Vic est la même.
Ici aussi les tercios de piques sont bafoués, ici aussi des présidents écourtent sans raison les tercios de banderilles, ici aussi des vueltas al ruedo incompréhensibles il y a de cela dix ans sont octroyées dans la ferveur populaire. Ici aussi le public hurle contre le sabot d'un cheval qui dépasse une raya pour piquer un manso, ici aussi on applaudit un piquero qui vrille dans une épaule et cite de profil. Ici aussi les matadors ne mettent pas correctement en suerte (doux euphémisme), ici aussi on te répond « Ta gueule ! » quand tu forces les décibels, de dégoût. Ici aussi. Vic est la même. Ici aussi on lance des pétitions depuis le callejón, ici aussi les peones baragouinent à tue-tête leurs conseils avisés à des toreros déconfits (Juan Bautista), ici aussi tu enlèves le bouchon de ta bouteille d'eau de 33 centilitres en entrant aux arènes, ici aussi il faut des toreros français parce que c'est chez nous, ici aussi les cornes sont parfois éclatées, ici aussi...
Vic est la même.
Mais Sergio Aguilar a toréé, le bras devant, la muleta planchada, la jambe avancée dans un terrain qui ne lui appartenait pas. Mais Alberto Aguilar a toréé, bourré d’envie et de joie d’être là, face aux cornes du toro ; il a lidié, mis la jambe et le bras. Mais Rafaelillo s'est joué la vie devant un tonton de Victorino. Mais El Pimpi a toréé, lui aussi, essayant de bloquer par la droite un mulet d'Alcurrucén puis de le piquer à proximité du toril. Essayant, car Vic est la même et ici aussi ça hurle quand un sabot dépasse. Nous l'écrivions plus haut. Mais le Dolores Aguirre était encasté. Mais 'Canario' de José Escolar Gil l'était aussi, et même sacrément.
Mais. Parce qu'il faut des « mais » quand la déception est forte de ces Palha certes pas inintéressants ni mauvais mais sans force ni rage aucune ; cette force et cette rage que nous étions venus chercher, car il n’y a plus guère que chez le Lusitanien et de rares autres ganaderos que nous avons quelque chance de les rencontrer. Parce qu'il faut des « mais » pour supporter le carnage des piques, les passes de châtiments qui n'existent plus et cet hymne du Sud imposé et contraint que ne connaissent même pas les hordes de festayres de moins de vingt ans en uniforme elles aussi. Elles s'en moquent, elles ne vont pas aux arènes.
Ici aussi, l'uniforme et l'hymne. Garde à vous !
Laurent Larrieu & Yannick Olivier
>>> Toutes les galeries de la féria de Vic 2010 sont en ligne sur le site à la rubrique RUEDOS.