10 décembre 2011

Depuis le carafal


Tout le monde n’a pas accès au carafal, cette immense cage en fer installée dans un coin de la place du village. Le carafal est la propriété de la peña des filles. Et il faut être membre pour y accéder. J’y suis admis, comme invité. La place est à peine éclairée, plongée dans une pénombre qui la rend inquiétante pour l'étranger que je suis ici.
Du premier étage je contemple les jovens però valents amener pour la deuxième fois de la journée le toro dans sa cage, l’attacher au pieu et parer ses cornes de torches qui dégagent une forte odeur d’essence.
J’ai la sensation que c’est tout le village qui tire sur la corde, pousse et bloque l’animal, le prépare pour son ultime course. C’est une sorte de communion, un attrait collectif et irrésistible qui pousse les plus courageux à s’approcher, toucher, pousser, attendre le dernier instant, l'ultime seconde avant de prendre la fuite et se mettre à l’abri.
Un murmure monte. Un homme allume les torches et un autre, immédiatement après, coupe la lourde corde qui retient l’animal.Un troisième s'accroche à la queue.
Une fois libéré, le toro devient le maître de ces rues nocturnes et sombres. Il les hantera et fera régner la peur et l’angoisse jusqu’à ce que ses cornes s’éteignent. Il sera alors temps pour lui de réintégrer une dernière fois les corrals provisoires installés de l’autre côté de la place. Ça en sera définitivement terminé de sa vie publique.