Ce matin de mai 1996, dans les corrals des arènes de Madrid, un toro noir de Murteira Grave fait de la résistance. Obstiné, têtu au-delà du raisonnable, il refuse toutes les invitations à aller plus loin que la cour où le public le contemple. Eventuellement repartir en arrière, mais certainement pas avancer. Les minutes paraissent des heures et l’on se dit que l’après-midi, dans cinq ou six heures, il sera sans doute épuisé de tant d’acharnement, évidemment très manso, sans doute dangereux, et en tous cas très mauvais.
Il n’en fut rien. Ce fut le meilleur de la course, et Luis Ortiz Valladares, Luis de Pauloba sur les carteles, le toréa comme dans un rêve.
Nous étions heureux, et nous nous disions que pour le fin torero d’Aznalcóllar c’était, enfin, la fin des galères. C’est ce que nous avons pensé, jusqu’au moment de l’estocade, jusqu’à ce que les pinchazos se succèdent, désespérément. En conséquence de quoi Luis de Pauloba n’est sorti de nulle part. Demeurent l’admiration que nous avons pour lui et le souvenir de ce jour de mai.