Si t'as pas vu la peau rouge de l'Alcurrucén sur le charbon de Bizkaia, difficile de t'expliquer ce qu'est la peur.
Le Parladé de toutes les "flippes", le Núñez de tous les remords, celui qui fait regretter, amer, cette seconde où t'as basculé pour devenir cet être suprême qui se sape de lumière à l'heure où l'autre, le terrien, enfile le short de plage. Ouais, l'ami, c'était sans compter sur ce foutu Núñez d'Alcurrucén, ce terrible enfoiré, fusion aboutie des clans Villamarta, et Rincón. Pourtant tu les as aimées, ces putains de bestioles éventées comme des "Ducros" de supermarché, quand tu rêvais LA faena meringuée, 1000 fois récitée à poil dans ta salle de bains, avant que de te voir con dans la glace. Pardi, cet Alcurrucén niaiseux comme un labrador te faisait frétiller, avec sa pénible caste carambar.
Foutaise, tu peux d'ores et déjà plier tes souvenirs de morveux à l'arrière du Berlier. Le Núñez que j'ai vu là, est devenu beau gosse, un vrai tatoué, même, et faudrait voir à pas lui causer dentelle, en plus. En fait, il se pourrait que les Lozano, dans leur vision "début de siècle", se décident à remettre les pendules de la Grande Caste, à l'heure. Les points sur les I, les gourmettes aux poignets, avec du plomb dans les mâchoires, s'il te plaît !
D'abord, ce toro est un cadeau pour les rétines : peau de feu sur morrillo en colline de Chalosse à l'heure de la moisson, croupe de teutone euphorique en plein "Oktoberfest", truffe en l'air, bave fumante, et pointes vers les cieux comme des dents en cors de chasse de pachydermes sibériens... Oh, mon Dieu, les pitones de l'Alcurrucén !!! Pas de bol pour les timides en baston, ce tonton-là a changé de partoche, et la musique qu'il joue ne va plus bien aux sensibles...
Sur le frontal velu de l'énergumène, tu peux lire désormais : ici, un fou de castagne ! Un pec de pets, de pignes et de patacs, de pam, de pum et de pif paf ! Bref, qu'on se le dise, Monsieur ne prend plus de rendez-vous mondain. Fougue fulante et rage à vif, ça court, ça tape et ça tempête ! Tronche vers les astres ou au ras des pâquerettes, coup de tromblon à tous les étages et gare à toi, minot, si t'as pas chaussé les 18. Ça pourrait voler épais, et tomber gras, pour fracasser sévère, comme en pluie de ferraille poudreuse dans un champ de la Somme, comme un coup de cornasse en pleine gueule ! T'inquiète, fiston, les 15 cm dans la guibole, c'est offert par le patron !
Je jurerais que les 3 fadas désignés pour cette mise en bouche à la mode bilbaína en parleront encore dans 150 ans, avec des grelots dans la voix et des tambours dans le teston, pour saupoudrer le tout. Je te le dis, je n'ai jamais vu tant de trouille derrière les mèches de chacun. De lumière, d'argent ou coiffé d'un castoreño, le doute, la peur, les remords, et une vibrante envie de se chier dessus, tout y était, car le toro d'Alcurrucén 2010 est un costaud, amigo, moulé dans la plus pure tradition de la Caste bouillante, de la Race vive, âpre, sèche et rêche qui fait d'un Toro, un Tío, d'un Toro, un Tihut, d'un Toro, un Toro.
Pour la partie sucrée, on coupa, ce jour-là, 1 grosse oreille grasse et velue, voire 2 ou 3 ou 4, si la guigne n'avait plongé le museau dans cet hymne aux tatoués et aux fortes têtes. L'on retiendra donc, qu'au final, qui veut toréer, coupe, SURTOUT, si Môssieur invite à l'acte torero.
Il reste une paye avant que ces diables rouges extremeños ne buvardent la douloureuse légende Miura, ou le prestige "lounge" des Albaserrada du père Martín, et sans doute qu'on nous servira ici et là encore un peu de cette charge "jambon purée" qui faisait rougir la haute futaille du toreo, mais il se trouve que les frangins Lozano ont déterré une pépite toristissime de leurs cercados de Navalmoral de la Mata, et ils savent bien, eux, que tout ça est bouffé d'une Caste folle, de celle que seuls les élus, les Toreros "qui veulent bien toréer" auront la courtoisie de croiser de près. Et si les noces de plomb se célèbrent sur le sable, alors on admettra volontiers que c'est déjà plutôt burné.