Comédie en une scène et un acte. L’action se passe à Vic-Fezensac, depuis trois jours. Tout le monde est bourré et sale, surtout les invités à la tribune officielle. Marianne et Dorine vident des bières dans les écolobelets. Arrivent Tartuffe et Arnolphe picolant du rosé.
MARIANNE - Ne vous fâchez pas mon père de ce que céans je veux vous dire... C’est... compliqué.
TARTUFFE - Eh bien quoi, parlez Marianne à la fin ! Que diable, changez de braquet !
DORINE - Compliqué de rester assis douze heures tout serré dans un énorme relent unanime de magret-frites ?
ORGON - Compliqué de se garer, de repartir, de se loger, de se nourrir ?
MARIANNE - Non, ça c’est cher. Non, "compliqués" mon bon père.
ARNOLPHE - Compliqué de retrouver la voiture, de ne pas marcher dans le vomi, de plaire aux vigiles ?
MARIANNE - Non, vous dis-je ! Compliqués !... Les toros ! Ils étaient compliqués ! La presse l'écrit et le vend !
ORGON - Mais, expliquez-vous écervelée, et ne nous rabâchez point ce « compliqué » assommant !
MARIANNE - La revue de presse en ce mardi de la Récupération est catégorique, mon père, le mot en vogue est : « compliqué ». Tout le monde le dit. Dès qu’ils tombaient entre les pattes de Padilla, Miletto, Bolívar, Robleño, Joselillo et autres Lescarret... ils étaient compliqués.
Entrent Fanchou suivi d'Orgon, avec du blanc limé.
TARTUFFE - Et je vous dis, moi, que vous êtes bien sotte. La terminologie est faste en tauromachie. Maître Fanchou, parlez, soyez sincère.
FANCHOU (énervé) - Si fait, Mademoiselle, souffrez que je vous tertouille. Dès qu’un toro se décompose, s’avise, développe du genio, tourne au bronco, OU vire au bœuf immobile CAR dézingué à la pique... On dit là-bas qu’il est... « compliqué ». Or, trop souvent, quand le toro est « compliqué », le torero devient... « ennuyeux »... Et ils sont parfois plusieurs.
MARIANNE (s’adressant à son père) - Ne vous alcourroucez pas mon gentil papa mais, à la fin, il m’embrouille.
TARTUFFE - Continuez Fanchou, développez je vous prie cette noble pensée.
FANCHOU (assez rouge) - Car, alors, le torero va s’acharner durant des heures (trois jours en fait) à extirper une passe après l’autre à cette mule arrêtée. Car il croit devoir arracher, au prix d’efforts inhumains, le minimum admis de passes peu honnêtes lui permettant d’éviter l’engueulade analphabête.
MARIANNE - Au lieu d’abattre la bête ?
FANCHOU (tout rouge) - Si fait. Il le devrait comme le fit le Fundi ce lundi.
ORGON - Et si d’aventure l’animal toujours s’avance ?
FANCHOU (violet) - Si fait. Il menace alors de bouffer le torero et, devant ce danger, celui-ci se replace. Evitant ainsi de se faire déborder à chacune des passes.
MARIANNE - Mais en s’éloignant à perpète on pourrait penser qu’à la fin il se barre ?
DORINE - Et voilà tant pourquoi, Marianne, d’aucuns s’ennuient dans l’étagère... quand le torero veut par trop... séduire le populaire.
Bon anniversaire Titi !
Mario 'Juan Bautista Poquelin' Tisné