Il existe un débat qui agite souvent les spectateurs de courses de taureaux (au sens le plus large du terme). La question est de savoir si la connaissance de la généalogie des encastes et du comportement des taureaux, d’une part, et de la technique de ceux qui les combattent, d’autre part, est indispensable pour être aficionado.
Il s’agit d’une question importante, primordiale même. Car c’est à mon sens ici que réside le principal mal de la corrida : l’ignorance d'une large majorité des personnes qui assistent à ce spectacle.
La réponse à cette question ne souffre à mon sens aucune contestation : oui, même si cela peut-être vécu par certains comme un effort (largement récompensé), il est indispensable de comprendre toutes les phases de la corrida pour en apprécier l’essence et ne pas s’ennuyer ferme sur les étagères neuf fois sur dix.
A qui la faute si la corrida en est arrivée à ce niveau navrant, en particulier en ce qui concerne l’état lamentable de la cabaña brava ? A nous, public, et à personne d’autre. On pourrait incriminer les organisateurs, mais ceux-ci ne font, pour la plupart d’entre eux, que ce que les matadors leur dictent. On pourrait incriminer les matadors, mais ces derniers ne cherchent à accomplir que ce qui leur permet de triompher, en limitant les risques qu’ils prennent autant que faire se peut. Et qui fait triompher les matadors ? Nous, le public.
S’il est de la responsabilité de la presse spécialisée et des clubs taurins et autres peñas de contribuer à l’éducation des aficionados, c’est à nous qu’il appartient, au premier chef, de tenter de mieux comprendre et connaître ce monde qui nous fascine. Cela implique en particulier de se documenter sur les taureaux qui seront combattus afin de connaître leurs origines, leur comportement et leurs différentes morphologies afin de confronter nos connaissances ainsi acquises à la réalité qui s’étale sous nos yeux dans les ruedos. Ce simple exercice, source en lui-même d’enrichissement et d’épanouissement, permet en outre dans bien des cas de rendre moins ennuyeuses un grand nombre de courses. Or il paraît évident que plus le nombre de ceux qui s’y livrent grandira, et plus les exigences du public en matière de qualité et de diversité du ganado seront élevées. Et je ne laisse pas de croire – peut-être, compte tenu des méfaits parfois irréversibles causés par la modernisation de la corrida, dans un excès d’optimisme naïf – que ces exigences plus largement partagées auraient des conséquences non négligeables sur les choix effectués par les empresas et le comportement adopté en piste par les toreros.
Il suffit pour s’en convaincre d’aller à la rencontre des derniers ganaderos romantiques qui peuplent les terres de toros (si, si, il en existe encore), qui contre toute logique et contre vents et marées continuent d’élever des animaux que personne ou presque ne veut plus combattre, ni, ce qui est plus grave encore, voir combattre. Les plus acharnés d’entre eux – ou les plus fortunés – poursuivent leurs efforts pour la conservation exclusive d’un encaste ou d’une rama quasiment éteinte ; d’autres, pour survivre, sont contraints de créer une seconde ligne aux origines plus « commerciales », à défaut de laquelle il ne leur resterait plus qu’à jeter leur fer au fond d’un puits. Nous tenterons modestement, dans les prochaines semaines, de vous faire partager ces rencontres.
Les maux dont souffre la Fiesta sont malheureusement le reflet de notre temps ; on retrouve en effet les mêmes causes et les mêmes effets dans la plupart des disciplines, arts et spectacles. Mais notre époque a au moins cela de positif qu’elle permet précisément d’acquérir avec une facilité qui eût parue déconcertante à nos aînés ces connaissances nécessaires pour mieux appréhender notre passion. Le travail réalisé avec talent et acharnement par des aficionados totalement désintéressés, dans le seul but de partager, mérite, dans cette perspective, que l’on s’y attarde quelque peu. Nous vous invitons donc fortement à consulter régulièrement le site http://www.terresdetoros.com/ sur lequel de nouvelles mises à jour sont à attendre prochainement.