12 novembre 2005

Indulto


Notre complice Bastonito vient de se laisser aller à quelques réflexions sur les indultos.

Ce qu’en disent les professionnels taurins.
• L’indulto est une bonne chose, car les toros ainsi graciés peuvent ensuite se reproduire, contribuant ainsi à l’amélioration de la race.
• Peu importe la catégorie de l’arène où cela se produit, car, disent-ils, on ne sait jamais où va sortir le toro exceptionnel.
• Ils considèrent également, bien que ne le disant pas publiquement, que les indultos servent d’argument —argument des plus stupide — face aux antitaurins. On peut ainsi avancer que le toro a une chance de survivre s’il se montre brave et noble, comme si les toros avaient conscience, durant leur combat, qu’ils allaient mourir…
• Enfin, ils y sont favorables car il en découle une formidable propagande tant pour le ganadero que pour le torero.

Ce qu’en disent les aficionados.
Notons ici que ces positions ne font évidemment pas l’unanimité dans nos rangs, même si la majorité est généralement opposée à la généralisation de l’indulto.

Les toros graciés servent rarement de semental, car il est difficile de soigner les blessures occasionnées par les piques, ou bien parce que l’éleveur ne considère pas l’animal comme un « toro de vache », soit par ses origines soit par son trapío.

Le niveau de l’arène a son importance car le trapío diminue avec le niveau desdites arènes, et un animal au trapío de sardine pourra difficilement améliorer le niveau d’un élevage Et si un ganadero est suffisamment inconscient pour mettre un tel toro sur ses vaches, un prélèvement de semence à l’issu du combat sera bien suffisant pour ensuite pratiquer l’insémination artificielle.

Ce que les taurins ne reconnaissent pas c’est que l’indulto évite au matador de passer à la pointe des cornes pour la suerte suprême (le numéro avec la banderille ne pouvant remplacer pareille épreuve).
Le plus hallucinant venant ensuite par l’attribution systématique au matador des deux oreilles et la queue qui permettent de grossir immédiatement les statistiques personnelles de celui-ci et donne des titres du style « Charcuterito de Móstoles gracie un toro à l’occasion d’une tarde historique et devient prophète chez lui » sans que ledit toro ou son ganadero ne soient réellement associés à pareil événement.
Ne serait-il pas plus juste d’écrire alors : « Un toro de Críspulo Regúlez gracié à Móstoles » ?
Et ne parlons pas du premier tercio, où se mesure la bravoure, souvent limité au strict minimum.

Pour Bastonito, l’indulto devrait donc être associé à diverses conditions :
• Arène de première catégorie.
• Toro au trapío irréprochable.
• Que le toro prenne au moins trois piques dans les règles en poussant vraiment, sans accuser la douleur, ni donner des coups de tête, ni sortir seul.
• Le toro devra rester brave, noble (ce qui ne veut pas dire idiot) jusqu’à la fin de son combat.
• Ce sera au public de solliciter l’indulto sans que le matador ne le suggère par quelque gesticulation que ce soit.

Le travail du matador sera ensuite jugé, positivement ou négativement, en fonction de sa capacité ou de son incapacité a s’être hissé à la hauteur des qualités de son adversaire.
Les revendications de Bastonito, même si elles peuvent actuellement paraître ambitieuses ou irréalisables, n’ont pourtant rien d’extraordinaire.

D’ailleurs, Álvaro Domecq, favorable à l’indulto, écrivait, dans son ouvrage El Toro bravo, que cela devrait être envisagé seulement dans certaines arènes comme Madrid ou Séville, car dans des arènes de seconde catégorie nous aurions alors à faire à des toros imparfaits de constitution (taille, tête, etc.).

Dans la première édition de cet ouvrage, il indiquait également que le toro n’était toro qu’à 5 ans et pas avant, mais cela fut retiré des rééditions…