20 juillet 2013

Tout bien réfléchi


Un texte de Laurent Giner nous parvient…

Céret 2013… La réussite tient à peu de choses. Après les férias de 2010, 2011 et 2012, nous pensions que l’avenir était assuré. Le niveau des courses cérétanes dépassait toutes nos espérances. Nous avions l’impression d’assister tous les jours à une corrida concours. Les maestros et les picadors jouaient le jeu. Hormis quelques varas mal placées, le niveau était largement au-dessus de la moyenne, beaucoup plus élevé que dans les autres plazas françaises ou espagnoles. Que s’est-il donc passé lors de l’édition 2013 ? Pourquoi des premiers tiers aussi mauvais alors que 50 % des picadors étaient présents en 2011 et 2012 ? Sont-ils tous devenus mauvais, subitement ?

Personne ne peut y croire, mais tout le monde l’a constaté. Pour preuve, nous observerons que la majorité des prix dévolus aux picadors sont restés desiertos. 

Pour comprendre ce qui va suivre, il faut savoir que l’Adac exige, depuis toujours, que ses toros soient piqués avec des piques espagnoles réglementaires, celles fabriquées par le puyero García. Ce qui oblige la cuadra de caballos engagée à Céret, à louer les caisses de piques au fabriquant espagnol.

Lors de la dernière tertulia, dimanche soir dans les arènes, c’est Bernard Raviglione, président de l’Adac, qui a ouvert la réflexion.

Pendant la discussion, nous avons appris que des picadors étaient montés au créneau, dès le matin, afin de pouvoir piquer avec la pique Bonijol. Après recherche et investigation rapides, il s’agirait notamment de Gabin Réhabi, le picador arlésien. Étonnant de la part de ce garçon réservé, presque timide, de vouloir imposer sa loi aux organisateurs cérétans. Ou alors peut-on imaginer que d’autres personnes l’aient poussé à se rebeller.

Mais, au fait, Gabin n’est-il pas le plus beau fruit de la cuadra Bonijol ? Et là tout s’enchaîne, tout s’explique. Les picadors ne sont-ils pas devenus les moyens de pression des fabricants de puyas, qui les utiliseraient pour conserver leurs parts de marché ? Céret en a été le meilleur exemple. Pression du puyero García via certains picadors face à la pression du puyero Bonijol et de ses amis proches. Résultat pour nous, aficionados, et pour l’Adac : une très mauvaise féria au regard du premier tiers.

L’Afición n’a pas à subir les problèmes des marchands du temple taurin, et les aficionados organisateurs méritent un plus grand respect.

L’ANDA, qui s’était réveillée en décembre dernier afin de faire réagir l’UVTF , ne s’était pas trompée. Qu’a fait cette dernière depuis ? Nada. Pourtant, il ne lui coûterait rien de mener une analyse comparative des différentes piques. Si ce n’est la volonté de le faire…

Après l’utilisation de la pique espagnole, de la pique andalouse, de la pique Bonijol ou de la pique Heyral, nous avons eu droit, ce week-end, à la « pique cérétane ». En effet, cerise sur le gâteau, afin de satisfaire son client, M. Bonijol a équipé ses propres piques du cordage dont elles sont habituellement dépourvues pour les rendre semblables aux piques officielles. En tant qu’assesseur au palco, dimanche après-midi, j’ai pu le constater moi-même en procédant à l’ouverture de la caisse des piques. En termes polis, on appelle cela « pousser le bouchon un peu trop loin ».

Ceci dit, Bonijol et García ont raison. N’étant pas des philanthropes, ils profitent d’un vide réglementaire. Celui qui effectue le meilleur lobbying décroche la timbale ! Pour l’instant, les empresas Bonijol et Heyral ont l’avantage, car elles fournissent aussi la cavalerie.

Le drame, c’est que personne ne met en place les analyses comparatives. Même l’ADA de Parentis, alors que son représentant à l’UVTF était contre, s’affiche maintenant pour la pique Bonijol. 

L’UVTF, grâce à son président convaincu, laissera pourrir la situation jusqu’à ce que soit validé un état de fait quasi généralisé.

Si les petites arènes comme Céret, Vic-Fezensac, Orthez, Parentis-en-Born, Roquefort, Saint-Martin-de-Crau, Alès… ne se mobilisent pas, il ne faudra rien attendre des grandes plazas.

Messieurs les organisateurs aficionados, prenez les choses en main. L’Afición compte sur vous. Nous voulons des analyses concrètes afin de pouvoir remettre à l’UVTF un rapport complet.

Laurent Giner


Photographie Gabin Réhabi, Céret de toros 2013 — JotaC