Pour les fidèles, rien d’étonnant, mais autant avertir l’aficionaute de passage afin de lui éviter deux types d’égarements, celui de perdre son temps ou de se perdre en conjectures.
Qu'elle soit classique, mexicaine ou andalouse, à faces concaves ou convexes, qu’il s’agisse de tienta ou de regatón, tout ce qui de prêt ou de loin se réfère à la tranchante pyramide éveille notre curiosité.
Bref, qu’on se le dise, la pique, c’est notre dada !
Il suffit pour s’en convaincre de cliquer ici. Vous constaterez alors à quel point ce sujet passionne l’ensemble des chroniqueurs de Camposyruedos.
La défense du premier tiers est essentielle pour l’avenir de la tauromachie. Tout simplement parce que le tercio de varas, c’est le moment où tout commence, où se révèle la bravoure, parfois même le poder, la force brute, la puissance animale. C’est le moment où, souvent, par la faiblesse des bêtes ou l’indigence des hommes, tout finit. Ne nous y trompons pas, si le premier tiers venait à disparaitre, comme le souhaite tout haut JP Domecq et le pensent tout bas de nombreux autres, c’est tout l’édifice taurin qui vacillerait sur son socle. Le Toro de lidia, littéralement de combat, doit se comporter en bravo, en sauvage, en fauve car sa combativité est une caractéristique fondamentale dans l’alchimie des valeurs qui composent la caste. A trop forcer la nature, on oriente le Toro vers une mutation édulcorée, exclusivement axée sur la noblesse. On le transforme en faire-valoir tournicotant autour d’artistiques toreros. Une fois métamorphosé, au mieux, en partenaire, au pire, en collabo, il est gracié.
Cette épidémie d’« indultite » aiguë gagne de saison en temporada nivelant par le bas les valeurs tauromachiques, semant la confusion sur les gradins et maintenant l’illusion que dans une arène tout se vaut... Pardon, tout ce veau !
Si le premier tiers disparaît, c’est le Toro Bravo qui s’efface et la tauromachie y laissera son âme. Le débat n’est pas nouveau mais nécessite que l’on y revienne régulièrement pour être immunisé. En guise de vaccination, une pique de rappel livrée à votre sagacité sous forme de traduction.
Commentaire d’une gravure de Perea parue dans la revue LA LIDIA sous le titre, Picar en lo alto, en date du lundi 27 août 1900.
"C’est à peine si hormis les illustrations on peut encore voir de belles piques, ces grandes piques placées entre les épaules, ces piques où les cavaliers, en accord avec les principes qui régissent les bonnes pratiques du toreo, visent juste, obligeant l’adversaire à plier le cou, à aller de l’avant, jusqu’à ce qu’il cède en abaissant la tête sans prendre pour autant de mauvaises manières, ces piques qui permettent de régler le mouvement de l'encolure tout en modérant la rudesse de la bête, rendant possible le déroulement du combat lors des tiers suivants.
On ne voit plus souvent cela dans nos amphithéâtres comme c’était le cas en d'autres temps. Aujourd'hui, la grande majorité de ceux qui se destinent à piquer les taureaux sont certes d’excellents et robustes cavaliers, ne manquant pas de courage, mais ils ignorent tout de leur art comme du bétail avec lequel ils doivent constamment composer.
Car on ne peut réduire la suerte de varas à un puyazo très appuyé, il faut aussi faire preuve de savoir-faire, connaître le bétail, son comportement, ses querencias, afin de choisir où se placer, dans les terrains offrant l’avantage, là où l’on est le plus efficace et le moins exposé en cas de chute.
On pourra toujours objecter que la plupart des chevaux ne sont pas appropriés à la mise en valeur des cavaliers. Cependant, pour y remédier, il existe l’examen des montures, mais cette opération qui se déroulait auparavant en présence des autorités et des matadors de la course n’est plus actuellement pratiquée en bonne et due forme.
De nos jours ces épreuves ont un air angélique, mais plutôt que de sélectionner les chevaux résistants, possédant de solides appuis, une bonne bouche et dépourvus de tares, elles se résument en arrangements entre fournisseurs et cavaliers.
Ainsi donc, il n’y a rien d’étonnant à ce que ces puyazos mémorables qui firent la réputation de tant et tant de picadors consciencieux ne se voient plus désormais, en règle générale, que sur les planches des journaux. La tauromachie en est rendue à cette extrémité."