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19 septembre 2013

Le saviez-vous ?


Le Landais est gueulard. Bon, ça, vous le saviez. Dans les arènes, autour d’un stade, au bistrot, mais sur les champs de course, le saviez-vous ?

Eh bien autour des champs de course, aussi. Il n’y a guère que perché sur sa palombière qu’il soit à peu près calme.

16 juillet 2013

Dans Gascon, il y a con, mais pas que


Entre le tournoi de pétanque patati-patata et le concours de pêche à la ligne tagada-tsoin-tsoin, j’apprends au détour de l’info po-po-poh Sud Ouets ts-ts-ts, que quatre toros de Núñez del Cuvillo « Aïe aïe aïe ! Ouille ! Aïe aïe aïe !* » sur six, se sont retrouvés par hasard, ce matin glin-glin, dans les corrals de la préfecture landaise, aux senteurs de féria la-la-la, sans y avoir été invités… « Crac boum huuuuuu* » ! 

On y dit que dame Guenièvre a, d’un coup, pour soulager son courroux, réexpédié sans attendre le convoi et les présents pas souhaités au marchand de bétail peu soigneux dans ses bons de commande, et l’on découvre au passage que deux ou trois noms glorieux et de grande lignée pourraient ainsi avoir convaincu le maquignon de procéder à quelques revirements anodins dans le menu, préférant, aux kilos et aux armes, des camarades plus festifs.

On devine un peu les termes de la rançon et de l’échange, et l’on imagine alors d’autant mieux aisément que dame Guenièvre n’ait que peu goûté au fameux sens de l’humour de nos trois ou quatre compères ibères et de leurs visions des choses plus « sociales », mais on soupire fort à l’idée que ces trois-là aient finalement dû abdiquer et admettre qu’ils auront donc bien à palabrer avec les invités initiaux sinon rien, leurs quatre remplaçants n’étant ni du goût de la baronne ni de celui de ses conseillers, encore moins de celui de ses sujets.

De cette anecdote, il fut entendu que la valeur d’un individu ne se mesure pas seulement aux broderies d’or cousues sur le revers de son veston et, bien que l’on sache déjà qu’il ne se fût agi là que d’un bête malentendu, d’une banale mégarde ou d’un inopportun moment d’inattention, nous nous associons vivement à la démarche des élus locaux et espérons d’ores et déjà que le peuple du fief en question aura pris acte de l’événement, et qu’il saura se souvenir de cette tentative de surpercherie au moment où les trois zozos défileront, de toute leur morgue et de toute leur fierté combattante, sur le sable du champ de bataille landais. 

Et tiens, tant que j’y suis, si cela peut aider ces quelques sagouins à se souvenir que, même si l’on est des couillons de Gascons, on ne l’est pas tant que ça non plus, NOUS VOUS PRENONS AU MOT DE LES ACCUEILLIR EN LEUR TOURNANT LE DOS, SUR L’AIR DE PAN Y TOROS, DEPUIS LES TENDIDOS, LE TEMPS D’UN PASEÍLLO !… Poil au dos !


* Extraits, respectivement, des chansons Les Cactus et Les Play-boys, de Jacques Dutronc. 

30 mai 2013

Puntilla vide son sac (de Tarbes)


Gascogne !

Reine couronnée des Pyrénées, orgueilleux rempart adamantin fort de ses imprenables citadelles cathares ! Souveraine alanguie parée de ses verts atours, elle se prélasse dans les rondeurs du Gers. Coquette embaumée des entêtants parfums de ses forêts de pins, se heurtant à l’embrun de la vague marine quand elle devient les Landes, la Gascogne est une belle femme brune dont l’œil par sa franchise étonne. Et je l’aime !

Je vous entretiendrai de la gastronomie de ce pays béni de Bacchus, car naquirent en ces terres généreuses tant de mets simples et roboratifs, dont l’efficacité nutritive n’a d’égal que la délicatesse en bouche et le raffinement des arômes. La glèbe gasconne dispense généreusement à ses enfants les bons produits de ses seins ronds et fermes ! Ces fruits si judicieusement accommodés, dans ce merveilleux plat nommé garbure dans l’idiome local, ont permis à cette race fière de mettre au monde des enfants dont le corps, à défaut d’être mince, ne laisse pas d’être vigoureux !

Cadets de Gascogne, hommes de cœur (de canard), gloire aux cochons au fin fond des bauges ! Aux Normands la crème, aux Gascons le canard dont la graisse est à elle seule un onguent, une panacée ! Et que dire du ragoût de carcasses ou des cœurs de canards frits dans la graisse de leurs ex-propriétaires et mangés de bon matin accompagnés d’un viril madiran ! Miam, slurp et diététique !

Il y a des vaches aussi, en Gascogne. Des vaches toutes noires venant d’Espagne, car les Gascons n’élèvent traditionnellement que des oies, des cochons et les désormais célèbres canards — dont on se repaît du cœur avec un tord-boyau appelé madiran les matins de becerradas. Elles sont sympas leurs vaches ! Ils leurs collent du chatterton sur les cornes, les attachent avec une corde et font sauter par-dessus leur échine, lors de cérémonies appelées « course landaise », des prix Nobel gavés de cœurs de canards au madiran. C’est très pittoresque.

La Gascogne aime aussi les toros ! Des toros tout noirs qui viennent eux aussi d’Espagne, bien que quelques ploucs locaux — moustachus ou pas — tentent aujourd’hui de les élever eux-mêmes. Des toros que l’on combat selon des règles naturellement ibériques dans des lieux appelés « arène » et prévus à cet effet. Ces fêtes sont célébrées lors de manifestations culturelles : les férias. Elle ont généralement lieu au cours de la belle saison, dans les mégapoles des Landes, du Gers et du Pays basque : Dax, Vic-Fezensac, Bayonne et, perle des Landes, Mont-de-Marsan.

À ces occasions, le peuple gascon, délicat et mesuré à son habitude, déguste le petit doigt en l’air des litres et des litres de pastis et de madiran — ce vin qui fait peur aux comptoirs les plus aguerris. Nadine de Rotschild n’a qu’à bien se tenir ! Pour le non-initié, il semblerait que le but du jeu consistât à vomir partout des cœurs de canards et de la garbure. C’est aussi pour l’ethnosociologue amateur l’occasion de croiser des rugbymen déguisés en vahinés ou en danseuses étoiles, ce qui n’a de cesse de ravir l’âme de l’esthète sommeillant en chacun de nous…

Les mégapoles de moindre importance apprécient elles aussi ces manifestations de la belle culture gasconne, mais se contentent d’organiser des becerradas ou des novilladas piquées lors de leurs fêtes votives. Captieux, Aire-sur-l’Adour, Maubourguet… Nul n’échappe aux cœurs de canards, au Grand Repas de l’Afición et à la peña les Armagnacs. Cette belle coutume a en Gascogne ses hauts-lieux et ses chapelles, car le peuple gascon n’est pas monolithique en afición a los toros.

Il y a, en revanche, un sujet faisant consensus chez les indigènes de la région : le « Parisieng » ou « Lutécieng » (prononcer avec mépris). Je ne me suis jamais très bien expliqué l’acrimonie particulière que certains autochtones de cette si riante région française nourrissent à notre encontre, nous, résidents de la Capitale du Monde, la Belle, la Somptueuse Paris ! Je n’en sais pas bien long sur les origines de cette haine recuite, et l’ignorance dans laquelle je demeure contrarie ma curiosité scientifique naturelle et inextinguible. J’ai bien tenté, à diverses occasions, d’élucider cette énigme anthropologique, usant d’une diplomatie que m’aurait envié un Claude Lévi-Strauss apprivoisant le Jivaro l’ayant traité de « p’tite tête ». En vain !!!

Mais les faits sont les faits, et les faits sont têtus : on ne nous aime guère en ces rugueuses contrées et l’on nous déteste à coup sûr lorsque l’on a le mauvais goût de se piquer d’afición a los toros. En effet, seul le Gascon est à même de comprendre et d’apprécier le combat des taureaux à sa juste valeur. Plus Espagnol que l’Espagnol, il y a le Gascon ! Même si la corrida est un produit d’importation somme toute récent entre Adour et Midouze, lui seul, valeureux Gascon, est habilité à se rendre aux arènes en toute légitimité. Même son congénère, le Sudestien, n’a pas à ses yeux les capacités requises pour appréhender comme il se doit le noble art de trucider un taureau entre 18 h et 20 h.

Aux yeux du Gascon, le Chevalois n’est bon qu’à regarder des mecs en blanc se faire courser par des taureaux privés de leurs attributs, alors un Parisieng !… pensez-vous ! Le Parisieng, ou Lutécieng selon les chapelles, a pour le Gascon de base été initié à la tauromachie par Canal+ dans les années 90, s’est aguerri dans les arènes de Nîmes (2 h 30 de Paname en TGV) et dénature par sa présence incongrue l’homogénéité d’un public local savant autant que sobre.

Afin de vous en convaincre, je me permets de vous citer quelques paroles viriles d’aficionados gascons glanées récemment sur le Net, en général, et sur ce merveilleux forum qu’est la Bronca, en particulier :
« Quant aux Vicois, l’ambiance est sympa à l’extérieur des arènes, mais à l’intérieur il est difficile d’exprimer son mécontentement quand une corrida concours se transforme en corrida de banderilleros… Je ne parlerai pas de "canalplusisation" [sic] du public, mais plutôt d’une "parisianosudestisation" [re-sic]. » — Thierry R.
« Les Lutéciens connaissent la taureau machie ??? » — Laurent L.
• « Mais Dieu que la corrida devient tristounette avec cet afflux d’aficionados culture Canal+, disions-nous il y a quelques années. » ; « Bravo les Parisiengs pour cette observation nationale de la culture taurine… virtuelle… en attendant Céééreeet… » — Roger M.
Etc., etc. Je n’invente rien !

Bien entendu, lorsque nous avons le bon goût de nous déguiser en portefeuille, les mains se tendent, les barrières culturelles jadis insurmontables s’érodent et les dichotomies linguistiques laissent place à une tolérance bon enfant. Il serait toutefois malhonnête de ne point constater qu’après vingt ou trente Tariquet payés à un tarif que l’on n’oserait exiger à un émir arabe, le robuste indigène amadoué vous aperçoit enfin comme quelqu’un ayant peut-être une âme ! La controverse de Valladolid est encore dans toutes les têtes au pays des maïs toujours verts !

Mais les effusions éthyliques évaporées, le béret se fait plus près de la tête et le naturel du Tarbais ou du Montois bon teint revient au galop. Il gueule alors comme un putois que le Parisieng pollue SES tendidos — qui, à coup sûr, resteraient vides si nous ne venions pas, nous, heureux résidents de LA capitale, les garnir de notre amicale présence. Toutes ces considérations et cet espèce de racisme interrégional commençant à me courir sur le haricot (et pas que le tarbais !), nous avons, avec mes amis privilégiés de Paname, pris une décision qui s’avérera lourde de conséquences et dont l’histoire se souviendra douloureusement.

Luz (gloire à elle :), fondatrice des forums de la Bronca, premier forum taurin au monde, Dionxu, quelques autres et moi-même, nous nous sommes donc concertés et avons décidé à l’unanimité qu’une bonne croisade remettrait quelques vilaines idées en place à coups de guisarme dans le fondement ! Ou, à défaut de croisade, l’ost du pays d’oïl menée par un Simon de Montfort moderne serait à même de calmer les ardeurs xénophobes de certains bas du bulbe…

Sus ! Taïaut ! Tuez-les tous, Dieu n'est pas ! (Sac de Tarbes, An de Grâce 2013.)
Paroles attribuées à Puntilla, soudard tristement célèbre pour avoir mis à feu et à sang, avec la complicité efficace de Luz et de Bloody Haribo, la riante région de Chevalie — gloire à ses chères tradiciouns !

Qu’enfin les échasses trouvent un semblant d’utilité et servent à empaler les pompeux cornichons de la fiesta brava ! Le sac de Tarbes ! Ça aurait de la gueule, nom d’une pipa !

16 janvier 2013

La Gascogne par Iturria


Pour Jean, il comprendra…



Dessin d’Iturria publié début janvier 2013 dans Sud Ouest, le mag.

16 octobre 2010

La mort, le dimanche


La chambre était un cocon. La frêle lumière de la lampe de chevet valait presque le crépitement d’un feu de cheminée. Les motifs invraisemblables des vieilles tapisseries se fondaient aux ombres que l’on projetait dessus avant de se coucher.
Le lit de bois, massif, robuste à dix enfances, était un monde que l’on s’apprêtait à conquérir au péril de nos rêveries sous les gros édredons gonflés de plume d’oie.
C’était l’hiver. C’était les vacances. C’était l’âge et c’était l’heure de Michel Strogoff, des ours tués à mains nues, du vent que lançait le pôle nord et qui piquait de mille aiguilles la troïka qu’attendaient le lac Baïkal et Irkoutsk. Irkoutsk ! C’était l’autre rive du lit, autant dire le bout de la terre, autant écrire une autre vie.
Un soir, avant que la nuit ne l’emporte, un livre était là. La veille, il n’y était pas. Il n’existait pas. C’était un gros livre, épais, sans image. La couverture était une photographie toute simple, en noir et blanc jauni, d’un vieux portant le béret et assis sur un tout petit tabouret de bois. Des types comme ça, j’en connaissais et ils n’avaient aucune chance face à Michel Strogoff, face à son manteau de fourrure et face aux ours tués à mains nues. Des types comme ça, ils étaient de chez nous, sur la même rive du lit que moi et j’étais persuadé que cette rive je la connaissais. C’était le titre d’ailleurs, Chez nous, en Gascogne. Joseph de Pesquidoux. Du Houga, Bas-Armagnac. C’était donc ici la Gascogne et ce livre, ancien, c’était certain, parlait de cet "ici". Qu’est-ce qu’il pouvait bien raconter de trépidant sur ici ? Ici n’était pas la Sibérie. Ici, Michel Strogoff n’aurait eu à affronter que la ridicule agressivité d’un jard trop arrogant ou la digestion, il est vrai parfois dantesque, d’un repas de famille. Au-delà, Michel Strogoff se serait mis à contempler les Pyrénées en fantasmant sur l’aventure ratée de sa vie ici.
Mais j’avais tort.
Car ici attendait 'Caracola'*. Et j’abandonnais Michel Strogoff sur l’autre rive de mon monde, de l’autre côté de l’édredon. Ici, d’autres drames se jouaient, loin des turpitudes de la neige glacée et de la nuit blanche sur Irkoutsk. Ici, la mort rôdait. Ici, la mort s’appelait 'Caracola'. Elle tuait le dimanche. Elle tuait en public et on courait la voir tous les dimanches. De jeunes aventuriers nés ici gonflaient le torse face à elle, levaient les bras au ciel et faisaient scintiller les brodures de neige de leur pauvre boléro rapé par tant de dimanches à affronter la mort. De face, loin d’elle. Un cri, un léger saut sur place pour attirer son attention, les bras levés au ciel, les brodures de neige pour tout l’or du monde et attendre. Attendre sans broncher qu’elle leur fonce dessus sous les regards noirs comme leur béret des vieux sortis de la photo pour venir voir la mort, le dimanche. Attendre et s’écarter, au dernier moment, tourner sur soi pour la faire passer, la saoûler, la tromper. Ecarter. Survivre à la mort lancée comme un obus, survivre à 'Caracola'. Le dimanche.
La course landaise existe toujours. Michel Strogoff a dû rejoindre Irkoutsk. La Sibérie doit déjà être blanche. La mort rôde toujours le dimanche vers ici, en Gascogne, et les bérets n'ont cessé d'être noirs.

* D'après Joseph de Pesquidoux, la vache 'Caracola' était d'origine navarraise et venait de la légendaire ganadería de Carriquiri. Depuis le début du XXème siècle, les ganaderos landais se sont largement servis en Espagne et la vache brave, mère et soeur du taureau de combat, est maintenant la seule (hormis quelques camarguaises) à pouvoir se prétendre "vache landaise". Sur la deuxième photographie, des vaches de la ganadería Coran en 1925 dont certaines ne peuvent renier leur ascendance navarraise. La photographie est extraite de l'ouvrage Derrière la talanquère, écrit par Robert Castagnon et illustré par Georges Papigny.

A lire Joseph de Pesquidoux, Chez nous. Travaux et jeux rustiques, Plon, 1920 & Robert Castagnon et Georges Papigny, Derrière la talanquère, Nogaro, 1977.

Quelques liens sur la course landaise Le site de la Fédération française de la course landaise (FFCL) & un blog très sympa et complet animé par Marylène : Passion coursayre.

>>> Retrouvez sur le site www.camposyruedos.com une galerie consacrée à la course landaise dans la rubrique PHOTOGRAPHIES.

Photographie Écart dans les arènes de Donzacq en juillet 2010 © Laurent Larrieu/Camposyruedos.com