18 août 2009

Je ne vous salue pas Marie


Quand il fait chaud en Espagne, il se trouve un moment entre 14h et 16h où l’ombre n’existe que dans les cathédrales. Il fait alors si chaud que vous pouvez bien aller vous réfugier dans le village d’à côté, c’est pareil.
J’ai laissé mes copains à l’ombre des géraniums et filé vers le sud voir les Conde de la Corte (corrida mansa), Cortijoliva (une vuelta al toro) et Alcurrucén (supérieurs).

Ce matin du 16 août 2009, il doit bien faire 60 degrés à onze heures sur un trottoir à l’ombre à San Martín de Valdeiglesias. J’ai repéré un cyber bistrot en face, je veux des infos et rassurer ma famille.
Je traverse la rue en courant pour ne pas me faire attraper par le soleil.
Le cyber machin est tenu par une gitane avec laquelle je connecte immédiatement pour faire le tour de ma messagerie, les infos…
Sans sommation, je suis intercepté par cette image du Fundi au sol, les yeux grands ouverts, immobile, durant deux secondes je le crois mort, lui, le Fundi, mon icône. Le seul Torero de l’escalafón qui soit cramé de soleil, de campo, de cheval et de Toros. Le recordman des prix Popelin, l’aigle impérial de la Sierra de Gredos.
Et je clique sur la petite flèche à l’écran qui m’envoie la vidéo : Padilla qui prend un brin, et le Fundi d’abord « aux abris » dans le cou du Toro, la chute verticale, l’immobilité tragique.
Je ferme la connexion, règle 54 centimes à la caisse où je remarque un petit panier rempli de gros sel sur lequel sont posées des gousses d’ail.
- C’est quoi ça Madame ?
- Contre le mauvais œil.
Authentique…
Me revoici sur le trottoir, il fait au moins 80 degrés… Je m’en moque, je l’ai mauvaise. Hier, quinze août, jour de l’Assomption, la Vierge est partie prendre le frais et fêter son anniversaire avec des copains à St Sébastien et elle a préféré le Stade d’Anoeta et le but de Kaka au Tuperware d’Illumbe et elle n’a rien fait pour le Fundi. Marie, il faudra que nous ayons une discussion...
Cenicientos, il est Alcurrucén moins 130 minutes, à la terrasse d’un micro hôtel taurin, je tombe sur un apoderado qui vient de Roquefort et qui repart à Dax dans les bagages de Javier Cortés. On parle du Fundi.
Alcurrucén moins 80 minutes, à la peña Fuerte Movida, ils préparent leur concours annuel du plus gros mangeurs de yoghourts (!). On parle du Fundi.
Alcurrucén moins 35 minutes, je retrouve les Catalans de Céret, on parle du Fundi.
Alcurrucén : depuis trois ans ici, un élevage qui fait peur. Toujours encastés, parfois braves, deux Toros de vuelta ce soir-là. Les piqueros anticipent, partent vers le Toro, franchissent les 2 lignes pour réduire la distance et s’éviter un batacazo. Des toros de cinq ans souvent, un de presque six ans. Le tamaño est très sérieux. Deux Toros de vuelta, des piques assassines, de la bravoure et une solidité à toute épreuve. Trois années consécutives… troublante régularité.
A 19h, il ne fait plus que 70 degrés, on respire. J’ai une voisine de barrera, une mamie, son sac est rempli de latas de Kas naranja, Coca et Sprite. Les cuadrillas n’hésitent pas à faire le tour complet pour s’approvisionner et pour la saluer. Quand elle n’a plus de munitions elle en achète au distributeur itinérant. En bas c’est la guerre, surtout aux banderilles. La mamie logisticienne redouble d’efficacité, je n’ose pas lui demander si elle vient de Nazareth.

García Gimenez moins 22 heures, départ vers Bilbao en écoutant les noticias dans la nuit sur l'"août-ovia". On n’y parle pas du Fundi mais du Fandi qui va « susti-touiller » Morante de la Puebla. Trop tard, nos billets sont réservés. A Bilbao il fait si chaud qu'ils ont sorti le Txirimiri, sorte d’immense brumisateur dans le ciel capable de fonctionner même quand il ne fait pas chaud. Il est facile d’avoir des infos de qualité à la Federación Taurina de Bizkaia : le Fundi est rentré chez lui (ouf !) et les débuts de Bonijol sont salués ici comme un progrès attendu. L’empresa française est venue avec huit chevaux dont Kings, Icono, Pacha, Moise…
Autre innovation, un prix à la meilleure pique de la Féria sera décerné par un jury d’aficionados (un peu comme à Orthez !).
Les garcía jiménez n’ont pas mis en valeur les chevaux français, manque de poder malgré un batacazo davantage à charge du cavalier. Corrida encastée, parfois brave mais toujours à la limite de l’acceptable en terme de solidité. Impeccable función du Juli. On reviendra en fin de semaine.
Alain Bonijol, ici, à Bilbao, presque une satisfaction personnelle, on a bouffé du Fontecha si longtemps qu'on pourrait bien chanter la Marseillaise dans les gradins.
Mario 'El Ubano' Tisné