08 juin 2011

Les poser ou pas



A ceux qui les ont posées au Vive Madrid, entre les jambes ou sur le menton de filles à la vénalité sincère et quantifiable.
 

Les poser ou pas, telle est la question. Pour 'Aviador', la réponse a été claire, on peut évoquer le décollage par son patronyme et décider de poser le train central sur la piste le temps d'envoyer en orbite un groupe équestre. Sánchez, son canasson et le matelas jaune brodé de rouge de l'abuela. Parler de couilles et de les poser sur un terrain de jeu, une table ou que sais-je, dans notre vilaine langue, sonne comme une déclaration d'avant-match par un mauvais footballeur éprouvant le besoin de fleurir son langage faute de faire germer sa virilité sur le terrain. Alors désolé pour cette expression à la Jérôme Rothen mais c'est un fait, 'Aviador' a posé son énorme paire de couilles sur le sable par deux fois pour faire décoller une fois de plus ce panzer qui lui astiquait le dos. Si je prends la check-list, ça sonne bien : 'Aviador' a consciencieusement collé sa paire de cornes et ses Wayfarer de pilote dans le bas du peto, arrimé le tout, et du morrillo jusqu'au cul a raidi tout ce que ses vertèbres comptaient de muscles aux alentours pour s'arc-bouter et soulever plus d'une demie-tonne de bourrin, jockey et tout le reste. Deux fois. Ce spectacle à lui seul justifiait le prix des places à la reventa, celles de la veille, jour de sardines, l'avion, le 70-200 payés en faibles dollars à New York le cigare de Benjamin et la bouteille d'eau glacée. 'Aviador', 585 kilos de méchanceté castaña et complexe irriguée de caste. Un bravo dans le sens premier du terme. Sauvage. Pourtant, 'Aviador' est sorti au pas comme 4 des 6 toros de Cuadri de ce jour-là et s'est allumé en querencia, au cheval, etc. Il en est aussi sorti seul pour retourner au fil des planches. Manso con casta ? Si vous tenez vraiment à répertorier...
J'ai adoré 'Aviador', Alberto Aguilar beaucoup moins, et on ne lui en veut pas : bousculé, pris, repris, bugné, dépassé, le petit a encaissé des embestidas qui pesaient chacune un A380 et aguanté ce qu'il a pu. 

Dans le genre encasté, Iván Fandiño a montré à nouveau que Madrid était à sa hauteur cette année. Le meilleur lot, certes, mais on jurerait qu'avec tant de ganas il l'avait ramené lui-même depuis "Comeuñas", à la force de ses bras et de ses mâchoires serrées. Madrid a souligné d'un silence religieux le moment où toute la place pensait que la faena au quinto bueno allait décoller façon Ariane, et même si le fil s'est en fait brisé à gauche et si le labeur a plongé, une oreille est venue récompenser une entrega de gala sur deux toros, deux épées et une féria. 

Mais parlons Toros... C'est si rare. Fernando Cuadri avait amené un lot globalement dans le type de la casa, compliqué mais sans complexe de force ou d'attitude, chaque toro développant une personnalité a su aire, sans fléchir un sabot malgré les rations de fer. Un lot à faire se poser des questions à l'escalafón entier par sa présence, son danger, sa caste. Un lot qui demandait les papiers et moissonnait les coletas fragiles comme la faucheuse ratisse chez Jérôme Bosch. Mais un lot dont les quatre premiers toros sont sortis au pas et qui dans l'ensemble manqua de pétard voire même de mobilité pour certains. Deux heures et quart comme un soupir grâce à l'intérêt de la course, entre le constant peligro sordo et les grands moments de toros, le 5, 'Podador' alla a más, après avoir lui aussi rempli sa tâche aux piques sans trop se soucier des canons. Un grand toro, mobile et encasté et surtout exigeant au troisième tiers. 'Podador' et 'Aviador', deux toracos qui marqueront la saison. Laissons la conclusion à Luis Cuadri  : "¡Hay que pedirle más!" 
— ¡Olé a tu afición y tu exigencia!

>>> Retrouvez sur le site www.camposyruedos.com, rubrique RUEDOS, les photographies de la dernière course de la San Isidro 2011.

Faites moi l'honneur et le plaisir de cliquer sur la photo afin de l'agrandir et constater la mine ravie des spectateurs devant pareil spectacle !