09 septembre 2008

"Pends-toi, Brave Crillon !"


En moins de 40 ans, jusqu'au crépuscule du XVIè siècle, la France se trouva déchirée par 8 guerres de religion, pas moins. En septembre 1589, du côté d'Arques en Normandie, bien loin d'ici, Henri IV à la tête de l'armée royale affronta la Ligue et Charles de Mayenne, et bien qu'en infériorité numérique, les troupes du Palois remportèrent la victoire. Sur le champ de bataille d'où s'élevait l'odeur pestilentielle de la mort, des entrailles de chevaux et des viscères des soldats, Henri IV écrivit à son capitaine provençal Louis Des Balbes de Berton de Crillon, dit le "Brave Crillon" ces quelques mots restés célèbres : "Pends-toi, Brave Crillon ! Nous avons combattu à Arques, et tu n'y étais pas."
C'est souvent comme ça... On a beau être acharné autant qu'il nous semble possible de l'être, plus fidèle à sa passion que Pénélope à Ulysse et plus assidu sur les gradins que la reine d'Ithaque à son métier à tisser, survient toujours un moment où l'on ne peut briller que par notre absence. Les ondes crépitent alors de messages nourris de regrets plus ou moins sincères et vaguement chambreurs... "Tu n'y étais pas."

Dimanche, la plupart d'entre nous n'y étions pas et, sans une once de gêne, un grand moment en a profité pour se dérouler sans nous. Restent les témoignages compatissants ou goguenards des copains, et ces images qui roulent des regrets amers dans le lit de notre déception.
Tout le monde est sorti le souffle coupé des arènes dimanche ! Il paraît même que les touristes n'ont pu décoller leur séant du béton numéroté avant le terme du spectacle. Ce n'est pas peu dire ! Au 6è, le héros de la soirée a reçu la récompense du long combat qu'il venait de livrer. Les aficionados pensaient alors que ce qu'ils aimaient était bien vivant, toujours... contre toute attente : 5 toros venaient de périr, 5 sur 6... Exceptionnel me direz-vous ! Ce n'est pas tous les jours qu'on voit ça dans les ruedos, en effet. D'ailleurs, nous ne l'avons pas vu, nous restons dans cet état un peu bizarre de qui se contente de connaître celui qui a vu le loup (euh... le toro) et comme nous sommes prudents, nous essayons d'évoquer cela avec la retenue nécessaire : histoire que la légende garde de sa véracité sans verser dans le mauvais sens du terme de panégyrique. L'émotion était là, elle était venue avec la caste, comme souvent... Alors puisque les bons moments doivent laisser une trace (malgré tout parfois) sur cette page, je vous propose à vous qui n'étiez pas "at the right place" non plus dimanche soir, de suivre ces quelques liens et de lire les évocations des chanceux qui, eux, y étaient :
http://torosyarte.blogspot.com/2008/09/gran-novillada-de-moreno-silva.html,
http://taurofilia.blogspot.com/2008/09/una-novillada-de-las-que-hacen-aficin.html & El imperio del terror.

Les terribles photos de Juan Pelegrín sur le site de Las Ventas ("La tarde tras el objetivo").
La fiche de l'élevage Moreno de Silva sur Terre de toros.

Sinon, au même moment, à l'autre bout de l'échelle de la planète, au royaume des paillettes, des toros bonbons, et des cachets millionnaires, un certain 'Desgarbado' de Victoriano del Río a été gracié après avoir pris "un simulacre de pique" (c'est pas moi qui le dis) - mais rassurez vous "si on l'avait piqué, aurait-il fait preuve de bravoure ? Oui. Quatre ou cinq fois il y serait allé de loin..." C'est merveilleux la corrida virtuelle : dans le même genre, si elle m'avait dit oui, je serais sorti avec Laetitia Casta.

¡Vaya "Daxeries"!

Le novillero Valentín Mingo dimanche à Las Ventas. Tout le poids de la caste des Saltillo et de l'épreuve endurée par le chaval sur cette photo de Juan Pelegrín.