En février, il n'était pas là où on l'attend — Vistalegre, vous connaissez, vous ? Bientôt, il sera de nouveau fidèle au poste, discret, à déambuler, observer, viser, déclencher, puis grimacer — fichue lumière ! Bientôt, il sera de nouveau bloqué dans son burladero, toujours aussi mal placé, pour immortaliser une suerte de vara que l'écrasante majorité des bêtes choisies pour Las Ventas par l'empresa Taurodelta snobe superbement.
Vous permettez maintenant que je vous donne à lire le petit texte que j'avais consacré à Juan Pelegrín dans Campos y Ruedos 01 ? Oui ? Pour vous remercier, le voici agrémenté de quelques liens.
Juan Pelegrín et Manon, princes de Madrid
Un dimanche d’octobre en milieu d'après-midi, cet homme d’âge mûr étrangement mélancolique et à la mise irréprochable qui attend accoudé à un mur l’heure de la dernière course de la temporada, c’est Manon qui l’a vu. Un dimanche de juillet dans le callejón venteño, cette cheville égarée — tatouée d’un lézard rebelle et ourlée d'un morceau de tissu strictement impeccable — que prolonge non sans étrangeté un pied chaussé d’un classique mocassin en cuir, c’est Juan Pelegrín qui l’a repérée. Un dimanche de mai à l’heure du journal télévisé du soir, Morenito de Aranda de face et le menton dans le jabot qui dessine tout en puissance et grâce torera une naturelle à un Santa Coloma retors, c’est Manon qui l’a figé. Un dimanche d’août dans l’indifférence générale, Iván García, de dos, les mains accrochées à la barrière et la montera vissée sur une tête qui semble crouler sous la grandeur des lieux et la haute responsabilité de devoir s’y jouer la vie, c’est Juan Pelegrín qui l’a cueilli. Lors de la San Isidro, à quelques minutes du paseíllo, ce charmant minois d’aficionada barré d’une monture futuriste — au travers de laquelle on distingue nettement Las Ventas pleine à craquer — scrutant le sable que Morante ne va pas tarder à fouler, c’est Manon qui vous l’offre et aucun autre de ses confrères n’aurait eu cette délicate attention.
Un jour — peut-être à Madrid —, quelqu’un a dit : « N'est pas photographe celui qui prend des photos — aujourd'hui, tout le monde en prend —, mais celui pour qui faire des photographies et voir le monde ou une partie de celui-ci au travers d'un appareil photo est un trait constitutif de sa personnalité. » Hé bien ! l'auteur de ces propos ne peut pas être un mauvais gars, et c’est fort volontiers que je prendrais quelques verres et tapas avec. De Cruzcampo en hierba et de fino en Mahou, le sol jonché de papiers gras, je finirai par prendre mon courage à deux mains et par lui demander de m’autoriser à le suivre partout dans cet œil du cyclone de la tauromachie mondiale qu’est Las Ventas. Saoul, il accepterait, mais, pas devenu fou pour autant, il se saisirait du rebond en l’accompagnant d’une extravagante condition : que je me fasse le plus petit possible en... Et voilà que je deviendrai mouche sous le soleil de Madrid ; que je serai reine dans le ciel madrilène. A moi l’intimité des toros partagée dans les corrals, à moi le patio de caballos et les secrets des cuadrillas, à moi le crottin exquis butiné dans les écuries, à moi les huiles du callejón que j’embêterai frénétiquement avec délice, à moi le fabuleux terrain de jeu des tendidos. A moi, rien qu’à moi.
Un jour — peut-être à Madrid —, quelqu’un a dit : « N'est pas photographe celui qui prend des photos — aujourd'hui, tout le monde en prend —, mais celui pour qui faire des photographies et voir le monde ou une partie de celui-ci au travers d'un appareil photo est un trait constitutif de sa personnalité. » Hé bien ! l'auteur de ces propos ne peut pas être un mauvais gars, et c’est fort volontiers que je prendrais quelques verres et tapas avec. De Cruzcampo en hierba et de fino en Mahou, le sol jonché de papiers gras, je finirai par prendre mon courage à deux mains et par lui demander de m’autoriser à le suivre partout dans cet œil du cyclone de la tauromachie mondiale qu’est Las Ventas. Saoul, il accepterait, mais, pas devenu fou pour autant, il se saisirait du rebond en l’accompagnant d’une extravagante condition : que je me fasse le plus petit possible en... Et voilà que je deviendrai mouche sous le soleil de Madrid ; que je serai reine dans le ciel madrilène. A moi l’intimité des toros partagée dans les corrals, à moi le patio de caballos et les secrets des cuadrillas, à moi le crottin exquis butiné dans les écuries, à moi les huiles du callejón que j’embêterai frénétiquement avec délice, à moi le fabuleux terrain de jeu des tendidos. A moi, rien qu’à moi.
Juan Pelegrín Corbacho, alias 'Manon', vit et travaille à Madrid. Initiateur du site Internet des arènes de Las Ventas, il en assure, entre autres, l’intégralité de la couverture photographique. Photographe-voyageur et aficionado, il voue une passion inconditionnelle au club de basket Estudiantes.
Juan 'Manon' Pelegrín sur Internet
Site de Las Ventas : http://www.las-ventas.com/.
Photothèque flickr : http://www.flickr.com/photos/naturales71/.
Blog : http://manonfotoblog.blogspot.com/.
Blog : http://manonfotoblog.blogspot.com/.
Site personnel : http://www.juanpelegrin.es/.
>>> Juan Pelegrín (photographies) et Luis Francisco Esplá (textes), Un día en Las Ventas, Bellaterra, 2010.
Images © Juan Pelegrín
Le mayoral de Juan Luis Fraile, le 12 octobre 2010 à Las Ventas — pas de figuras à l'affiche, tendidos clairsemés ● Pancho Jasen, l'ailier argentin de l'Estudiantes : un sacré lidiador.