un peu agriculteur aussi. Un des playmobil® traverse la route sans toucher terre, relève son bras articulé et « serre » la main de celui qui vient tout juste d’arriver. Ils échangent quelques mots en playmobil® — une langue bizarre inventée pour l’occasion par le petit Gaspard.

Vroum ! Le 4x4 de mamie Jeannette prend la direction de Forfoleda — le bureau de papa — via le couloir et la salle à manger : « Gaspard, ta chambre n’est pas assez grande !? — Si, si... » Le petit Gaspard a tout prévu ; les Lego® de son anniversaire et les barrières du centre équestre playmobil® du Père Noël lui ont permis de construire une arène avec sa dépendance — une maisonnette pour recevoir les amis playmobil®, se mettre à l’abri ou ranger le matériel playmobil® — et un grand enclos avec des arbres playmobil®, des vaches — rares —, un taureau et une poignée de cochons — noirs. « Pan ! Pan ! — Qu’est-ce que j’entends petit chenapan ? — T’inquiète pas papy, c’est des chasseurs dans les bois. »

Les remarques intempestives des adultes envolées, les toits des véhicules enlevés, le petit Gaspard éjecte ses playmobil® et s’en va prendre un goûter bien mérité — des tartines de Nutella® avec un sirop de grenadine.

Vroum ! Requinqué, le petit Gaspard rembarque toutes ses figurines en plastique dans le 4x4 pour une visite de l’enclos mais, par manque de place, se trouve obligé de loger dans le coffre le playmobil® à la calvitie — qui a dit que les playmobil® n’en avaient pas ? Ce contretemps technique donne soudain l’idée au petit Gaspard d’ouvrir le hayon et de poser sur les jambes du playmobil® à la calvitie, donc, un gros sac de « croquettes » destiné au taureau, aux vaches et aux veaux — une ruse de playmobil®, en fait, leur permettant de les approcher de très près. Et voilà les bêtes les plus gourmandes qui prennent en trottinant le sillage de ce « distributeur de croquettes » d’un genre nouveau... Le sac est vide maintenant.

Vroum ! Le playmobil® à la moustache quitte l’enclos, puis coupe le moteur de son « quat-quat » à proximité de la maisonnette. Le petit Gaspard fait sauter le toit et expédie d’un bond ses personnages dans l’arène pour une entrevue avec le playmobil® au dictaphone et une séance photos avec les playmobil® qui portent un appareil autour du cou. « Gaspard ! C’est l’heure du bain ! — Y reste plus qu’le pique-nique et j’arrive ! — Dépêche-toi de les faire manger alors ! — Oui m’man ! » Le pique-nique improvisé dans la maisonnette prit beaucoup plus de temps que prévu et, après le sermon paternel, la soupe et les petits-suisses, le petit Gaspard s’en alla au lit avec des rêves plein la tête... « Playmobil®, en avant les histoires ! »

En plus Si vous estimez que ces lignes :
— n’informent guère sur l’élevage de l’aficionado et vétérinaire Benito Martín Martín, consultez impérativement la fiche de Terre de toros ;
— ne rendent pas compte de l’immense plaisir ressenti à la découverte de cette attachante ganadería, (re)lisez celles-ci sur le blog ;
— sont chichement illustrées, partez illico voir la galerie à la rubrique CAMPOS sur le site.

Images « La bé » & Benito © Les playmobil® de Camposyruedos

Mano a mano


ORTHEZ 6 VENDREDI 13 MARS 2009, 20h30
Salle Francis Planté, (création)

Olivier Deck & André Velter

JESUS AURED accordéon
PATRICE CAZALS guitares, textures sonores
AZIZ FAYET oud, percussions

Récital de poésie & musique improvisée

Il y va de la quadrature du souffle
sur un cercle de sable et de lumière.
Des voix comme autant de soleils de sangs rouges ou noirs.
Musique improvisée en terrains découverts,
jazz en partance, jazz torero
avec des galops d’ombre et des charges de feu.
Poésie à risques, sans assurance.
Poésie cavalière qui se veut en cavale.
Poésie d’arène et de roulotte au long cours.
Voyage qui se voue à l’éveil du duende.

08 mars 2009

Toros en Crau


A Saint-Martin-de-Crau :
Samedi 25 avril
6 novillos de PARTIDO DE RESINA (antes Pablo Romero) pour José Carlos Venegas, Pablo Lechuga et Patrick Oliver
Dimanche 26 avril
Corrida concours
6 toros d'ALONSO MORENO DE LA COVA - ROCÍO DE LA CÁMARA - REHUELGA - TARDIEU FRÈRES - GALLON & FILS - HÉRITIERS DE CHRISTOPHE YONNET

Pour plus d'informations : www.feriadelacrau.fr.

06 mars 2009

Il a marché sur l'eau


C'est bien connu. Vendredi, c'est raviolis...

Un lecteur qui lit à tous les râteliers (mais comment le lui reprocher !?) nous a transmis les lignes suivantes, rédigées, proclamées, déclamées, par l’inénarrable Président, Prophète, Pape, Christ Ressuscité de l’OCT... Amen, alléluia et prosternez-vous, pauvres mortels...

"Ce que je peux dire est que j'ai été interrompu à diverses reprises par les applaudissements, que plusieurs fois une voix a clamé : "C'est le meilleur pregón de l'histoire de Ciudad Rodrigo", que la présidente de la Diputación de Salamanca qui était présente m'a demandé le texte pour qu'il soit distribué dans les écoles, que le président de l'Association taurine parlementaire le diffuse largement, que le père du Juli qui était également présent m'a demandé que l'on travaille ensemble sur divers projets de la fondation qui porte le nom du torero pour défendre la Fiesta en Espagne, et que pendant trois jours j'ai été arrêté dans la rue par des aficionados qui voulaient me féliciter... Pour le reste, les mots ne sont rien s'ils ne sont pas suivis d'actions."

05 mars 2009

Hermanos Pérez Escudero


Nous vous invitons à vous rendre de ce pas sur Terre de toros pour découvrir un élevage méconnu, mystérieux mais qui met l'eau à la bouche, celui de Hermanos Pérez Escudero. Annoncé d'origine Saltillo, il semblerait que la vérité soit plus complexe. Toujours est-il que la visite est belle et mérite le détour.

>>> Retrouvez une galerie de cet élevage, rubrique CAMPOS, sur notre site www.camposyruedos.com.

Bonne visite à toutes et tous.

Photographie Un bicho de Pérez Escudero © Laurent Larrieu

Yonnet, 150 ans


Vous le savez sans doute, en 2009 la famille Yonnet fête les 150 ans de l'élevage.

A cette occasion, Hubert et Françoise Yonnet ont décidé d’organiser une exposition retraçant l'historique de la manade. Une petite équipe d’aficionados les aide à rassembler et organiser la documentation.

Les personnes détentrices d’affiches ou de photos susceptibles d’intéresser Hubert et Françoise peuvent contacter laurent Giner par e-mail : lginer@wanadoo.fr ou même Camposyruedos. Nous ferons suivre.

03 mars 2009

Ulisses... Chroniques amazoniennes


Quand je lui ai demandé qui étaient les meilleurs, il a pas hésité : les Cubains, il a dit, parce que ça a faim, c’est pas gros, mais putain, ça tape fort et ça lâche rien ! Ulisses Pereira, la cinquantaine robuste et la face usée par le cuir trempé de sueur de ses adversaires du bon temps jadis devenus de vieux frères, était là, assis sous la pâle lumière de l’unique néon du ring numéro 3, celui qui sert à l’entraînement des petits, ceux du quartier, et puis aux vieux aussi, ceux qui ne sauront ou ne pourront jamais s’arrêter de se la donner sur un ring, en attendant l’année de trop, celle qu’il ne fallait pas faire. Le numéro 3, c’est celui du fond, là-bas, celui où les cordes sont usées, parfois manquantes ou vaguement rafistolées, et où le sol se décolle de partout... Du coup, il faut y faire plus gaffe qu’ailleurs, mais c’est bon pour travailler les appuis. Alors bon...
Ici, c’est l’Academia Paraense de Boxe d’Ulisses Pereira, la vieille gloire locale des années 1980. Tout le monde le connaît, Ulisses, dans la Travessa Rui Barbosa, et puis surtout, tout le monde le respecte. Il a encore des bras, le vieux lion, et il serait bien capable de coller quelques crochets bien sentis. Mais, quand Ulisses raconte, tu sens bien que la guerre est finie depuis une paye. Le muscle est moins saillant, et les arcades et la cloison nasale en auraient à raconter. Ulisses, il a l’aspect d’un de ces vieux sementales que l’on apperçoit dans toutes les ganaderías de bravos, là-bas, planqués paisiblement sous un vieil arbre mort, un peu empâté, la démarche un peu lourde et boîteuse, mais la présence rassurante, par ce qu’il a été, même si...
Bref, pour lui, la vie, c’est combattre, et combattre, c’est vivre. Il peut pas faire autrement, Ulisses, parce que tout ce qu’il a, ça vient du ring, et de ses poings aussi, bien sûr. Et puis, de toutes façons, il savait pas faire autre chose. Alors, plutôt que de finir au fond d’un caniveau dégueulasse de Marituba, la peau trouée par un calibre pour une sombre histoire de bagnole volée ou de gonzesse un peu facile, il a choisi de pouvoir se regarder dans la glace tous les matins, même si ça n’a pas toujours été facile... Pas comme ces gamins qui branlent à longueur de journée dans la Travessa Rui Barbosa sur des bécanes un peu trop chromées pour être possédées honnêtement, et qui le toisent d’un peu haut, le vieux lion, et à qui il collerait bien quelques droites pas volées, de temps en temps, et que ça ne leur ferait pas de mal, même... mais bon, chacun sa vie, chacun sa merde. Ulisses, lui, il a choisi de combattre... avec honneur.
Il a été un grand champion de l’Etat du Pará, et les photos jaunies qui n’ont pourtant pas vu la lumière du jour depuis des années, vous le racontent encore, sur les grands murs de l’Academia Paraense de Boxe do Belém, qui mériteraient bien un petit coup de pinceau, d’ailleurs. Tout ça, ça le fait marrer, et il transpire la modestie l’ami Ulisses, mais tu sens bien l’orgueil qu’il a au fond de lui, de te faire remarquer que Acelino 'Popo' Freitas, le fringant puncheur bahianais, a été son poulain, et qu’ils ont partagé trois titres WBO ensemble. Et c’est tellement vrai, que du coup, cette histoire a une autre gueule... enfin, pour moi, en tous cas, elle en avait une autre...
Il m’a raconté aussi comment il s’est retrouvé entraîneur de l’équipe nationale du Brésil en partance pour quelques olympiades, mais bon, tout ça, c’est bel et bien fini... Il a préféré raccrocher parce que de toute façon, ils étaient pas bons, et qu’avec des mecs qui en voulaient pas, y avait rien à faire, et quoi qu’il en soit, les sélections nationales, ça voulait rien dire, et il savait bien, lui , ce bon Ulisses, que certains y étaient parce qu’ils connaissaient du monde à la fédé, et puis que finalement pour boxer, faut avoir la dalle. Et puis c’est tout...
Bref, tout ça, c’est Ulisses, Ulisses Pereira, le vieux combattant de Belém que tout le monde respecte, et qui passe son temps entre les trois rings de l’Academia Paraense de Boxe, à corriger des crochets pas assez appuyés, des droites pas assez profondes ou des uppercuts sur des appuis inversés, dans l’épaisse moiteur d’une salle de boxe des rives de l’Amazone.
Pendant qu’un des sacs encaissait copieusement les coups d’un hypothétique futur champion dans l’obscurité du gymnase, Ulisses Pereira, avec des airs de vieux ganadero las de trop de labeur, finit par m’avouer que la vie l’avait poussé à combattre, mais que la lutte, on l’invente pas, on l’a dans la peau. On part pas à la guerre si on a une âme de pianiste, un mental de trapéziste. Lutter, c’est douloureux, ça fait peur aussi, parce qu'on sait jamais comment on va en sortir. Quoi qu’il en soit, combattre c’est pas une affaire de poids, disait-il, c’est une affaire de mental. De regard aussi. Des pas francs, des trop francs, des vides, des effrayés, des fous... Et il en a vu, Ulisses, des combattants de toute sorte, mais il vous dirait que c’est pas les plus gros qui lui ont fait peur, ou mal. Il aimait pas les trop malins ou les trop vicieux, mais il fallait quand même les aguanter. Pas le choix. T’y es, t’y restes, et tu donnes tout, parce que l’autre, en face, ce gros enfoiré plein de haine, il va t’en mettre plein la gueule, il en veut qu’à ta tronche et il va pas te louper. Pourvu qu’il crève pas plus la dalle que toi, bonhomme, parce que sinon, tu vas prendre cher, et ça va tomber épais ! Ouais, les vicieux et les trop malins, Ulisses, il les aimait pas, mais il fallait quand même les aguanter. Tout comme les gros qui tapaient fort, les grands mous qui encaissaient tout, les fins stratèges, ou les valeureux qui boxaient tête en avant. Tous, il fallait les aguanter. Fallait faire le boulot, il disait, sinon, c’etait la galère, les trafics à la con, la rue...
L’entraînement commençait, Ulisses avait du taf. Je le laissais. Et puis je le regardais une dernière fois, le vieux combattant qui réajustait ses sacs, vérifiait les cordes, et je me disais que, forcément, sous d’autres cieux, il aurait été torero, en lidiador avisé il aurait sûrement ouvert les puertas grandes de Las Ventas à Bilbao, et aurait même pu s’appeler Fundi, Frascuelo ou Luis Francisco... et autant de raisons de ne pas faire l’année de trop.

C’est juste qu’Ulisses Pereira est né un peu trop au sud. C’est comme ça...

Saludo, Maestro !