16 octobre 2008

Pour quelques millimètres de plus...


Vers 15-16 ans, c’est plutôt des histoires de centimètres qui rosissent les trougnes boutonneuses des garçons. Au moindre coup de vent, vas-y que ça sort le double décimètre du cours de maths ou mieux, si la tempête s’annonce, le mètre de bricolage de papa.
Avec l’âge, les garçons s’énervent de moins en moins sur les questions de centimètres pour des raisons de pudeur, de résignation ou tout simplement parce que le temps manque. Mais comme ils restent des garçons, il faut bien que le sujet les titille encore un peu, autrement ils ne seraient plus des garçons. Alors, quand ça fait longtemps qu’ils n’ont plus 15 ou 16 ans, ils se mettent à causer de millimètres. Ça fait moins rêver mais ça fait bien rosir encore la trougne auto-satisfaite de certains.
A Camposyruedos, comme nous sommes tous des garçons, et comme ça fait longtemps que nous n’avons plus 15 ou 16 ans, ça nous avait fait plaisir de discutailler le bout de gras pendant l’année 2008 au sujet de quelques millimètres de trop ou de moins. Ça nous a fait plaisir jusqu’en juillet quand la placita de Beaucaire a voulu tester ce que l’on nomme aujourd’hui la puya andalouse. Pendant cette course de Victorino Martín, seuls deux toros ont été piqués avec cette pique annoncée comme l’incontournable outil de l’évolution et de la sauvegarde du tercio de piques. C’est vrai que depuis deux ou trois ans les tercios de piques sévillans ont bien plus de grandeur que ceux d’autrefois !
Au terme de la course de Victorino Martín donc, des vétérinaires ont procédé à des analyses sur les blessures des toros pour déterminer quelles avaient été les piques les plus profondes. Il s’avère en lisant leur compte rendu que la blessure la plus profonde fut occasionnée sur le sixième exemplaire par une pique andalouse. Jusque-là, rien de bien grave sous le soleil des doubles décimètres, me direz-vous.
Le lendemain même de cette corrida, chaque aficionado pouvait pourtant lire sur son site internet les mots du président de l’OCT, "Quant aux blessures occasionnées par l'une et l'autre pique, elles furent mesurées et comparées par les vétérinaires mandatés à cet effet par l'UVTF. Et contrairement à ce que démontrent de savantes études théoriques qui nous sont proposées depuis quelques temps, le résultat de leurs constatations est fort probant : 11 centimètres pour les piques andalouses, de 14 à 15 pour les traditionnelles. Soit près de trente pour cent... en moins. Ce qui est le but recherché."
Déjà à l’époque, tenus au courant des résultats de ces analyses vétérinaires, nous nous étions émus de découvrir ces mesures avancées comme vraies par le président de l’OCT (http://camposyruedos2.blogspot.com/2008/07/beaucaire-centimtres-et-vieux-rayas.html).
Cependant, nul n’ignore que se tromper est humain ou qu’un double décimètre est parfois difficile à lire. Et nous pensions la péripétie enterrée. Et nous avions tort. Et certains, qui n’ont plus, eux aussi, 15 ou 16 ans, continuent de ne pas arriver à lire leur double décimètre.
Ainsi, le président de l’OCT, qui persiste obstinément, ne s’avance plus à donner des chiffres que nous savons fantaisistes mais se laisse aller à écrire, cette fois dans le dernier opus de sa revue, ce qui suit : "En effet, des essais réalisés en France sur deux toros à l’occasion d’une utilisation expérimentale à Beaucaire lors d’une imposante corrida de Victorino Martín permettent de vérifier que les blessures occasionnées par la pique andalouse sont inférieures d’un tiers à celles de la pique normale."
Edifiant, n’est-il pas ?
Alors, au-delà des réflexions proprement dites sur la nécessité de réformer ou non le tercio de piques, il nous semble que deux éléments sont intéressants à relever dans cette façon peu sincère de s’arranger avec la réalité ou plutôt d’arranger la réalité à la convenance de sa démonstration :
1/ Peut-être faudrait-il conseiller au président de l’OCT un bon ophtalmo car il peine réellement à lire son double décimètre.
2/ Nous sommes dans ce cas présent très loin de la rigueur scientifique qu’invoque le président de l’OCT à longueur de pages de cet opus 19. Il est entendu également que sa volonté de "poser objectivement" les termes du débat sur le tercio de piques paraît bien entamée au regard des faciles arrangements qu’il entretient avec les résultats scientifiques de la course de Beaucaire. Enfin, il paraît tout de même peu crédible d'appuyer une partie d'un raisonnement sur cette seule expérience (2 toros !) de Beaucaire. C'est d'ailleurs ce qu'exprime très bien Gérard Bourdeau, président de l'AVTF, dans son rapport fait à l'UVTF : "En conclusion, il fut très difficile, voire impossible de pouvoir établir une échelle de valeurs significatives, quant à l’utilisation des deux types de piques. D’abord, par le fait que nous ayons un échantillon trop petit statistiquement, 6 toros c’est vraiment peu. Ensuite, par le fait même que l’élevage de V.Martin ne soit pas des plus braves sous le fer, avec pour conséquence immédiate un délabrement musculaire moindre, et surtout un comportement pratiquement inchangé."
Comme nous en avons un peu assez de jouer avec le mètre de bricolage de papa, nous avons convoqué toutes les forces occultes de l’afición "ultra" méchante pour vous livrer sur un plateau les documents officiels des résultats des analyses de piques effectuées à Beaucaire en juillet 2008. L’ANDA a ainsi eu la gentillesse de nous communiquer le rapport officiel du vétérinaire ayant procédé à ces mesures. Si tout fonctionne bien, vous pourrez en prendre connaissance en cliquant sur les photos qui accompagnent ce texte.

L’équipe de "Camposymilimetros"