03 octobre 2011

Il était une fois une caisse en bois


D'aucuns hausseront les épaules, mais reconnaissons qu'il n'est pas, pour un aficionado lambda même curieux, évident d'approcher la caisse en bois renfermant les piques utilisées par les picadors. Les deux photos de Laurent Larroque publiées récemment («Fermée», «Ouverte») en montrent déjà beaucoup ; le texte de Marc Roumengou «À propos de piques et de butoirs»1 (extrait ci-dessous) a le mérite d'en dire davantage encore — si des empêcheurs de tourner en rond étaient tentés d'y voir un début de commencement de conflit d'intérêts2, ce n'est pas moi qui trouverai cela hasardeux... Enfin, toute personne désireuse d'apporter une ou des précisions sur le sujet (la caisse des piques, les piques elles-mêmes voire le «conflit d'intérêts») est cordialement invitée à le faire.

«Et puis il y a une chose très importante, mais généralement ignorée. Jusqu’en 1992, il existait un contrôle préalable des piques fait par les “parties prenantes” : éleveurs et picadors. Il avait lieu au siège de l’Unión de criadores de toros de lidia (UCTL) ; ensuite, chaque pique recevait une étiquette numérotée collée sur le tope, et un certificat de conformité, signé par les 2 parties, était placé dans la caisse (contenant 18 piques3), qu’une fois fermée on scellait par une bande de papier portant les sceaux des 2 organismes. Depuis le règlement espagnol du 27 février 1992, ce contrôle préalable n’existe plus.
Les caisses sont cerclées par le fabricant de piques lui-même, à l’aide d’une bande de papier fantaisiste qui ne signifie rien et n’a évidemment aucun caractère officiel. Pendant des années, il reproduisait les cachets des 2 organismes précédemment chargés du contrôle, les piques étaient étiquetées comme précédemment et la boîte contenait un certificat avec les cachets de l’UCTL (inexact d’ailleurs) et de l’Union nacional de picadores y banderilleros españoles : tout cela c’était des faux et usage de faux ! Le 15 janvier 2000, je l’avais signalé à Juan Pablo Jiménez Pasquau qui était alors président de l’UCTL ; je ne sais pas ce qu’il en est aujourd’hui hormis le fait que le contrôle préalable n’a pas été rétabli.
En Espagne, alors qu’auparavant le délégué de l’autorité devait avoir sur lui un gabarit pour contrôler les piques, le règlement de 1992 a supprimé celui-ci (en même temps que le délégué devenait gouvernemental). Donc impossibilité d’un contrôle aux arènes.
De toute évidence l’Union des villes taurines de France (UVTF) n’a pas encore connaissance de la disparition du contrôle préalable ! La preuve en est qu’elle prescrit toujours l’examen de l’intégrité des scellés de la boîte des piques et sur la présence du sceau (un seul et l’on ne dit pas lequel) posé par les “organisateurs” (organisateurs de quoi ? les 3 associations citées ne pouvant être qualifiées d’organisateurs).
Art. 62 :
Les piques seront présentées par l’organisateur au délégué de la CTEM avant l’apartado, dans une boîte scellée que celui-ci ouvrira. Elles ne serviront que pour une course et porteront, sur la partie entourée de corde, le sceau préalablement posé par les organisateurs compétents à savoir : «la Asociación de matadores españoles de toros y novillos y de rejoneadores, la Unión nacional de picadores y banderilleros y la Unión de criadores de toros de lidia».
[...] Conséquence de la disparition du contrôle préalable, nous rencontrons souvent — les vétérinaires de l’UCTL l’ont signalé lors de leur rapport de 1998 — des piques dont la pyramide d’acier a été trafiquée : faces de la pyramide plus ou moins creusées et arêtes concaves !» Marc Roumengou (juin 2008).

1 Un texte salutaire se terminant par ces lignes à valeur de manifeste : «Tant qu’un butoir efficace ne sera pas placé immédiatement après la pique proprement dite, tant que l’on ne sanctionnera pas sévèrement les picadors qui impriment un mouvement de marteau-piqueur à la garrocha, ainsi que ceux qui ferment la sortie au taureau (carioca), les blessures par pique continueront à pénétrer de 20 à 30 cm et plus dans le corps du taureau.» À bon entendeur...
2 Les premières lignes de l'article de Wikipédia énoncent qu'«un conflit d'intérêts apparaît quand un individu ou une organisation est impliquée dans de multiples intérêts, l'un deux pouvant corrompre la motivation à agir sur les autres.»
3 La caisse visible sur le second lien de ce post en contient 14 (NDLR).

>>> L'article 62 du règlement de l'UVTF peut être lu dans son intégralité en cliquant sur ce lien.

Images À Sangüesa © Laurent Larrrieu À Bilbao © Frédéric Bartholin