05 octobre 2007

César chez Pablo


Vous le savez, César Rincón a tué sa dernière corrida en France à Nîmes à l’occasion de la féria des Vendanges. Curieusement, et à l’exception d’une médaille de la ville remise, à la va-vite après le paseo, rien n’a été fait pour rendre hommage au Colombien.
Seule l’association Les Amis de Pablo Romero s’est montrée à la hauteur du bonhomme en organisant ce dont vous avez déjà eu écho ici.
Voici le texte lu à cette occasion par Gilles Gal, une des têtes pensantes de ladite association.

Dimanche 16 septembre 2007

REMERCIEMENTS
J.-C. Roux pour la conquête des photos auprès de Botán et les premiers contacts avec le maestro. Les photographes François Bruschet et Michel Volle, Botán et tous ceux du Club qui ce sont investis pour l’événement.

Maestro,

Bienvenu chez nous, bienvenu à la bodega « Les Amis de Pablo Romero ».
J’aime dire de nous que nous sommes une bande de fous, de « locos » pour avoir osé faire tout ce qu’on a fait jusqu’à aujourd’hui.

Et de vous, que dire de vous en quelques mots ?
En quelques mots : amour, tendresse, famille, passion de la vie, respect, tolérance, maîtrise, amour du travail, rigueur, courage, sincérité, optimisme, afición a los toros, intelligence... Intelligence ?

Ne fallait-il pas être un peu fou pour faire ce que vous avez fait les 21 et 22 mai 1991 à Madrid ?
Vous voilà après une belle saison 1990 mais dans un relatif anonymat, enfin programmé à Madrid pour la San Isidro.
Rendez-vous est pris : le 21 mai 1991 (première réapparition à Las Ventas depuis votre confirmation de 1984) et c’est le triomphe, vous coupez 2 oreilles au toro 'Santanerito' de Baltasar Ibán et sortez par la Puerta Grande.
Joaquín Vidal titrera dans El País : « César Rincón sube a los cielos ».

Le soir même on vous propose de remplacer un torero blessé pour la course du lendemain… Que fallait-il faire ? Accepter la proposition au risque d’un possible échec qui viendrait alors ternir le triomphe de la veille ? La refuser et conserver alors l’acquis du triomphe ? César Rincón double la mise et accepte.

Vous restez à Madrid et affrontez le 22 mai 91 les toros de Murteira Grave aux cotés de Ruiz Miguel et Espartaco à Las Ventas. C’est le quitte ou double. Madrid bouillonne... J’imagine l’ambiance à La Venencia à la uno y media de la tarde. Et c’est à nouveau le triomphe, 2éme Grande Porte en 24 heures.
Joaquín Vidal titrera : « Rinconistas a tope » (Rinconistes à fond).

Madrid vous propose alors, et cela semble normal, le cartel de la Beneficencia. En mano a mano avec Ortega Cano face a un lot de Samuel Flores.
Cette corrida est passée à l’histoire de la tauromachie. Vous sortez tous les deux a hombros avec le ganadero. C’est votre 3éme Grande Porte consécutive.
Le titre de Joaquín Vidal ? : « Memorable ».

C’était le 6 juin 1991. 16 jours ont passé depuis le 21 mai où bon nombre d’aficionados allaient aux arènes en se disant « ¿César Rincón?... Ah sí, pero... ¿Dónde?... Veramos... »

Dans un relatif anonymat, le 21 mai, voilà César Rincón à l’Olympe de la tauromachie le 16 juin.

Un peu moins de 4 mois plus tard, nouveau rendez-vous à Madrid pour la Feria de Otoño pour une corrida de João Moura aux côtés de votre témoin d’alternative J. M. Manzanares. Et… nouveau triomphe ! Vous sortez pour la quatrième fois consécutive par la Grande Porte de Las Ventas. C’est la grande émotion, énorme.
Joaquín Vidal titre : « La gran conmoción » et conclut sa reseña en disant de vous « Es el que tiene el toreo puro ».

César Rincón devient César de Madrid, à jamais.

1991 est votre année, l’année CESAR RINCON !

Cette même année, vous triomphez également à Mexico et vous vous présentez en France (à Palavas le 30 juin 1991) puis à Nimes le 22 septembre en mano a mano avec Joselito face à des toros de Samuel Flores.

Les années qui suivront seront un peu plus classiques pour un torero reconnu par tous comme l’un des plus grands. Vous êtes présents dans presque tous les férias, en Espagne, en Amérique du Sud et bien entendu, chez nous en France.

L’année 1992 sera la plus chargée de toute avec 83 paseos.

L’année 1994 sera marquée par le combat d’un homme et d’un toro, César Rincon et 'Bastonito', toro exceptionnel de Baltasar Ibán, à Madrid le 7 juin 1994.
Ce combat est dans toutes les mémoires. Les présents ont encore le pellizco.
Javier Villán, le chroniqueur du quotidien El Mundo, avait titré sa reseña : « Le triomphe du vaincu ».

Le reste ne se raconte pas, sauf sous la plume talentueuse d’un autre maestro : Joaquín Vidal.

Le 29 mai 1995, nouveau triomphe à Madrid. 2 oreilles à un toro d’Astolfi. C’est votre 5ème Puerta Grande.

L’année 2003 sera l’année du retour en bonne santé du Maestro César Rincón après 2 années d’absence pour raison de santé. Tout le monde s’en réjouit.

Comme on dit, en ce moment de Coupe du Monde, César Rincón monte en puissance au fil de son retour, pour triompher en fin de temporada chez nous, à Nîmes le 19 septembre 2003 face des Samuel Flores.

Le 23 avril 2004, il triomphe à Séville. Un triomphe très important pour la carrière du Maestro face au public sévillan qui jusque-là l’attendait…
Voilà : Séville : c’est fait !
Cette même année, il triomphe chez nous à deux reprises, le 29 février et le 18 septembre.

Le 19 mai 2005, Madrid. Nouveau succès. Ce sera sa 6éme et dernière Grande Porte à Las Ventas (toros d'Alcurrucén aux côtés d’El Cid et El Gallo).

Cette année 2007, le 24 avril, le jour de votre despedida, vous triomphez une nouvelle fois à Séville qui vous acclame.

Aujourd’hui Maestro, c’est à notre tour : vous nous faites aujourd’hui vos adieux…
Vos adieux de torero ; à Nîmes, à l’afición nîmoise mais quelque part, en cette fin de temporada, au public français tout entier. Et nous sommes nostalgiques...

Vous étiez et resterez un des toreros préférés du public français, le torero des aficionados.
Pour vos prestations toujours sérieuses et sincères, données dans toutes les plazas, sans faire de détails. Peu importe la catégorie, quand César Rincón est engagé, il fait son métier consciencieusement, du mieux possible, donne tout, paye comptant, con vergüenza !
Vous vous êtes toujours livré, engagé, toréant en respectant les fondamentaux que nous aimons, en respectant le toro, en nous faisant voir le toro, en lui donnant l’avantage, la distance….
Que vos "cites" de loin vont nous manquer ! Mais rassurez-nous, nous ne sommes pas prêts de les oublier. Votre toreo, « à la vergüenza torera incarnée » pour reprendre François, restera dans nos mémoires et serviront à jamais de référence.

Tout le public français à cette expression en parlant de vous « César Rincón paye comptant».
Et cela a payé ! Et c’est tant mieux !
Pour vos triomphes à Dax, Mont-de-Marsan, Bayonne, Vic-Fezensac (on se souvient d’un toro de Rocío de la Cámara), Arles, Nîmes, vous êtes et resterez le torero des aficionados français, quelque part... Le César de France !

A Nîmes, vous aurez toréé à 23 reprises, tuant 14 toros de Samuel Flores aux présentations le plus souvent dignes d’une arène de 1ère bien que Nîmes n'en soit pas une.

Maestro merci, merci pour tout ce que vous avez donné à l’afición, merci pour votre sincérité, pour votre sens de la lidia, pour l’amour que vous portez au toro et au respect que vous avez toujours eu envers les aficionados.

J’ai relevé une phrase dans une de vos interviews, que je voudrais rappeler ici chez nous à la bodega : « Pero insisto que el toro es el rey de nuestra fiesta brava ».

Maestro César Rincón, nous voulons vous dire merci et bravo, nous voulons saluer votre courage pour avoir comme vous l’avez fait, affronter le danger et combattu avec la plus grande sincérité, en payant comptant à chaque course, subi les douleurs de la blessure, affronté la maladie qui vous a fait souffrir et éloigné des ruedos pendant de trop longues années. A chaque fois vous avez eu la force d’affronter, de tenir, de croire, pour revenir... toujours avec l’envie, le respect, la sincérité, et votre sourire… dévoreur d’envie de vivre.

Nous vous souhaitons d’être heureux longtemps dans votre nouvelle vie qui commencera à la fin de cette temporada, de cette carrière exceptionnelle, mais vous nous manquerez.