28 juin 2013

In campo veritas


Utrero chez François André, juin 2013 — JotaC

« J’éprouve pour les animaux, essentiellement les animaux sauvages, une admiration sincère, je n’aime pas la chasse, je n’ai jamais chassé ; je suis de ceux qui évitent d’écraser un insecte traversant le chemin, j’ai plusieurs fois risqué de jeter ma voiture au fossé pour ne pas tuer un animal, fût-ce le plus modeste des lézards, et pourtant je vais voir combattre et mourir une bête que j’ai pu admirer, vivante, dans son pâturage, une des plus belles bêtes qui soient et, voyant combattre cette bête exceptionnelle, issue d’un lent travail des éleveurs (un aficionado qui ne s’intéresse pas à l’élevage n’est pas, à mes yeux, un véritable aficionado), sculpture vivante, je me dis que cette espèce ne vit que de devoir mourir dans le combat, puisque, si ce combat disparaissait, l’espèce, elle aussi, disparaîtrait. »
Extrait d’Une question noire, de René Pons (Atelier Baie, 2012).


René Pons a 81 ans, c’est ainsi. Ancien professeur à l’école des beaux-arts de Nîmes, écrivain et poète, il est l’auteur d’une trentaine de livres, recueils, carnets et traductions. Entré en afición, comme beaucoup d’autres, par les effets conjugués du hasard et de la curiosité, René Pons ne s’est jamais envisagé comme un militant de la tauromachie. Un jour, il a accompagné un ami qui se rendait aux arènes pour assister à une corrida, et, soixante ans plus tard, il n’en est toujours pas revenu, comme beaucoup d’autres d’ailleurs… C’est ainsi.

René Pons est écrivain, d’abord et avant tout, ami des peintres, intello et aficionado. Il ne s’envisageait pas comme un militant de la tauromachie parce que sa passion n’est qu’une démarche personnelle, la longue suite d’une rencontre impromptue, un parcours intime prolongé par introspection collective sur les gradins. Puis il s’est lassé des attaques virulentes, des insultes grossières, des invectives douteuses, des théories fumeuses d’animalistes de tout poil et, en une cinquantaine de pages, il a vidé un sac de questions sombres qui tournent autour d’un monde obsolète et hors du temps, un monde entre la vie et la mort, le monde du toro.


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