Hier, samedi 25 juin, devait être combattue à Zamora une corrida de Palha, mais les vétérinaires ont émis un avis contraire. Ils ont écarté les toros portugais pour un manque flagrant de trapío. Fatalitas ? Non. Comment ne pas s'interroger devant les errements réguliers d'un élevage irrégulier devenu un véritable melting pot incontrôlé. D'un côté Pinto Barreiros, Isaías y Tulio Vázquez, Oliveira Irmãos, Torrealta et, de l'autre, Baltasar Ibán, autrement dit du Contreras — là aussi un cocktail assez varié. C'était autrefois, il y a peu, un mélange détonnant. Du TNT, demandez à Israel Lancho. Maintenant, il semble que même un test ADN ne suffirait plus à reconstituer un arbre généalogique complexe dont certaines branches sont mortes et d'autres sont en train d'être sciées. La scie, voilà un instrument qu'il vaut mieux ne pas évoquer en présence de ces toros, quand on songe à l'état de certaines de leurs cornes. C'est comme parler de corde dans la maison d'un pendu : un véritable manque de savoir-vivre. Dorénavant, le fer lui-même semble participer de cette logique : P+. On dirait le résultat d'une analyse sanguine.
— Tu es de quel groupe, toi ?
— P+, pourquoi ?... Toi aussi ?
— Non, c'est juste pour savoir... au cas où !
Trois élevages uniques, trois, pas un de plus. Trois familles ganaderas, trois, pas une de plus. Uniques depuis l'origine. Plus de 150 ans d'existence. Miura (1842), Palha (1848) et Yonnet (1859). Toutes indirectement liées. Les liens du sang de toro : du Miura chez Palha, du Pinto Barreiros chez Yonnet. L'Espagne, le Portugal et la France, tout un panorama taurin. Un patrimoine ? Monsieur Folque, Palha est un fer mythique qu'il serait urgent de réhabiliter.
>>> Pour compléter cet argumentaire, "3 illustrations 3" et un commentaire paru dans le numéro 57 de la revue La Lidia du 27 avril 1917.
L'élevage de Palha
Cet ancien élevage portugais, composé à partir de toros et de vaches de pure race espagnole, est désormais l'un des plus réputés.
En 1883, lorsque D. José Palha, si célèbre aujourd'hui, pense créer son élevage, il introduit, dans un premier temps, des toros de Miura dans son cheptel de vaches portugaises. Plus tard, en incorporant à son troupeau une "pointe" de vaches achetées au Duc et trois étalons de Jacinto Trespalacios, il obtient une lignée distincte, au sang résolument Veragua, qui lui permet d'ajouter de la bravoure et de la noblesse à la puissance des Miura.
Le malheureux accident dont furent victimes Algabeño et Lagartijo, tous deux blessés à Madrid par le même animal, a donné l'occasion au banderillero Moyano de colporter une rumeur qui a grandi comme boule de neige entre les toreros. Les maestros ont acquis la certitude que ce toro avait déjà été toréé alors que les faits rapportés ont été démentis et que rien n'accrédite ces affabulations, mais il reste toujours quelque chose de toute calomnie. Depuis, les toreros ont pour cette prestigieuse devise une méfiance injustifiée. En réalité, le toro incriminé ne fut même pas éprouvé car, des 72 bêtes que comptait la camada, 11 seulement le furent, un des veaux mettant un terme à la tienta après avoir fracturé la clavicule du picador.
La preuve de l'intérêt que porte le public à cet élevage réside dans le nombre de bêtes, 98, combattues pendant la saison 1916 dans les arènes de Barcelone, Valence, Vista Alegre, Badajoz, Logroño, Palma de Majorque... Nobles et braves dans l'ensemble, offrant de nombreux triomphes aux toreros, elles ont gommé un peu de la légende noire des Palha. Grâce à l'extrême attention que D. José porte à son élevage, prenant en compte les désirs des matadors, il est parvenu à réduire le volume de ses bêtes, à diminuer la taille de leurs cornes, à leur donner une allure plus agréable et à les doter d'une excellente bravoure.
Un toro cependant mérite une mention spéciale, celui combattu et tué par Larita à Valence le 21 mai. C'était un véritable toro de bandera, de ceux qui font honneur à leur devise.
Il a reçu 9 piques, toujours en chargeant. Il a tué 4 chevaux. Il a causé 7 chutes, renversant le castoreño à chaque reprise, mais le plus incroyable est qu'il a pris la dernière puya sans rechigner, alors que le picador Aragonés avait brisé sa hampe, enfonçant 77 cm de bois qui sont restés dans son corps, jusqu'à la mort. […]
La Lidia, 27 avril 1917.
Trois photos prises aux corrales dans une situation similaire. Entre la première et la dernière... 95 ans.
1. 'Listo', toro de Palha, 11 juin 2011, Vic-Fezensac © José Angulo / www.camposyruedos.com
2. 'Sardinero', toro de Palha, 27 septembre 2009, Las Ventas, Madrid © Juan 'Manon' Pelegrín, que vous pouvez retrouver ici, là et encore ailleurs.
3. 'Comisario', novillo de Palha, 1916, Vista Alegre, Madrid © Baldomero